Le botulisme est une maladie grave, parfois fatale, qui survient aprĂšs avoir consommĂ© des aliments en conserve ou en bouteille qui ont Ă©tĂ© mal prĂ©parĂ©s. Le botulisme est causĂ© par une bactĂ©rie appelĂ©e Clostridium botulinum C. botulinum qui produit une toxine. La bactĂ©rie et sa toxine sont invisibles Ă l'Ćil nu et ne modifient pas la couleur, l'odeur ou le goĂ»t des aliments. Comme la toxine est trĂšs toxique et n'est pas nĂ©cessairement dĂ©truite Ă la cuisson, il est essentiel d'empĂȘcher sa formation. C. botulinum se trouve naturellement dans le sol et l'eau. La bactĂ©rie prolifĂšre dans un environnement humide et anaĂ©robique. Par consĂ©quent, la mise en conserve et en bouteille de fruits de mer Ă la maison crĂ©e les conditions idĂ©ales pour permettre Ă la bactĂ©rie de se multiplier et de produire la toxine, Ă moins que l'aliment ne soit prĂ©parĂ© de façon appropriĂ©e. Le C. botulinum possĂšde une structure protectrice appelĂ©e spore ». Les spores sont dĂ©truites Ă des tempĂ©ratures supĂ©rieures Ă celle de l'eau bouillante. Si le procĂ©dĂ© thermique est insuffisant ou si l'aliment n'est pas acide pH de 4,6 ou moins, la bactĂ©rie responsable du botulisme peut se multiplier et produire des toxines. Tous peuvent contracter le botulisme. Les symptĂŽmes de botulisme varient nausĂ©es, vomissements, fatigue, Ă©tourdissements, maux de tĂȘte, vision double, assĂšchement de la gorge et du nez, insuffisance respiratoire, paralysie et, dans certains cas, dĂ©cĂšs. Les symptĂŽmes se manifestent gĂ©nĂ©ralement de 12 Ă 36 heures aprĂšs l'ingestion de la toxine. La maladie dure de 2 heures Ă 14 jours, bien que certains symptĂŽmes puissent perdurer. Chaque annĂ©e, en AmĂ©rique du Nord, des personnes souffrent de botulisme aprĂšs avoir consommĂ© des aliments mis en conserve Ă la maison qui n'Ă©taient pas prĂ©parĂ©s de façon appropriĂ©e. Conservation des fruits de mer Ă la maison Les fruits de mer sont peu acides et, Ă l'instar des aliments peu acides, il ne suffit pas de chauffer les bouteilles ou les conserves au niveau d'Ă©bullition de l'eau, car la bactĂ©rie responsable du botulisme est trĂšs rĂ©sistante Ă la chaleur. Pour mettre en conserve ou en bouteille Ă la maison des aliments peu acides, comme les fruits de mer, il faut utiliser un appareil spĂ©cialisĂ© appelĂ© cuiseur sous pression ». Le cuiseur sous pression procure de la vapeur Ă une pression Ă©levĂ©e pour s'assurer que les aliments peu acides atteignent des tempĂ©ratures suffisamment Ă©levĂ©es pour Ă©liminer les bactĂ©ries responsables du botulisme. Ces tempĂ©ratures Ă©levĂ©es ne peuvent ĂȘtre atteintes qu'Ă l'aide d'un cuiseur sous pression. Il faut s'assurer que le cuiseur sous pression fonctionne adĂ©quatement et veiller Ă suivre attentivement les directives du fabricant. Il faut toujours se laver les mains, les ustensiles et l'Ă©quipement Ă l'aide d'une eau chaude savonneuse avant d'entreprendre la mise en conserve ou en bouteille d'aliments, de mĂȘme que durant le nettoyage qui s'ensuit. En outre, il ne faut jamais modifier la taille du bocal ou la quantitĂ© d'ingrĂ©dients recommandĂ©e dans la recette. Les substitutions peuvent changer la durĂ©e de cuisson de l'aliment en conserve ou en bouteille dans le cuiseur sous pression. La bactĂ©rie responsable du botulisme risque de demeurer dans le produit fini en conserve ou en bouteille si l'on substitue des aliments ou que l'on modifie la taille du bocal. Le produit doit ĂȘtre mis dans un contenant scellĂ© Ă©tanche. Pour une meilleure qualitĂ©, il faut consommer le produit final dans l'annĂ©e. Une fois le contenant ouvert, il faut conserver les restes immĂ©diatement au rĂ©frigĂ©rateur et les jeter au rebut aprĂšs trois ou quatre jours, tout au plus. Achat de produits en conserve ou en bouteille Les produits vendus qui sont prĂ©parĂ©s conformĂ©ment Ă la rĂ©glementation fĂ©dĂ©rale prĂ©parĂ©s commercialement sont traitĂ©s selon des contrĂŽles stricts qui minimisent ou Ă©liminent les dangers comme les maladies d'origine alimentaire. Il ne faut jamais consommer d'aliments en conserve qui semblent ĂȘtre altĂ©rĂ©s, dont le seau est brisĂ© ou le couvercle gonflĂ©, ou si le contenant est renflĂ© ou qu'il fuit. Dans le doute, vaut mieux les jeter! Que fait le gouvernement du Canada pour maintenir la salubritĂ© des aliments? Le gouvernement du Canada a Ă cĆur d'assurer la salubritĂ© des aliments que consomment les Canadiennes et les Canadiens. SantĂ© Canada Ă©tablit des rĂšglements et des normes relatives Ă la salubritĂ© et Ă la qualitĂ© nutritionnelle des aliments vendus au Canada. GrĂące Ă des activitĂ©s d'inspection et d'application de la loi, l'Agence canadienne d'inspection des aliments vĂ©rifie que les aliments vendus au Canada sont conformes aux exigences de SantĂ© Canada.Commentmettre un fruit dans une bouteille ? Choisissez un fruit portĂ© par une branche suffisamment longue pour entrer dans la bouteille et introduisez-le par le goulot. Fixez ensuite la bouteille dans lâarbre, tĂȘte en bas. Ăa câest la partie la plus facile. Il faut bien sĂ»r mettre en bouteille plusieurs poires pour ĂȘtre sĂ»r dâen Image d'illustration. CrĂ©dit photo Shutterstock / NISTOR MARIUS A la fin dâun repas, vos hĂŽtes vous ont peut-ĂȘtre dĂ©jĂ servi un digestif* avec une bouteille dans laquelle se trouve une poire ? Et vous vous ĂȘtes probablement demandĂ© comment cela Ă©tait possible ? De prime abord en effet, il semble bien impossible de faire rentrer une poire dans une bouteille⊠Si lâon peut comprendre le principe de faire pousser une plante dans un rĂ©cipient et de lâenfermer pendant 62 ans, une poire, câest plus compliquĂ©. Pourtant, le fruit qui sert dâarĂŽme Ă lâeau-de-vie a bel et bien poussĂ© directement dans la bouteille. Vous voulez tenter lâexpĂ©rience, on vous explique comment vrai tour de magie Le principe est finalement assez simple dans un premier temps, il faut Ă©videmment possĂ©der un poirier qui produit des fruits. Il faut ensuite installer une bouteille sur le fruit pendant quâil passe encore dans le goulot de la bouteille, en choisissant un fruit sur une tige parfaitement droite, qui doit aussi pousser vers le haut. InsĂ©rez ensuite la bouteille sur la poire encore petite, puis ficelez-la solidement pour quâelle ne tombe pas. Les experts du dĂ©veloppement de poire dans une bouteille installent environ 10 bouteilles pour avoir au moins une poire. Le fruit va alors mĂ»rir dans la bouteille que vous remplirez dâeau-de-vie. Vous pourrez alors rĂ©aliser vos desserts, ou offrir un digestif maison Ă vos amis. Image dâillustration. CrĂ©dit photo Shutterstock / Larisa Blinova Et comment sortir la poire de la bouteille ? Il nâexiste pas vraiment de mĂ©thode pour sortir la poire de la bouteille, Ă part de la couper en petits morceaux. Cependant attention, le fruit qui aura sĂ©journĂ© parfois des annĂ©es dans lâeau-de-vie aura une trĂšs forte teneur en alcool. Au pire, si vous ne tenez pas Ă votre bouteille, vous pouvez la dĂ©couper au diamant pour sortir la poire. Si vous souhaitez manger des poires Ă lâeau-de-vie, mieux vaut partir sur le principe des cerises, et les mettre en bocaux; vous Ă©viterez les Ă©clats de verre dans le fruit et dâĂ©ventuelles complications. Et avec une pomme, ça marche aussi ? Eh bien non, vous ne pourrez pas faire pousser autre chose quâune poire dans une bouteille ! Câest le seul fruit qui accepte de pousser dans une sorte de mini serre créée par la bouteille. Si vous avez besoin dâautres fruits Ă lâeau-de-vie, il faudra passer par le bocal de fruits dĂ©jĂ formĂ©s, et patienter trois mois avant de les dĂ©guster. On vous a peut-ĂȘtre dĂ©jĂ racontĂ© que la bouteille Ă©tait soufflĂ©e autour de la poire, ou que lâon soufflait dans la poire pour la faire grossir ? Que nenni, câest bien le fruit qui pousse dans la bouteille, Ă lâabri des insectes et des oiseaux, en crĂ©ant une sorte dâĂ©cosystĂšme Ă lâintĂ©rieur. GrĂące Ă la bouteille, la poire est protĂ©gĂ©e de la pluie, des nuisibles et baignĂ©e de chaleur et de lumiĂšre confĂ©rĂ©es par les parois en verre. Bonne dĂ©gustation ! *Lâabus dâalcool est dangereux pour la santĂ©. A consommer avec modĂ©ration. La vente dâalcool est interdite aux mineurs de moins de 18 ans. Mes sujets de prĂ©dilection sont l'Ă©cologie, l'environnement, les innovations solidaires et les actualitĂ©s en gĂ©nĂ©ral. J'espĂšre que vous prendrez plaisir Ă me lire. Ma devise "Carpe Diem" parce que la vie est trop courte et qu'il faut en savourer chaque instant. Percerle bouchon de la bouteille dâeau avec la mĂšche de 6.5mm et y insĂ©rer le tube en plastique. Faire un trou dans le tronc de lâarbre Ă environ 1 mĂštre du sol, et percer sur 3 cm de profondeur environ. Il est important de faire des trous propres et discrets pour prĂ©server le tronc. READ Que Faire Du Fruit Du Jasmin Etoile? Le deal Ă ne pas rater Cartes PokĂ©mon Japon le display PokĂ©mon Go de retour en stock sur ... Voir le deal NEW YORK CITY LIFE Archives CorbeillePartagez Aller Ă la page 1, 2, 3 AuteurMessageInvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet OUR beautiful never-ending story {Aaron} Mer 7 Juil - 131 OUR BEAUTIFUL STORYSOUVENIRS, SOUVENIRS, Aaron & Lise Nous finissons ce cours sur cette explication. Je vous libĂšre un quart dâheure plus tĂŽt, mais ayant un rendez-vous avec lâillustre Amaury Delierre, je ne peux pas me permettre dâĂȘtre en retard. Il devrait bientĂŽt venir faire une confĂ©rence pour vous, du reste, je vous tiendrais au courant. A la semaine prochaine les jeunes ! »Spencer avait dĂ©bitĂ© ce petit discours dâune traite, avant de saluer ses Ă©lĂšves et de les laisser ranger leurs affaires. Ce rendez-vous avec le grand pĂšre de Lise, il ne pouvait pas le manquer CâĂ©tait la demoiselle elle-mĂȘme qui lui avait lâhonneur dâarranger ce rendez-vous avec son idole ! Pour le remercier des coups de main quâil lui avait donnĂ©s, sans doute. Comme quoi, elle prouvait une fois pour toute quâelle avait la reconnaissance du ventre. Quant Ă Lise, elle nâavait pas vu Aaron de la semaine, Ă son grand regret. A cause du fait que son grand pĂšre avait dĂ©barquĂ© de Paris lundi soir tard, elle avait passĂ© son temps Ă faire des allers et retours entre son petit appartement, quâelle dĂ©mĂ©nageait, et la maison que venait tout juste dâacheter Amaury. Elle avait ensuite Ă©tĂ© trĂšs prise par ses cours, son travail au pub, quâelle comptait laisser tomber bientĂŽt, et rĂ©sultat, si elle appelait chaque soir Aaron pour lui donner des nouvelles, elle nâavait eu guĂšre le temps de faire plus. Elle ne voulait pas encore lâamener Ă la maison de son grand pĂšre avant dâavoir tout planifiĂ© au millimĂštre, et elle prĂ©fĂ©rait lui expliquer sa nouvelle situation de vive voix. Aussi, la mĂȘme aprĂšs-midi oĂč Spencer avait rendez-vous Ă quinze heures tapantes avec Amaury, Lise attendait sagement dans le couloir de voir Aaron sortir de son amphi. AdossĂ©e au mur, les cheveux dĂ©tachĂ©s et une robe blanche courte sur elle, sans compter sur les magnifiques chaussures Ă talons quâelle portait aux pieds, Lise attirait le regard. Mais elle ne voulait obtenir lâattention que dâun seul, en vĂ©ritĂ©. Et quand leurs regards se croisĂšrent, un immense sourire se dessina dĂ©licatement sur ses lĂšvres. Elle sâavança pour le serrer dĂ©licatement contre elle, se plaçant sur la pointe des pieds pour attendre sa joue, oĂč elle dĂ©posa un baiser aussi lĂ©ger quâune brise. Bien Ă©videmment, elle avait une raison prĂ©cise pour ĂȘtre ici, Ă la fin de ses cours. Jâai regardĂ© tes horaires, et tâas plus coursâŠDonc, tâes obligĂ© de me suivre ! Jâai une belle surprise pour toi. »Lise avait lâintention de garder le mystĂšre aussi longtemps que possible. Elle avait donc saisit la main dâAaron dans la sienne afin de lâemmener jusquâau parking de lâuniversitĂ©, oĂč les attendait son fidĂšle cabriolet bleu roi, quâelle avait emmenĂ© au garage afin de rĂ©gler ce foutu problĂšme de dĂ©marrage. Elle invita donc Aaron Ă sâinstaller avant de prendre place au volant et de dĂ©marrer son petit bijou. Un sourire aux lĂšvres, elle mit ses belles lunettes de soleil, comme si elle donnait dans le clichĂ© aujourdâhuiâŠEt ils Ă©taient partis. Pour oĂč, ça, câĂ©tait encore un mystĂšre qui nâallait pas tarder Ă sâĂ©claircir. Je suis vraiment dĂ©solĂ©e de tâavoir un peu abandonnĂ© cette semaine, mais jâai Ă©tĂ© plutĂŽt bookĂ©e. Vois-tu, comme je ne suis pas partie Ă Paris, mon grand pĂšre a dĂ©cidĂ© de venir sâinstaller ici, pour que lâon forme une petite famille, lui et moi. Il a estimĂ© que jâavais assez vĂ©cu seule et que jâavais besoin de quelquâun pour surveiller mes arriĂšres. Cette semaine, jâai donc dĂ©barrassĂ© mon appartâ, je lâai aidĂ© Ă sâinstaller, et jâai tout amĂ©nagĂ© pour aujourdâhuiâŠPour que tu viennes et que tu puisses le rencontrer. Tu le connais sĂ»rement de rĂ©putation, câest lâidole de Spencer Amaury Delierre, cĂ©lĂšbre neurochirurgien français. Il compte bien rester Ă San Francisco, et mĂȘme donner des confĂ©rences Ă la fac pour aider les jeunes en mĂ©decine. Pour remercier Spencer de tout ce quâil a fait pour moi, jâai organisĂ© un tĂȘte Ă tĂȘte entre eux. On a la baraque pour nous tous seuls jusque ce soir tardâŠTu vas voir, jâai tout prĂ©vu. »Et dire que Lise nâĂ©tait pas coutumiĂšre de la chose ! Tout planifier dâavance, elle trouvait cela barbant, dâordinaire. Mais cette fois, câĂ©tait un peu spĂ©cialâŠElle adorait son grand pĂšre, avec qui elle avait Ă©normĂ©ment de points communs, y compris ses beaux yeux noisettes et son sourire charmeur. Et puis, elle lâavait tellement bassinĂ© avec Aaron qui avait fini par lui proposer de lâinviter Ă dĂźnerâŠAussi, ce soir allait ĂȘtre une soirĂ©e spĂ©ciale, car le jeune homme nâallait pas rencontrer un membre de lâĂ©minente famille Hawkins, mais bien de la branche française de sa famille, les DelierreâŠClan Ă©minemment riche, plutĂŽt situĂ© dans la mĂ©decine ou la recherche, et avec qui Lise sâentendait trĂšs bien. VoilĂ pourquoi elle Ă©tait doublement excitĂ©e Ă lâidĂ©e de prĂ©senter Aaron Ă son grand pĂšre, espĂ©rant bien que ces deux lĂ sâentendraientâŠEn se dirigeant gentiment sur les hauteurs de San Francisco, ils parvinrent bientĂŽt jusquâĂ un quartier calme, peuplĂ© uniquement de maisons trĂšs modernes, semblant Ă la fois spacieuses et sans prĂ©tention. Ce quartier Ă©tait Ă lâimage du grand pĂšre de LiseâŠUn homme simple que la richesse ne semblait pas rendre mauvais, mais plutĂŽt serviable et Ă lâĂ©coute dâautrui. La demoiselle poussa donc son magnifique cabriolet jusquâau bout de lâannĂ©e, avant dâouvrir Ă lâaide dâune petite tĂ©lĂ©commande noire un portail aux grilles joliment agencĂ©es. Une fois ouvert, elle monta la toute petite allĂ©e en pierres, lĂ©gĂšrement en pente, qui offrait la vue sur une maison absolument charmante. Moderne, lumineuse et peuplĂ©e de nombreuses fenĂȘtres, Lise en Ă©tait tout bonnement tombĂ©e amoureuse. Elle prit donc la prĂ©caution de refermer la grille Ă lâaide de la mĂȘme tĂ©lĂ©commande, avant de garer sa voiture juste devant la maison. Une fois le moteur arrĂȘtĂ©, elle sortit de voiture avant dâaller ouvrir la portiĂšre Ă Aaron, comme sâil Ă©tait la demoiselle et elle lâhomme de ces lieux, cherchant Ă faire de son invitĂ© un cĆur comblĂ©. Elle prit dĂ©licatement sa main avant de lâemmener Ă lâintĂ©rieur, en commençant par sâextasier pour la Ă©niĂšme fois sur les deux colonnes bordant lâimmense porte dâentrĂ©e, lui rappelant comme des temples grecs Ă©tudiĂ©s en cours dâhistoire. Une fois la porte ouverte et poussĂ©e, Lise fit dĂ©couvrir un hall tout en carrelage aux couleurs chaudes, parfaitement lustrĂ©, peuplĂ© dâun lustre de taille moyenne en cristal. Un hĂ©ritage familial, passĂ© de gĂ©nĂ©ration en gĂ©nĂ©ration et dont son grand pĂšre nâavait dĂ©cemment pu se sĂ©parer. En allant Ă gauche, Lise pu faire dĂ©couvrir Ă Aaron une cuisine relativement imposante et aĂ©rĂ©e, avec des plaques de professionnel, ainsi quâun plan de travail fonctionnel et grand. Un frigo amĂ©ricain Ă©tait encastrĂ© dans un magnifique meuble en bois vĂ©ritable, de couleur verte claire, faisant partie dâun tout comprenant les placards accrochĂ©s au mur. En poursuivant la visite en allant tout droit, on accĂ©dait Ă la salle Ă manger, spacieuse, dĂ©corĂ©e avec goĂ»t mais sans fioritures Il y avait quelques tableaux disposĂ©s savamment sur les murs, tous peints par quelquâun de la famille La mĂšre de Lise, sa sĆur HĂ©lĂšne, et mĂȘme Lise pour certains, et pour lesquels la patte Ă©tait aisĂ©ment reconnaissable. Il y avait au centre une table ronde en chĂȘne foncĂ©, recouvert dâune nappe blanche brodĂ©e Ă la main. Les chaises Ă©taient dans la mĂȘme matiĂšre que la table, et donnaient un petit aspect forestier » Ă cette salle Ă manger ravissante. Ainsi, en revenant sur leurs pas et en partant Ă droite Ă partir du hall, ils se retrouvĂšrent bientĂŽt dans le salon, spacieux et amĂ©nagĂ© intelligemment. Un grand canapĂ© se trouvait au centre, de couleur orangĂ©e, allant parfaitement avec le papier peint aux tons chaleureux et chatoyants. Le canapĂ© se trouvait juste en face dâun Ă©cran plat installĂ© sur le mur, pour plus de confort des yeux. En dessous se trouvait une table basse oĂč Ă©tait dĂ©posĂ© une Wii avec deux tĂ©lĂ©commandes. En dessous du meuble, une somme importante de jeux vidĂ©o y Ă©tait rangĂ©e. VoilĂ le plus gros de la maison ! A lâĂ©tage, il y a la chambre de mon grand pĂšre, deux chambres dâamis et deux salles de bain. Maintenant, laisse-moi te montrer le clou du spectacle ! »Certes, Lise nâavait pas lĂąchĂ© la main dâAaron depuis lâinstant oĂč ils avaient quittĂ© la voiture, mais son Ă©treinte sâĂ©tait lĂ©gĂšrement renforcĂ©e tandis quâils retournaient dans la cuisine. Lise ouvrit la porte fenĂȘtre coulissante pour conduire Aaron jusquâĂ une immense terrasse, dont la vue surplombait la mer, donnant une impression de libertĂ© intense. Contournant les deux transats qui sây trouvaient, dĂ©boulant ainsi sur une piscine de taille moyenne, agencĂ©e royalement pour y passer dâexcellents moments. Et en sâavançant un peu plus sur la terrasse, Lise lâamena jusquâĂ la maison dâinvitĂ©s, bordant la maison sans y ĂȘtre rattachĂ©e. CâĂ©tait une maisonnette plein pied dâĂ peu prĂšs quarante mĂštres carrĂ©s, endroit privilĂ©giĂ© oĂč son grand pĂšre lâavait installĂ©e. Les portes Ă©taient uniquement en verre, Ă cause de la zone dâombre importante Ă cet endroit de la villa. Une fois Ă lâintĂ©rieur, le sourire de Lise sâagrandit. Un canapĂ© confortable, un fauteuil, un lit deux places dâune taille impressionnante disposĂ© au milieu, un chevalet ainsi quâune grande salle de bain. Lâessentiel pour Lise, qui avait une vue imprenable. La demoiselle dĂ©posa son sac Ă main, ses clefs ainsi que ses lunettes de soleil avant de se laisser tomber sur son lit, soupirant dâaise avant de fermer les yeux doucement. Mon petit coin de paradisâŠJâadore cette baraque. Confortable, sans prĂ©tention ! Quand tu auras vu mon grand pĂšre, tu verras Ă quel point il se dĂ©tache des gens riches, dâordinaire dĂ©testables. Lui, il aime la simplicitĂ©. Il a pas de limousine, refuse dâavoir de chauffeur, et se contente dâun train de vie ordinaire. Il veut juste une maison confortable et accueillanteâŠIl ressemblait Ă©normĂ©ment Ă ma mĂšre. Traduction Jâai plus pris de lui que de mon propre pĂšre ! »Lise rouvrit subitement les yeux en constatant quâelle en avait presque oubliĂ© lâessentiel, avec tout ça ! Elle se releva donc pour ouvrir son placard Ă vĂȘtements, sortant deux tenues encore emballĂ©es et cintrĂ©es pour ĂȘtre protĂ©gĂ©es ; des tenues neuves, spĂ©cialement achetĂ©es pour ce soirâŠUne pour Aaron, et une pour Lise. Elle dĂ©posa les deux tenues sur son lit et enleva lâemballage pour quâil puisse admirer le goĂ»t quâelle avait mis dans le choix de tout ça. Je tâai pris un smoking tout noir avec cravate blanche, pour lâoccasion. Jâai flashĂ© pour une robe noire pour moiâŠEnfin, je voulais que ce soit une soirĂ©e un peu particuliĂšre, pour ça que jâai pas pu venir te voir, je voulais maintenir la surprise au maximum. »Lise se rapprocha dâAaron pour placer ses bras autour de son cou et ainsi crĂ©er une proximitĂ© certaine entre eux. CâĂ©tait presque difficile dâimaginer quâelle nâavait pas encore osĂ© goĂ»ter ses lĂšvres diablement tentantesâŠMais comme si câĂ©tait trop tĂŽt ou quâelle sâimaginait quâil pouvait le prendre mal, elle ne franchit pas encore le pas, se contentant de dĂ©poser ses lĂšvres sur sa joue, gardant ses lĂšvres tout prĂšs des siennes. Je suis dĂ©solĂ©e...Je te gĂȘne, hein? »Lise dĂ©fit son Ă©treinte avec dĂ©licatesse, n'oubliant pas la scĂšne qui avait eue lieu une semaine plus tĂŽt. AprĂšs tout, ce n'Ă©tait pas comme si elle ne s'Ă©tait pas soulĂ©e de peur que sa dĂ©claration n'ait servi Ă rien, et comme si elle ne s'Ă©tait pas Ă©croulĂ©e pour mieux se retrouver chez Spencer en prĂ©sence d'Aaron...Aussi, elle ne pu s'empĂȘcher un lĂ©ger sourire timide en repensant Ă cette dĂ©testable scĂšne, qui avait un peu gĂąchĂ© la dĂ©claration qu'elle lui avait faite. J'ai pas eu le temps de m'excuser pour...La scĂšne de la semaine derniĂšre. J'aurais pas du boire autant, c'est un mauvais rĂ©flexe, en fait. Je ne m'excuserais pas pour mes sentiments, comme je te l'ai dis, mais plutĂŽt d'avoir gĂąchĂ© ce que je t'ai dis en buvant Ă en ĂȘtre Ă moitiĂ© ivre morte. J'suis encore une gamine...Et je pense que j'ai un peu peur. Personne a jamais accordĂ© la moindre importance Ă la personne que j'Ă©tais. C'est un peu...Bizarre. Enfin bon, on s'en fout. »Lise n'Ă©tait pas Ă l'aise pour les mea culpa, d'autant plus qu'elle venait de poser son regard sur une photographie que son grand pĂšre avait accrochĂ© sur le mur juste en face d'elle. L'espace de quelques secondes, le regard de Lise marqua une expression de mĂ©lancolie. Cette photo, c'Ă©tait ni plus ni moins que sa mĂšre et elle, quand elle avait dix ans. Mais elle se reprit en regardant Aaron et en lui offrant un magnifique sourire...Pour mieux se laisser une fois encore tomber sur son lit, qu'elle trouvait diablement confortable. Tu peux dormir ici ce soir, si tu veux. J'ai mon canapĂ© qui se dĂ©plie, ou si jamais j'ai froid, tu peux dormir Ă cĂŽtĂ© de moi. Je garderais mes mains toutes sages, y'a aucun souci. » InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Mer 7 Juil - 1721 Cela faisait une semaine maintenant quâAaron nâavait pas eu lâoccasion de revoir Lise⊠autant dire une Ă©ternitĂ© ! Certes, tout deux prenaient le temps de sâappeler ou de sâenvoyer un petit message de temps Ă autre mais câĂ©tait loin dâĂȘtre suffisant afin de combler le manque quâil Ă©prouvait. Etait-ce bien raisonnable de sâattacher de la sorte en si peu de temps ? La question ne se posait mĂȘme pas et les sentiments se faisaient de plus en plus clairs dans lâesprit du jeune homme. Cette semaine avait Ă©tĂ© particuliĂšrement agitĂ©e de son cĂŽtĂ©. En effet, Aaron avait dĂ» faire face aux attaques incessantes de Summer qui ne cessait de le harceler Ă coup de visites Ă lâimproviste, pleurant parfois Ă chaudes larmes et jurant tous les dieux quâelle finirait par se suicider sâil ne voulait vraiment plus dâelle. Bien que prises au sĂ©rieux, ces allĂ©gations faisaient gentiment sourire Aaron qui la trouvait bien trop dĂ©monstrative bien quâil ne remette en doute sa peine et son chagrin. Il avait beau essayer encore et encore de se justifier, il ne parvenait pas Ă lui faire admettre que tout Ă©tait dĂ©sormais fini entre eux. Cela ne servirait Ă rien de continuer dans ces conditions, il nây avait aucun sentiment entre eux, ils Ă©taient faits pour ĂȘtre amis, pas pour ĂȘtre amants. Dans le fond, Summer savait parfaitement quâil disait vrai et quâil ne sâagissait que dâune histoire physique entre eux, cependant, elle avait beaucoup de mal Ă admettre quâil ai pu mettre un terme Ă leur histoire Ă cause dâune autre. En rĂ©alitĂ©, câĂ©tait ça son problĂšme perdre Aaron Ă©tait une chose difficile Ă admettre mais le perdre Ă cause de Lise Ă©tait carrĂ©ment inacceptable. Bien entendu, le jeune homme nâavait pas exposĂ© la situation en ces termes, il sâĂ©tait contentĂ© dâadmettre quâil Ă©tait relativement proche de Lise sans pour autant Ă©voquer ses sentiments. Toutefois, Summer nâĂ©tait pas dupe, elle avait remarquĂ© la façon dont il la dĂ©vorait des yeux chaque fois que leurs regards se croisaient et la façon dont ses yeux brillaient lorsquâil parlait dâelle. Autant de signes qui la rendaient folle de jalousie. Quoi quâil en soit, la jeune femme avait bien lâintention de se venger tĂŽt ou tardâŠEn sortant de cours, Aaron fut agrĂ©ablement surpris de trouver Lise juste devant la porte de lâamphi. Comme toujours, elle Ă©tait diablement jolie et il lui Ă©tait extrĂȘmement difficile de garder son sang froid face Ă elle. Il se demandait encore comment il faisait pour rĂ©sister Ă cette envie irrĂ©pressible de lâembrasser, de goĂ»ter Ă ce fruit dĂ©fendu, dĂ©licieuse tentation. En rĂ©alitĂ©, Aaron avait lâimpression de ne pas lâavoir vu depuis une Ă©ternitĂ©, Ă croire que sa prĂ©sence Ă©tait devenue vitale dĂ©sormais. Main dans la main, il la suivi donc jusquâau parking, lâĂ©coutant attentivement et se laissant guider jusquâĂ la maison du fameux Amaury Delierre. Ce nom, Aaron lâavait entendu des dizaines de fois, plus spĂ©cialement ces derniers jours Ă©tant donnĂ© que Spencer ne cessait dây faire rĂ©fĂ©rence. Le jeune homme fut donc relativement surpris dâapprendre quâil sâagissait du grand pĂšre de Lise. Comme quoi, le monde est petit. CâĂ©tait surprenant de se dire quâil allait probablement faire la connaissance de cet homme quâil admirait beaucoup pour ses travaux et dont la rĂ©putation nâĂ©tait plus Ă faire. Aaron se souvenait avoir lu de nombreux articles rĂ©digĂ©s par cet Ă©minent neurochirurgien quâil trouvait tout bonnement fascinent. Non seulement, il Ă©tait un ponte dans son domaine mais en plus de ça, il Ă©tait le grand pĂšre de la femme quâil aimait !! Alors avec ça, il Ă©tait gĂątĂ© ! AprĂšs avoir fait le tour de la villa qui au passage, Ă©tait dĂ©corĂ©e et agencĂ©e avec beaucoup de goĂ»t, Aaron eu le plaisir de visiter la nouvelle demeure de Lizzie, forcĂ© dâadmettre que lâendroit Ă©tait plus que confortable et quâelle avait bien fait de troquer son appartement en ville pour ce petit bout de paradis. Le jeune homme fit quelques pas dans la piĂšce, presque intimidĂ© de se retrouver ainsi totalement plongĂ© dans lâunivers de Lise. Sans avoir jamais visitĂ© cet endroit, il sây sentait dĂ©jĂ Ă lâaise. Aaron frĂŽla du bout des doigts les affaires de Lise avant de remarquer une photo dâelle, plus jeune et dâune femme qui lui ressemblait Ă©normĂ©ment. Câest alors que Lise reprit la parole, sortant du placard deux tenues dont un smoking spĂ©cialement pour lui. Aaron se gratta lĂ©gĂšrement la tĂȘte tout en essayant de comprendre Ă quoi cela pouvait bien rimer. Pour quelquâun qui aime la simplicitĂ©, je dois dire que tu me surprends. Câest soirĂ©e gala ? Je pensais que nous ne serions que tout les deux, pas de cĂ©rĂ©monie, pas de tralala, juste toi et moi. »Bien quâextrĂȘmement distinguĂ©, Aaron nâĂ©tait pas Ă lâaise dans ce genre de soirĂ©es, il prĂ©fĂ©rait que les choses soient claires dĂšs le dĂ©but. Il voulait bien faire des efforts si la situation lâexigeait mais dans le cas prĂ©sent, il nâen voyait pas spĂ©cialement lâintĂ©rĂȘt. Toutefois, il ne voulait pas Lise sâoffusque en interprĂ©tant mal ses propos, aussi, le jeune homme sâempressa dâajouter quelques mots. Je trouve ça vraiment super comme surprise, mais il faut que tu saches quâĂ partir du moment oĂč tu es avec moi, le reste nâa aucune importance. Le cadre mâimporte peu, pas plus que nos tenues ou ce que nous pouvons faire. En rĂ©alitĂ©, jâai simplement besoin de ta prĂ©sence, rien de plus. Tu nâimagines mĂȘme pas Ă quel point cette semaine mâa semblĂ© longue⊠interminable. Je nâavais quâune hĂąte, câĂ©tait de pouvoir enfin te retrouver et passer du temps avec toi. »Pendant quâils parlaient, Lise Ă©tait venue passer ses bras autour de son cou, ce qui ne le gĂȘna pas le moins du monde contrairement Ă ce quâelle pouvait penser. Au contraire, il avait besoin de ce sentiment de proximitĂ©, câĂ©tait devenu indispensable et une fois de plus, il se demanda comment il lui Ă©tait possible de rĂ©sister Ă lâappel de ses lĂšvres⊠Le problĂšme Ă©tant que de son cĂŽtĂ©, Aaron ne voulait pas non plus brusquer la situation, aprĂšs tout, ils avaient tout leur temps et câĂ©tait bien plus agrĂ©able de se lancer dans un jeu de sĂ©duction effrĂ©nĂ© plutĂŽt que de cĂ©der Ă la tentation sur le champ. AprĂšs son baiser, il relĂącha son Ă©treinte et la laissa filer, regrettant dĂ©jĂ de ne pas avoir eu le plaisir de la cĂąliner plus longtemps. Ce qui sâest passĂ© nâa vraiment aucune importance Ă mes yeux. Je ne garde que le meilleur dans tout ce que tu mâas dit et pour ĂȘtre franc, je nâai pas arrĂȘtĂ© dây penser tout au long de la semaine. Tu es Ă la fois troublante et fascinante⊠câest un sentiment trĂšs Ă©trange que je nâavais encore jamais Ă©prouvĂ© auparavant. Tu es une personne magnifique LiseâŠdans tous les sens du terme. Tu vas sans doute trouver ça ridicule mais jâai du mal Ă imaginer une vie dont tu ne ferais pas partie dĂ©sormais. Jâaime chaque instant que nous passons ensemble et jâai bien lâintention de profiter de chaque seconde comme si câĂ©tait la derniĂšre. »Aaron la dĂ©visagea longuement, se demandant comment personne nâavait pu lâaimer dâune maniĂšre aussi intense auparavant. A ses yeux, elle Ă©tait la perfection incarnĂ©e, tout ce dont un homme normal pouvait rĂȘver. Lise Ă©tait bien plus quâune Ă©vidence Ă ses yeux et câĂ©tait difficile pour lui, dâordinaire charmeur, coureur et compagnie, quâune personne avait rĂ©ussi Ă sâemparer de son cĆur de cette maniĂšre. Pour un peu, Aaron se serait presque trouvĂ© pathĂ©tique. Tandis quâil continuait de contempler les photos accrochĂ©es au mĂ»r, le jeune homme entendit la remarque de Lise qui lui proposait de dormir ici⊠Argh⊠Voila encore une horrible torture quâelle allait lui infliger !! Aaron se souvenait encore de la nuit quâelle avait passĂ© chez lui quelques jours plus tĂŽt alors quâelle nâĂ©tait pas en Ă©tat de reprendre le volant. A vrai dire, il nâavait pas fermĂ© lâĆil de la nuit tant la prĂ©sence de Lise le perturbait⊠imaginer dormir Ă ses cĂŽtĂ©s, aussi innocente soit cette proposition, Ă©tait assez troublant. Aaron afficha toutefois un sourire amusĂ© avant de prendre un air angĂ©lique comme il savait si bien le faire. Tu me fais confiance Ă ce point ?! Ne suis-je pas le grand mĂ©chant loup dont il faut se mĂ©fier ?! Oh Ă propos⊠je ne sais pas si tu es au courant mais Summer a tenu Ă modifier lĂ©gĂšrement les faits elle raconte Ă tout le monde que câest elle qui mâa larguĂ© histoire de ne pas trop entacher sa rĂ©putation. Quant Ă Lloyd, il nâa pas perdu de temps puisquâil sâest empressĂ© de lâinviter Ă dĂźner Ă ce que jâai cru comprendre. Enfin bon, avec ou sans moi, le monde de Summer continue de tourner. Hmm⊠câest ta mĂšre je suppose ? Elle est vraiment trĂšs belle. Vous avez le mĂȘme sourireâŠÂ»Aaron avait enchaĂźnĂ© sans vraiment sans rendre compte, simplement parce que son regard venait de se poser une fois de plus sur cette ravissante photo de famille. La mĂšre de Lise Ă©tait vraiment trĂšs jolie, toutes les deux se ressemblaient Ă©normĂ©ment. Cela dit, Aaron ignorait totalement quâil mettrait les pieds dans le plat en parlant dâAnne au prĂ©sent. Comment aurait-il pu deviner le drame qui avait touchĂ© Lise lorsquâelle Ă©tait enfant ? Parler de la mĂšre de Lise lui fit alors repenser au fameux grand pĂšre dont il ferait probablement la connaissance prochainement. Tu sais, jâai encore du mal Ă croire que le docteur Delierre soit ton grand-pĂšre ! Tu sais que jâai lu tous ses livres, y compris ses articles et ses travaux de recherche ?! Il faut dire que Spencer nâarrĂȘte pas de nous parler de lui depuis des mois !! Encore tout Ă lâheure, il Ă©tait tout excitĂ© en nous annonçant quâil viendrait faire une confĂ©rence. Jâai vraiment hĂąte de faire sa connaissance. »Le jeune homme semblait tout excitĂ© et il faut dire quâil y avait vraiment de quoi !! Cela dit, il se reprit bien vite, tout simplement parce quâil nâavait quâune seule et unique envie se concentrer sur la prĂ©sence de LiseâŠelle et elle seule. Aaron sâinstalla sur le lit, prĂšs dâelle et remit une mĂšche de ses cheveux en place, prenant soin de dĂ©licatement caresser son visage de porcelaine dâun revers de main. Son regard nâavait pas quittĂ© un seul instant les yeux de la jeune femme, comme sâil Ă©tait soudainement captivĂ© par tout ce quâelle reprĂ©sentait⊠Tu es magnifique⊠jâarrive toujours pas Ă croire que tu ne sois pas partie⊠en fait, je ne sais pas si jâaurais pu supporter ton absence. Au fait, il me semble que ceci t'appartient...»Aaron se redressa un instant, juste le temps de glisser sa main dans la poche de son pantalon pour en tirer le fameux collier qu'il lui avait offert et que Summer s'Ă©tait empressĂ© d'arracher de son cou. Aaron l'avait fait rĂ©parĂ© et dĂ©sormais, il voulait qu'elle le porte Ă nouveau. Il souleva dĂ©licatement les cheveux de Lise avant d'attacher le bijou tout comme il l'avait fait la premiĂšre fois, sauf que cette fois ci, il se permit de dĂ©poser un baiser dans le cou de la jeune femme. InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Mer 7 Juil - 1801 Oh ne tâinquiĂštes pas, câest quâun smokingâŠCâest juste que mon grand pĂšre sâest tellement fait beau en prĂ©vision de ce soir que je voulais quâon soit tous les trois accordĂ©s. Yâaura que nous trois ce soir, câest pas une soirĂ©e de gala ! JusteâŠUn petit dĂźner familial, en fait. Quelque chose que jâai jamais vraiment eu, alors jâai peut-ĂȘtre un peu trop planifiĂ© la chose. »Lise eut un sourire franc tandis quâelle avait un peu trop lâimpression de se justifier. Ce nâĂ©tait effectivement quâun smoking, comme pour une soirĂ©e un peu spĂ©ciale. AprĂšs tout, si Amaury Ă©tait quelquâun dâexcessivement ouvert dâesprit et quelquâun que lâon abordait facilement, il Ă©tait toujours trĂšs bien habillĂ©. Il aimait avoir des vĂȘtements qui lui plaisaient, exactement comme Lise. Mais elle perdit rapidement cette idĂ©e tandis quâAaron lui dictait que le monde dans sa petite bande tournait trĂšs bien sans lui. Oh, Lise en doutaitâŠCe nâĂ©tait quâune apparence tout cela, elle savait que Summer nâhĂ©siterait pas Ă tout mettre en Ćuvre pour le rĂ©cupĂ©rer, si elle en avait lâoccasion. CâĂ©tait tellement Ă©vident ! Aaron paraissait trĂšs populaire dans lâuniversitĂ©, et surtout, la blondinette ne supportait sĂ»rement pas quâil ait prĂ©fĂ©rĂ© Lise Ă sa petite personne. La future archĂ©ologue nâĂ©tait pas idiote, elle savait quâĂȘtre avec Aaron ne serait pas forcĂ©ment facile tous les jours. Pas Ă cause dâeux-mĂȘmes, mais bien Ă cause de leurs entourages respectifs, trĂšs diffĂ©rents. Lise ne pouvait sâempĂȘcher de redouter le moment oĂč il rencontrerait son pĂšre, si toutefois pareil malheur arrivait. Aaron nâavait pas la moindre idĂ©e de la personne quâĂ©tait James Hawkins, et pour le moment, il valait bien mieux quâil ne le sache pas. Il semblait nettement plus enthousiaste vis-Ă -vis de la future rencontre avec son grand pĂšre, qui demeurait lâidole de Spencer. Lise ne pu sâempĂȘcher de rire en entendant les propos du jeune homme, ayant lâimpression quâelle se trouvait en face de Spencer deuxiĂšme du nom. A croire quâAaron lui ressemblait un peu, quelque partâŠEt câĂ©tait presque mignon Ă analyser. De plus, elle Ă©tait doublement certaine que son grand pĂšre apprĂ©cierait Aaron. Ce nâĂ©tait pas possible autrement, surtout quâil devait bien se douter quâil Ă©tait important Ă ses yeux. Jamais Lise nâavait prĂ©sentĂ© quelquâun Ă son grand pĂšre avant ce soirâŠEt bien quâelle nâait aucune envie de mettre la moindre pression sur les Ă©paules du futur mĂ©decin, elle ne pouvait sâempĂȘcher dâen ĂȘtre amusĂ©e. Elle avait changĂ© radicalement depuis son arrivĂ©e Ă San FranciscoâŠMĂȘme Amaury lâavait remarquĂ©. Je croirais entendre Spencer ! Tu sais quâil a tenu Ă ce que je lui apprenne quelques rudiments de français pour ce rendez-vous avec mon grand pĂšre ? Tu verras, câest un homme formidable. Il est curieux de te rencontrer, en plus. Il a toujours Ă©tĂ© passionnĂ© par lâengouement des Ă©lĂšves de mĂ©decine, alors ça ne mâĂ©tonnerait pas quâil veuille te prendre sous son aileâŠIl est trĂšs paternel », en fait. Et puis, il nâa jamais eu de fils. Deux jumelles seulement, ma mĂšre et ma tante HĂ©lĂšne. Tu verras quâĂ la confĂ©rence, mĂȘme les jeunes demoiselles boiront ses parolesâŠLe charme français, parait-il. Et puis, mon grand pĂšre nâest pas vieux, il a eu ses deux filles trĂšs jeune. »Lise semblait passionnĂ©e en Ă©voquant le sujet de son grand pĂšre, qui Ă©tait plus un pĂšre Ă ses yeux quâun vĂ©ritable papy gĂąteau. Elle Ă©tait tellement concentrĂ©e dans ses dires quâelle sursauta presque quand Aaron lui fit un complimentâŠQui la fit rougir, du reste. Elle ne pu sâempĂȘcher de sourire doucement alors quâil rattachait le pendentif quâil lui avait offert pour son anniversaire. CâĂ©tait Ă©trange, mais elle Ă©tait trĂšs attachĂ©e Ă cet objet. Il marquait sa premiĂšre fĂȘte dâanniversaire, mais aussi, lâun des meilleurs moments de sa vie. Aaron nâavait pas idĂ©e du peu de bons moments dont elle se souvenait dans toute son existence, en vĂ©ritĂ©. Et du fait quâelle Ă©tait particuliĂšrement Ă©mue quâil le lui rende, elle frissonna presque violemment suite au baiser quâil lui dĂ©posa dans le cou. Tu lâas rĂ©parĂ© ? Tu sais quâil marque la meilleure soirĂ©e de ma vie ? Jâavais peur de plus pouvoir le mettre Ă cause de SummerâŠTu sais, je ne suis pas sĂ»re quâelle tournera la page aussi facilement. Elle va me haĂŻr jusquâĂ la fin de ses jours parce quâelle pense sĂ»rement que je tâai volĂ©âŠQuant Ă Lloyd, il a peut-ĂȘtre invitĂ© Summer, mais il a rĂ©ussi Ă avoir mon numĂ©ro de tĂ©lĂ©phone je ne sais mĂȘme pas comment ! Alors pour deux tourtereaux censĂ©s avoir tournĂ© la page, ils sont pas fins ! »Ce nâĂ©tait que la triste vĂ©ritĂ©. Lloyd espĂ©rait visiblement que Lise se lasserait rapidement dâAaronâŠMais il nâavait pas idĂ©e de la force de ses sentiments. Non, personne nâen avait la moindre idĂ©eâŠEt dâailleurs, alors que leur proximitĂ© Ă©tait dâautant plus prĂ©sente que prĂ©cĂ©demment, Lise ne pu sâempĂȘcher dâĂ©mettre un lĂ©ger grognement en entendant son cellulaire se mettre Ă nouveau Ă sonner. Elle se releva donc du lit en lançant un regard presque dĂ©sespĂ©rĂ© Ă Aaron, avant de se saisir de son tĂ©lĂ©phone qui Ă©tait soigneusement sur la petite table Ă cĂŽtĂ© du lit. En parlant du loup, câĂ©tait justement Lloyd ! Tiens, tu pensais ĂȘtre un grand mĂ©chant loup, mais jâaime mieux te dire que tu es un ange, comparĂ© Ă Lloyd, qui vient justement de se vanter pour la Ă©niĂšme fois dâavoir un coup dâavance sur toi me concernant. PathĂ©tique⊠»Cette phrase pouvait prĂȘter Ă confusion, Ă©videmment. Lise entendait par lĂ que Lloyd lâavait dĂ©jĂ embrassĂ©e et Aaron nonâŠMais loin dâelle lâenvie de mettre les points sur les i et les barres sur les t, car elle apprĂ©ciait le fait quâils prennent leur temps au lieu de se sauter au cou de maniĂšre vulgaire et théùtrale. CâĂ©tait justement ça, qui faisait la force de leur dĂ©but de relationâŠY aller tout en douceur garantissait Ă Aaron le fait que Lise ne le fuirait jamais. Au contraire, plus ils prenaient leur temps, et plus lâenvie de dĂ©couvrir lâautre sous ses multiples facettes se faisait intense. Au point que Lise finisse presque par trĂ©pigner dâimpatience, sans en montrer le moindre dĂ©tail. Alors, sans mĂȘme rĂ©pondre au message de Lloyd dont elle se fichait Ă©perdument, elle redĂ©posa son cellulaire contre la table avant de se rasseoir sur son lit. Aaron ne pouvait pas vraiment voir son expression puisquâelle Ă©tait au bord du lit, et câĂ©tait tant mieux, car la tristesse marquait bel et bien ses traits. Elle se souvenait maintenant quâAaron avait dit quâil trouvait sa mĂšre trĂšs belle, et quâelles avaient toutes les deux le mĂȘme sourire. CâĂ©tait la pure vĂ©ritĂ©, bien quâelles possĂšdent Ă©galement les mĂȘmes yeux. Lise nâavait pas pris la blondeur de ses cheveux, câĂ©tait bien lĂ lâunique diffĂ©rence. Lise ne pu sâempĂȘcher de se relever pour aller chercher une grande photo dans sa petite commode, une photographie de Spencer Ă lâĂąge dâAaron, au bras dâAnne, Ă lâĂąge de Lise. Ces deux lĂ Ă©taient habillĂ©s pour leur bal de promo, et arboraient un sourire Ă la fois sincĂšre et radieux. Lise dĂ©posa donc la photo sur le lit avant de sâasseoir juste en face dâAaron, sans pour autant le regarder pour lâinstant. VoilĂ Spencer avec quelques annĂ©es de moins, au bras de la femme de sa vie. Mon grand pĂšre adore Spencer parce quâil Ă©tait le gendre idĂ©al, selon lui. Sache que je ressemble Ă©normĂ©ment Ă ma mĂšreâŠLes mĂȘmes yeux, les mĂȘmes traits, le mĂȘme caractĂšreâŠJâai tout pris dâelle, ou presque. Je sais que jâĂ©tais sa prĂ©fĂ©rĂ©eâŠEt câest justement parce que je lui ressemble que mon pĂšre me dĂ©teste autant, je pense. »Lise avait relevĂ© son regard dĂšs quâelle avait fini de parler, ses yeux soudainement devenus brillants. Elle ne pensait pas que ce serait aussi difficile pour elle de parler de sa mĂšre, bien que cela fasse des annĂ©es maintenantâŠLise nâavait jamais pu faire son deuil. Et pour info, je te fais confiance. Tu as peur de dormir avec moi dois-je comprendre ? »Lise eut un mince sourire, mais le cĆur nây Ă©tait pas. Elle avait beau essayer de changer de sujet, avoir la photo de sa mĂšre sous le nez Ă©tait presque insupportable. Ses mains se mirent lĂ©gĂšrement Ă trembler avant quâelle ne prenne le rĂ©flexe de se lever et de faire quelques pas. Excuse-moi. Je vais aller piquer une tĂȘte⊠»La voilĂ de retour, la Lizzie fuyante. AussitĂŽt dit, aussitĂŽt fait, du reste, car Lise avait dĂ©jĂ ouvert sa porte fenĂȘtre pour se retrouver juste en face de la piscine. A partir de lĂ , elle ĂŽta ses chaussures ainsi que sa robe avant de plonger dans la piscine et de faire quelques longueurs pour se dĂ©fouler. CâĂ©tait le seul moyen de se vider lâespritâŠCe ne fut quâau bout de plusieurs longues minutes que Lise sâarrĂȘta, le cĆur battant dâavoir nagĂ© si vite, se tenant au rebord opposĂ© de lĂ oĂč elle Ă©tait entrĂ©e. Elle Ă©tait dos Ă son petit coin de paradis, et soupirait lĂ©gĂšrement, luttant contre elle-mĂȘme pour ne pas se mettre Ă pleurer comme une vulgaire enfant. Le menton contre ses bras, elle prĂ©fĂ©rait regarder lâhorizon, se fichant Ă©perdument du reste pour lâinstant. Il fallait juste quâelle reprenne contenance et tout irait au mieux. InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Mer 7 Juil - 1903 Lorsquâil se retrouva seul, Aaron soupira et agita lĂ©gĂšrement la tĂȘte, se blĂąmant intĂ©rieurement dâavoir fait preuve dâautant de maladresse. A vrai dire, il ne pensait pas rĂ©veiller en elle de mauvais souvenirs, il avait simplement parlĂ© de sa mĂšre sans vĂ©ritablement connaĂźtre leur histoire Ă toute les deux. CâĂ©tait assez difficile de savoir sur quel pied danser avec Lise et ce nâĂ©tait pas la premiĂšre fois quâAaron fonçait droit dans le mĂ»r. On a dĂ©jĂ vu mieux comme dĂ©but de relation, nâest-ce pas ? Naturellement, il ne pouvait que sâen vouloir et se jura de ne plus faire la moindre allusion Ă la famille de Lise au cours de leurs conversations Ă venir. Chaque fois quâil le faisait, il se rendait compte que la jeune femme se sentait particuliĂšrement affectĂ©e, ce nâĂ©tait donc pas la peine de remuer de vieux souvenirs, dâautant plus sâils Ă©taient douloureux. Au bout dâune dizaine de minutes, Aaron se leva, espĂ©rant que Lise ait eu suffisamment de temps pour Ă©vacuer la pression. Le jeune homme alla la rejoindre, restant debout au bord de la piscine, visiblement mal Ă lâaise dâavoir causĂ© autant de chagrin. Jâai encore mis les pieds dans le plat, nâest-ce pas ? Tu vas finir par penser que câest une manie chez moi. Je suis sincĂšrement dĂ©solĂ©, je ne pensais pas que ça tâaffecterait Ă ce point dâen parler. La prochaine fois, je te promets de me mordre la langue avant de poser la moindre question ou de faire la moindre remarque. »La tension Ă©tait plus que palpable et mĂȘme si Aaron essayait de paraĂźtre le plus naturel possible, Lise nâaurait probablement aucun mal Ă cerner sa gĂȘne vis-Ă -vis de la situation. Il faut dire quâil nâĂ©tait pas vraiment habituĂ© aux vies aussi compliquĂ©es que celle de Lise. La famille de la jeune femme Ă©tait pour le moins Ă©trange et ça, Aaron pouvait sâen rendre compte avant mĂȘme dâavoir rencontrĂ© les membres qui la composaient. Dâun sens, câĂ©tait probablement mieux de faire partie dâun clan comme celui-ci que de ne pas avoir de famille du tout, comme câĂ©tait le cas du jeune homme. Aaron nâavait pour ainsi dire pas de famille Ă lâexception de Sarah. Cette derniĂšre le faisait passer aux yeux de tous pour son fils bien que dans le fond, son comportement se rapproche davantage de celui dâune grande sĆur bienveillante que dâune mĂšre Ă proprement parler. Cela dit, cette vie lĂ convenait parfaitement Ă Aaron, peut-ĂȘtre parce quâil nâavait connu que çà et quâil avait Ă©tĂ© heureux ainsi. Y compris avec tous les efforts du monde, il ne pouvait comprendre ce que Lise Ă©tait en train dâendurer. En fait, jâai pas vraiment lâhabitude des grandes familles comme la tienne. De mon cĂŽtĂ©, nous ne sommes que deux. Je nâai pas dâoncle, pas de tante, pas de frĂšre et sĆur ni de grands parents⊠je nâai pour ainsi dire, aucune expĂ©rience en matiĂšre de famille. Jâai toujours essayĂ© dâimaginer ce que ça pouvait faire dâen avoir une⊠je crois que je mâen fais une image idĂ©ale, presque utopique. Enfin bon, tout ça pour dire que je suis vraiment navrĂ© dâĂȘtre aussi maladroit. Je ne voulais pas te faire de la peine. »A peine eut-il achevĂ© sa phrase, que son propre portable se mit Ă sonner. Aaron glissa la main dans sa poche et vit que Lloyd venait tout juste de lui envoyer un message. Il lui demandait de venir les rejoindre, Summer et lui, au cafĂ© habituel afin dâavoir une petite conversation Ă trois. Pour dire quoi ? Entendre une Ă©niĂšme fois Summer lui cracher son venin avant de dire quâelle Ă©tait dĂ©solĂ©e et quâelle lâaimait plus que tout ? Pour que Lloyd essaie de les remettre ensemble afin de mieux se jeter sur Lise au final ? Non merci. Si je ne rĂ©ponds pas non plus, tu crois quâil parviendra enfin Ă capter le message ? Jâai toujours adorĂ© Lloyd mais depuis quelques jours, il est tout simplement insupportable ! »Aaron Ă©teignit son portable afin dâĂȘtre certain de ne plus ĂȘtre dĂ©rangĂ© de toute la soirĂ©e. Il avait envie de profiter de cet instant en compagnie de Lise, sans songer Ă rien dâautre quâĂ elle seule. CâĂ©tait lâune des premiĂšres fois quâils avaient lâoccasion dâapprendre Ă se dĂ©couvrir en tĂȘte Ă tĂȘte et il savait quâils avaient encore tout un tas de choses Ă apprendre lâun de lâautre. Hors de question quâune personne extĂ©rieure âqui plus est sâil sâagissait de Lloyd !- vienne gĂącher leur soirĂ©e. Oui pour en revenir Ă tout ça, je veux juste que tu saches que je suis lĂ , prĂȘt Ă tâĂ©couter si tu as envie dâen parler. Tu mâas dit toi-mĂȘme que personne ne sâĂ©tait jamais intĂ©ressĂ© Ă toi, Ă ce que tu penses ou ce que tu ressens⊠je prĂ©sume que tu nâas jamais pris le temps de te confier⊠ça fait pourtant beaucoup de bien parfois. Câest en extĂ©riorisant ce que tu as sur le cĆur que tu parviendras Ă combattre tes vieux dĂ©mons. Je ne te force Ă rien mais dis toi bien que tu nâes plus seule dĂ©sormais⊠je suis lĂ moi.»LâhĂŽpital qui se fout de la charitĂ© comme on dit !! Aaron nâavait jamais parlĂ© Ă personne de tout ce quâil avait vĂ©cu, mĂȘme en prĂ©sence de Sarah et lorsque par malheur elle abordait le sujet, le jeune homme faisait mine dâavoir tout oubliĂ©. Je ne mâen souviens pas, jâĂ©tait trop petit. » Bien sur, il se souvenait de tout dans les moindres dĂ©tails, de chaque parole, de chaque geste, de la peur quâil Ă©prouvait et de la voix de cet homme qui lâavait terrifiĂ© durant des annĂ©es. Cela faisait presque quinze ans maintenant et pourtant, Aaron nâarrivait pas Ă exorciser ses propres dĂ©mons. Pourquoi tu te retiens de pleurer ? RelĂąche la pression de temps en temps⊠ça nâa rien dâhonteux tu sais. Ca lâest encore moins quand tu as une Ă©paule sur laquelle tâappuyer. »Aaron se baissa au bord de la piscine, de maniĂšre Ă pouvoir la toucher. Câest fou comme il avait besoin de ce contact charnel dĂ©sormais. Sâil ne se retenait pas, il passerait le plus clair de son temps Ă lui tenir la main, Ă la caresser, la toucher ses cheveux, Ă laisser ses lĂšvres papillonner sur ses joues ou sur ses lĂšvres, pourquoi pas. Cela dit, je prĂ©fĂšre de loin te voir sourire et tâentendre rire⊠je trouverais toujours le moyen dây arriver mĂȘme si pour cela je dois employer la maniĂšre forte⊠»Le jeune homme esquissa un large sourire avant de finalement, sâasseoir au bord de la piscine pour y entrer tout habillĂ©. Rapidement, il se jeta sur Lise tout en la chatouillant et dĂ©posant un gros baiser sur sa joue. Il Ă©tait totalement hors de question quâil la laisse arborer cette petite mine tristounette pour le restant de la soirĂ©e. Il ne voulait pas que cet instant soit gĂąchĂ© Ă cause de sa maladresse exemplaire. Aaron avait parfaitement compris quâil Ă©tait plus prudent de sâabstenir de poser la moindre question Ă lâavenir. JâespĂšre que ton grand pĂšre nâaura pas la bonne idĂ©e de rentrer maintenant, sans quoi, bonjour lâimage quâil se fera de moi ! »Une fois de plus, je dis que c'est nul, sauf que cette fois, c'est parfaitement justifiĂ©! InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Mer 7 Juil - 1944 Lise Ă©tait presque prĂȘte Ă rester ruminer sa peine pendant des heures, comme elle le faisait avec Sam par le passĂ©. CâĂ©tait tellement plus facile de fuir toute conversation triste plutĂŽt que dâĂ©voquer ce qui la rendait triste, justement. AprĂšs tout, pourquoi sâembarrasser de dĂ©tails alors quâils pouvaient simplement oublier et passer une bonne soirĂ©e ? Et bien, parce que Lise ne pouvait pas oublier. Oublier serait comme une trahison Ă la mĂ©moire de sa mĂšre, et ça, elle ne parvenait pas Ă lâaccepter. SĂ»rement parce que sa gĂ©nitrice avait Ă©tĂ© lâun des piliers de sa vie et quâelle ne parvenait pas Ă avancer sans elle. Comment avancer sans aucun guide ? Son grand pĂšre lâavait compris, et câest pourquoi il avait pris la dĂ©cision de venir sâinstaller Ă San Francisco. Aaron ne pouvait dĂ©cemment pas comprendre cette situation familiale, puisque comme il venait de lui avouer, les grandes familles et leurs intrigues lui Ă©taient totalement inconnues. Il semblait protĂ©gĂ© par cette petite bulle, et bien que Lise ne veuille pas se permettre de demander sâil vivait avec sa mĂšre ou avec son pĂšre, elle avait lâimpression quâil Ă©tait heureux ainsi. Il en avait, de la chanceâŠLise ne parvenait pas Ă aimer sa situation familiale, ni mĂȘme sa situation tout court, du moins jusquâĂ ce que son grand pĂšre vienne la sauver de sa solitude. Amaury nâavait pas idĂ©e Ă quel point elle sâĂ©tait mise en danger, pourtant. Et pourquoi, au final ? Pour fuir son salaud de pĂšre, ou bien elle-mĂȘme au sens large du terme ? Probablement. Et expliquer ça Ă Aaron, mĂȘme si elle sâĂ©tait promis dâĂȘtre toujours franche avec lui, paraissait un vĂ©ritable parcours du combattant. Alors, lâespace dâun instant, elle sâabandonna au rire et Ă ce jeu dâenfant provoquĂ© par le jeune homme, entrĂ© tout habillĂ© dans la piscine alors quâelle Ă©tait en sous vĂȘtements pour sa part. Sa sollicitude Ă©tait diablement touchante et si elle ne sâĂ©tait pas retenue, effectivement, elle aurait fondu en larmes. De peine, de relĂąchement de pression, et de tout ce qui lâĂ©touffait depuis des annĂ©esâŠMais Ă la place, elle parvint Ă feindre un amusement total jusquâĂ ce quâelle sâabandonne dans ses bras, le serrant dĂ©licatement contre elle. VoilĂ probablement tout ce dont elle avait besoin, en vĂ©ritĂ©. Mon grand pĂšre a fait ce genre de choses avant toi, va ! Lui et ma grand-mĂšre Ă©taient pour un ainsi dire un coupleâŠSpĂ©cial. Pour la simple et bonne raison quâils aimaient aller contre les conventions. Par exemple, se genre en costume Ă fleurs Ă un enterrement, pour Ă©viter que les gens ne sâancrent dans leur tristesse, et beaucoup dâautres choses. Tu ne sais pas encore tout ça, mais il est pire que toi⊠»Lise en rit volontiers, sachant Ă©perdument de quoi son grand pĂšre Ă©tait capable pour briser ce masque dâhomme connu et trop sĂ©rieux. Le roi de la dĂ©conne, dans la famille, câĂ©tait lui. Il sâĂ©tait un peu assagit depuis le dĂ©cĂšs de sa femme, mais il demeurait un joyeux luron en toute circonstance tout de mĂȘme. Mais tout ça, Aaron aurait bientĂŽt le temps de le dĂ©couvrir par lui-mĂȘme. Pour lâinstant, Lise nâavait pas lâintention de le laisser attraper froidâŠAussi, elle prit ses deux mains dans les siennes pour lâemmener non pas Ă lâintĂ©rieur de son petit coin Ă elle, mais bien Ă lâintĂ©rieur de la maison en elle-mĂȘme. Elle le conduisit jusquâĂ la salle de bain qui se trouvait Ă cĂŽtĂ© de la cuisine, oĂč elle lĂącha ses mains dĂ©licatement pour ouvrir le placard et sortir trois grandes serviettes blanches propres. Le fait quâelle soit en sous-vĂȘtements elle-mĂȘme et toute aussi trempĂ©e que lui nâavait pas dâimportance. Lui, il avait ses vĂȘtements qui lui collaient Ă la peau et quâelle avait du mal Ă ne pas craindre quâil nâattrape froid. Bon, ne va pas croire que je te fais du charme, hein ! Câest juste pour que tu nâattrapes pas froid, Casanova des bacs Ă sable. »Lise lui lança un clin dâĆil taquin avant de dĂ©poser les serviettes Ă cĂŽtĂ© dâelle. Elle posa ensuite ses mains sur son torse pour commencer Ă dĂ©faire les boutons de sa chemise. Elle y allait lentement de peur de le brusquer et pour un peu, elle du lutter atrocement pour que ses mains ne tremblent pas. Son cĆur possĂ©dait dĂ©sormais des battements effrĂ©nĂ©s, et câĂ©tait Ă peine si elle nâallait pas se mettre Ă rougir dans la seconde. CâĂ©tait bien la premiĂšre fois quâelle se montrait aussi maladroite pour une chose pareille. AprĂšs tout, il nây avait strictement aucune arriĂšre pensĂ©e lĂ -dessous, et si elle faisait cela, câĂ©tait bien pour lui empĂȘcher dâattraper la crĂšve, non ? Et pourtant, Lise ne pouvait pas sâempĂȘcher dâĂȘtre irrĂ©sistiblement attirĂ©e par le dĂ©sir de se blottir dans sa chaleur. Ce contact Ă©tait devenu presque vital pour elle, et pourtant, elle sâinterdisait presque le fait de crĂ©er ce lien entre eux. Comme si cette prĂ©cipitation soudaine pouvait les briser lâun comme lâautreâŠIl fallait dire quâelle nâavait jamais aimĂ©, ni vĂ©ritablement pris soin de quelquâun auparavant, en dehors de sa petite sĆur. On ne pouvait donc pas dire quâelle Ă©tait experte en la matiĂšre, et pourtant, câĂ©tait avec la meilleure volontĂ© du monde quâelle le faisait pour Aaron Ă cet instant prĂ©cis. Elle dĂ©boutonna chaque bouton avec dĂ©licatesse, son regard rivĂ© sur sa chemise comme si elle Ă©tait en train dâaccomplir un ouvrage impossible. Une fois quâelle eut Ă©cartĂ© les deux pans de la chemise dâAaron et quâelle pu apercevoir son magnifique torse, ce fut Ă ce moment lĂ quâelle ne pu se retenir de le regarder, de maniĂšre Ă la fois Ă©nigmatique et sensuelle. Oui, câĂ©tait parfaitement le mot adĂ©quat pour dĂ©crire la scĂšne entre euxâŠDâune sensualitĂ© Ă couper le souffle, tandis que Lise possĂ©dait ses deux mains sur le torse dâAaron. La tentation de lui voler un baiser lĂ tout de suite commençait Ă ĂȘtre vĂ©ritablement insupportable, et elle se maudissait de ne pas cĂ©der Ă la tentation une bonne fois pour toute. Fallait-il quâelle lâaime comme une folle pour le respecter ainsi, dĂ©sirant ne surtout pas le brusquer ! Et dâailleurs, lâexpression de Lise, si elle Ă©tait dĂ©pourvue de sourire, nâĂ©tait plus triste Ă lâheure actuelle. MystĂ©rieuse, câĂ©tait le mot. DĂ©solĂ©e dâĂȘtre lenteâŠJe me lasse pas de te contempler. »Lise fit quitter lâune de ses mains du torse dâAaron pour la passer doucement sur sa joue, avant de jouer avec ses cheveux, les caressant avec une dĂ©licatesse qui nâĂ©tait pourtant pas digne dâelle. Comme sâil la rendait tendre, romantique, attentionnĂ©eâŠTout ce quâelle nâavait jamais Ă©tĂ© et quâelle ne pensait jamais ĂȘtre. Elle se risqua Ă sourire tendrement avant de dĂ©poser ses lĂšvres contre sa joue, exerçant une lĂ©gĂšre pression Ă lâaide de sa main sur la joue voisine afin que le contact dure quelques secondes. Pour en profiter dâailleurs, elle se permit de clore ses yeux lâespace dâun instant, comme si câĂ©tait la plus belle chose quâelle avait faite dans sa vie. Sans doute Ă©tait-ce le cas, dâailleursâŠCar la torture de la sĂ©paration fut particuliĂšrement dure Ă encaisser. Quand elle sâĂ©carta pour reprendre son ouvrage, lui ĂŽtant ainsi sa chemise des Ă©paules avec douceur et lenteur, elle ne pu sâempĂȘcher de se mordiller lĂ©gĂšrement la lĂšvre, de maniĂšre discrĂšte afin quâil ne le remarque pas comme un signe de gĂȘne quelconque. Il fallait quâelle rĂ©agisse, quâelle dise quelque chose, sans quoi, elle nâallait pas rĂ©sister longtemps Ă ce rythme. DĂ©solĂ©e de prendre soin de ta chemise Ă ce point, dâhabitude, jâai plutĂŽt tendance Ă arracher les boutons en ouvrant ce genre de vĂȘtement. Mais lĂ , comme tu vas la remettre aprĂšs, je vais en prendre soin. »Lise lui lança Ă nouveau un clin dâĆil avant de dĂ©poser la chemise sur un cintre et de la laisser pendre au dessus de la douche. Elle revint ensuite Ă cĂŽtĂ© dâAaron pour mieux se saisir dâune serviette propre, et commença Ă lui frotter doucement le torse pour le sĂ©cher. Elle serra ensuite sa poitrine contre son torse pour sĂ©cher dĂ©licatement son dos, avant de remonter vers sa chevelure. Il nây avait pas vraiment lĂ de geste maternel, en vĂ©ritĂ©. CâĂ©tait plutĂŽt lâaction dâune femme amoureuse que ses actes surprenaient toujours plus de seconde en seconde. Ăvidemment, Lise aurait pu pousser la chose plus loin en enlevant son pantalon Ă Aaron, mais elle ne voulait surtout pas le brusquer, justement. Elle ne sâĂ©tait pas retenue de lâembrasser pour le dĂ©shabiller complĂštement ! Elle finit donc de lui sĂ©cher les cheveux avant de reprendre la parole, dâune voix douce Tu nâas pas mis les pieds dans le plat, tout Ă lâheure. Tu ne pouvais pas savoirâŠMa mĂšre nâest plus de ce monde, en fait. Jâavais douze ans, et jâarrive pas Ă faire mon deuil. Surtout que son dĂ©cĂšs a marquĂ© un tournant considĂ©rable vis-Ă -vis de ma relation avec mon pĂšre. Je savais quâil avait toujours voulu un garçon, pour Ă©viter que je ressemble trop Ă ma mĂšreâŠMais depuis quâelle nâest plus lĂ , il me le fait un peu payer. A ses yeux, je ne suis quâune enfant capricieuse qui ne saura jamais ce quâelle veut. Il faut dire quâenfant, je le faisais tourner en bourrique, que jâai fuis New York Ă mes quatorze ans pour parcourir le globe, et il nâa pas eu de mes nouvelles pendant deux ans. Je suis rentrĂ©e un peu avant de partir pour venir ici, Ă San Francisco. Il voulait que je me marie pour me mettre du plomb dans la cervelleâŠMais je ne suis pas un objet que lâon peut vendre et exposer sur une commode bien en Ă©vidence. Je respire, je pense, jâai des sentiments, des dĂ©sirs et des rĂȘves, comme tout le monde. Il nâa pas encore compris que je nâai jamais eu de guide, du fait quâil ne mâa jamais soutenue ni accordĂ© le moindre temps, la moindre importance. Mon grand pĂšre est lĂ , câest pour y remĂ©dier. Mâapprendre la vie, quoiâŠJe sais quâil me connait par cĆur et je lui fais une confiance aveugle. Il est la seule personne au monde, avec mon frĂšre Sam et mon meilleur pote William, Ă ne mâavoir jamais déçue. »Lise nâincluait pas encore Aaron, non pas parce quâil lâavait dĂ©jĂ déçue, mais parce quâil Ă©tait encore trop tĂŽt pour quâelle se dĂ©voile Ă cĆur ouvert de cette maniĂšre. Il lui fallait du tempsâŠSans compter quâelle avait en face dâelle quelquâun aussi peu portĂ© quâelle sur la confidence. Fondamentalement, cela la dĂ©rangeait sans vraiment la dĂ©rangerâŠSans doute Ă©tait-ce confortable, en vĂ©ritĂ©. Et quand elle eut finit de lui sĂ©cher les cheveux, elle reposa la serviette dĂ©sormais trempĂ©e sur le radiateur, afin de lâĂ©tendre, et offrit Ă Aaron un sourire franc et sincĂšre. Certes, ses yeux Ă©taient encore brillants, mais elle avait dĂ©cidĂ© quâelle ne pleurerait. Il lâavait dĂ©jĂ vue fragileâŠEt elle nâavait aucune envie que cela recommence. Je crois que je connais rien de toi, en fait. Tu es parti du principe que tu Ă©tais banal et quâil nây avait rien Ă en direâŠJe ne suis pas de cet avis. Et aussi vrai que je compte devenir archĂ©ologue, compte sur moi pour percer ton mystĂšre, Aaron Cooper. »Lise Ă©tait presque tentĂ©e de lui dire quâaussi vrais que ses sentiments puissent lâĂȘtre, elle allait apprendre Ă le connaĂźtre, petit Ă petit, de la maniĂšre qui lui conviendrait. Elle ne lui demandait rien, pour lâinstantâŠMĂȘme sur cela, elle avait lâintelligence et la dĂ©licatesse de ne surtout pas le brusquer. Bon, je vais pas jouer les perverses en te dĂ©faisant ton pantalon pour faire mine de vouloir te sĂ©cher les gambettes, alors il faudra que tu te dĂ©brouillesâŠTu penses pouvoir le faire mon chou ? Yâa des peignoirs blancs ou noirs dans lâarmoire, nâhĂ©sites pas Ă te servir. Je tâattends dans la cuisine. »Un dernier baiser sur sa joue, et Lise fermait la porte derriĂšre elle, nâayant aucune intention de se rhabiller pour sa part. Cela faisait longtemps quâelle nâavait plus eu lâoccasion de se trimballer en petite tenue chez elle sans ĂȘtre reluquĂ©e par un voisin curieux, aprĂšs tout. Et effectivement, chose promise chose due, elle se dirigea dans la cuisine. Elle brancha le mixer et se mit Ă choisir dans la corbeille prĂ©vue Ă cet effet plusieurs fruits pour faire un petit cocktail frais. Au menu Oranges, bananes, ananas et une pointe de lait de coco. Elle mixa le tout pour en remplir lâĂ©quivalent de deux verres, avant dây ajouter quelques glaçons pour le rendre plus frais. Elle sâassit sur lâun des tabourets bordant le bar de la cuisine, les deux verres devant elle. Comme dâhabitude, elle nâattendait plus que luiâŠN'importe quoi sont parfaits tes posteuh!!!! Et 3000° message pour moi, la classe *out* InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Jeu 8 Juil - 141 Difficile de ne pas cĂ©der dans une situation pareille. Commet Aaron pouvait-il rester de marbre alors que la tentation se faisait grandissante, tout comme ses Ă©motions ? Tandis que Lise se serrait contre son torse, il garda les yeux rivĂ©s vers les siens tout en se laissant aller Ă ses songes et en essayant de rĂ©guler sa respiration. Aaron redoutait par-dessus tout quâelle puisse percevoir les battements effrĂ©nĂ©s de son cĆur qui trahissaient Ă quel point elle avait de lâemprise sur son ĂȘtre tout entier. Dâun sens, il nâavait jamais imaginĂ© que ses sentiments puissent prendre une telle ampleur et tout cela avait tendance Ă le dĂ©contenancer. Pire encore, Ă le dĂ©router. Il aurait souhaitĂ© que leur relation Ă©volue en douceur et que les sentiments sâinstallent petit Ă petit or, câest exactement le contraire qui sâĂ©tait produit trop dâamour dâun seul coup. Dire quâil nâĂ©tait pas effrayĂ© face Ă la situation serait mentir car dans le fond, Aaron Ă©tait complĂštement terrifiĂ©. Le fait est quâil ignorait comment il avait rĂ©ussi Ă rassembler tant dâaudace pour lui avouer ses sentiments et laisser entrevoir une leur dâespoir entre eux. Dâordinaire, il ne sâembarrassait pas de scrupule, lorsquâune fille lui plaisait, il passait Ă lâaction sans se soucier des consĂ©quences. NĂ©anmoins, il ne souhaitait pas que les choses se dĂ©roulent ainsi entre eux. Aaron avait envie de prendre son temps, il ne voulait pas brusquer Lise et encore moins lui laisser imaginer que la rĂ©putation quâil traĂźnait derriĂšre lui Ă©tait justifiĂ©e. Il voulait dâabord quâelle dĂ©couvre une autre facette de sa personnalitĂ©, quâelle sache qui il Ă©tait vraiment. CâĂ©tait un travail long, dĂ©licat et minutieux qui risquait de prendre beaucoup de temps, mais il Ă©tait nĂ©cessaire sâils tenaient Ă partir sur des bases solides. Lise Ă©tait une jeune femme mystĂ©rieuse mais Aaron lâĂ©tait tout autant. Il nâaimait pas parler de lui, il dĂ©testait que quelquâun puisse lire au fond de son Ăąme comme Lise semblait capable de le faire. CâĂ©tait totalement dĂ©routant. Dire quâil Ă©tait en train dâeffleurer du doigt une parcelle de bonheur au lieu de la saisir Ă pleine main le rendait malade, mais il nâĂ©tait pas capable de sây prendre autrement. Aaron nâavait pas envie de se comporter en crĂ©tin Ă lâĂ©gard de Lise, il ne tenait pas Ă tout foutre en lâair. Cela dit, mĂȘme sâil ne rĂ©pondait pas, que ce soit physiquement ou verbalement Ă la douceur de Lise, son regard Ă©tait suffisamment parlant pour que quiconque comprenne ce quâil ressentait en cet instant il Ă©tait complĂštement fou dâelle et lâamour quâil Ă©prouvait Ă©tait sans limite. MalgrĂ© tout, Aaron nâĂ©tait pas prĂȘt Ă lâadmettre, il Ă©tait toujours long pour parvenir Ă exprimer ses sentiments. Lise savait quâil tenait Ă elle, quâil avait envie de partager un bout de chemin et pourquoi pas toute une vie Ă ses cĂŽtĂ©s, cela dit, Aaron prĂ©fĂ©rait que tout ceci reste tacite pour lâinstant. CâĂ©tait dans sa nature de ne pas faire confiance aux autres⊠dâordinaire, câĂ©tait lui le chasseur, câĂ©tait lui qui menait le jeu, qui dĂ©cidait quand cela devait commencer et quand cela devait finir. En lâoccurrence, Aaron se trouvait dans une position vulnĂ©rable dans le sens oĂč il savait que si Lise venait Ă lâabandonner, il ne parviendrait pas Ă se relever. Il dĂ©testait penser de la sorte, il avait lâimpression dâĂȘtre faible. Faible face Ă une femme, en somme câest tout ce quâil dĂ©testait. Aaron Ă©tait en pleine hĂ©sitation. Il ne savait pas sâil devait prendre la parole et ĂȘtre plus clair au sujet de ce quâil ressentait en cet instant ou bien si le silence Ă©tait suffisamment parlant⊠comme toujours, il opta pour la seconde option. Il ne savait que trop bien que les longs discours sentimentaux nâĂ©taient pas faits pour lui, pourtant, il y avait tout un tas de choses quâil souhaitait lui faire savoir. HĂ©las, le tact ne faisait pas partie de sa philosophie surtout en matiĂšre de sentiments, il savait fort bien quâen jouant les jolis cĆurs comme il le faisait dâordinaire, il ne pourrait que la blesser. Sans compter que Lise nâĂ©tait probablement pas du genre Ă jouer les vierges effarouchĂ©es et quâelle verrait clair dans son jeu. Il fallait quâil soit sincĂšre jusquâau bout⊠plus facile Ă dire quâĂ faire car pour le coup, Aaron prĂ©fĂ©ra rester silencieux, sans doute par peur dâĂȘtre ridicule. Aussi, il sâĂ©tait rĂ©solu en lâespace de quelques minutes Ă ne pas sâĂ©taler ni Ă sâĂ©garer de trop mĂȘme si dans le fond, lâenvie ne manquait pas. Lorsquâelle entama des explications au sujet de sa famille, il pu comprendre davantage que la famille Hawkins Ă©tait loin dâĂȘtre facile Ă cerner. Plus spĂ©cifiquement son pĂšre. Aussi, tout en fronçant les sourcils, il se passa soucieusement la main dans les cheveux encore mouillĂ©s, prĂȘt Ă prendre la parole. Il regretta presque dans lâinstant dâavoir ouvert la bouche. Il nâavait pas Ă faire le moindre commentaire au sujet de cette famille quâil ne connaissait pas pour ainsi dire, pourtant, il ne pouvait sâempĂȘcher de trouver le caractĂšre de son pĂšre proprement atroce. Vouloir te marier, câest plutĂŽt radical comme dĂ©cision. Je pensais quâen AmĂ©rique, chacun Ă©tait libre de choisir lâĂ©lu de son cĆur. Câest difficile dâimaginer que ton pĂšre puisse raisonner de la sorte. Peut-ĂȘtre quâil cherchait simplement Ă tâoffrir une certaine stabilitĂ© mĂȘme si la maniĂšre de sây prendre est loin dâĂȘtre parfaite. » Sa remarque Ă©tait plutĂŽt maladroite et il ne le rĂ©alisa quâaprĂšs coup. Aaron se disait quâil nâavait pas le droit dâĂ©mettre le moindre jugement dans le sens oĂč il ne savait strictement rien Ă lâexception des quelques Ă©lĂ©ments que Lise daignait bien distiller petit Ă petit. Dâailleurs, il avait parfaitement compris quâelle ne lui en dirait pas davantage, pour la simple et bonne raison que câĂ©tait encore beaucoup trop tĂŽt. Cela nâavait aucune espĂšce dâimportance, Aaron savait faire preuve de patience et en aucun cas il ne lâinciterait Ă parler dâun passĂ© quâelle ne souhaitait pas Ă©voquer en sa prĂ©sence. En rĂ©alitĂ©, il savait quâil pourrait se contenter des Ă©lĂ©ments quâelle voudrait bien lui fournir. Il se disait quâil fallait quâil se contente de ce quâil possĂ©dait et ma foi, il sâagissait dĂ©jĂ de beaucoup de choses. ConnaĂźtre Lise sur le bout des doigts ne lâintĂ©ressait pas vraiment Ă©tant donnĂ© quâil savait dĂ©jĂ lâessentiel⊠elle Ă©tait la bonne personne, celle qui faisait battre son cĆur et pour qui il aurait fait lâimpossible. CâĂ©tait largement suffisant pour lâinstant. RĂ©flexe typiquement masculin, il ne pu sâempĂȘcher de laisser son regard se promener dans le dos de Lise, glissant jusquâĂ ses fesses au moment oĂč elle se tourna pour poser la serviette sur le radiateur. Pour la premiĂšre fois de sa vie, Aaron aurait presque culpabilisĂ© dâavoir eu un comportement aussi primaire mais hĂ©las, il ne lâavait pas maĂźtrisĂ© le moins du monde. Il faut admettre que Lise Ă©tait plutĂŽt agrĂ©able Ă regarder, elle Ă©tait mĂȘme divinement belle. Une fois de plus, il ne sâagissait pas dâun regard dĂ©placĂ©, Ă vrai dire, il avait toujours tendance Ă la contempler Ă la maniĂšre dâune vĂ©ritable Ćuvre dâart. Comme il le redoutait tant, Lise ne manqua pas de braquer les projecteurs de nouveau sur lui tout en lui faisant remarquer quâelle ne savait pas grand-chose Ă son sujet. Aaron Ă©tait quelquâun de mystĂ©rieux et qui nâaimait pas sâĂ©taler Ă son propos. Dâailleurs, il estimait quâil nây avait pas grand-chose Ă dire. CâĂ©tait probablement une maniĂšre de se protĂ©ger afin dâĂ©viter que les regards ne se braquent de trop dans sa direction. Aaron Ă©tait un ocĂ©an de secrets quâil protĂ©geait avec soin. Il Ă©tait certain de pouvoir dire que personne ne le connaissait par cĆur et partait du principe que personne nây parviendrait jamais. Un regard agrĂ©mentĂ© dâun lĂ©ger sourire suffirent probablement Ă faire comprendre Ă la jeune femme quâil la remerciait pour sa discrĂ©tion et du fait quâelle nâessaie pas de le brusquer en posant des questions auxquelles, il ne rĂ©pondrait pas de toute maniĂšre. CâĂ©tait plus fort que lui, Aaron Ă©tait totalement bloquĂ© lorsquâil fallait Ă©voquer sa propre personnalitĂ©. La remarque suivante le fit rire sincĂšrement. De toute Ă©vidence, il nâallait tout de mĂȘme pas se faire traiter comme un nabab, Ă attendre quâelle daigne bien lui sĂ©cher les gambettes. Il avait suffisamment profitĂ© de la situation comme ça !! Alors quâelle venait tout juste de dĂ©poser un baiser sur sa joue et quâelle sâapprĂȘtait Ă partir, Aaron tĂącha de la retenir doucement par le bras afin de lâattirer de nouveau jusquâĂ lui et la serra un court instant dans ses bras avant de lâembrasser sur le front en murmurant un merci ». Merci pour tout, merci dâĂȘtre lĂ et de faire dĂ©sormais partie de ma vieâŠvoilĂ prĂ©cisĂ©ment ce que cela signifiait. Lorsque Lise fut sortie, Aaron termina de se sĂ©cher avant dâemprunter un peignoir noir. Le jeune homme ne tarda pas Ă rejoindre Lise dans la cuisine, remarquant soudainement que la demoiselle nâavait toujours rien enfilĂ© sur son dos. Aaron ne manqua donc pas dâironiser sur la situation. Je sais que je suis dâun calme olympien mais je vais sĂ©rieusement finir par croire que tu cherches Ă jouer avec mes nerfs. A moins quâil ne sâagisse dâune ruse pour tomber malade et mâinciter Ă rester Ă tes cĂŽtĂ©s pour la nuit⊠mais jâose en douter Ă©tant donnĂ© que nous sommes sous le toit dâun des meilleurs mĂ©decins de cette planĂšte. Si, si !! C'est prĂ©cisĂ©ment ce que Spencer ne cesse de rĂ©pĂ©ter depuis des semaines!! ... Plus sĂ©rieusement, tu nâas pas froid ? »Aaron sâĂ©tait avancĂ© jusque derriĂšre elle, posant ses mains chaudes sur les Ă©paules glacĂ©es de la jeune femme. Ce simple contact suffisait Ă enflammer ses sens et affoler une fois de plus son pauvre cĆur qui nâallait certainement pas tenir le coup. Une dĂ©licieuse odeur fruitĂ©e envahissait la piĂšce et le jeune homme ne tarda pas Ă dĂ©couvrir les merveilleux cocktails que Lise venait de leur prĂ©parer, rien que la couleur lui faisait envie. Hmm, jâavais presque oubliĂ© que je me trouve en prĂ©sence de la reine des cocktails !! Mary a enfin trouvĂ© une rivale digne de ce nom ! Elle qui se vente depuis toujours de prĂ©parer les meilleures boissons de toute la ville ! »Le jeune homme ne tarda pas Ă prendre place prĂšs de Lise, il y avait quelque chose dont il souhaitait lui parler, juste pour que tout soit parfaitement clair entre eux. Il baissa un court instant le regard en direction de son verre, lâair visiblement sĂ©rieux. Cette tĂ©mĂ©ritĂ© exacerbĂ©e qui lui Ă©tait pourtant tellement caractĂ©ristique semblait sâĂ©vaporer chaque fois quâil devait parler de lui. Hum⊠tu sais pour ce que tu mâas dit tout Ă lâheure, Ă propos du fait que tu ne sais pas grand-chose Ă mon sujet⊠et bien je voulais que tu saches que si je ne parle pas beaucoup de moi, ce nâest pas parce que jâai quelque chose Ă te cacher ou autre⊠non. En fait, jâai toujours eu beaucoup de mal Ă parler de mon passĂ©, sans doute par crainte dâĂȘtre jugĂ© ou tout simplement car jâai moi-mĂȘme du mal Ă accepter certains Ă©lĂ©ments qui pourtant, sont Ă lâorigine de ce que je suis aujourdâhui. Jâai dĂ©jĂ eu lâoccasion dâĂ©voquer mon passĂ© et je nâai pas eu dâexcellents retours du coup, je crois que je suis devenu mĂ©fiant. Ce nâest pas une question de confiance, câest juste que⊠certaines choses ne sont pas faciles Ă admettre. Câest aussi pour cette raison que je ne te brusquerai jamais⊠je sais trop bien ce que câest que dâaccepter un passĂ© relativement lourd et dâen faire part Ă quelquâun dâautre. »HĂ©las, Aaron Ă©tait loin dâimaginer la tragĂ©die qui avait touchĂ© Lise lorsquâelle Ă©tait enfant. Qui pourrait imaginer une chose pareille ? Quoi quâil en soit, Aaron ne voulait pas quâelle pense quâil ne souhaitait pas se confier Ă elle car ce nâĂ©tait pas le cas. Disons surtout quâil nâĂ©tait pas prĂȘt Ă le faire mais la grande question est de savoir sâil le serait un jour. Fort Ă parier que non. Le jeune homme se leva et fit quelques pas dans la piĂšce. Parler de son enfance reviendrait Ă admettre les raisons profondes qui lâavaient poussĂ© Ă faire mĂ©decine ou encore Ă risquer sa vie une premiĂšre fois en tentant une premiĂšre expĂ©rience dans lâarmĂ©e. Aaron se demandait dâailleurs sâil nâallait pas rĂ©itĂ©rer lâexpĂ©rience⊠Il ne souhaitait pas parler du passĂ© pour une multitude de raisons qui lui Ă©taient propres et câest ce quâil voulait lui faire comprendre. Je suis parti du principe que jâĂ©tais banal justement pour ne pas avoir Ă te parler de tout ce qui fondamentalement, me perturbe. En fait jâai lâimpression quâon se ressemble Ă©normĂ©ment toi et moi. Bien plus quâon ne veut bien lâadmettre. Jâai eu une enfance relativement agitĂ©e, le genre quâon ne souhaite Ă personne. Depuis, je fais mine dâavoir tout oubliĂ© afin quâon cesse de me poser des questions. Jâai pas envie de ressasser le passĂ© mais malheureusement, jây pense tous les jours Ă mon insu. En fait, jâai mĂȘme lâimpression que tout ce que jâai vĂ©cu se lit sur mon visage et ça me dĂ©stabilise vraiment. Câest sĂ»rement pour ça que je me cache en permanence derriĂšre un masque qui ressemble Ă AaronâŠmais qui nâest pas Aaron. Tu dois trouver ça complĂštement absurde. Je crois bien quâil nây a quâen ta prĂ©sence que je ne mens pas⊠je nâen ressens pas le besoin et je nâai pas la moindre envie de te tromper de toute maniĂšre. Câest bien la premiĂšre fois que je ressens ça⊠»Aaron cessa soudainement de faire les cents pas dans la cuisine et de nouveau, son regard se plongea dans celui de la jeune femme tandis quâil sâĂ©tait rapprochĂ© dâelle. Il ne savait pas si elle en avait conscience ou non mais sa prĂ©sence dans sa vie avait tout changĂ©. Dire quâil Ă©tait amoureux dâelle Ă©tait un euphĂ©misme car ses sentiments dĂ©passaient de loin ce quâun ĂȘtre normalement constituĂ© est en mesure dâĂ©prouver. Je nâai besoin de personne d'autre que toi⊠comme si ma vie dĂ©pendait de ton amour⊠jâespĂšre que ça ne te fait pas trop peur que je puisse dire tout ça en si peu de temps. Mais je te lâai dit, je nâai pas la moindre envie de te mentir et te cacher mes sentiments ne rimerait Ă rien. »La main dâAaron glissa sous le menton de la jeune femme, avant de caresser dĂ©licatement sa joue puis de glisser dans ses cheveux. Ce contact charnel Ă©tait devenu indispensable⊠durant un instant, son regard fixa ses lĂšvres rosĂ©es, objet de tous ses dĂ©sirs. Comment faisait-il pour rĂ©sister de la sorte ? Inutile de prĂ©ciser que dâordinaire, pour quâune fille parvienne Ă troubler Aaron, il fallait quâelle se lĂšve de bonne heure, mais venant de Lise un simple regard pouvait lui faire perdre tous ses moyens. J'ai tellement fait d'erreurs par le passĂ© que penser au futur avait tendance Ă m'angoisser jusquâici. Mais si tu me promets dâoublier dans les trois secondes qui suivent ce que je suis sur le point de te dire,alors je tâouvrirais certainement mon cĆur⊠»Aaron continuait de fixer les lĂšvres de Lise et son souffle se faisait plus rapide, tout comme les battements de son cĆur. Doucement, sa main glissa sur la nuque de la jeune femme et trĂšs lentement, il se rapprocha dâelle se laissant aller Ă la tentation⊠leurs visages nâĂ©taient plus quâĂ quelques millimĂštres et Aaron pouvait percevoir le souffle de la jeune femme sur sa peau. Il Ă©tait sur le point de frĂŽler ses lĂšvres au moment oĂč il entendit un toussotement dans son dos. InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Jeu 8 Juil - 223 Tout ce quâAaron venait de dire Ă Lise avait complĂštement bouleversĂ©e la demoiselle. Comment pouvait-elle dĂ©cemment oublier dans les trois secondes suivantes ce quâil lui dirait en lui ouvrant son cĆur ? Non, il lui en demandait trop. Peut-ĂȘtre Ă©tait-ce prĂ©fĂ©rable quâil ne dise rien, plutĂŽt que de lui imposer lâimmense torture de lâoubli. Le concernant, elle ne voulait rien oublier justementâŠNi son visage, ni sa voix, ni sa maniĂšre dâĂȘtre ! Tout ce quâil reprĂ©sentait la bouleversait complĂštement dĂšs quâelle posait son regard sur lui. Alors tant pis, Lise attendrait le temps quâil faudrait, mais elle refusait de devoir oublier. Tout comme elle refusait de se laisser aller lĂ , tout de suite. Aaron la frĂŽlait du bout des doigts, et ce contact dĂ©licieux sur sa peau Ă©tait Ă lâorigine de frissons incontrĂŽlables et des battements effrĂ©nĂ©s de son cĆur. Lise avait perdu tout contrĂŽle, et pour la premiĂšre fois de sa vie, elle se surprenait Ă se dĂ©lecter de la chose. Le souffle chaud dâAaron contre sa peau ne rendait ses lĂšvres que plus dĂ©sirables, et elle aurait maudit ce fichu destin qui avait poussĂ© son grand pĂšre Ă rentrer trop tĂŽtâŠEt Ă les surprendre dans la cuisine. Amaury Delierre Ă©tait en prĂ©sence de son assistant, un jeune homme dâune trentaine dâannĂ©es, qui demeura bouche bĂ©e devant la tenue de Lise et son peu dâenvie de se cacher. AprĂšs tout, elle avait Ă©tĂ© mannequin ! Oh, dĂ©solĂ© mademoiselle Hawkins ! » Bah dis donc, monsieur lâempotĂ© ! On ne dĂ©range pas deux tourtereaux en pleine roucoulade ! Faut tout leur apprendre aux jeunes, de nos joursâŠEnfin, jâespĂšre que le jeune monsieur Cooper nâespĂšre pas faire impression et me demander ma bĂ©nĂ©diction dans cette tenue ! » Grand pĂšre ! » Je plaisante Lise, je plaisante, voyons. Allez vous habiller, les tourtereaux, je prĂ©pare le salon en attendant. »LâĂ©change avait Ă©tĂ© bref mais intenseâŠCela dit, Lise attrapa rapidement la main dâAaron pour le reconduire jusquâĂ son petit coin personnel, avant dâĂ©clater complĂštement de rire. Dans le fond, le cĆur nây Ă©tait pas car elle se doutait bien quâun moment unique venait dâĂȘtre brisĂ©, mais elle avait besoin de relativiser et de dĂ©tendre lâatmosphĂšre. Sans cette manie quâelle avait de rire de tout en prĂ©sence dâAaron, elle aurait volontiers explosĂ© de colĂšre. Dire quâelle avait manquĂ© de goĂ»ter Ă la dĂ©licieuse tentation prĂ©sentĂ©e par les lĂšvres du jeune homme ! Mais elle aurait du se douter que rien ne serait simple en sa prĂ©sence. Tous les deux semblaient si complĂštement novices en matiĂšre de sentiments que sâils Ă©taient touchants Ă souhait, ils demeuraient dâune maladresse lĂ©gendaire. Lise finit donc par lĂącher dĂ©licatement la main dâAaron pour sâasseoir sur le lit, constatant quâelle Ă©tait toujours en sous vĂȘtements et quâelle nâen Ă©tait pas gĂȘnĂ©e le moins du monde. Elle aimait sentir le regard dâAaron sur elleâŠCâĂ©tait de bonne guerre, aprĂšs tout, non ? Je ne pensais pas quâil arriverait si tĂŽt ! JâespĂšre que je ne tâai pas fais honte en Ă©tant si peu habillĂ©e devant lâassistant de mon grand pĂšreâŠEnfin. On va sâhabiller et aller le rejoindre. »Lise aurait pu cacher son ultime dĂ©ception, mais elle nâavait pas envie dâĂȘtre fausse en prĂ©sence dâAaron, bien au contraire. Si seulement il savait la fĂ©rocitĂ© de ses sentiments, si seulement il comprenait Ă quel point demeurer Ă un mĂštre de lui constituait en soi une torture abominableâŠIl fallait quâil sache. Lise se releva donc du lit, se dirigeant doucement vers lui dâun pas fĂ©lin, sans le quitter des yeux une seconde. Non, elle ne jouerait pas avec ses nerfs, câĂ©tait plutĂŽt avec son cĆur quâelle jouait, Ă croire quâelle souhaitait quâil arrĂȘte de battre dâun instant Ă lâautre. Mais elle se hasarda Ă se rapprocher et Ă caresser Ă nouveau la joue du jeune homme, avec la mĂȘme douceur dont elle avait fait preuve dans la salle de bain. Son regard Ă©tait brillant sous lâĂ©motion, et elle brĂ»lait littĂ©ralement dâenvie de tout lui dire, bien que les mots refusent de dĂ©passer ses lĂšvres. Il nâavait pas idĂ©e de la torture quâil reprĂ©sentait pour elleâŠNi Ă quel il Ă©tait vital quâil demeure auprĂšs dâelle. Leurs lĂšvres Ă©taient Ă la mĂȘme distance que tout Ă lâheure, et Lise ne savait pas ce qui la retenait dâen prendre dĂ©finitivement possession, en un baiser qui lui ferait certainement comprendre Ă quel point ses sentiments Ă©taient une rĂ©alitĂ©. Elle se mit donc Ă caresser sa nuque, se rapprochant encore, et quand ses lĂšvres frĂŽlĂšrent une demi-seconde celles dâAaron, elle recula doucement. NonâŠIl ne fallait pas le brusquer, elle nâavait pas le droit dâĂȘtre aussi Ă©goĂŻste. Excuse-moiâŠJe crois que jâai juste peur de te voir disparaĂźtre dans la seconde. Je ne veux pas que tu mâouvres ton cĆur si cela induit de devoir tout oublier ensuite. Jâendurerais lâattenteâŠTant pis pour le supplice que cela reprĂ©sente, tant que tu restes avec moi. AaronâŠNe mâabandonne pas. »CâĂ©tait comme un appel au secours, un ultime appel que Lise lançait Ă lâĂ©gard dâAaron pour quâil prenne conscience du fait quâelle Ă©tait aussi bouleversĂ©e que lui. Lâespace de quelques instants, elle le serra donc contre elle, se retenant de ne pas lui rĂ©pĂ©ter ces deux petits mots qui lui brĂ»laient les lĂšvres je tâaime ». Il ne fallait pas quâil ait la moindre pression sur les Ă©paules. Elle finit donc par sâĂ©carter doucement, prenant la robe quâelle avait prĂ©vue pour ce soir sur le lit, invitant Aaron Ă sâhabiller Ă©galement. Elle partit sâenfermer dans la salle de bain, et ce moment de solitude lui permis de remettre un peu dâordre dans son esprit. Elle changea de sous-vĂȘtements, se sĂ©cha complĂštement, sâhabilla et coiffa ses cheveux afin que sa coupe illumine son visage plutĂŽt que de lâencombrer. Ainsi, quand elle sortit de la salle de bain, elle Ă©tait sublime, rayonnante mĂȘme, malgrĂ© le fait que son cĆur soit diablement serrĂ© Ă lui faire mal. DĂ©couvrir un Aaron aussi fringant en smoking la fit sourire dâailleurs, tandis quâelle sâĂ©tait avancĂ©e pour lui nouer sa cravate, chose quâil nâavait pas encore faite. A croire que tout Ă©tait prĂ©texte Ă ce quâelle le toucheâŠEt prenne soin de lui. Je me disais quâon pourrait peut-ĂȘtre faire le circuit pro donc tu mâas parlĂ©âŠEnsemble. Tu serais au volant, et je serais ton copilote. Pourquoi pas ? Il y a un circuit Ă un kilomĂštre, et il est trĂšs bien parait-il. Ce serait une expĂ©rience uniqueâŠUne façon de nous surpasser ensemble, tu ne crois pas ? RĂ©flĂ©chis-y, et si tu dis oui, on dĂ©crochera la lune et les Ă©toiles avec. Mais ensemble. »Oui, il fallait le laisser rĂ©flĂ©chir, et ainsi changer de sujet par rapport Ă ce qui sâĂ©tait passĂ© entre eux un peu plus tĂŽt. Lise finit de nouer la cravate blanche dâAaron avant de saisir sa main et de lâemmener jusquâau salon, oĂč son grand pĂšre les attendait avec trois cocktails dâun rouge vif, ornĂ©s dâune petite cerise, lĂ©gĂšrement alcoolisĂ©s. Amaury sâĂ©tait aussitĂŽt avancĂ© pour serrer chaleureusement la main dâAaron en les apercevant, avec le mĂȘme sourire franc que pouvait avoir Lise avec lui. Il semblait ravi que sa petite fille se soit enfin dĂ©cidĂ©e Ă lui prĂ©senter un garçonâŠA croire quâil prenait son rĂŽle de pĂšre par procuration » vraiment trĂšs au sĂ©rieux, Ă en devenir vieux jeu dâun certain cĂŽtĂ©. Ăvidemment, Lise sâĂ©tait empressĂ©e dâaller lui faire une grosse bise sur la joue, avant dâajouter, la voix enjouĂ©e Bonsoir, grand pĂšre ! Alors, ce rendez-vous ? Spencer a Ă©tĂ© Ă la hauteur de tes attentes, jâimagine ! » Absolument. Câest un homme qui a de la trempe, il en veut. Câest un plaisir que dâĂ©changer avec lui. Tu es ravissante, ma chĂ©rie. Je ne comprends pas que ton pĂšre puisse dire que tu es transparenteâŠQuel crĂ©tin. Je vous souhaite la bienvenue dans mon humble demeure, Aaron. Cela me fait penser que je connais un autre Cooper, mĂ©decin de mĂ©tierâŠUne tĂȘte de con, mais remarquable mĂ©decin. Son prĂ©nom mâĂ©chappeâŠAh jây suis ! Matthew. Sans doute aucun lien entre vous, mais câest un nom connu dans notre mĂ©tier. Dâailleurs, Spencer mâa fait une description Ă©logieuse de vous. Selon lui, vous ĂȘtes un Ă©tudiant capable, brillant mĂȘme, mais vos doutes pĂšsent bien trop dans la balance. Vivez votre vie, jeune homme, ne vous prĂ©occupez pas de ce que les vieux croĂ»tons peuvent raconter. Si toutefois votre vocation reste dans la mĂ©decine, ma porte vous sera ouverte, soyez-en sĂ»r. »Amaury Delierre nâĂ©tait pas du genre Ă faire ce genre de proposition dans le vent. Si Aaron avait un jour besoin dâaide, alors sa porte serait effectivement ouverte, que ce soit pour une question dâĂ©tude ou pour tout Ă fait autre chose. Dâautant plus si Lise tenait Ă lui, il comptait bien jouer son rĂŽle adorĂ© de papy gĂąteau complĂštement gaga de la chair de sa chair. Il tendit donc un cocktail Ă Lise puis Ă Aaron avant de trinquer avec eux. La demoiselle but une premiĂšre gorgĂ©e avant de sourire. CâĂ©tait bonâŠcela lui embrumerait presque lâesprit, si toutefois elle Ă©tait prĂȘte Ă en boire des litresâŠMais il fallait quâelle garde lâesprit clair. Grand pĂšre, je ne tâai pas encore remerciĂ© pour avoir fait ce que tu as fais. Tu dois te dire quâen plus dâĂȘtre une gamine, je nâai mĂȘme pas la reconnaissance du ventre. Mais tu sais, ta prĂ©sence est extrĂȘmement prĂ©cieuse Ă mes yeux. » Balivernes, Lise. Je mâinquiĂ©tais pour toi et ta santĂ©. Le mannequina a manquĂ© de te tuer, je te rappelleâŠEt ce nâest pas James Hawkins qui prendrait soin de toi. Jâai fais ce que ta grand-mĂšre aurait fait si elle Ă©tait encore vivante. CâĂ©tait un sacrĂ© bout de femme, ta grand-mĂšre ! Capable de soulever des montagnes, surtout si on ne le lui avait pas demandĂ©. A croire que tu as pris une partie de chaque femme de cette famille, Ă commencer par ta mĂšre. Mais dites-moi Aaron, vous vouliez ma bĂ©nĂ©diction, nâest-ce pas ? Lise est une demoiselle hors pair, et je ne la cĂšderais pas pour tout lâor du monde jeune homme. »Changer de sujet pour ne surtout pas accabler Lise. Amaury Ă©tait dâun tact absolu pour un homme, et bien quâil soit jeune pour ĂȘtre grand pĂšre, il nâaurait laissĂ© sa place pour rien au monde. Du haut de ses soixante cinq ans, lâexpĂ©rience parlait allĂšgrement pour luiâŠMĂȘme si Lise ne pu sâempĂȘcher de rĂ©pliquer aussitĂŽt, gĂȘnĂ©e Aaron, te laisse pas impressionner surtout, avec grand pĂšre, il faut toujours prendre du recul parce quâil est difficile de savoir quand il est sĂ©rieux et quand il plaisante⊠» DĂ©tendez-vous, jeune homme ! Lise est assez grande pour savoir ce quâelle fait. Du reste, câest la premiĂšre fois quâelle me prĂ©sente un damoiseau. Je commençais mĂȘme Ă me dĂ©sespĂ©rerâŠSam est fiancĂ©, mais Lise est une jeune fille mystĂ©rieuse, Ă qui jamais personne Ă part moi ne lui a clairement fait comprendre quâelle Ă©tait importante. » Balivernes Papy ! Câest pas bien grave. On sâhabitue Ă tout, surtout Ă la solitude. »Il est vrai que son grand pĂšre Ă©tait le seul Ă lui avoir dit je tâaime » en ces termes. Sam avait toujours Ă©tĂ© discret, se contentant de la cĂąliner plus que de raisons, quant Ă William, il distribuait des bisous jusquâĂ plus soif, faisait des sous entendus, mais nâĂ©tait jamais totalement franc non plus. A croire que Lise pouvait faire peurâŠQuant Ă son pĂšre, Ă©tant donnĂ© quâil la dĂ©testait, elle avait du mal Ă lâimaginer en train de lui dire quâil tenait Ă elle. Sa mĂšre nâen avait pas eu le tempsâŠEt elle ne voulait pas quâAaron se sente obligĂ© de faire quoi que ce soit, aussi, elle avait rapidement coupĂ© court. Amaury sâavança pour embrasser son front, avant dâinviter ces deux jeunes gens Ă passer Ă table. Au menu Merlot blanc pour la boisson, crabe dĂ©cortiquĂ© avec une purĂ©e maison. La bonne franquetteâŠLise Ă©tait toujours amusĂ©e de voir Ă quel point son grand pĂšre gardait les traditions françaises pour lui. Tout en s'asseyant, souriante comme jamais, Lise ne pu s'empĂȘcher de contempler Aaron, l'espace de quelques secondes, avant de lui faire lĂ©gĂšrement du pied. Elle cessa rapidement, avant de lui faire un clin d'Ćil discret, juste pour le titiller. La bonne franquette, hein ? Câa lâair dĂ©licieux ! » InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Jeu 8 Juil - 1834 Certes lâinstant magique venait dâĂȘtre lamentablement brisĂ© mais en plus de ça, Aaron se sentait particuliĂšrement mal Ă lâaise aux vues de la situation. Il faut dire que dĂ©jĂ Ă la base, il Ă©prouvait une certaine apprĂ©hension Ă lâidĂ©e de rencontrer le grand-pĂšre de Lise, mais quoi de plus normal ? Outre le fait quâAaron admirait cet homme pour ses qualitĂ©s de mĂ©decin et ses nombreux travaux recherche tout simplement fascinants, il devait dĂ©sormais lui prouver quâil Ă©tait digne de frĂ©quenter sa petite fille et quâil nâavait pas lâintention de se comporter comme un crĂ©tin Ă son Ă©gard. Ses sentiments Ă©taient nobles, sincĂšres et dâune remarquable intensitĂ©. Aaron ne souhaitait donc quâune seule chose donner une bonne image de lui-mĂȘme et prouver quâil Ă©tait digne de confiance. Toutefois, on a dĂ©jĂ vu mieux comme entrĂ©e en matiĂšre et Aaron se sentit particuliĂšrement confus, voir carrĂ©ment mortifiĂ© au moment oĂč le cĂ©lĂšbre Amaury Delierre fit son apparition. Physiquement, il Ă©tait bien diffĂ©rent de lâimage quâAaron sâĂ©tait faite de lui⊠il lâimaginait plus strict peut-ĂȘtre ⊠et lĂ©gĂšrement plus ĂągĂ© Ă©galement. Quoi quâil en soit, câĂ©tait Ă la fois un honneur et un rĂ©el plaisir pour Aaron de faire sa connaissance. Fort heureusement, Lise le tira bien vite de cette situation embarrassante en lui prenant la main et en lâentraĂźnant jusque chez elle, le temps de se rhabiller. Le jeune homme se mit Ă sourire avec ironie, il faut dire quâil avait imaginĂ© que cette soirĂ©e se dĂ©roulerait autrement, quâil aurait Ă la fois le temps de dĂ©clarer ses sentiments Ă Lise sans nulle crainte et de rencontrer son grand-pĂšre dans de bien meilleures conditions. Toutefois, lâhomme semblait dotĂ© dâun certain sens de lâhumour et visiblement, ne se formalisait pas pour si peu. Honte ? Tu plaisantes, je nâaurais jamais honte de toi. En revanche, le petit gringalet ne semblait pas vraiment Ă son aise. Il faut dire que tu es⊠divinement belle⊠yâa largement de quoi se sentir troublĂ© en ta prĂ©sence. Câest lâassistant de ton grand-pĂšre, je me trompe ? »Toutefois, Lise sembla faire fi de sa question et se rapprocha dangereusement, instaurant de nouveau cette proximitĂ© particuliĂšrement troublante entre eux. Une fois nâest pas coutume, Aaron sentit son pouls sâaffoler et ses sens sâembraser. Leurs lĂšvres nâĂ©taient plus quâĂ quelques millimĂštres, comme une douce provocation sauf que cette fois-ci, Aaron prĂ©fĂ©rait la laisser mener le jeu. Il savait quâelle nâhĂ©siterait pas Ă lâembrasser si lâenvie se faisait trop intense et dâailleurs, il cru durant un instant quâils allaient sauter le pas puisque les lĂšvres de la jeune femme frĂŽlĂšrent les siennes, lui donnant un avant goĂ»t du paradis. Les secondes semblaient passer au ralenti et les paupiĂšres closes, Aaron nâattendait quâun petit signe de sa part pour passer Ă lâaction⊠Oh frustration intense ! Voila que maintenant Lise se reculait, prĂ©textant ne pas vouloir le brusquer par peur quâil ne lâabandonne. Cela ne faisait pas partie de ses intentions et Ă dire vrai, câĂ©tait plutĂŽt lui qui avait peur dâaller un peu trop vite en besogne. Aaron ne tarda pas Ă retrouver ses esprits et attira Lise tout contre lui afin de la cĂąliner tendrement. Elle nâavait aucune raison dâavoir peur, il nâavait pas lâintention de partir ou de lâabandonner, il tenait beaucoup trop Ă elle pour ça. Peut-ĂȘtre que dans le fond, il ne fallait pas trop espĂ©rer pour lâinstant, leurs sentiments nâen Ă©taient quâĂ leurs balbutiements et il nâĂ©tait pas utile de brusquer les choses. Durant un long moment, il garda la jeune femme dans ses bras, la serrant tendrement et dĂ©posant de temps Ă autre un baiser sur son front ou sur le sommet de son crĂąne. Il ne voulait pas quâelle ait le moindre doute concernant ses sentiments, aussi, Aaron tenait Ă faire preuve de patience. Je nâai pas lâintention de tâabandonner⊠chaque seconde de ma vie est dĂ©sormais intimement liĂ©e Ă la tienne. Comment veux-tu que je tâĂ©chappe dans de telles conditions ? Si je veux que tu oublies tout, câest probablement parce que mes propres sentiments parviennent Ă me surprendre⊠câest tellement intense⊠tellement inhabituel. Mais tu nâas pas Ă avoir peur Lizzie⊠je serai toujours lĂ , quoi quâil arrive. Aie confiance⊠»Un nouveau baiser sur sa joue et Aaron la laissa sâĂ©loigner en direction de la salle de bain pendant quâil enfilait le fameux smoking prĂ©vu spĂ©cialement pour lui. Quelques minutes plus tard, Lise Ă©tait de retour, plus belle que jamais. Aaron le contempla durant quelques secondes, lâair totalement admiratif et visiblement sous le charme de cette divine apparition. Dâailleurs lorsquâil reprit la parole, il manqua de justesse de passer pour un idiot en se mettant Ă bafouiller. Tu es dâune beautĂ© Ă couper le souffle. »Et comme un parfait petit couple, Aaron laissa la jeune femme venir nouer sa cravate tout en Ă©coutant sa proposition fort allĂ©chante. Cette idĂ©e de circuit Ă©tait vraiment fabuleuse et il faut bien le reconnaĂźtre, avait de quoi laisser rĂȘveur nâimporte quel passionnĂ© de courses automobiles. Dans lâimmĂ©diat, ce nâĂ©tait pas tellement ça qui le rendait si souriant, mais plutĂŽt le fait que Lise lui propose de faire ça Ă deux⊠ensemble. Chaque instant passĂ© Ă tes cĂŽtĂ©s est une expĂ©rience unique Ă mes yeux. Mais je trouve ta proposition vraiment tentante, nous avons une passion commune alors autant en profiter. Cela dit et mĂȘme si cela me fait mal de lâadmettre, tu es bien meilleure que moi quand il sâagit de piloter un de ces engins⊠jâespĂšre avoir droit Ă un entraĂźnement spĂ©cial avant le jour J⊠»Aaron lui lança un petit clin dâĆil amusĂ© et charmeur Ă la fois avant de sâobserver dans le miroir, ravi dâĂȘtre nettement plus prĂ©sentable quâĂ lâarrivĂ©e du grand pĂšre de Lise. Dâailleurs, ils ne tardĂšrent pas Ă rejoindre le cĂ©lĂšbre mĂ©decin dans le salon et Aaron lui serra la main chaleureusement, ne manquant pas de prĂ©ciser quâil Ă©tait ravi de faire sa connaissance. Il faut dire quâil Ă©tait un vrai modĂšle pour la plupart des Ă©tudiants en mĂ©decine qui Ă©tait sous la coupe de Spencer. Ce dernier ne cessait de parler dâAmaury Delierre, y faisant rĂ©fĂ©rence Ă chacun de ses cours et leur conseillant vivement dâaller jeter un Ćil Ă tel ou tel article rĂ©digĂ© par le maĂźtre. Le mĂ©decin ne tarda pas Ă Ă©voquer son rendez vous avec Spencer avant de faire remarquer quâil connaissait un autre Cooper⊠un certain Matthew, Ă©minent chirurgien. MĂȘme sâil tĂąchait de rien laisser paraĂźtre, Aaron se sentit soudainement crispĂ©. Le fait que Matthew soit traitĂ© de con ne sembla pas vraiment le surprendre puisquâil Ă©tait Ă©galement de cet avis⊠et encore, ce nâĂ©tait pas exactement le mot quâil aurait employĂ© pour dĂ©signer cette pourriture qui avait rĂ©ussi Ă sâen sortir grĂące Ă dâexcellents avocats. Aaron ne lâavait pas revu depuis des annĂ©es mais sa rancĆur Ă©tait telle quâil espĂ©rait que cela se produise un jour afin quâil puisse prendre sa revanche. Naturellement, Amaury Delierre nâinsista pas et Ă©voqua de nouveau Spencer qui visiblement, nâavait pas manquĂ© de parler de lui. Quand il entendit la proposition du mĂ©decin, Aaron dĂ©via le regard un court instant en direction de Lise avant de reporter son attention vers Amaury dont les paroles ne le laissaient pas indiffĂ©rent. Ce serait un immense honneur monsieur, je vous remercie. Je dois admettre que câest assez dĂ©routant pour moi de me trouver face Ă lâun des plus grands neurochirurgiens dâEurope. Vous savez, Spencer ne manque jamais une occasion de venter vos exploits, il nous a tellement parlĂ© de vous que jâai lâimpression de vous connaĂźtre depuis toujours. Enfin, si je puis me permettre. »Il est vrai quâAaron avait entendu du Delierre par ci, Delierre par lĂ durant des mois et des semaines jusquâau jour oĂč il avait eu la curiositĂ© de faire quelques recherches et il sâĂ©tait tout bonnement fascinĂ© pour les travaux du mĂ©decin. La neurochirurgie nâĂ©tait pourtant pas ce qui lâintĂ©ressait le plus mais il se devait dâadmettre que les Ă©crits du grand pĂšre de Lise Ă©taient passionnants. Le jeune homme ne tarda pas Ă boire une gorgĂ©e tout en assistant Ă lâĂ©change entre Lise et son grand pĂšre. Comme quoi, sa famille nâĂ©tait pas si terrible que ça, bien au contraire. Aaron aurait vraiment payĂ© cher pour avoir un grand pĂšre avec qui il aurait une telle complicitĂ© !! Lâhomme Ă©tait vraiment bourrĂ© dâhumour et il le prouva une nouvelle fois en demandant Ă Aaron sâil attendait sa bĂ©nĂ©diction, auquel cas il ne fallait pas trop y compter. Et sachez que je vous comprends parfaitement monsieur. Lise est de loin la jeune femme la plus extraordinaire quâil mâait Ă©tĂ© donnĂ© de rencontrer. Elle me surprend de jour en jour. »Aaron ne pu rĂ©primer un nouveau sourire avant de voir Lise, passablement gĂȘnĂ©e intervenir afin de lui demander de ne pas se laisser impressionner. Ce nâĂ©tait pas vraiment le cas, en fait Aaron Ă©tait plutĂŽt amusĂ© par la situation et avait dĂ©jĂ oubliĂ© lâincident dans la cuisine tant Amaury avait lâart et la maniĂšre de mettre ses convives Ă lâaise. Tandis quâils se dirigeaient vers la table, merveilleusement bien dressĂ©e pour lâoccasion, Aaron se rapprocha de Lise avant de parler Ă mi-voix, pour la taquiner et lui faire comprendre quâun Ă©lĂ©ment important ne lui avait pas Ă©chappĂ©. Le premier,hum ? Dois-je comprendre que vous mâaccordez une place spĂ©ciale mademoiselle Hawkins ? »Câest fou ce quâil avait envie de lâembrasser !! Il nâavait encore jamais Ă©prouvĂ© tant de dĂ©sir. Le sourire dâAaron sâaccentua davantage avant quâil ne prenne place Ă table et quâil sente le pied de la jeune femme. Il lui jeta un lĂ©ger coup dâĆil complice avant de rĂ©pondre Ă ses propos en nâoubliant pas dây ajouter un lĂ©ger sous entendu⊠DĂ©licieux, câest exactement le terme que jâaurais employé⊠»Il esquissa un nouveau sourire, charmeur et typiquement digne de lui avant de se concentrer de nouveau sur le grand pĂšre de Lise, car en toute sincĂ©ritĂ©, il avait envie dâen apprendre davantage sur cet homme fabuleux. Jâai cru comprendre que vous allier venir donner quelques confĂ©rences Ă lâUniversitĂ© ? Jâimagine que Spencer a eu du mal Ă rĂ©aliser que ce nâĂ©tait pas une plaisanterie. Il a lâair de beaucoup vous apprĂ©cier et je comprends mieux pourquoi dĂ©sormais. A tort, jâai toujours eu une image⊠pĂ©jorative des mĂ©decins⊠sans doute parce que je nâen garde pas un trĂšs bon souvenir⊠Spencer a su me faire changer dâavis, câest un homme remarquable et au-delĂ de lâhomme de science se cache Ă la fois un Ă©minent pĂ©dagogue et une gĂ©nĂ©rositĂ© absolue. Vous comptez rester Ă San Francisco dĂ©sormais ?»Tandis qu'il parlait, sa main Ă©tait allĂ©e chercher celle de Lise en tout discrĂ©tion. A croire qu'il ne pouvait pas se passer de ce contact charnel. Il la caressa du bout des doigts avant d'entrelacer leurs mains et de la serrer doucement, par peur qu'elle ne lui Ă©chappe... InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Jeu 8 Juil - 1916 Amaury semblait visiblement intĂ©ressĂ© par lâintermĂšde donnĂ© par ce charmant petit couple. A croire quâil avait lâimpression de retrouver Spencer dans la peau dâAaron, la premiĂšre fois quâAnne le lui avait prĂ©sentĂ©. Sans doute la situation nâĂ©tait-elle pas si diffĂ©rente que cela, en fin de compte. Lise ressemblait Ă©normĂ©ment Ă sa mĂšre, et quelque part, Aaron avait certains cĂŽtĂ©s en commun avec Spencer, bien quâils fussent trĂšs diffĂ©rents fondamentalement. Et Lise, de son cĂŽtĂ©, ne pouvait sâempĂȘcher de boire les paroles de son grand pĂšre, qui savait toujours capturer lâattention de son interlocuteur avec un brio qui nâĂ©tait digne que de lui. Il nâexistait pas un Ă©tudiant inattentif Ă ses dires en ce monde, car il savait remarquer facilement les traits de caractĂšre des uns et des autres. CâĂ©tait un homme observateur, ouvert dâesprit qui nâhĂ©sitait pas Ă se mettre Ă la hauteur de la personne avec qui il Ă©changeait. Certes, il nâĂ©tait pas un homme parfait, et bien souvent il avait déçu sa formidable Ă©pouse, mais il Ă©tait ravi de pouvoir clamer quâil avait fait un mariage dâamour. Sa famille Ă©tant remarquablement riche et connue, il aurait trĂšs bien pu Ă©pouser une riche hĂ©ritiĂšre afin de maintenir le quand dira-t-on. Mais il avait choisi pour ainsi dire une roturiĂšreâŠMarie, sa femme, avait bouleversĂ© tous ses sens Ă lâinstant mĂȘme oĂč elle lâavait invitĂ© Ă danser Ă ce bal oĂč il ne voulait pourtant pas se montrer. Lise avait entendu cette histoire des dizaines et des dizaines de fois, peut-ĂȘtre mĂȘme encore plus depuis que sa grand-mĂšre avait quittĂ© cette terre. Et parfois, elle se demandait comment il pouvait supporter sa solitudeâŠSans doute parce quâil Ă©tait entourĂ© de sa fille HĂ©lĂšne, qui vivait dans la mĂȘme demeure que lui Ă Paris, avec son fils Adam, le cousin de Lizzie. Mais Amaury avait sans doute peur dâĂȘtre distrait des souvenirs quâil conservait de sa dĂ©funte Ă©pouse, et câĂ©tait pour cela quâil ne souhaitait aucune autre compagnie fĂ©minine de son Ăąge. Il se contentait dâaider la jeunesse Ă avancer, et trouvait en Lise un nouveau chemin de croix qui donnerait un sens Ă sa vie. CâĂ©tait bien cela, lâultime quĂȘte de tout ĂȘtre humainâŠTrouver un sens Ă sa vie. Par le biais dâautres personnes, de passions ou vocations. Amaury Delierre en Ă©tait lâexacte dĂ©monstration. Jeune homme, les mĂ©decins sont avant tous des ĂȘtres humainsâŠFaibles, faillibles, emplis de dĂ©fauts ! Mais il existe des exceptions, comme Spencer notamment. Cet homme a ce que lâon appelle le feu sacrĂ©, se montrant capable de passionner une foule dâĂ©tudiants sur des sujets ne prĂȘtant pas Ă rire, bien au contraire. Je me souviendrais toujours le jour oĂč la mĂšre de Lise me lâavait prĂ©sentĂ©. CâĂ©tait Ă la fin de leur derniĂšre annĂ©e de lycĂ©e, il souhaitait inviter Anne au bal. Il a appris le français, sâest mis sur son trente et un et a demandĂ© un entretien personnel avec moi, Ă mon cabinet. JâĂ©tais Ă©poustouflĂ©. Et bien des annĂ©es aprĂšs, il revient toujours me voir comme un jeune Ă©tudiant en mal de conseils. Câest un peu mon premier disciple, en vĂ©ritĂ©. »Lise nâĂ©tait pas intervenue pour lâinstant, se contentant de manger dâune main, et de serrer celle dâAaron de lâautre. Comme si elle pouvait rompre un quelconque charme entre son grand pĂšre et le jeune homme, elle prĂ©fĂ©rait largement ne pas intervenir. Il Ă©tait toujours temps de garder ses commentaires pour plus tard. Jâai achetĂ© cette maison et je compte bien rester aussi longtemps que je vivrais. San Francisco est une ville fabuleuse, et de toute Ă©vidence, on a besoin de moi iciâŠQue ce soit pour passionner ces petits jeunes en mal de rĂ©ponses, ou ma propre petite fille. Je ne voudrais surtout pas que James puisse tâobliger Ă retourner Ă New York. Il est peut-ĂȘtre lâĂ©minent scientifique Hawkins, mais aussi vrai que je suis français, jâai de la dĂ©fense. Jâai pris mon premier poing dans la figure Ă sept ans, aprĂšs tout ! » Je tâai battu, grand pĂšreâŠPremiĂšre bagarre A cinq ans avec William ! On se dĂ©testait, au dĂ©part. Et au final, des petits on voulu nous volĂ© et on a cognĂ© Ă coups de cartables. Comme quoi, mĂȘme la violence est de famille⊠»Lise nâavait pas commentĂ© le fait que son grand pĂšre veuille la protĂ©ger de son gĂ©niteurâŠElle le savait dĂ©jĂ et ils avaient eu une longue conversation lĂ -dessus. Elle ne savait pas encore que son grand pĂšre adorĂ© comptait rĂ©clamer sa garde aux yeux de la justice, mais tout viendrait en temps et en heure. Pour lâinstant, Amaury constatait quâelle sâĂ©tait trĂšs bien faite Ă cette maison, et quâelle semblait bien plus Ă©quilibrĂ©e quâelle ne lâavait jamais Ă©tĂ©. CâĂ©tait lâimportant, en somme. Je risque de mâabsenter de temps en temps pour des confĂ©rences françaises, mais je ferais en sorte que mon assistant garde un Ćil sur cette maison. Par consĂ©quent, Lise ne sera jamais seule, et quant Ă vous, nâhĂ©sitez pas Ă venir me parler de vos doutes, quels quâils soient. La mĂ©decine est une vocation, et qui mieux quâun vieux croĂ»ton tel que moi pourrait en parler ? Ah, si mon Ă©pouse Ă©tait lĂ elle dirait presque que la mĂ©decine lui a volĂ© son mari ! Mais la mĂ©decine sauve. Câest cela que vous devez garder Ă lâesprit, jeune monsieur Cooper. »Amaury afficha un sourire franc juste avant que le tĂ©lĂ©phone fixe ne sonne. Ăvidemment, Lise sâapprĂȘtait Ă se lever, mais son grand pĂšre la devança en lui disant quâelle pouvait rester assise pour profiter dâAaron. Pour un peu, la demoiselle aurait espĂ©rĂ© que rien ne vienne troubler cette rencontre quâelle trouvait diablement agrĂ©able. Cette ambiance presque bon enfant, elle ne lâavait pas connue si souvent, aprĂšs toutâŠEt tandis quâils se retrouvaient seuls dans la salle Ă manger, Lise bu une gorgĂ©e de vin avant de briser dĂ©licatement le silence en adoptant une voix douce et mystĂ©rieuse Bien sĂ»r que tu as une place spĂ©ciale, Aaron CooperâŠJamais mon grand pĂšre nâaurait Ă©tĂ© aussi accueillant si je ne lui avais pas avouĂ© Ă quel point tu es spĂ©cial Ă mes yeux. Tu ne sais pas quel point tu comptes pour toiâŠEt Ă quel point personne dâautre ne comptera jamais de cette façon dans ma vie. »Lise avait presque cessĂ© de sourire pour lui donner un regard tendre Ă la place. Elle caressa dĂ©licatement sa joue, dĂ©viant vers sa nuque quâelle massa quelques instants, avant que son grand pĂšre ne fasse Ă nouveau son apparition dans la piĂšce. Malheureusement, il sâexcusa auprĂšs du petit couple, mais une urgence mĂ©dicale nĂ©cessitait sa prĂ©sence expresse Ă lâhĂŽpital principal de la ville. Il sâavança donc vers Aaron pour lui serrer Ă nouveau la main, lui promettant quâils finiraient cette charmante soirĂ©e trĂšs bientĂŽt. Il prit ensuite congĂ© en embrassant sa petite fille, les laissant tous seuls pour le restant de la soirĂ©e et probablement de la nuit. Lise aurait presque Ă©tĂ© déçue quâil parte aussi vite, mĂȘme si elle devait bien avouer que la prĂ©sence du jeune homme lui avait toujours suffit. Elle finirait par rĂ©ussir Ă obtenir une soirĂ©e entiĂšre avec son grand pĂšre, rien nâĂ©tait perduâŠMais pour lâheure, elle ne pu sâempĂȘcher de rire. CâĂ©tait cocasse comme les imprĂ©vus sâenchaĂźnaient, dĂšs quâils se trouvaient ensemble. On ne sâennuie jamais dans la familleâŠFaudra tây habituer, je crois que jâai ça dans le sang, câest hĂ©rĂ©ditaire. »Mais Lise ne trouvait pas cela dommage, bien au contraire. Cela lâempĂȘchait dâavoir une vie trop fadeâŠEt par le passĂ©, câĂ©tait sĂ»rement cela qui lâavait empĂȘchĂ©e de se foutre en lâair, dâailleurs. A cette pensĂ©e, la demoiselle ne pu sâempĂȘcher de se lever pour aller se placer sur les genoux dâAaron, plaçant doucement sa tĂȘte au creux de son cou, oĂč elle appuya doucement ses lĂšvres. Elle ne pouvait pas supporter lâabsence de contact entre eux, câĂ©tait impossible. Et se bercer grĂące aux battements de son cĆur Ă©tait Ă la fois reposant et synonyme de paix totale pour elle. Il nâavait pas idĂ©e Ă quel point sa prĂ©sence Ă©tait apaisante pour elle. Pour en revenir Ă ce que tu disais tout Ă lâheureâŠJe ne veux pas oublier, ni mĂȘme me faire sourde. Alors ne dis rien si tu nâen ressens pas lâenvie. Reste juste avec moi, cela me suffit. Je nâai rien besoin dâautre. »CâĂ©tait la pure vĂ©ritĂ©. La preuve en Ă©tait, Lise fermait dĂ©jĂ les yeux, confortablement installĂ© tout contre Aaron. Cela Ă©tant, la position nâĂ©tait pas vraiment confortable. Elle ne pu donc sâempĂȘcher de se relever et de reprendre ses mains pour lâemmener une fois encore dans son petit environnement personnel. Elle referma la porte fenĂȘtre derriĂšre eux, et alluma une seule lampe de chevet pour crĂ©er une petite lumiĂšre tamisĂ©e. A partir de ce moment lĂ , elle ne pu sâempĂȘcher dâenlever la veste de costume des Ă©paules dâAaron, ainsi que sa cravate, pour finir par dĂ©boutonner deux boutons de sa chemise. Juste pour quâil nâait pas lâimpression dâĂ©touffer. Quant Ă elle, elle venait dâĂŽter ses chaussures avant de plonger ses beaux yeux dans lâocĂ©an de ceux dâAaron. Ce contact visuel Ă©tait si troublant quâelle poussa lĂ©gĂšrement le jeune homme en exerçant une pression dâune seule main sur son torse, avant de le faire sâallonger sur son lit et de se placer sur lui, continuant de lâobserver sans esquisser de sourire. Elle caressa doucement sa joue, se torturant elle-mĂȘme en hĂ©sitant ainsi Ă prendre enfin possession de ses lĂšvres. Lise ne pouvait pas sâempĂȘcher dâavoir peurâŠPeur quâil ne sâĂ©chappe si jamais elle brusquait la situation qui Ă©tait par ailleurs purement extraordinaire. Elle se contenta donc de dĂ©poser un baiser juste Ă la limite de ses lĂšvres avant de prendre place Ă cĂŽtĂ© de lui, tournant son visage dĂ©licatement pour quâils puissent sâobserver en chien de faĂŻence. Il nây avait pas besoin de parolesâŠOu alors juste les essentielles. Je tâaime⊠»Lise avait murmurĂ© cette ultime dĂ©claration pour quâAaron soit le seul Ă lâentendre. Elle sâĂ©tait ensuite rapprochĂ©e et blottie dans ses bras, fermant les yeux tout en sâenivrant complĂštement de son odeur. Elle aurait pu rester un siĂšcle ainsi, en vĂ©ritĂ©, ça ne lâaurait pas dĂ©rangĂ©e. Elle aurait mĂȘme pu mourir tout de suite dans ses bras, elle serait partie en paix dâavoir pu aimer autant une personne une fois dans sa vie. Et sur ces belles pensĂ©es, la demoiselle sâendormit. Pour la premiĂšre fois depuis ses douze ans, elle avait rĂ©ussi Ă trouver le sommeil avec une facilitĂ© dĂ©concertante. Mais Ă peine sa respiration Ă©tait-elle devenue plus calme, plus lente que son corps se mettait dĂ©jĂ Ă trembler violemment. Elle se crispait presque sur elle-mĂȘme, comme si elle ressemblait une souffrance quelconque. Au final, elle poussa un cri mĂȘlĂ© Ă un grognement, avec une virulence qui Ă©tait on ne peut plus dĂ©routante. NOOOOOOOOOOOOOOOOOOOON !!! Du SANG ! ARRĂTEZ ! »Lise sâĂ©tait levĂ©e brusquement, en sueur, toute tremblante quâelle Ă©tait aprĂšs ce cauchemar habituel. Le meurtre de sa mĂšreâŠToute sa vie, elle serait sĂ»rement pourchassĂ©e, au point de ne plus savoir oĂč elle se trouvait, alors quâelle Ă©tait simplement assise sur son lit, les larmes au bord des yeux. InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Lun 12 Juil - 313 Aaron qui redoutait tant cette premiĂšre rencontre familiale fut particuliĂšrement surpris de constater qu' en plus d'ĂȘtre l'un si ce n'est LE! des plus grands mĂ©decins de son temps, Amaury Ă©tait un homme avec des valeurs simples, d'une grande gentillesse et dĂŽtĂ© d'un sens de l'humour hors du commun. En somme, il Ă©tait l'homme qu'Aaron aurait aimĂ© avoir pour modĂšle et d'un sens, on peut mĂȘme dire que quelque part, il enviait Lise d'avoir un grand-pĂšre comme lui. Famille Ă©tait un mot que le jeune homme ne connaissait pas et pour une premiĂšre expĂ©rience, il se devait de reconnaĂźtre que c'Ă©tait plutĂŽt rĂ©ussi. D'ailleurs, Aaron ne pu cacher sa dĂ©ception au moment oĂč Amaury les abandonna Ă cause d'une urgence. Cela dit, c'Ă©tait le lot de chaque mĂ©decin et Aaron se faisait dĂ©jĂ une vague idĂ©e de ce Ă quoi ressemblerait sa vie s'il venait Ă concrĂ©tiser ses rĂȘves. Il savait que ce mĂ©tier demandait de nombreux sacrifices, y compris de renoncer Ă un crabe plus que dĂ©licieux pour se rendre au chevet de ses patients !! Aussi brĂšve que fut cette soirĂ©e, le jeune homme n'Ă©tait donc pas prĂȘt d'oublier cette rencontre incroyable et d'ailleurs, il ne manqua pas de faire savoir au grand-pĂšre de Lise qu'il attendait avec impatience d'avoir l'occasion de parler mĂ©decine en sa compagnie. Il y avait tellement de choses qu'il souhaitait apprendre ! Cet homme Ă©tait un puit intarissable dans son domaine si on s'en tenait aux propos de Spencer. DĂ©sormais, Aaron comprenait mieux pourquoi le professeur s'Ă©tait tellement attachĂ© au neurochirurgien... De retour chez Lise, Aaron se sentit de nouveau faire preuve d'une gaucherie exemplaire. D'ordinaire, il n'hĂ©sitait pas Ă sortir son grand jeu de sĂ©ducteur mais avec Lise, il n'Ă©prouvait pas cette envie. Le jeune homme tenait Ă jouer la carte de la sincĂ©ritĂ©, comme si pour la premiĂšre fois de sa vie, il ne doutait pas quant Ă la suite des Ă©vĂšnements. MĂȘme si ses propres sentiments Ă©taient relativement nouveaux, il ne doutait ni de leur intensitĂ© ni de leur vĂ©racitĂ©. Il voulait que tout soit parfait et jusqu'Ă prĂ©sent, ça l'Ă©tait. Lorsqu'il se retrouva allongĂ© prĂšs de Lise, le jeune homme se sentit soudainement envahi par une onde de bien ĂȘtre, de plaisir et de dĂ©sir. Au cours de cette journĂ©e, Lise venait de lui prouver une fois encore qu'elle Ă©tait une jeune femme extraordinaire et Aaron n'osait mĂȘme pas imaginer le nombre de prĂ©tendants qui devaient se prĂ©senter chaque jour devant elle. A propos, si Lloyd avait eu l'occasion de les voir ainsi Ă©tendus sur le lit, il aurait probablement succombĂ© Ă un arrĂȘt cardiaque. Toutefois, les pensĂ©es d'Aaron Ă©taient exclusivement dirigĂ©es vers Lise dont le parfum lĂ©ger et enivrant venait chatouiller ses narines et aiguiser ses sens. DĂ©licatement, il caressa sa peau de velours, dĂ©taillant chacun de ses traits et chaucne de ses courbes afin d'ĂȘtre certain de ne jamais les oublier. Lise Ă©tait d'une beautĂ© incroyable, attirante et sensuelle Ă souhait. Personne ne pouvait dĂ©cemment rester de marbre lorsqu'elle se trouvait dans les parages. Du bout des doigts, il frĂŽla ses lĂšvres dont il rĂȘvait de connaĂźtre le goĂ»t... probablement sucrĂ© et inoubliable. L'embrasser Ă©tait devenu une vĂ©ritable obsession... Il le dĂ©sirait plus violemment que tout ce qu'il avait jamais dĂ©sirĂ© dans sa vie. Lise reprĂ©sentait une vĂ©ritable tentation Ă elle seule et la sentir si prĂšs de lui, si fragile, Ă©tait en soi une vĂ©ritable torture. C'est alors qu'un Ă©clair de plaisir le foudroya, comme si le son de la voix de Lise Ă©tait la plus belle chose qu'il ait entendu de son existence. Son je t'aime », douce mĂ©lodie inattendue raisonnait encore et toujours dans son esprit. Elle venait de prononcer des paroles magiques comme s'il s'agissait de la clĂ© permettant d'accĂ©der au plus profond de son coeur et de son Ăąme. Avait-il rĂ©ellement compris ce qu'elle venait de dire ? Il aurait aimĂ© se pincer pour en ĂȘtre certain mais ce n'Ă©tait pas le moment de rĂ©flĂ©chir, pas maintenant. Aaron sentit une nouvelle onde de bonheur l'envahir au moment oĂč la jeune femme vint se blottir davantage dans ses bras. Cette sensation Ă©tait divine, exquise mĂȘme et il aurait pu rester ainsi jusqu'Ă la fin des temps, ça ne l'aurait pas dĂ©rangĂ© le moins du monde. Que pouvait-il rĂ©pondre Ă cela, lui qui n'Ă©tait pas douĂ© pour exprimer ses sentiments ? Rien. Pourtant, Lise n'aurait aucun mal Ă dĂ©celer le trouble qu'elle venait de crĂ©er en lui et vu leur proximitĂ©, elle avait certaine dĂ©jĂ remarquĂ© les battements effrĂ©nĂ©s du coeur de son futur amant. DĂ©licatement, Aaron caressa son Ă©paule puis son bras, d'un geste tendre et qui se voulait bienveillant et ce, jusqu'Ă ce que Lise s'endorme. De son cĂŽtĂ© et malgrĂ© la fatigue, Aaron n'avait pas envie de fermer les yeux, sans doute par peur que la jeune femme ne s'Ă©vapore soudainement. Sans compter qu'il aurait pu passer des heures entiĂšres Ă la regarder dormir... Aaron avait beau connaĂźtre l'incroyable force de caractĂšre de Lise, il n'en restait pas moins diablement surpris de constater Ă quel point elle paraissait fragile lorsqu'elle Ă©tait dans ses bras. Etait-il nĂ©cessaire d'admettre de vive voix qu'elle Ă©tait dĂ©sormais ce qu'il avait de plus prĂ©cieux au monde? Aaron ne souhaitait qu'une chose Ă prĂ©sent faire son bonheur, l'aimer Ă en perdre l'esprit et pourquoi pas, rĂȘver d'un avenir Ă deux. Leur relation qui finalement, n'en Ă©tait pas encore une, Ă©tait dĂ©jĂ d'une remarquable intensitĂ©. Aaron n'avait jamais ressenti ça de toute sa vie et espĂ©rait du fond du coeur que cette sensation ne s'arrĂȘte jamais. Petit Ă petit, le jeune homme ferma les yeux, se laissant gagner par une plĂ©nitude incroyable... les paupiĂšres closes, il revivait inlassablement les Ă©vĂšnements de la soirĂ©e, songeant Ă toutes les belles paroles de la jeune femme ainsi qu'Ă son troublant je t'aime »... Je t'aime aussi... cette pensĂ©e prĂ©valait sur toutes les autres mais encore, fallait-il qu'il trouve le courage de le lui dire enfin. C'est alors qu'un cri le sortit de ses rĂȘveries, Aaron sentit son pouls s'accĂ©lĂ©rer et le jeune homme ne tarda pas Ă se redresser Ă son tour, posant ses mains sur les Ă©paules de Lise et l'enlaçant tendrement par derriĂšre afin qu'elle retrouve son calme. Lise !! Calme toi mon ange.... c'est rien. Qu'est-ce qui se passe, tu as fait un cauchemar ? Calme toi, ça va aller...respire doucement. »Aaron comprit que c'Ă©tait sĂ©rieux lorsqu'il sentit que la jeune femme tremblait et qu'il constata qu'elle Ă©tait en sueur. De toute Ă©vidence, il s'agissait d'un mauvais rĂȘve mais il fallait qu'il soit sacrĂ©ment rĂ©aliste pour la mettre dans un tel Ă©tat !! Afin qu'elle retrouve son calme, le jeune homme la berça doucement avant de dĂ©poser un baiser sur sa joue et de se rendre compte qu'elle Ă©tait brĂ»lante. AussitĂŽt, il posa sa main sur le front de la jeune femme constatant que Lise Ă©tait fiĂ©vreuse ce qui expliquait naturellement le paradoxe entre sa peau brĂ»lante et le fait qu'elle tremble de froid... ou de peur.... des deux peut-ĂȘtre ? Tu es brĂ»lante de fiĂšvre, tu ne peux pas rester comme ça. Je vais m'occuper de toi... »En attendant, Aaron prit la veste de smoking qui Ă©tait posĂ©e un peu plus loin et la plaça sur les Ă©paules de Lise afin qu'elle n'ait pas froid le temps qu'il s'occupe de sa fiĂšvre. Le jeune homme l'abandonna un court instant, juste le temps d'aller faire un tour dans la salle de bain, Ă la recherche d'une armoire Ă pharmacie et d'un mĂ©dicament appropriĂ©. Au retour, il fit un arrĂȘt par le rĂ©figĂ©rateur afin de lui servir un verre d'eau trĂšs fraĂźche afin d'aider Ă faire tomber la fiĂšvre. Aaron s'installa de nouveau sur le lit et tendit Ă Lise un cachet ainsi que le verre d'eau. Avale ça, tu devrais te sentir beaucoup mieux d'ici une vingtaine de minutes. »Aaron l'incita Ă finir le verre d'eau et le lui reprit des mains pour le poser prĂšs d'eux afin que Lise n'ai pas Ă faire cet effort. Avec dĂ©licatesse, il retira la veste de ses Ă©paules et aida Lise Ă s'allonger sous les couvertures avant de s'y glisser Ă son tour, se collant tout contre elle avant de lui faire partager la chaleur qui Ă©manait de son corps. Pour Aaron, c'Ă©tait mĂȘme une vĂ©ritable fournaise. Sans compter que c'Ă©tait relativement troublant de se trouver une fois de plus aussi proche de la jeune femme. Cette proximitĂ© aidant, il dĂ©posa un baiser sur le bout de son nez avant de remettre ses longs cheveux en arriĂšre d'un geste tendre. AprĂšs un court instant de silence, le jeune homme esquissa un sourire et reprit enfin la parole. Au moins on pourra dire que notre premiĂšre nuit passĂ©e ensemble fut mouvementĂ©e et... brĂ»lante. Ca ne m'Ă©tonne pas que tu dormes si peu finalement. Si toutes tes nuits ressemblent Ă celle-ci... Est-ce que ça va mieux ? Je ne comprends pas, tu Ă©tais pourtant en pleine forme tout Ă l'heure. Tu as peut-ĂȘtre attrapĂ©e quelque chose... en rĂ©alitĂ©, c'est le fait que tu sois fiĂ©vreuse qui m'inquiĂšte. »Mais d'un autre cĂŽtĂ©, c'est aussi ce qui lui permettait de jouer les mĂ©decins bienveillants auprĂšs d'une ravissante patiente, n'est-ce pas ? Cette pensĂ©e lĂ ne lui traversa mĂȘme pas l'esprit en rĂ©alitĂ©, il Ă©tait bien trop prĂ©occupĂ© Ă ce que Lise se sente mieux. Bien entendu, Aaron n'imaginait pas un seul instant qu'il avait vu juste en prĂ©tendant que toutes les nuits de la jeune femme ressemblaient Ă celle-ci. Et ce cauchemar ? Tu souhaites en parler ? Quand j'ai de la fiĂšvre, j'ai plutĂŽt tendance Ă dĂ©lirer moi aussi mais ça, je pense que c'est le lot de chacun. Tu as parlĂ©... de sang me semble-t-il... j'espĂ©rais que ma prĂ©sence t'inspirerait des rĂȘves plus ⊠agrĂ©ables. »Aaron esquissa un nouveau sourire avant de tirer davantage la couverture afin que Lise n'ait pas froid. De toute maniĂšre, le cachet ne tarderait pas Ă faire effet et elle se sentirait rapidement mieux. Sa main caressa la joue de la jeune femme, comme si elle risquait de se briser d'un instant Ă l'autre. InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Lun 12 Juil - 1122 Heureusement que les mains rassurantes dâAaron se posĂšrent aussitĂŽt sur les Ă©paules de Lise, sans quoi, elle serait restĂ©e dans un Ă©tat de nervositĂ© intense pendant un bon moment encore. Elle nâavait jamais voulu lui cacher cela, mais le fait quâelle ne dorme pratiquement jamais Ă©tait le rĂ©sultat de ces cauchemars incessants. Aaron nâavait pas idĂ©e Ă quel point son propre passĂ© pouvait la hanter au point de la tĂ©taniser littĂ©ralement. Et alors quâelle Ă©tait assise sur le lit, elle repensait Ă tout ce quâelle venait de voir dĂ©filer dans son esprit, et qui nâĂ©tait fondamentalement que ses souvenirs vĂ©ritables remontant Ă la surface. Elle y voyait le visage de sa mĂšre devenant de plus en plus figĂ©, le sang sâĂ©clabousser sur elle, encore petite fille, pour finalement contempler le corps froid et sans vie de sa gĂ©nitrice. Parfois, elle entendait Ă©galement ses derniĂšres paroles, et son cauchemar ne se finissait que lorsquâAnne Delierre avait fini de caresser une derniĂšre fois le visage de Lise. Cette fois, la demoiselle nâavait pas supportĂ© la vision de tout ce sangâŠCâĂ©tait une vĂ©ritable hantise pour elle. A chaque fois quâelle voyait la moindre goutte dâhĂ©moglobine, elle Ă©tait au bord de lâĂ©vanouissementâŠComme si ce dĂ©sastreux jour, sâĂ©tant produit peu aprĂšs lâanniversaire de ses douze ans, rythmait sa vie depuis lors. Mais expliquer tout ceci Ă Aaron, qui semblait dĂ©jĂ se faire un sang dâencre Ă cause de sa fiĂšvre, nâĂ©tait pas plus aisĂ© que cela. Lise nâĂ©tait pas prĂȘte Ă se livrer lĂ -dessusâŠCâĂ©tait trop dur, sĂ»rement trop tĂŽt, sans compter quâelle nâavait aucune idĂ©e de la force des sentiments du jeune homme Ă son Ă©gard. Pour lâinstant, sâil sâĂ©tait dĂ©clarĂ©, le je tâaime » restait sous entenduâŠCâĂ©tait idiot de penser ainsi, surtout quâune large part dâelle Ă©tait persuadĂ©e quâil ressentait ses propres sentiments avec la mĂȘme ardeur. Mais câĂ©tait Ă©galement plus fort quâelle, il ne fallait pas quâelle sorte toutes ses cartes trop vite, de peur de le perdre Ă jamais. Sâil connaissait sa situation familiale, le comportement de son pĂšre Ă son Ă©gard, comment pourrait-il dĂ©cemment rĂ©agir ? Lise avait dĂ©jĂ eu lâoccasion de cĂŽtoyer le caractĂšre sanguin dâAaron, et autant dire quâelle redoutait plus que tout quâil ne rencontre lâĂ©minent James HawkinsâŠSon pĂšre Ă©tait le contraire absolu dâAmaury Delierre. Il nâavait rien de sympathique, pas mĂȘme ce charisme dĂ©bordant qui avait fait de lui un homme si puissant. Et, par-dessus le marchĂ©, Lise nâavait rien en commun avec lui. Elle lui ressemblait bien entendu, aussi bien physiquement que mentalement, mais ils nâavaient jamais rien partagĂ© de formidable Ă ce jour, et cela nâallait pas changer maintenant que James rendait Lise responsable de la mort de son Ă©pouse bien aimĂ©e. Lise joua donc la carte de la docilitĂ© pour lâinstant, buvant lâintĂ©gralitĂ© du verre dâeau gentiment proposĂ© par Aaron, avant de se blottir dans ses bras. DĂ©licieuse sensation, qui lui donnait un avant goĂ»t de paradisâŠMais il ne fallait pas quâelle se dĂ©tende trop, au risque de voir la situation prĂ©cĂ©dente se renouveler inlassablement. CâĂ©tait presque horrible dâĂȘtre autant en confiance avec une personneâŠIl aurait pu lui demander nâimporte quoi, sans doute se serait-elle livrĂ©e dans une certaine mesure. Il nâavait pas idĂ©e Ă quel point elle Ă©tait totalement sans dĂ©fense en sa prĂ©sence. CâĂ©tait dĂ©routant, presque effrayant mĂȘme. Ca va, câest rien tâinquiĂštes pas. Mes nuits sont toujours comme ça depuis que jâai douze ans. Si je dors jamais, câest bien pour quelque chose. Tu sais, quand jâai dormi chez toi la derniĂšre fois, jâai rĂ©ussi Ă feindre dâavoir dormi, mais en vĂ©ritĂ©, je nâai pas fermĂ© lâĆil une seconde. Sans doute parce que je voulais pas que tu me voies comme ça, si faible, si laide. Je dĂ©teste me retrouver dans pareil situation de faiblesse. Pour ça que jâinvite jamais personneâŠTu peux tâestimer chanceux ! Mais ça va aller, câest rien. Dâici une heure, jâvais bondir comme une gazelle Ă nouveau, faut juste que je dorme pas. »Effectivement, la fiertĂ© de Lise lui avait toujours dictĂ© de ne surtout pas se laisser aller Ă la faiblesse. Education totalement digne de James Hawkins en somme, dont elle Ă©tait encore marquĂ©e visiblement. Mais ça, elle doutait que Aaron puisse le comprendre, dâune maniĂšre ou dâune autre. Il ne connaissait pas lâĂ©vĂšnement qui rythmait et polluait sa vie, et il ne connaissait pas non plus le plus large cĂŽtĂ© de sa famille avec lequel elle nâavait aucun atome crochus. Elle ne voulait pas lâeffrayer, lâinquiĂ©ter, mais aussi, elle ne souhaitait surtout pas se livrer si cela devait sâavĂ©rer inutile. CâĂ©tait son petit cĂŽtĂ© dĂ©faitiste qui reprenait le dessus, comme Ă chaque fois quâelle faisait un cauchemar, et qui lui faisait tout voir du mauvais cĂŽtĂ©âŠMais si Aaron la laissait prochainement tomber, du jour au lendemain ? Se relĂšverait-elle du fait de sâĂȘtre livrĂ©e sans armure et sans retenue ? Oh, Lise aurait trĂšs bien pu lui faire promettre de tout oublier dans la seconde pour pouvoir se confier rien quâune toute petite fois Ă quelquâun de confianceâŠMais elle se retint de faire cette rĂ©flexion. A la place, au bout de quelques minutes, elle sâĂ©carta lĂ©gĂšrement de ses bras, tout en restant allongĂ©e prĂšs de lui tout de mĂȘme, juste pour avoir le privilĂšge de pouvoir contempler son beau visage. Il avait un effet tellement dĂ©vastateur sur elle quâelle ne savait par oĂč commencer, en vĂ©ritĂ©. Il Ă©tait devenu une telle Ă©vidence, un pilier tellement vital Ă sa vie quâelle se retenait presque de respirer tellement tout ceci Ă©tait unique et terrifiant Ă la fois. Il avait pris possession de sa derniĂšre dĂ©fense pouvant la protĂ©ger dâune souffrance sans prĂ©cĂ©dent. Et pour le moment, câĂ©tait la peur qui prĂ©dominait, alors quâelle trouvait ce sentiment merveilleusement nouveau quelques minutes auparavantâŠLâeffet destructeur de son propre cauchemar. Jâveux pas en parler. Ca sert Ă rien, câest Ă moi, câest mon fardeau. Tu pourrais pas mâaider, personne le peut. Aucun intĂ©rĂȘt de sâappesantir dessus. »Lise sâĂ©tait brusquement relevĂ©e, sâasseyant sur son lit en ramenant ses genoux Ă elle, sans quitter la couverture pour autant. Elle sâen voulait de se renfermer comme une huĂźtre et dâĂȘtre presque froide Ă lâĂ©gard dâAaron, mais cet Ă©vĂšnement la touchait de si prĂšs quâelle ne pouvait dĂ©cemment pas raconter ce cauchemar comme une chose anodine et banale. Lui raconter serait rentrer dans des dĂ©tails quâelle nâavait aucune envie de revivre, surtout pas par la parole. Alors, câĂ©tait proprement Ă©goĂŻste de laisser Aaron sâinquiĂ©ter pour elle, et Lise finit par sâasseoir face Ă lui, prenant lâune de ses mains dans les siennes en esquissant un tendre sourire. CâĂ©tait difficile Ă accepter pour elle, tout çaâŠLeur rapprochement, ses sentiments, le fait quâil nâavait sans doute pas encore totalement rĂ©pondu Ă sa dĂ©clarationâŠCâĂ©tait une source de panique supplĂ©mentaire pour une angoissĂ©e comme Lise, qui nâavait pas besoin de ça pour ĂȘtre dĂ©jĂ paniquĂ©e Ă mort. Elle eut un petit rire Ă cette pensĂ©e, refusant le fait de pleurer une nouvelle fois devant Aaron, bien que ses yeux laissent clairement entrevoir des perles qui ne demandaient quâĂ sâĂ©couler le long de ses belles joues pĂąles. La fiĂšvre commençait Ă tomber, et elle recommençait enfin Ă avoir lâesprit un peu plus clair. Un peu Ă©tait bien le terme adĂ©quat, parce quâelle ne savait jamais trop comment se comporter avec lui, de peur de le blesser sans doute. Il ne fallait pas lui en vouloirâŠInconsciemment, son dĂ©sir profond Ă©tait Ă©galement de se protĂ©ger elle-mĂȘme de quelque chose qui pourrait la dĂ©truire complĂštement. Excuse-moi. Tu nâen as pas la moindre idĂ©e, mais ma vie est chaotique au possible et je ne sais mĂȘme pas si je serais un jour capable de la recadrer un peu, alorsâŠJâai peur. Non, je suis mĂȘme terrifiĂ©e. Tout ça, câest totalement nouveau pour moi, je suis quelquâun qui a agit de maniĂšre trĂšs Ă©goĂŻste toute sa vie par peur justement dâĂȘtre aimĂ©e ET dĂ©truite pour cela. Aaron, tu te rends compte que tu as fais sâenvoler toutes mes armures, que jâavais soigneusement construite autour de moi durant toute ma vie ? Pour toi, jâai arrĂȘtĂ© de fuirâŠJâai arrĂȘtĂ© dâĂȘtre brutale, glaciale, ne cherchant que le plaisir sans me soucier des Ă©motions des autres. Si tu pars, je mâen relĂšverais pasâŠCâest comme si dâun coup dâun seul, tu Ă©tais devenu lâoxygĂšne qui me maintiens en vie, mon propre sang qui coule dans mon corps. Une Ă©vidence, en somme. Et jâai peur que si je me livre sans aucune retenue Ă toi, je vienne Ă âŠLe payer ensuite. Câest con je sais, parce que je tâaime comme une folle, maisâŠJe crois que jâai besoin de temps pour faire tomber mes derniĂšres barriĂšres et flanquer ma fiertĂ© aux orties. »Lise eut un petit rictus nerveux, nâen revenant pas dâavoir parlĂ© aussi vite. Pour un peu, elle en aurait presque Ă©tĂ© essoufflĂ©e, sans compter que les battements de son cĆur Ă©taient complĂštement affolĂ©s. A ce moment prĂ©cis, elle ne pu sâempĂȘcher de rire en tendant une main pour caresser tendrement sa joue, sans le quitter une seule seconde du regard. Il nâavait pas idĂ©e Ă quel point elle tenait Ă luiâŠEt combien elle attendait avec impatience le jour oĂč son je tâaime » trouverait un Ă©cho, une rĂ©ponse dans leur petite route commune. A cet instant dĂ©jĂ , Lise savait quâelle nâaimerait jamais personne dâautre, et quâelle ne voudrait jamais personne dâautre Ă ses cĂŽtĂ©s. CâĂ©tait Aaron, ou câĂ©tait la solitude la plus complĂšte. VoilĂ pourquoi elle ne pu sâempĂȘcher de sortir doucement des couvertures pour se mettre Ă le border lĂ©gĂšrement, sâallongeant Ă cĂŽtĂ© de lui sur les couvertures, un sourire lĂ©ger mais sincĂšre sur les lĂšvres. Tu peux dormir, je veillerais sur toi. Tu nâes pas insomniaque toi, tu as sĂ»rement besoin de te remettre de tes Ă©motions. Quoiquâil advienne, je serais lĂ demain matin et on ira Ă la fac ensembleâŠAu volant de mon superbe cabriolet. » InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Mar 13 Juil - 303 La voyant se redresser, Aaron ne tarda pas Ă en faire de mĂȘme tout en conservant une distance raisonnable entre eux afin que Lise puisse avoir le temps de souffler. Le jeune homme savait quâil venait de toucher un point sensible et il ne voulait surtout pas la brusquer ni mĂȘme quâelle se sente contrainte de se confier Ă lui si elle nâen Ă©prouvait pas le besoin. Câest dâailleurs le message quâelle tĂącha de lui transmettre et mĂȘme si les mots quâelle employait pouvaient sembler durs, Aaron savait que ce nâĂ©tait quâune maniĂšre de se protĂ©ger. Il nâavait pas lâintention de faire irruption dans sa vie tout en ayant lâintention de vouloir tout savoir Ă son sujet et de parvenir Ă la dĂ©crypter en quelques jours, toutefois il fallait quâelle sache quâil pouvait ĂȘtre une oreille attentive et de bon conseil mĂȘme. Bien entendu, il nâavait pas la moindre idĂ©e de ce quâavait connu Lise par le passĂ© et il Ă©tait Ă des lustres de sâimaginer quelle Ă©tait la nature de sa tragique histoire. MalgrĂ© tout, il avait pu noter au fil des jours que Lise Ă©tait une jeune femme extrĂȘmement mystĂ©rieuse et qui tout comme lui, nâaimait pas parler dâelle. Lise semblait mĂ©fiante, habituĂ©e Ă sa solitude et câest prĂ©cisĂ©ment cette barriĂšre quâelle mettait entre eux quâil aurait aimĂ© pouvoir franchir. Tu as lâair convaincue que personne ne peut ni tâaider ni te comprendre Lise⊠et ce, Ă nâimporte quel niveau. Il faut que tu apprennes Ă lĂącher prise et Ă avoir confiance en ceux qui tâentourentâŠau moins Ă avoir confiance en moi. Je tâaime telle que tu es et je ne veux pas partager que les bons moments avec toi. Je ne veux pas dâune relation idyllique, ça ne mâintĂ©resse pas, je crois quâon finirait pas sâennuyer. Je sais que gagner ta confiance est loin dâĂȘtre une chose facile mais je sais me montrer Ă la fois patient et dĂ©terminĂ©. »Aaron nâavait pas envie de la brusquer, il ne voulait pas que Lise se sente obligĂ©e de lui parler de ce qui la perturbait autant. Il aurait aimĂ© que les choses se fassent en douceur et au rythme de la jeune femme. De toute maniĂšre, il avait bien lâintention de rester Ă ses cĂŽtĂ©s Ă©ternellement alors attendre un peu plus ou un peu moins ne changerait pas la donne. Tandis que Lise lui faisait de nouveau face et prenait dĂ©licatement sa main, Aaron entrelaça leurs doigts avant de porter la main de la jeune femme Ă ses lĂšvres pour y dĂ©poser un baiser. Il la sentait encore extrĂȘmement tendue et bouleversĂ©e aprĂšs ce qui venait de se passer et de son cĂŽtĂ©, il ne souhaitait pas quâelle culpabilise Ă cause de cet incident. Oui je tâai vu dans de drĂŽles de situations⊠je tâai vu rire⊠pleurer⊠et maintenant je dĂ©couvre une jeune femme fragile et bouleversĂ©e⊠tu trouves vraiment ça honteux ? Tu nâes pas un robot, tu as un cĆur et des sentiments et mĂȘme si tu nâas pas lâhabitude de les partager, ça ne veut pas dire pour autant quâil faut en avoir honte. »Câest alors que la jeune femme se mit Ă parler Ă toute vitesse, essayant de lui faire comprendre que sa vie Ă©tait un vĂ©ritable chaos et quâen plus de ça, elle devait dĂ©sormais faire face Ă des sentiments nouveaux. Naturellement, Aaron ne fut pas insensible Ă ce discours, il ignorait que les sentiments de Lise Ă©taient si profonds et pour ĂȘtre honnĂȘte, il se sentait plutĂŽt bouleversĂ©. Comment pouvait-il lui faire comprendre quâĂ ses cĂŽtĂ©s, elle nâavait rien Ă craindre et quâil Ă©tait totalement inutile quâelle se mĂ©fie de lui ? Aaron nâavait pas lâintention de jouer avec ses sentiments ou de sâĂ©vaporer dans la nature aprĂšs avoir pris du bon temps Ă ses cĂŽtĂ©s. Bien au contraire, pour la premiĂšre fois de sa vie, il envisageait une relation des plus sĂ©rieuses et comptait bien tout mettre en Ćuvre pour que ça fonctionne entre eux. Le temps quâil rĂ©flĂ©chisse Ă une rĂ©ponse appropriĂ©e, Aaron sâĂ©tait de nouveau retrouvĂ© allongĂ©, la douce voix de Lise lui affirmant quâelle serait encore lĂ Ă son rĂ©veil⊠Le jeune homme se redressa lĂ©gĂšrement en sâappuyant sur ses coudes. Attends, attends⊠je ne pourrai pas fermer lâĆil avant que les choses soient parfaitement claires entre nous. Ecoute Lise⊠je comprends parfaitement ce que tu vis. Je veux dire que je comprends ce sentiment dâincertitude et de peur tout simplement parce que je le ressens moi aussi. Pour ĂȘtre honnĂȘte, je peux mĂȘme avouer que je suis littĂ©ralement effrayĂ© par lâampleur que prennent mes sentiments Ă ton Ă©gard. Câest fou⊠je ne pensais pas quâil Ă©tait possible dâĂ©prouver tant dâamour dâun seul coup. »Quel euphĂ©misme !! Ce nâĂ©tait plus de lâamour, câĂ©tait carrĂ©ment de la passion !! Aaron prit appui sur son coude gauche et laissa son autre main venir caresser le visage de Lise comme pour appuyer ses propos. Il voulait quâelle soit certaine que jamais il ne la laisserait tomber, quâil serait lĂ aussi longtemps que sa prĂ©sence serait dĂ©sirĂ©e et surtout, il fallait quâelle sache que ses sentiments Ă©taient dâune sincĂ©ritĂ© et dâune intensitĂ© sans pareil. Je nâai pas lâintention de partir⊠je viens tout juste de donner un sens Ă ma vie⊠je me demande mĂȘme comment jâai pu tenir jusquâici sans que tu ne sois Ă mes cĂŽtĂ©s. Jâai su que câĂ©tait toi Ă lâinstant mĂȘme oĂč nos regards se sont croisĂ©s. Je nâai pas le moindre doute concernant mes sentiments. Jâai juste⊠beaucoup de mal Ă les exprimer, câest diffĂ©rent. Alors je ne veux pas que tu imagines ne serait-ce quâun instant que je pourrais tout foutre en lâair. Je serai toujours là ⊠parce que toi et moi, on ne forme plus quâun dĂ©sormais. Tu sautes, je saute. Câest aussi simple que ça. »Aaron se pencha vers elle, dĂ©posant un baiser Ă proximitĂ© de ses lĂšvres avant de se rallonger tout en lâattirant tout contre lui. Il avait besoin de sentit le corps de Lise contre le sien, câĂ©tait une impression magique, troublante et tellement apaisante Ă la fois. Le jeune homme nâarriverait pas Ă trouver le sommeil, câĂ©tait lâĂ©vidence mĂȘme, pour lâinstant, il avait simplement envie dâĂ©claircir quelques zones dâombre et de tenter au mieux de rassurer Lise. Tu sais Lizzie, je ne cherche pas Ă faire tomber les derniĂšres barriĂšresâŠtout comme je nâai pas la prĂ©tention de vouloir te connaĂźtre sur le bout des doigts. Je veux juste ĂȘtre un pilier dans ta vie, un point dâĂ©quilibre ou si tu prĂ©fĂšres, une personne en qui tu peux avoir une confiance aveugle. Et sache que je ne porterai jamais le moindre jugement Ă ton sujet⊠jâignore ce qui te fait autant souffrir mais sache que je suis prĂȘt Ă partager tout ça avec toi. Tu nâes plus seule dĂ©sormais⊠tu ne seras plus jamais seule. »Aaron nâenvisageait pas de passer le reste de sa vie sans elle mais câĂ©tait sans doute un peu prĂ©maturĂ© pour lâavouer. Il espĂ©rait de tout cĆur que la complicitĂ© qui les unissait, tout comme la force des sentiments parviendrait Ă faire comprendre Ă la jeune femme quâil Ă©tait dâune incroyable franchise et que mĂȘme si pour lâinstant, il Ă©tait incapable de rĂ©pondre Ă son je tâaimeâ, ce nâĂ©tait plus quâune question de temps. Dâune certaine maniĂšre, il avait lui aussi besoin de lĂącher prise et il savait quâil y parviendrait tĂŽt ou tard. AprĂšs tout, Lise Ă©tait bien plus quâune Ă©vidence Ă ses yeux elle Ă©tait... son Ăąme sĆur. Tu sais quoi ? Je nâai pas envie de mâendormir⊠jâai peur que tout ça ne soit quâun rĂȘve⊠une rĂȘve fabuleux. Tu es bien trop parfaite pour ĂȘtre rĂ©elle Lise Hawkins. »Parfaite? Oh oui elle l'Ă©tait... Aaron Ă©tait totalement sous le charme et plus les heures passaient, plus ce sentiment se renforçait. Lise Ă©tait l'objet de tous ses dĂ©sirs et il s'en voulait de ne pas parvenir Ă exprimer clairement ce qu'il ressentait.... ou s'il le faisait, il tenait Ă ce qu'elle oublie tout dans les trois secondes Ă venir. Patience. Maintenant que j'ai dĂ©couvert ton petit coin de Paradis, que dirais-tu de dĂ©couvrir le mien ? Bon d'accord, tu es dĂ©ja venue Ă la maison, mais je pourrais tenter quelque chose de spĂ©cial pour une fois... un dĂźner romantique? Ce serait le premier. Vendredi soir, ça te tente? » InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Mar 13 Juil - 357 Trop parfaite pour ĂȘtre rĂ©elleâŠEn vĂ©ritĂ©, il nây avait que cette phrase que Lise voulait retenir. Le fait quâelle soit secrĂšte, mystĂ©rieuse et quâelle ne fasse pas confiance nâallant pas changer du jour au lendemain, elle voulait se concentrer sur quelque chose de positif. Aaron nâen avait sĂ»rement pas la moindre idĂ©e, mais ses paroles lui faisaient du bien. Mieux, il lâapaisait comme jamais personne ne lâavait fait. Je ne suis pas parfaite, Aaron Cooper. Je suis simplement amoureuse de toiâŠVendredi, je viendrais dans ton petit coin de paradis, câest promis. »Comme pour ponctuer ses paroles, Lise sâĂ©tait avancĂ©e pour dĂ©poser trĂšs dĂ©licatement ses lĂšvres sur la joue du jeune homme, durant une fugace seconde, avant de reprendre sa place initiale. Elle demeura le reste de la nuit ainsi, Ă contempler son beau visage, sans pratiquement dire un mot. Ils nâavaient pas besoin de parler pour se comprendreâŠDe temps Ă autre, Lise caressait la joue dâAaron, comme si elle voulait quâil sâendorme et se repose, tout en lui prouvant quâelle allait rester ici, fidĂšle au poste. Rien au monde nâaurait pu la faire partir, de toute Ă©vidence, et quand bien mĂȘme son grand pĂšre aurait-il fait irruption dans la piĂšce, elle ne se serait pas dĂ©placĂ©e. Durant toute cette nuit, Lise nâeut dâyeux que pour Aaron. A ce moment prĂ©cis, elle savait dĂ©jĂ que nul nâaurait jamais la place quâil occupait dans son cĆur. Il sâen Ă©tait littĂ©ralement emparĂ©, et tout en frĂŽlant le bonheur du bout de ses doigts, elle ne voulait rien brusquer. VoilĂ pourquoi, une fois que le jour fut levĂ©, Lise tint sa promesse Ă la lettre Ils sâhabillĂšrent tous deux aprĂšs ĂȘtre passĂ©s chacun leur tour sous la douche, et la demoiselle conduisit le jeune homme Ă lâuniversitĂ©, non sans lui dĂ©poser un fugace baiser sur sa joue, pour lui souhaiter une bonne journĂ©e. A aucun moment, elle ne se permis dâaller plus loin, bien que lâenvie de prendre enfin possession de ses lĂšvres fut dâune intensitĂ© sans pareille. Son courage devant ce cruel dilemme Ă©tait exemplaireâŠCar elle supportait toute sa journĂ©e de cours en essayant de dominer ses pensĂ©es, dĂ©viant toutes vers la mĂȘme personne Aaron Cooper. Il sâĂ©tait littĂ©ralement emparĂ© de tout ce quâelle reprĂ©sentait, câĂ©tait lui qui tenait les ficelles de sa vie pour ainsi dire. Aussi, ne pas pouvoir le voir pendant ces trois petits jours les sĂ©parant de vendredi fut un vĂ©ritable supplice. Une abominable torture Ă cause de laquelle elle manqua de devenir folleâŠAu lieu de rĂ©viser pour ses examens et de se montrer sous son masque de parfaite Ă©lĂšve, Lise tournait complĂštement en rond, dans la maison dâinvitĂ© oĂč elle vivait dĂ©sormais. TantĂŽt allongĂ©e sur son lit, elle songeait encore et encore Ă la soirĂ©e quâelle avait passĂ©e avec Aaron, et sâen voulut aussitĂŽt de ne pas sâĂȘtre confiĂ©e Ă lui de maniĂšre plus expansive ; TantĂŽt debout, Ă faire les cents pas dans la piĂšce, elle songeait cette fois Ă la maniĂšre dont elle allait sâhabiller pour lâoccasion. Aaron avait mis une pression supplĂ©mentaire sur ses frĂȘles Ă©paules de ce cĂŽtĂ©-lĂ , en disant quâil sâagirait de leur premier dĂźner romantiqueâŠElle ne pouvait dĂ©cemment pas sây rendre en short et en sandalettes ! Elle prit donc le taureau par les cornes et, au lieu de continuer Ă tourner en rond comme une Ăąme en peine, elle partit faire les boutiques au volant de son sublime cabriolet. Aaron ne savait pas Ă quel point cela lui demandait un effort considĂ©rable, de faire du shoppingâŠUne vĂ©ritable torture ! Et pourtant, Lise fit la totale Magasins de vĂȘtements pour trouver une jolie robe, de chaussures pour faire un ensemble assortit, et mĂȘme le coiffeur, oĂč elle prit un rendez-vous pour vendredi aprĂšs-midi, afin dâĂȘtre apprĂȘtĂ©e de maniĂšre absolument sublime. Lise voulait ĂȘtre Ă©blouissante, elle ne voulait pas spĂ©cifiquement lâimpressionner, juste quâil la trouve belleâŠTous ces efforts nâĂ©taient faits que dans cet unique but, et cela bien quâun simple regard de la part dâAaron puisse suffire Ă la rendre sublime en jour J fut terriblement long Ă arriver. Cette nuit-lĂ , Lise nâavait mĂȘme pas fermĂ© lâĆil une minute, envoyant message sur message Ă Aaron, qui ne semblait pas vouloir dormir non plus. Ils semblaient tellement liĂ©s lâun Ă lâautre quâils se refilaient mutuellement leur stress, mine de rien. Pourtant, durant tout cet Ă©change, aucune allusion au rendez-vous ne fut faite. CâĂ©tait simplement des petits mots doux sous entendus, sans fioriture, et sans romantisme exacerbĂ©. Juste de quoi se donner du courage pour affronter tout le vendredi, et pour Ă©viter de les mettre mal Ă lâaise lâun comme lâautre. Ce fut sans doute grĂące Ă ce charmant Ă©change que Lise fut dâaussi bonne humeur le matin, pour affronter son seul cours de la journĂ©e, qui nâĂ©tait pas des moindres Histoire. CâĂ©tait un cours gĂ©nĂ©ral regroupant plusieurs examens Ă lui tout seul, quâelle ne pouvait dĂ©cemment se permettre de manquer. Fort heureusement, et cela bien que toutes ses pensĂ©es soient toujours rivĂ©es vers Aaron, ce cours-lĂ passa Ă la vitesse grand V. Elle se rendit donc bien vite au parking de lâuniversitĂ©, oĂč son fidĂšle cabriolet lâattendait toujours. En moins de temps quâil nâen fallut pour le dire, elle se fraya un chemin dans les rues de San Francisco, parvenant jusquâau salon de coiffure oĂč elle avait pris rendez-vous. Elle demanda une coiffure simple et jolie, Ă son image. Un chignon amĂ©liorĂ© avec des Ă©pingles aux diamants fantaisies, et deux mĂšches tombant joliment sur son visage, lĂ©gĂšrement ondulĂ©es pour donner une impression de lĂ©gĂšretĂ©. Cette coiffure lĂ lui illuminait complĂštement le visageâŠAussi, quand il fallut quâelle sâhabille et se maquille, elle prit soin de ne surtout pas dĂ©faire ne serait-ce quâun cheveu de sa jolie coiffure. Elle prit toutes les prĂ©cautions du monde afin dâĂȘtre absolument parfaite une fois lâheure de partir venue. Du reste, elle avait prĂ©vu large au niveau de lâhoraire afin dâĂ©viter de se faire avoir par les embouteillages. Elle parvint absolument pile Ă lâheure chez Aaron, maquillĂ©e de maniĂšre lĂ©gĂšre, vĂȘtue dâune sublime robe blanche courte, chaussĂ©e avec de belles chaussures noires Ă talons aiguillesâŠEt parfumĂ©e dĂ©licatement afin de ne pas avoir une odeur trop entĂȘtante. En somme, tout Ă©tait fait avec lĂ©gĂšretĂ© et goĂ»t, et Lise espĂ©rait ĂŽ combien que Aaron apprĂ©cierait son derniĂšre inspiration tandis quâelle venait de se garer devant la maison de la mĂšre dâAaron, Ă©vitant de se remĂ©morer la derniĂšre fois oĂč elle avait mis les pieds en ces lieux. Ce souvenir, elle prĂ©fĂ©rait largement le laisser de cĂŽtĂ© afin de ne surtout pas cĂ©der Ă la panique Il y avait fort Ă parier pour que ce rendez-vous lĂ soit absolument parfait, et elle nâavait donc rien Ă craindre. Elle sortit de voiture en inspirant profondĂ©ment, tentant de calmer les battements effrĂ©nĂ©s de son cĆur qui semblaient rĂ©solus Ă trahir sa peur mĂȘlĂ©e Ă son excitation profonde. Il ne fallait surtout pas quâelle paniqueâŠMais qui nâaurait pas paniquĂ© Ă sa place ?! CâĂ©tait lĂ le premier rendez-vous romantique de Lise ! Oh bien sĂ»r, elle avait dĂ©jĂ dĂźnĂ© avec des hommes, mais ces soirĂ©es lĂ nâavaient pour but que dâavoir une nouvelle proie dans son lit une fois la nuit venue. Cette fois, câĂ©tait diffĂ©rent. Comme Aaron lâavait Ă©noncĂ© trois jours plus tĂŽt, câĂ©tait un dĂźner romantique, leur tout premier, en espĂ©rant sincĂšrement quâune longue liste suivrait celui-ci. Ce fut donc non sans une intense apprĂ©hension que Lise frappa Ă la porte, les mains encore tremblantes, sans pour autant ĂȘtre moites. La future archĂ©ologue Ă©tait pĂ©trifiĂ©eâŠLittĂ©ralement pĂ©trifiĂ©e. Et pourtant, ce fut avec un sourire on ne peut plus radieux quâelle accueillit un Aaron absolument Ă©blouissant. Durant quelques secondes, elle sâoctroya le droit de le contempler dâailleurs, non sans sourire de maniĂšre sincĂšre, se maudissant de ne pas lui sauter purement et simplement au cou pour goĂ»ter enfin le fruit dĂ©fendu reprĂ©sentĂ© par ses lĂšvres. Aaron Ă©tait Ă lui seul la plus dĂ©licieuse tentation quâil soit⊠Tu esâŠJe nâai pas de mot ! MagnifiqueâŠJe suis flattĂ©e que tu aies fait autant dâeffort pour moi ! Et merci encore de m'avoir invitĂ©e ce soir, je suis vraiment flattĂ©e par cette dĂ©licate attention. »Phrase ridicule de la part dâune demoiselle qui sâĂ©tait littĂ©ralement pliĂ©e en quatre pour ĂȘtre sublime Ă©galement ce soir ! Mais Lise ne prĂȘta pas attention Ă ce dĂ©tail, sâavançant lĂ©gĂšrement pour dĂ©poser dĂ©licatement ses lĂšvres sur la joue dâAaron, avant de dĂ©vier quelques secondes vers son cou pour humer son odeur. Ce parfum Ă©taitâŠA la fois attirant et Ă©nigmatique, comme sâil avait Ă©tĂ© conçu pour Aaron. Tu sens bonâŠOn en mangerait. »Lise ne pu sâempĂȘcher de rire tout en se pinçant discrĂštement pour cette nouvelle rĂ©flexion proprement dĂ©sespĂ©rante. Ce nâĂ©tait pas la peine de vouloir sous entendre quâelle lâaurait bien mangĂ© en dessert, voyons ! Et discrĂštement, elle se racla la gorge avant de passer le hall dâentrĂ©e pour la deuxiĂšme fois depuis son arrivĂ©e Ă San Francisco. Elle se disait Ă cet instant prĂ©cis que ce nâĂ©tait pas dieu possible dâĂ©prouver autant dâamour et de dĂ©sir pour une seule personneâŠIl fallait Ă tout prix quâelle se maĂźtrise sans quoi, elle allait rapidement frĂŽler un aller sans retour pour lâasile le plus proche. Et pourtantâŠIl nâexistait pas tĂąche plus difficile que celle-ci. Lise venait de dĂ©poser son sac Ă main dans le salon, avançant dâun pas lent et fĂ©lin jusquâĂ MĂ©phisto qui lâaccueillit avec un miaulement significatif. Elle lui caressa dĂ©licatement la tĂȘte bien Ă©videmment, comme flattĂ©e sâil se souvenait dâelle. Tu crois quâil se souvient de moi ? Lâest vraiment adorable ce gros matou. Ce me manque moi, je pas cĂąliner un petit animal. »Lise se mordit aussitĂŽt la lĂšvre avant de lancer un regard dĂ©solĂ© Ă Aaron. Elle perdait dĂ©jĂ complĂštement le contrĂŽle dâelle-mĂȘme, devenant horriblement maladroite, comme sâil avait dâors et dĂ©jĂ un effet dĂ©vastateur sur elle sans mĂȘme avoir prononcĂ© une seule phrase troublante. CâĂ©tait impossible de se contrĂŽler avec luiâŠImpossible de rĂ©frĂ©ner ce dĂ©sir de se blottir dans ses bras, de rĂ©sister Ă son propre corps qui lui ordonnait de le toucher. Dans un Ă©lan dâinconscience, elle se rapprocha donc, le regard brillant non pas de larmes, mais bien de dĂ©sir. Lise Ă©tait en train de perdre lâesprit, et elle venait Ă peine dâarriver⊠Je suis dĂ©solĂ©eâŠJe crois que je suis juste un peu nerveuse. Premier rendez-vous galant pour moiâŠJe vais me tenir bien mieux tu verras. Câest promis. Quâest-ce que tu nous as prĂ©vu de bon dis-moi ? »La question salvatriceâŠSe concentrer sur cela allait Ă©viter Ă Lise tout geste ou mot dĂ©placĂ©. En somme, câĂ©tait un crime de ne pas sauter sur pareille occasion dans le cas prĂ©sent ! Et cela bien que le menu lui importe bien peu et quâelle nâait dĂ©cidĂ©ment dâyeux que pour Aaron. InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Mar 13 Juil - 1618 Le premier rendez vous est toujours une Ă©tape extrĂȘmement difficile Ă franchir⊠encore plus quand on choisit dâinviter sa dulcinĂ©e Ă dĂźner non pas au restaurant mais chez soi. Aaron se maudissait dâavoir surestimĂ© ses capacitĂ©s de cuisinier. Il savait quâil Ă©tait mauvais, ce nâĂ©tait pas nouveau ! Câest Ă peine sâil Ă©tait capable de faire cuire un plat au micro-ondes sans dĂ©clancher un incendie ! Quoi quâil en soit, il avait pourtant tentĂ© de sortir le grand jeu et sâĂ©tait lancĂ© dans une recette française des plus raffinĂ©es. EnfinâŠdisons surtout quâil avait tentĂ© de se lancer. De lâextĂ©rieur, câĂ©tait probablement amusant de le voir faire. Aaron tentait tant bien que mal de dĂ©chiffrer le livre de cuisine, comme sâil sâagissait dâune langue ancienne, presque impossible Ă dĂ©coder. Quand Sarah passait derriĂšre les fourneaux, ça avait pourtant lâair facile ! Dâailleurs, nâavait-il pas jurĂ© plus dâune fois quâavec un livre de recettes, nâimporte qui Ă©tait capable de se donner des allures de grand chef Ă©toilĂ© ? Pour lâinstant son entrĂ©e, un tiramisu salĂ© aux crevettes, ressemblait⊠à pas grand-chose en fait. Il avait pourtant suivi les instructions, manquĂ© de se couper deux doigts et de sâembrocher le troisiĂšme⊠câĂ©tait pĂ©rilleux quand mĂȘme ! Sans compter que lâheure commençait Ă tourner et quâil fallait impĂ©rativement que tout soit prĂȘt au moment oĂč Lise allait arriver. Afin de ne pas perdre trop de temps, Aaron dĂ©cida de laisser lâentrĂ©e de cĂŽtĂ© pour lâinstant afin de se concentrer sur le plat principal. Il fallait vraiment quâil assure sâil voulait rivaliser avec le dĂ©licieux crabe quâil avait savourĂ© chez la jeune femme. Pas besoin dâĂȘtre un expert en la matiĂšre pour comprendre quâAaron nâavait pas sa place derriĂšre les fourneaux. Dâordinaire, cette situation lâamusait plus quâautre chose mais ce soir, il trouvait ça carrĂ©ment dĂ©sespĂ©rant. Il se souvenait encore du nombre incalculable de fois oĂč Sarah lâavait gentiment invitĂ© Ă se joindre Ă lui pour prĂ©parer le dĂźner. Ce nâest que maintenant quâil regrettait dâavoir privilĂ©giĂ© les matchs de basket Ă la tĂ©lĂ© plutĂŽt que les petites attentions de sa mĂšre. Il lui fallu dâailleurs rassembler tout son courage pour confectionner un plat a peu prĂšs correct de cannelloni dont, il fallait bien lâadmettre, il Ă©tait plutĂŽt fier. Le jeune homme avait pris soin de suivre la recette Ă la lettre, ne se permettant pas dâajouter sa petite touche personnelle comme le faisait Sarah qui cuisinait nâimporte quel plat les yeux fermĂ©s. Il enfourna donc le plat et retourna Ă son tiramisu salĂ© qui lui donnait du fil Ă retordre⊠au bout dâune dizaine de minutes âla patience nâĂ©tait vraiment pas son point fort-, Aaron dĂ©cida de laisser tomber. AprĂšs tout, il pouvait tout aussi bien confectionner une salade raffinĂ©e avec tout ce quâil y avait au frigo. Le jeune homme Ă©tait donc serein concernant la suite des Ă©vĂšnements. Rapidement, il jeta un coup dâĆil Ă sa montre, sâapercevant que le temps passait bien plus vite quâil ne lâavait imaginĂ©. Aaron monta donc prendre une douche et sâhabiller. Il enfila un pantalon sombre et une chemise blanche avant de passer un peu de gel dans ses cheveux. Si Summer lâavait vu, il y a fort Ă parier quâelle ne lâaurait pas lĂąchĂ© dâune semelle !! En parlant de Summer, cela faisait un bon bout de temps quâil ne lâavait pas croisĂ© dans les couloirs de lâUniversitĂ©. En y rĂ©flĂ©chissait bien, il nâavait pas non plus croisĂ© Lloyd⊠peut-ĂȘtre que quelque chose Ă©tait en train de se tramer entre ces deux lĂ allez savoir ! Quoi quâil en soit, câĂ©tait bien la derniĂšre prĂ©occupation dâAaron pour lâinstant. Lorsquâil sortit de la salle de bain, le jeune homme grimaça tout en respirant une drĂŽle dâodeur⊠câĂ©tait mĂȘme immonde. DâoĂč cela pouvait-il provenir ? Comme ce nâĂ©tait pas Ă lâĂ©tage, Aaron redescendit au rez de chaussĂ©e avant de sâapercevoir quâune Ă©paisse fumĂ©e noire sortait du four ! Et merde !! Il avait oubliĂ© les cannelloni !! Le jeune homme se prĂ©cipita donc jusquâau four quâil ouvrit avant dâattraper le plat Ă main nue et bien Ă©videmment, le relĂącher sur le champs ! Quelle catastrophe ! Aaron attrapa un gant et un torchon et sortit enfin le plat du four avant dâouvrir les fenĂȘtres et dâagiter le torchon pour se dĂ©barrasser de la fumĂ©e. Naturellement, il ne manqua pas dâouvrir le robinet dâeau froide afin de calmer la brĂ»lure de sa main qui par miracle, nâĂ©tait que superficielle. Il soupira doucement tout en croisant le regard du chat qui sâĂ©tait installĂ© non loin de lĂ et qui ne cessait de le toiser. Quâest-ce quâil y a ? Câest pas la peine de me regarder comme ça abominable fĂ©lin, jâai essayĂ© !! Mon repas tombe Ă lâeau mais jâai essayĂ© !! Puis tu devrais ĂȘtre content, câest toi qui vas dĂ©guster les crevettes pour la peine. Bon en attendant, il faut que je trouve quelque chose pour Lise⊠je ne vais tout de mĂȘme pas commander uneâŠhey !! »Aaron stoppa toute activitĂ© durant un instant, songeant tout Ă coup quâune autre option sâoffrait Ă lui. LâidĂ©e dâappeler un traiteur lui traversa lâesprit, il pourrait ainsi faire bonne figure et offrir Ă Lise un vrai dĂźner romantique, digne de ce nom. Peut-ĂȘtre quâavec un peu de chance, elle nây verrait que du feu. Aaron ferma le robinet dâeau froide, ainsi que les fenĂȘtres Ă©tant donnĂ© que la fumĂ©e sâĂ©tait Ă prĂ©sent dispersĂ©e et se dirigea vers son ordinateur portable dans le salon afin dây trouver le numĂ©ro dâun traiteur non loin dâici. Câest alors quâil entendit frapper Ă la porte. Quoi dĂ©jĂ ?? Le jeune homme se releva dâun bond, sentant la pression monter dâun cran⊠Lise Ă©tait sur le pas de sa porte et il nâavait toujours rien Ă lui proposer pour dĂźner Ă lâexception du dessert. Pas le temps de rĂ©flĂ©chir. Aaron se leva, retourna en vitesse Ă la cuisine afin de se dĂ©barrasser du plat trop cuit et faire disparaĂźtre toutes les piĂšces Ă conviction de son carnage et aprĂšs une grande inspiration, se dirigea vers la porte pour ouvrir. Lise Ă©tait⊠magnifique⊠éblouissante mĂȘme. Le jeune homme resta sans voix durant quelques secondes, sâoctroyant le droit de la dĂ©vorer des yeux. Câest plutĂŽt moi qui te remercie dâavoir acceptĂ© mon invitation⊠tu es vraiment ravissante. »*Ravissante ? Tâes tombĂ© sur la tĂȘte ou quoi ? Câest tout ce que tu trouves Ă dire ? Elle est pas ravissante elle est carrĂ©ment Ă tomber !!* Aaron reprit contenance et glissa dĂ©licatement sa main dans le dos de la jeune femme tandis quâelle dĂ©posait un baiser, comme une nouvelle tentation, sur sa joue. Il avait attendu cette soirĂ©e avec impatience, Ă vrai dire, il nâavait fait que songer Ă cela depuis quâils sâĂ©taient quittĂ©s. Le temps lui paraissait long lorsquâelle nâĂ©tait pas lĂ . A croire quâil ne pouvait plus se passer dâelle. Tu sens bon⊠On en mangerait. » Cette remarque le fit sourire gentiment. Ne se doutait-elle pas quâil aurait adorĂ© ĂȘtre son dessert ? Aaron lâinvita donc Ă entrer avant de voir son rival dâun soir, MĂ©phisto se prĂ©cipiter vers Lise dans lâintention dâobtenir un cĂąlin. CâĂ©tait normal dâĂȘtre jaloux dâun chat ? Voila quâil perdait lâesprit Ă prĂ©sent, dâailleurs, il eu mĂȘme lâimpression que le matou noir aux yeux perçants continuait de le narguer comme il lâavait fait quelques minutes plus tĂŽt dans la cuisine. Aaron plissa les yeux un instant puis reporta son attention vers Lise⊠Etait-ce possible dâĂȘtre aussi belle ? Elle semblait tout droit sortie dâun conte de fĂ©es, câest Ă peine sâil osait imaginer quâelle Ă©tait bel et bien rĂ©elle. La remarque concernant le chat le fit sourire et dâun sens, le rassura il nâĂ©tait donc pas le seul Ă se sentir extrĂȘmement nerveux. Doucement, il glissa sa main sur la joue de la jeune femme, rĂ©sistant tant bien que mal Ă lâenvie de sâemparer de ses lĂšvres⊠Câest moi qui te rend nerveuse ? Si ça peut te rassurer, câest assez nouveau pour moi Ă©galement. Cela dit, tu nâimagines pas Ă quel point je suis heureux que tu aies acceptĂ© mon invitation. »Quâavait-il prĂ©vu de bon ? PrĂ©vu oui⊠de bon, câĂ©tait une autre histoire. Voila quâil se sentit de nouveau submergĂ© par un Ă©lan de nervositĂ©, toutefois, le jeune homme ne se dĂ©monta pas. AprĂšs tout, il fallait bien quâil trouve une solution Ă partir des moyens du bord non ?! Il sâempara donc de la main de la demoiselle et lâentraĂźna avec lui jusque dans la cuisine avant dâouvrir un placard et dâen sortir un paquet de spaghettis. Avec humour et une lĂ©gĂšre lueur dans le regard, il tenta de faire passer ça le mieux possible. Tu mâas dit que tu aimais la cuisine EuropĂ©enne non ? Paste alla Aaron signora!! Une spĂ©cialitĂ© comme tu nâen as jamais goĂ»tĂ© nulle part !! Crois moi, ce sera les meilleures pĂątes de toute ta vie, je peux te le garantir ! »Le jeune homme se mit Ă rire lĂ©gĂšrement, visiblement dĂ©solĂ© de ne pas avoir mieux Ă lui offrir. Sans compter quâil Ă©tait totalement hors de question quâil admette son fiasco des heures prĂ©cĂ©dentes ! Certes il avait tentĂ© de confectionner un dĂźner raffinĂ© mais il avait lamentablement Ă©chouĂ©, ce nâĂ©tait donc pas la peine dâinsister davantage. Aaron sortit le nĂ©cessaire pour faire cuire les pĂątes avant dâouvrir le frigo et dâen sortir une bouteille de coca. Puisque son pseudo repas Ă©tait ridicule et quâil sâen rendait compte, autant tourner tout ça Ă la dĂ©rision, non ? Quoi ? Tu ne connais donc pas le rĂ©gime pĂąte coca ? Câest trĂšs en vogue dans les restaurants français !! Lizzie !! Tu as un temps de retard jâai lâimpression⊠»Le jeune homme sortit deux grands verres quâil leur servit. CâĂ©tait assez amusant de les voir ainsi vĂȘtus, tout beaux, extrĂȘmement bien assortis ⊠avec leurs verres de coca Ă la main. Aaron passa une main sur sa nuque, le fameux signe qui prouve que quelque chose ne va pas chez lui. Plus sĂ©rieusement, jâespĂšre que tu ne mâen voudras pas trop pour⊠tout ça. Je ne suis pas trĂšs douĂ© pour cuisiner et je prĂ©fĂšre de loin faire quelque chose dâĂ peu prĂšs correct plutĂŽt que de te proposer un dĂźner franchement lamentable. »Le jeune homme se pencha vers elle pour dĂ©poser un autre baiser prĂšs de ses lĂšvres et reposa son verre afin dâaller mettre lâeau des pĂątes Ă chauffer. Aaron sâempara dâune grande casserole quâil remplit dâeau avant de la mettre sur le feu. Comme il avait les doigts encore mouillĂ©s, il ne manqua pas de taquiner Lise en lui envoyant les quelques gouttes dâeau qui sây trouvaient⊠Oups... je suis navrĂ©... je ne voulais pas faire ça.»Et naturellement, il recommença de plus belle avant de se mettre Ă rire comme un gamin... qu'il Ă©tait. InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Mar 13 Juil - 1652 Lise ne pu rĂ©primer un large rire en entendant Aaron dire que ce soit, ce serait un plat de pĂątes spĂ©cialement assaisonnĂ©es par ses soins. CâĂ©tait plutĂŽt cocasse comme situation, et elle ne pouvait sâempĂȘcher dâen rire. Enfin quelquâun qui nâen faisait pas trop dans lâunique espoir de la mettre dans son lit. Au final, cela lui plaisait diablementâŠElle avait enfin lâimpression dâĂȘtre humaine » en prĂ©sence de quelquâun, et Aaron nâavait pas la moindre idĂ©e Ă quel point câĂ©tait reposant pour elle. Certes, elle sâĂ©tait apprĂȘtĂ©e de maniĂšre trĂšs classe, mais le fait dâavoir Ă faire Ă un dĂźner Ă la fois romantique et simple la charmait. CâĂ©taitâŠTrĂšs reprĂ©sentatif dĂšs, en vĂ©ritĂ©. Lise nâĂ©tait pas la derniĂšre Ă jouer la carte de la simplicitĂ© quand elle le pouvait, Ă vrai dire. LâidĂ©e du crabe, câĂ©tait une idĂ©e de son grand pĂšre, pour lâoccasion. Mais Lise nâaurait jamais choisi pareil menuâŠAprĂšs tout, ne lui avait-elle pas fait de simples pancakes Ă sa premiĂšre venue ici ? Ce nâĂ©tait pas du grand art, mais câĂ©tait mangeable, et câĂ©tait tout ce quâelle demandait Ă un met comme celui-ci. VoilĂ pourquoi elle accepta sans mĂȘme hĂ©siter une seconde le verre de coca gentiment servis par les bons soins dâAaron. Effectivement, peut-ĂȘtre avait-elle un large temps de retard en matiĂšre de rendez-vous amoureuxâŠUn temps trop long, dans lequel elle semblait avoir vĂ©cu sur une autre planĂšte. Une planĂšte de richards, un environnement dĂ©testable quâelle ne voulait plus jamais cĂŽtoyer. Elle sâĂ©tait toujours sentie plus Ă lâaise dans la simplicitĂ©, synonyme chez elle de sincĂ©ritĂ©. Alors ce soir, en voyant Aaron nerveux de ne pas lui offrir un repas plus chic » elle Ă©tait diablement charmĂ©e. Si elle nâavait pas appris Ă contrĂŽler aussi bien ses Ă©motions, elle lui aurait probablement sautĂ© au cou pour prendre possession de ses lĂšvres, lĂ tout de suite et maintenant. CâĂ©tait incroyable, cette attirance quâelle Ă©prouvait pour lui, alors que fondamentalement un plat de pĂątes nâa rien dâexceptionnelâŠMais si on avait questionnĂ© Lise sur ce moment prĂ©cis, elle aurait rĂ©pondu que câĂ©tait le plat le plus exceptionnel et le plus romantique de toute sa vie. Tout simplement parce quâelle Ă©tait avec Aaron, quâil sâĂ©tait fait beau pour elle et quâelle lâaimaitâŠElle lâaimait ĂŽ combien. Tâen vouloir ?! Tu dĂ©connes ! Pour moi, il nây a aucun stĂ©rĂ©otype de dĂźners romantiques, puisque câest mon tout premier. Je sais, jâai un temps de retard mais si tu savais Ă quel point câest reposant de ne pas devoir se prĂ©senter tirĂ©e complĂštement Ă quatre Ă©pingles dans des palaces cinq Ă©toiles, pour manger du caviar ou des plats Ă base de truffe et au final, finir dans le lit de quelquâun qui nâen a rien Ă foutre de moi. Non AaronâŠCe soir, câest charmant. Câest simple, sincĂšreâŠJâadore. »Un petit sourire malicieux sâĂ©tait dessinĂ© dĂ©licatement sur ses lĂšvres tandis quâelle sâoctroyait le droit de boire une longue gorgĂ©e de coca. Tout ce quâelle venait de dire Ă©tait amplement sincĂšreâŠElle prĂ©fĂ©rait mille fois profiter de cette divine soirĂ©e en sa compagnie plutĂŽt quâĂȘtre dans un palace Ă siroter du champagne en compagnie dâun fils dâambassadeur ou tout autre milliardaire puant de prĂ©tention. Aaron Ă©tait naturel, au moins. Il nâavait pas besoin de mettre de masque, de peser chaque mot juste pour la sĂ©duire. CâĂ©tait probablement la soirĂ©e la plus douce de toute sa vie, car Lise nâavait aucun rĂŽle Ă jouer. Pour une fois, elle oubliait dâĂȘtre la fille de milliardaire chargĂ©e de faire bonne figure absolument. Au contraire, elle Ă©tait absolument naturelle Ă son tour, et puisâŠĂtait-elle vraiment venue pour manger, aprĂšs tout ? Je suis pas venue pour manger uniquement, aprĂšs tout. Si je suis venue, câest pour toi. Alors que ce soit pour profiter dâun plat de pĂątes ou mĂȘme dâun paquet de chips, ça mâest Ă©gal. On est ensemble, câest lĂ le principal, non ? »Lise eut un lĂ©ger rire avant de se rapprocher dĂ©licatement dâAaron, le regard redevenu brillant. Elle nâavait plus aucun contrĂŽle sur ses Ă©motions et ses gestes dĂšs quâelle se trouvait en sa compagnieâŠCâĂ©tait comme sâil avait appuyĂ© sur un bouton invisible Ă lâorigine de son contrĂŽle si parfait dâordinaire. Si Sam la voyait ainsi, si maladroite, si nerveuse pour sĂ»r, il ne reconnaĂźtrait sĂ»rement pas sa sĆur cadette. Mais Lise sâen fichaitâŠElle Ă©tait en face dâAaron et câĂ©tait tout ce qui comptait. Puis je suis sĂ»re que tes pĂątes seront excellentes. AprĂšs tout, on peut pas ĂȘtre bons en toutâŠTu es excellent en circuit, en basket, tu as un corps sublime, un sourire Ă tomber par terreâŠTe faut bien des dĂ©fauts, non ? »Et Lise riait, bien quâelle ne soit pas en mesure de dire clairement quels Ă©taient ces fameux dĂ©fauts. Elle ne lui en trouvait aucun, Ă vrai dire, car Ă ses yeux il ne pouvait quâĂȘtre parfait. Pour ponctuer ses paroles, elle caressa doucement sa joue, se rapprochant davantage, comme si elle avait lâintention de franchir enfin ce pas qui sĂ©parait leurs lĂšvres respectives. Lâappel Ă©tait trop fort, la tentation insupportableâŠLise Ă©tait prĂȘte Ă prendre ce risque, quitte Ă se brĂ»ler les ailes. Elle le dĂ©sirait tellement que câen Ă©tait presque douloureux pour elle, qui nâavait jamais aimĂ© ni pris des risques en la matiĂšre. CâĂ©tait tellement plus simple de prendre ce que lâon veut et de disparaĂźtre de la vie de quelquâun dans la secondeâŠMais Aaron Ă©tait diffĂ©rent. Il lâavait toujours Ă©tĂ© Ă ses yeux, depuis lâinstant oĂč leurs regards sâĂ©taient croisĂ©s, il avait pris une place restĂ©e inoccupĂ©e. VoilĂ pourquoi elle Ă©tait venue ce soir, pour que le jeune homme en soit absolument persuadĂ©. La proximitĂ© Ă©tait devenue de plus en plus Ă©vidente, tandis que Lise penchait lĂ©gĂšrement son visage, prĂȘte Ă briser la derniĂšre barriĂšre jusquâici restĂ©e impĂ©nĂ©trable. Mais on ne fait pas toujours ce que lâon veut dans la vieâŠEt MĂ©phisto avait dĂ©cidĂ© que lâheure du fameux premier baiser nâĂ©tait pas encore venue. Il se mit Ă miauler bruyamment, avant de venir se frotter contre les jambes de Lise, rĂ©clamant des caresses visiblement, comme sâil nâen avait pas eu assez avant. Lise eut un rire gĂȘnĂ© en sâĂ©cartant lĂ©gĂšrement, sâagenouillant quelques instants pour caresser cet Ă©ternel insatisfait qui venait de briser sĂ»rement le seul moment oĂč la demoiselle avait Ă©tĂ© sĂ»re de ce quâelle faisait. Il est toujours comme ça avec tes invitĂ©s ? Je veux dire, un chat câest indĂ©pendant dâhabitude, ça nâaime que ses maĂźtresâŠMais on dirait quâil mâadore, ton chat. »Lise ne pu sâempĂȘcher de rire, tout en le caressant doucement, jusquâĂ ce que monsieur admette que cela suffisait et reparte en direction du salon. Ce fut au moment mĂȘme oĂč Lise se remit debout quâelle reçut quelques gouttes dâeau en pleine figure, lui crĂ©ant un mouvement de recul relativement violent. Quand elle le regarda Ă nouveau, son expression fut offusquĂ©e. Comment osait-il ? Quand bien mĂȘme il venait de sâexcuser, le mal » Ă©tait fait, et il nâavait pas la moindre idĂ©e de la fiertĂ© de la demoiselle. Ce nâĂ©tait quâun jeu, et comme Lise Ă©tait sĂ»rement une gamine pire quâAaron, elle ne manqua pas de soupirer, un sourire malicieux sur les lĂšvres. Tout ceci nâannonçait rien de bon. TrĂšs bienâŠTu veux la guerre ? Tu vas lâavoir ! »AussitĂŽt dit, aussitĂŽt fait, Lise sâĂ©tait emparĂ©e de la casserole Ă peine placĂ©e sur le feu, dont elle contrĂŽla la tempĂ©rature, avant de la balancer dans son intĂ©gralitĂ© sur Aaron. Une bonne douche froide, en dâautres termes, puisque lâeau nâavait pas eu le temps de se rĂ©chauffer sur le feu. Elle lui lança ensuite un regard dĂ©fiant, accompagnĂ© dâun haussement de sourcil, comme si elle voulait lui faire comprendre quâĂ ce petit jeu il ne gagnerait jamaisâŠOu en tout cas, quâil ne gagnerait pas aussi facilement ! Ne jamais me provoquer, ça peut ĂȘtre mauvais pour ta santĂ© mon chou. »Lise remplit Ă nouveau la casserole avant de la remettre sur le feu, prenant un torchon au passage pour le tendre vers Aaron, avant de se mettre Ă rire aux Ă©clats. Elle tendit Ă©galement sa main comme sâil sâagissait dâun drapeau blanc annonçant la paix. A ses yeux, le jeune homme ne rĂ©torquerait sĂ»rement pasâŠDu moins, câĂ©tait ce quâelle pensait dans sa grande naĂŻvetĂ© ! On fait la paix ? » InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Dim 18 Juil - 211 Alors comme ça, la guerre Ă©tait officiellement dĂ©clarĂ©e ? Fort bien. MalgrĂ© tout, Aaron ne sâattendait pas Ă tomber sur une adversaire aussi redoutable. Il faut dire que sans la connaĂźtre, on aurait jurĂ© que cette demoiselle Ă©tait un ange tout droit tombĂ© du ciel. GrossiĂšre erreur !! Dire que quelques malheureuses gouttes dâeau Ă©taient Ă lâorigine de ce carnage qui venait de lui coĂ»ter une chemise et un pantalon fraĂźchement repassĂ©s ! La jeune homme resta figĂ© sur place durant quelques secondes, trempĂ© de la tĂȘte aux pieds et le bras lĂ©gĂšrement Ă©cartĂ© du corps tout en jetant un regard mauvais en direction de Lise. Le silence fut brisĂ© par un miaulement ;de lĂ oĂč il se trouvait, MĂ©phisto observait la scĂšne et plus spĂ©cifiquement son maĂźtre dâun air condescendant, un peu comme sâil souhaitait que Lise gagne la partie. Ce chat avait vraiment le don de lui taper sur les nerfs ! Aaron observa Lizzie et son fameux drapeau improvisĂ© avant de se mettre Ă rire. Cette fille Ă©tait vraiment incroyable !! Aurait-il pu tenter de sâamuser ainsi en prĂ©sence de Summer ? Non, bien Ă©videmment !! Mais quâimporte, la petite blonde Ă©tait bien loin de son esprit pour le moment. Le rire dâAaron ne tarda pas Ă se transformer en un lĂ©ger rictus et son regard plongea dans celui de Lise dans lâintention de ne plus jamais le quitter. Si elle pensait avoir le dernier mot sur ce coup lĂ , autant dire que la demoiselle Ă©tait en train de faire fausse route. Toutefois, Aaron prĂ©fĂ©ra jouer la carte de lâinnocence, ainsi il adopta un air angĂ©lique et se rapprocha de la jeune femme avant de lui tendre la main en signe Ă©vident de rĂ©conciliation. Ok dâaccord !! Je mâavoue vaincu pour cette fois !! AprĂšs tout, je lâai bien cherchĂ© et je reconnais que câĂ©tait une trĂšs mauvaise idĂ©e de mâen prendre Ă toi⊠»Vu sous cet angle lĂ , Aaron pouvait paraĂźtre parfaitement sincĂšre. AprĂšs tout, qui aurait pu rĂ©sister Ă ce sourire charmeur quâil maĂźtrisait depuis des annĂ©es ?? CâĂ©tait tout un art !! Aaron avait compris trĂšs tĂŽt dans sa jeunesse quâil pouvait manipuler nâimporte qui au travers dâun regard direct et dâun de ses plus beaux sourire. Mais bien entendu, il ne faut pas se fier aux apparences puisque naturellement, le jeune homme avait une autre idĂ©e derriĂšre la tĂȘte. CâĂ©tait totalement hors de question quâil laisse Lizzie avoir le dernier mot sur ce coup lĂ . Aaron Ă©tait du genre Ă se laisser facilement prendre au jeu dans ce genre de situation et de toute Ă©vidence, il ne lĂącherait pas le morceau avant dâavoir eu le dernier mot. Histoire dâappuyer ses propos, le jeune homme tendit donc la main en direction de Lise, en signe de paix si on peut dire. Lorsque la jolie brune sâempara de sa main, Aaron lâattira brusquement vers lui avant de la soulever dans ses bras comme il aurait soulevĂ© une plume. ⊠mais câĂ©tait bien plus dangereux de ta part dâessayer de tâen prendre Ă moi !! Laissez moi vous dire une chose mademoiselle Hawkins vous ĂȘtes parfaitement inconsciente !! CâĂ©tait une grave erreur de croire que tu pouvais mâamadouer avec tes yeux de biche !! Tu veux vraiment la guerre princesse ? Et bien tu vas lâavoir !! »Tout en riant comme un gamin, Aaron se prĂ©cipita dans les escaliers afin de gagner la salle de bain au plus vite. Le jeune homme nâavait toujours pas lĂąchĂ© Lise et ce, malgrĂ© ses Ă©lans de protestation qui le faisaient beaucoup rire. Pourquoi serait-il le seul Ă avoir droit Ă une douche improvisĂ©e ? Quand ils furent sur place, Aaron la dĂ©posa dans la douche et ouvrit les robinets avant de lâĂ©clabousser Ă plusieurs reprises. Remarquons toutefois quâil nâĂ©tait pas si mĂ©chant que ça Ă©tant donnĂ© quâil nâavait pas lâintention dâabĂźmer la ravissante tenue de la jeune femme⊠il sâen voudrait de faire une chose pareille. AprĂšs un nouvel Ă©clat de rire, Aaron prit soin de sâĂ©loigner rapidement avant que Lise dĂ©cide de se venger. Le jeune homme sâĂ©tait cachĂ© derriĂšre la porte de la salle de bain, laissant simplement sa tĂȘte dĂ©passer avant de lui dire quelques mots. Je crois que nous sommes Ă Ă©galitĂ© Ă prĂ©sent. Tu me fais peur⊠tâas le pommeau de douche, câest de la triche⊠»Aaron sortit de derriĂšre la porte et fit une tentation pour retourner prĂšs de Lise afin de lâaider Ă sortir de la douche mais comme il aurait dĂ» le prĂ©voir, la bataille dâeau repartit de plus belle, se faisant mĂȘme plus virulente que prĂ©cĂ©demment. A prĂ©sent, ils Ă©taient tout deux trempĂ©s de la tĂȘte aux pieds et riaient comme deux gamins. Aaron sâĂ©tait Ă©galement retrouvĂ© sous la douche et ses lĂšvres se fendirent en un large sourire lorsquâil se rendit compte que la robe de Lizzie Ă©tait blanche⊠Je pourrais croire que tu avais largement anticipĂ© ce qui viens de se passer. Ravissante cette robe... »Aaron savait quâil Ă©tait en train de jouer avec le feu et que la vengeance de Lise risquait dâĂȘtre dâautant plus virulente dĂ©sormais mais quâimporte. AprĂšs tout, ils Ă©taient tout deux trempĂ©s et leurs tenues si Ă©lĂ©gantes quelques minutes plus tĂŽt ressemblaient dĂ©sormais à ⊠à ⊠et bien Ă pas grand-chose pour ĂȘtre honnĂȘte. La soirĂ©e ne faisait que commencer et Aaron avait dĂ©jĂ lâimpression quâune vĂ©ritable complicitĂ© sâĂ©tait installĂ©e entre eux. De toute Ă©vidence, il nâavait jamais Ă©tĂ© confrontĂ© Ă un ĂȘtre aussi paradoxal et mystĂ©rieux que Lise. Il avait beau essayer de la cerner, il nây arrivait toujours pas mais câest aussi ce qui faisait le charme de la demoiselle. AprĂšs avoir lancĂ© une derniĂšre giclĂ©e dâeau en direction de Lise, Aaron se pencha afin de fermer le robinet et cesser ainsi ce carnage inutile. Lorsquâil se redressa, il fut surpris de constater cette Ă©trange et troublante proximitĂ© entre leurs deux corps. Puis ce fut le silence⊠le sourire dâAaron sâestompa lĂ©gĂšrement tandis que son regard venait tout juste de plonger dans celui de la jeune femme. Il la trouvait plus dĂ©sirable que jamais⊠CâĂ©tait le moment de prendre une dĂ©cision et il en avait conscience⊠Devait-il se laisser aller ou bien rĂ©primer cette envie foudroyante de goĂ»ter Ă ce fruit dĂ©fendu ? Aaron se disait que lâaimer serait la dĂ©truire. Pourquoi ? Et bien tout simplement parce quâil avait toujours eut cette fĂącheuse manie de dĂ©truire les personnes qui lâentouraient. Il Ă©tait sans cesse dĂ©sireux dâautre chose que ce quâil parvenait Ă obtenir et sâĂ©tait laissĂ© prendre au piĂšge plus dâune fois, songeant que ses sentiments sâapparentaient Ă de lâamour alors quâil nâen Ă©tait rien. Il nâavait pas envie de la faire souffrir. Aaron savait quâil nâĂ©tait pas le genre dâhommes en qui lâon pouvait avoir confiance. Il Ă©tait infidĂšle, aimait jouer de son charme et lâamour nâavait jamais eut le moindre sens Ă ses yeux. Il Ă©tait avide de la passion sensorielle, de ce jeu de sĂ©duction qui pouvait sâinstaurer entre lui et les femmes qui lâentouraient. Aaron Ă©tait ce quâon pourrait qualifier de sentimental refoulĂ©, il Ă©tait incapable de se fixer en un seul point ou disons plutĂŽt, une seule femme. Toujours dĂ©sireux de dĂ©couvrir autre chose, de faire de nouvelles expĂ©riencesâŠde nouvelles aventures. Lâamour nâavait eu aucun sens jusquâĂ prĂ©sent. Dâailleurs, il nâhĂ©sitait pas Ă se qualifier lui-mĂȘme de passionnĂ© plutĂŽt que dâamoureux, sachant pertinemment que la passion se consume au fil des jours et quâelle finit par sâĂ©teindre. Ce nâĂ©tait quâune maniĂšre implicite de sâexcuser pour son batifolage incessant mais cette vision des choses lui convenait parfaitement. Toutes ces pensĂ©es se bousculĂšrent bien vite dans son esprit et Aaron prĂ©fĂ©ra ne pas se laisser envahir par la peur. PlutĂŽt que de songer Ă ce quâil pourrait Ă©ventuellement lui faire subir, il se concentra sur ses propres dĂ©sirs et ce brasier qui Ă©tait en train de se consumer en lui. Sa main glissa sur la joue de Lise en un geste presque trop dĂ©licat. Tout en lui laissant le temps de reculer si elle en avait envie, Aaron se pencha vers la jeune femme, sâemparant tendrement de ses lĂšvres. Le baiser se fit plus langoureux au fil des secondes, trahissant chez lui un dĂ©sir ardant quâil nâavait jamais Ă©prouvĂ© jusquâalors. Cette fois ci, il en Ă©tait absolument certain⊠il Ă©tait en train de tomber fou amoureux. Ce sentiment Ă©tait tout nouveau pour lui mais ĂŽ combien divin !! Avait-il dĂ©jĂ ressenti des sentiments aussi intenses pour quelquâun ? IndĂ©niablement,non, le jeune homme Ă©tait persuadĂ© que ça ne lui Ă©tait encore jamais arrivĂ© et dâailleurs, il se demandait si tout le monde avait la chance de connaĂźtre ça au moins une fois dans sa vie. Cependant, il ne fallait pas se voiler la face et Aaron Ă©tait contraint dâadmettre que tous ces sentiments lui faisaient un peu peur. Il avait dĂ©sormais lâimpression dâĂȘtre totalement dĂ©pendant de cet amour naissant. Et si le rĂȘve sâarrĂȘtait brusquement ? Si jamais Lise dĂ©cidait de mettre un terme Ă tout cela ? Aaron nâavait absolument aucune raison de se poser autant de question et pourtant, câĂ©tait inĂ©vitable. Ses mains glissĂšrent sur la taille de la jeune femme et il se recula doucement, encore troublĂ© par ce baiser des plus merveilleux. Lise Ă©tait prĂ©cisĂ©ment ce qui manquait jusquâalors Ă sa vie. Quelquâun qui soit capable de lâaimer, de lui apporter une dose de bonheur juste au travers dâun simple regard, quelquâun qui lui fasse un tel effet et pour qui il aurait pu mourir dans la seconde si on le lui avait demandĂ©. Ses mains allĂšrent chercher celle de la jeune femme et il approcha de nouveau ses lĂšvres des siennes, sans pour autant lâembrasser immĂ©diatement. Il faut savoir se faire dĂ©sirer nâest-ce pas ? FrĂŽlant le coin de ses lĂšvres, puis sa bouche, il sentit le souffle de la jeune femme contre sa peau et câest Ă ce moment lĂ quâil sâempara une fois encore de ses lĂšvres pour lui donner un tendre baiser,plein de promesses. Lorsquâil se sĂ©para dâelle, le cĆur du jeune homme se laissa de nouveau emporter, sauf que cette fois ci, il se rendit compte que Lise pouvait percevoir les battements effrĂ©nĂ©s de son cĆur et quâil Ă©tait probablement dĂ©masquĂ©. Pas de chance. Comprenant immĂ©diatement quâelle savait, Aaron sentit ses joues le chauffer. Etait-il en train de rougir ??? Manquerait plus que ça tiens !! JeâŠnon câest⊠tu⊠ça mâarrive parfoisâŠnon, je veux dire que tu⊠si je te dis que câest un problĂšme de palpitations, tu ferais semblant de me croire, pas vrai ? ⊠Ooh puis câest de ta faute aussi !! »Se mettant Ă rire, Aaron fut bien forcĂ© de reconnaĂźtre quâelle nâavait pas rĂȘvĂ© et que les rĂ©actions de son corps Ă©taient assez Ă©tranges. Il Ă©tait assez mal Ă lâaise de le reconnaĂźtre, Ă vrai dire, il avait plutĂŽt espĂ©rĂ© que cela passe inaperçu mais un cĆur battant si vite, ça se remarque nâest-ce pas ? Ca me fait ça chaque fois que tu es prĂšs de moi, chaque fois que tu me parles ou ne serait-ce quand je pense Ă toi. Câest un truc de fou, jâai lâimpression de me retrouver dans la peau dâun adolescent de quatorze ans, naĂŻf et maladroit. Jâai jamais ressenti ça et Ă vrai dire, jâespĂ©rais que tu ne tâen apercevrais pas. Tu comprendras sans doute pourquoi jâestime quâil est plus prudent dâinstaurer une limite de sĂ©curitĂ© entre nous⊠»Aaron se remit Ă sourire, visiblement gĂȘnĂ© dâavoir reconnu quasiment explicitement que Lise avait une sacrĂ©e emprise sur lui. Tu dois trouver ça vraiment ridicule. » InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Dim 18 Juil - 1047 La situation Ă©tait rapidement devenue un vrai carnage dans la cuisine dâAaron, puis dans la salle de bain du jeune homme, oĂč il semblait y avoir eu une tornade. AprĂšs tout, Lise nâavait-elle pas conservĂ© le pommeau de douche fermement tenu dans ses doigts fins jusquâĂ ce quâil coupe lâeau ? Il nây avait eu dĂ©claration de trĂȘve officielle quâĂ partir de lĂ , alors quâelle riait aux Ă©clats de leur propre bĂȘtise. Deux vĂ©ritables gamins, complices comme sâils se connaissaient depuis toujours, avaient eu une vĂ©ritable bataille digne de grandes histoires de la mythologie. Et Lise adorait celaâŠCâĂ©tait la toute premiĂšre fois quâelle se laissait aller avec quelquâun dâautre quâavec William. Aaron Ă©tait si rapidement devenu essentiel Ă sa vie que cela lui faisait presque peur. Pourtant, il y avait beau y avoir une proximitĂ© Ă©vidente entre eux, Lise nâeut pas le rĂ©flexe de fuir cette fois, mais plutĂŽt de se rapprocher plus encore. Elle ne pouvait pas supporter lâabsence de contact entre eux, et Ă cause de cela, elle tournait dans son esprit la mĂȘme question en boucle Comment aurait-elle pu partir en France en le laissant derriĂšre elle ? Lise nâaurait pas pu. Ou alors, elle aurait goĂ»tĂ© tout le long de son existence lâimpression dâavoir manquĂ© quelque chose, quelque chose dâimportant avec une personne exceptionnelle qui se trouvait juste devant elle. Pour un peu, elle deviendrait romantique Ă cause de lui, elle qui sâĂ©tait jusquâĂ lors interdit de lâĂȘtre. Heureusement quâAaron Ă©tait lĂ pour faire une rĂ©flexion qui lui fit perdre son air devenu tout dâun coup si sĂ©rieux ! Effectivement, la robe de Lise Ă©tait blanche, et du fait quâelle Ă©tait trempĂ©e de la tĂȘte au pied, cela lui donnait une sorte de transparence qui aurait du mettre la jeune femme mal Ă lâaise. Cela aurait duâŠMais lâamĂ©ricaine Ă©tait soudainement devenue obnubilĂ©e par les lĂšvres dâAaron, dĂ©licieuse tentation qui la narguait depuis des jours dĂ©jĂ , et qui commençait sĂ©rieusement Ă se rapprocher dâelle. Lise aurait peut-ĂȘtre du reculer, ne pas aller trop vite, laisser le temps Ă son cĆur de reprendre des battements plus normaux avant de lui faire faire le grand saut de cette maniĂšre. Mais lĂ encore, son seul et unique dĂ©sir fut de se rapprocher plus encore, comme un besoin vital et incontrĂŽlable de lâembrasser, de crĂ©er entre eux un nouveau lien quâelle ne voudrait plus jamais briser ou manquer. La main dâAaron frĂŽla sa joue et dĂšs lors, elle se figea complĂštement, tentant dâignorer tant bien que mal les battements effrĂ©nĂ©s de son cĆur, qui semblait sâemballer avec une virulence quâelle nâavait pas connue jusquâĂ lors. Comment faisait-il pour lui clouer le bec Ă ce point ? Lise nâavait plus murmurĂ© une seule parole depuis sa dĂ©claration officielle » de paix avec Aaron, et voilĂ maintenant quâelle se surprenait Ă approcher dangereusement son visage du jeune homme, comme pour lui faire comprendre que ce dĂ©sir Ă©tait on ne peut plus partagĂ©. Et il y eut une soudaine explosionâŠLes lĂšvres douces et chaudes dâAaron sâemparĂšrent des siennes, et le cĆur de Lise fit un bond vertigineux dans sa poitrine. Une tornade dâĂ©motions nouvelles sâempara de tout son ĂȘtre, la poussant Ă en redemander encore et encore. Ce baiser, timide au dĂ©part, prit de plus en plus de profondeur tandis que Lise sây abandonnait complĂštement. Elle aurait voulu que ce divin contact ne sâarrĂȘte jamais, nĂ©anmoins, elle laissa Aaron prendre le contrĂŽle. Lorsquâil sâĂ©carta lĂ©gĂšrement dâelle, sa respiration Ă©tait presque devenue haletante, trahissant largement les battements effrĂ©nĂ©s de son cĆur. Pour un peu, elle se serait surprise Ă sâapprocher davantage de lui pour rĂ©clamer une fois encore ce dĂ©licieux contact quâelle avait espĂ©rĂ© pendant des semaines. Ce ne fut que lorsquâelle sentit les mains dâAaron venir se poser sur sa taille quâelle dĂ©cida de ne surtout pas briser ce silence les entourant et les protĂ©geant. Lise se rapprocha encore avant de goĂ»ter Ă nouveau le fruit dĂ©fendu dâAaron, pour laquelle elle se serait volontiers damnĂ©e. Certes, il fut languir le moment prĂ©cis oĂč ses lĂšvres rencontrĂšrent Ă nouveau les siennes, mais Ă lâinstant mĂȘme oĂč le contact fut dĂ©licieusement replacĂ© entre eux, Lise sentit sa peau se mettre Ă frissonner violemment, tandis que son cĆur manquait des battements de temps Ă autre. Leurs bouches respectives sâĂ©cartĂšrent bientĂŽt pour laisser leurs langues se rencontrer, se caresser doucement lâune lâautre, pour finalement se lancer dans une danse langoureuse. Lise avait vĂ©ritablement lâimpression que son cĆur allait cesser de battre, et pour tout avouer, elle aurait pu mourir tout de suite, cela ne lâaurait pas dĂ©rangĂ©e. Au moins, elle serait morte en ayant connu lâamour, la passion, le dĂ©sir irrĂ©pressible pour un ĂȘtre humain. Distance de sĂ©curitĂ© ?! Non mais tu veux rire ! ProximitĂ© de sĂ©curitĂ© tu veux dire jâespĂšre ! Ca se voit pas que jâarrive pas Ă me dĂ©tacher de toi ? »En une expression faussement offusquĂ©e, Lise sâĂ©tait relevĂ©e pour faire face Ă Aaron, comme si elle refusait catĂ©goriquement quâil ose prĂ©tendre quâil fallait quâils sâĂ©cartent lâun de lâautre. Mais dâun autre cĂŽtĂ©, elle Ă©tait visiblement amusĂ©e dâavoir pareil effet sur lui, tout en sachant quâelle ressentait exactement la mĂȘme chose. Lise avait lâimpression dâĂȘtre revenue Ă sa premiĂšre fois, oĂč elle ne savait pas quoi faire ou quoi dire de peur de se couvrir de ridicule. Et pourtant, dans ce cas prĂ©cis et comme toujours, elle se laissait porter par les Ă©vĂšnements, mais aussi par ses sentiments, quâelle sentait indestructibles. HĂ©las, ces mĂȘmes sentiments Ă©taient tout Ă fait capables de la dĂ©truire, aussi sa supplication prĂ©cĂ©dente Ă©tait Ă©vidente Ne me quitte pas ou je meurs. Pour appuyer ses propos, elle se permit de prendre lâune des mains dâAaron pour la dĂ©poser juste sur lâendroit oĂč battait son cĆur Ă une vitesse presque alarmante. Heureusement que je ne suis pas cardiaque, tu as de la chance. Sinon, je crois que tu serais bon pour mâemmener Ă lâhostoâŠNon mais tu te rends compte ? Ca devrait pas ĂȘtre permis, un truc pareil ! »Lise se mit Ă rire doucement, tentant de sâempĂȘcher de rougir Ă tout prix. Il fallait quâelle reprenne dâurgence le contrĂŽle de son corps sans quoi, elle allait probablement ĂȘtre croquĂ©e toute crue. Sensation bien peu dĂ©licate, et qui lui faisait une peur monstre, il fallait admettre ce qui Ă©tait. Aussi, sans lĂącher sa main et sans lâenlever de lâemplacement oĂč son cĆur battait Ă tout rompre, elle reprit, brisant ainsi le dĂ©licat silence qui sâĂ©tait Ă nouveau instaurĂ© entre eux Je suis dĂ©solĂ©e de briser ce moment intense, mais je vais attraper la mort si je reste dans ma robe. Oui, je sais, tu lâadores, surtout trempĂ©e de cette maniĂšre, mais si tu veux pas avoir Ă tâoccuper de moi pendant une semaine Ă cause dâune grippe ou dâun truc du genre, je crois que tu ferais mieux de mâĂ©couter. Aurais-tu lâextrĂȘme amabilitĂ© de me prĂȘter une chemise ? Promis, je saurais ĂȘtre sexy dedans. »Lise ne pu sâempĂȘcher un clin dâĆil taquin, avant de se saisir de la deuxiĂšme main dâAaron pour lâemmener hors de la salle de bain. Effectivement, la demoiselle Ă©tait complĂštement trempĂ©e, sĂ»rement Ă cause du fait quâelle Ă©tait restĂ©e dans la douche tout du long, le pommeau Ă la main. Bien quâelle nâait pas spĂ©cifiquement les bronches fragiles, il valait mieux Ă©viter de tenter le diable. AprĂšs tout, nâĂ©tait-elle pas une insomniaque suffisamment tĂȘtue pour aller faire un tour en voiture en pleine nuit fraĂźche ? La laisser dans pareil Ă©tat serait cruel, donc. Elle conserva par consĂ©quent les deux mains dâAaron dans les siennes, tĂątonnant dans le couloir de lâĂ©tage afin de trouver la chambre dâAaron, qui Ă©tait parfaitement rangĂ©e. Avait-il prĂ©vu le coup ? Non, câĂ©tait peu probable, Ă©tant donnĂ© quâils Ă©taient aussi spontanĂ©s lâun que lâautre en matiĂšre de gaminerie style bataille dâeau dans une salle de bain. NĂ©anmoins, le fait de voir une chambre de jeune homme aussi bien rangĂ©e et nettoyĂ©e lui fit lĂącher les mains dâAaron sous le coup de la surprise. WawâŠTu es dĂ©cidĂ©ment plein de surprises, Aaron Cooper ! »CâĂ©taitâŠSurprenant et charmant Ă la fois. Ce nâĂ©tait guĂšre Ă©tonnant que Summer veuille le garder avec autant dâardeur ! Seulement, Lise voulait croire quâAaron nâavait plus dâyeux que pour elle dĂ©sormais. Elle profita donc dâĂȘtre dans sa chambre pour se regarder dans le petit miroir accrochĂ© au mur, avant dâesquisser une grimace quant au carnage sur sa coiffure. Elle qui avait pris un tel soin Ă prendre rendez-vous chez le coiffeur pour lâoccasion, voilĂ lâaffreux rĂ©sultat ! Elle ne fit pas dans la dentelle et commença par dĂ©tacher chaque mĂšche Ă©tant Ă©pinglĂ©e Ă la coiffure dans son ensemble, avant de dĂ©faire dĂ©licatement son chignon, dĂ©voilant ainsi sa belle chevelure, Ă moitiĂ© trempĂ©e, tombant en cascade sur ses Ă©paules jusquâau bas de son dos. A cette Ă©poque lĂ , Lise aimait garder ses cheveux trĂšs longs⊠Bon, ne prends pas peur quant Ă ce que je vais faire, hein ? »Lise eut un lĂ©ger rire avant de prendre lâun des grands rideaux Ă©pais dâAaron comme protection avant dâenlever sa robe. Bon, se dĂ©shabiller allait probablement provoquer une syncope au jeune homme, mais elle avait dĂ©cidĂ©ment trop froid pour continuer Ă porter son vĂȘtement, si beau soit-il. Elle prit cependant le soin dâutiliser ses longs cheveux pour couvrir intĂ©gralement sa poitrine nue, puisquâelle nâavait pas pu mettre de sous-vĂȘtements sur cette partie Ă cause de sa robe dos nu. Quand elle fut apprĂȘtĂ©e » comme il fallait, elle se dĂ©cida Ă sortir de sa cachette, vĂȘtue en tout et pour tout dâune simple culotte blanche en dentelle. Et Ă©videmment, Ă peine eut-elle senti le regard dâAaron sur elle quâelle ne pu rĂ©primer un rire gĂȘnĂ©, et pourtant franc. Panique pas jâai dis ! Je vais juste aller chercher une serviette, bouge pas. »AussitĂŽt dit, aussitĂŽt fait. Lise prit le soin de retourner Ă la salle de bain pour y prendre deux serviettes de grandes tailles, une pour chacun, avant de retourner auprĂšs dâAaron. Ăvidemment, elle aurait pu sâentourer avec la premiĂšre et empĂȘcher le jeune homme dâĂȘtre gĂȘnĂ© sâil Ă©tait, mais cela nâaurait pas Ă©tĂ© drĂŽle. Au de cela, elle avait placĂ© la seconde serviette sur les Ă©paules dâAaron et avait gardĂ© la premiĂšre Ă la main. Leur proximitĂ© Ă©tait dĂ©sormais assez Ă©vidente pour quâelle se permette de glisser sa main sur la joue dâAaron, avant de prendre dĂ©licatement possession de ses lĂšvres. Ce baiser fut dâabord doux, lent, tendreâŠA lâimage de ce quâĂ©tait Lise en vĂ©ritĂ©, et cĂŽtĂ© dâelle dont personne nâavait jamais vu la couleur avant Aaron. Puis il devint plus passionnĂ©, dĂ©voilant ainsi toutes les cartes de la demoiselle en la matiĂšre, sur la profondeur de ses sentiments. Ce fut presque Ă regret quâelle mit un terme Ă ce baiser qui avait Ă nouveau affolĂ© son cĆur. CâĂ©tait Ă peine croyable quâil puisse avoir un tel effet sur elle, si bien quâon aurait pu la briser avec une infinie facilitĂ©. Elle poussa un lĂ©ger soupir avant de faire glisser sa main sur la nuque dâAaron et dâarborer un sourire franc. Ce ne fut quâĂ ce moment lĂ quâelle se permit de le regarder dans les yeux, avec son habituel air Ă©nigmatique, et cela bien quâelle sente ses joues rosirent dĂ©testablement. Tu as vraiment un effet dĂ©vastateur mon angeâŠCâest Ă peine si mon cĆur va pas sâarrĂȘter de battre dâune seconde Ă lâautre. »DĂ©vastateur, oui, câĂ©tait le mot. Et il Ă©tait assez fort pour expliquer la situation suivante, que mĂȘme Lise nâaurait pas crue possible. Aaron ? Fais-moi lââŠTu aurais la bontĂ© de me frictionner le dos ? Je suis en train de grelotter de froid⊠»Un peu plus que Lise se trahissait. Elle sâĂ©tait certes rattrapĂ©e de justesse, mais elle savait quâelle ne pourrait pas rĂ©primer ce dĂ©sir indĂ©finiment. A moins quâelle ne devienne aveugle et quâelle ne puisse plus sentir la prĂ©sence dâAaron, câĂ©tait impossible. Ses battements de cĆur sâĂ©taient Ă nouveau affolĂ©s, et ses joues commençaient Ă devenir carmin. Ătre gĂȘnĂ©e Ă ce point, ce nâĂ©tait quâĂ peine croyable. Je n'aurais jamais pu partir en France en te laissant derriĂšre moi...Ou alors, je serais revenue pour te kidnapper. Une seule seconde qui n'est pas partagĂ©e avec toi est une seconde perdue...Ahhh je deviens presque sentimentale bon dieu! Ăcoute pas ce que je dis, surtout. » InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Lun 19 Juil - 1758 Plein de surprises ? Disons surtout quâAaron ne vivait plus ici depuis un bon bout de temps mais que Sarah sâĂ©vertuait Ă vouloir conserver sa chambre dans lâĂ©tat au cas oĂč son fils dĂ©ciderait un jour de revenir vivre avec elle. Elle avait tentĂ© plusieurs fois de le convaincre, mettant en avant le fait quâelle nâĂ©tait presque jamais lĂ , que la maison avait besoin dâĂȘtre gardĂ©e etc⊠mais câĂ©tait peine perdue. Maintenant quâil avait trouvĂ© un appartement convenable dans lâun des plus beaux quartiers de San Francisco, Aaron nâavait pas lâintention de revenir. La vie ici Ă©tait des plus agrĂ©ables cela ne faisait aucun doute, mais le jeune homme avait besoin de son indĂ©pendance et Sarah avait besoin de la sienne. AprĂšs tout, ce nâĂ©tait pas forcĂ©ment agrĂ©able de venir ici avec une Ă©ventuelle petite amie alors que Sarah et Mark avaient dĂ©cidĂ© au mĂȘme moment de se faire un dĂźner aux chandelles dans lâespoir dâĂȘtre un peu tranquilles. Quoi quâil en soit, la rĂ©action de Lise le fit sourire et il haussa les yeux au ciel avec amusement en rĂ©alisant que la jeune femme Ă©tait en train de le doter de tout un tas de qualitĂ©s quâil ne possĂ©dait finalement pas. CâĂ©tait touchant de se voir idĂ©alisĂ© de la sorte. Tandis que Lise Ă©tait en train de dĂ©tacher ses longs cheveux bruns, Aaron se dirigea en direction de lâarmoire afin dâen sortir des vĂȘtements secs pour tout les deux. Il faut dire quâils nây Ă©taient pas allĂ©s de main morte avec le pommeau de douche, on aurait facilement pu croire quâils Ă©taient tombĂ©s dans la piscine tout habillĂ©s. Lorsquâil se tourna de nouveau vers Lise, celle-ci Ă©tait en train de se dĂ©shabiller, chose qui naturellement, le troubla au plus haut point. Il aurait tout aussi bien pu sortir de la chambre et au moment oĂč il sâapprĂȘtait Ă le faire, Lise sortit de sa cachette vĂȘtue en tout et pour tout dâune simple culotte en dentelle. Panique pas, panique pas !! Tâen as de bonnes toi !! Câest humainement impossible de ne pas paniquer dans un moment pareil !! »Autant prendre la situation avec humour sans quoi, il risquait de se remettre Ă bafouiller comme ça lui arrivait bien trop souvent ces derniers temps. Sans vraiment sâen rendre compte, Aaron lâobserva de la tĂȘte aux pieds, visiblement charmĂ© par cette divine apparition. Avait-il dĂ©jĂ vu pareille beautĂ© ? De toute Ă©vidence, la rĂ©ponse Ă©tait non. Cela dit, le jeune homme ne tarda pas Ă dĂ©tourner le regard, sâĂ©claircir la gorge et finalement, dĂ©poser les vĂȘtements sur le lit. Il fallait quâil cesse de la dĂ©vorer des yeux, câĂ©tait sans doute gĂȘnant Ă force ! En attendant que Lise revienne de la salle de bain, Aaron en profita pour retirer sa chemise mouillĂ©e et tenter de retrouver un rythme cardiaque a peu prĂšs normal. Ce fut impossible naturellement car le retour de Lise et la façon dont elle venait de glisser sa main sur sa joue pour sâemparer de ses lĂšvres ne fit quâaffoler son cĆur une fois de plus. Plus troublant encore, le corps Ă demi nu de Lise, se collant contre le sien durant lâĂ©change de ce baiser⊠cela pouvait ressembler Ă de la pure provocation. CâĂ©tait bien la premiĂšre fois que le jeune homme Ă©prouvait de pareils sentiments. Pour une fois, cela ne se limitait pas Ă une simple attirance physique, de vĂ©ritables sentiments dâamour Ă©taient en train de naĂźtre et de sâemparer de son Ăąme afin de lui donner un avant goĂ»t du paradis. Lorsque Lizzie mit un terme Ă ce baiser, Aaron sentit que tout son cĆur Ă©tait en train dâen rĂ©clamer davantage. Sa main glissa sur la joue de la jeune femme et il plongea son regard dans le sien avant dâesquisser un lĂ©ger sourire. Tu nâimagines mĂȘme pas ce que ça reprĂ©sente pour moi dâĂȘtre ici avec toi. Je me rends compte que⊠je croyais connaĂźtre certaines choses, certains sentiments, mais en rĂ©alitĂ©, jâavais faux sur toute la ligne. Ce que je ressens quand tu es prĂšs de moi, câest totalement inexplicable, je nâavais jamais connu ça avant. Dâailleurs, jamais je n'aurais pensĂ© pouvoir connaĂźtre ça un jour. Avec toi, tout devient facile, il suffit que tu me regardes pour que la terre entiĂšre sâarrĂȘte de tourner. »Ce quâil cru comprendre par la suite dĂ©clancha en lui une vague de frissons et une accĂ©lĂ©ration soudaine de son rythme cardiaque. A ce train lĂ , son petit cĆur nâallait sĂ»rement pas tenir le coup bien longtemps. La jeune femme venait-elle de trahir le fond de sa pensĂ©e ou nâĂ©tait-ce que le fruit de son imagination qui le poussait Ă croire quâelle avait failli dire le mot de trop ?! Sans vraiment rĂ©flĂ©chir, Aaron sâempara de la serviette quâelle tenait entre ses mains et frictionna doucement le dos de la jeune femme tandis quâelle continuait son discours. Discours qui ne manqua pas de le faire sourire davantage pour la gĂȘne quâil causait en elle que pour son contenu. Quoi quâil en soit, Aaron se sentait plus que troublĂ© par toutes ces belles paroles qui dâordinaire, le laissaient de marbre. Je suis heureux que tu ne lâaies pas fait. Je ne sais pas si jâaurais pu tenir le coup bien longtemps. Me connaissant, je reste persuadĂ© que jâaurais pris un billet dâavion afin de te rejoindre et de te dire clairement ce que jâavais sur le cĆur⊠je ne pouvais pas prendre le risque de te perdre dĂ©finitivement. Tu vois, nous sommes deux Ă devenir sentimentaux. »Aaron esquissa un nouveau sourire et laissa tomber la serviette Ă terre avant dâenlacer tendrement Lise dans ses bras. Il est des sentiments que lâon croit connaĂźtre, de ceux dont on croit avoir percĂ© le secret, qui nous paraissent Ă©vidents et pourtant⊠le jeune homme se rendait compte quâil avait fait fausse route jusquâalors. Aaron ignorait quâil Ă©tait possible dâaimer une personne Ă ce point. CâĂ©tait donc ça le vĂ©ritable amour ? Câest ce quâil Ă©tait en train de vivre avec elle, grĂące Ă elle. Comment pouvoir se passer dâun tel sentiment aprĂšs lâavoir connu ? Ce serait comme le priver dâoxygĂšne, de son Ăąme ou encore de lui arracher le cĆur. Non, câĂ©tait totalement impossible. DĂ©licatement, Aaron lâincita Ă se tourner vers lui. Se noyant dans le regard de la jeune femme, il entrelaça ses doigts avec les siens durant un instant. Ce que je ressens est tellement diffĂ©rent de tout ce que jâai vĂ©cu jusquâalors⊠ça devrait sans doute mâeffrayer mais ce nâest pourtant pas le cas. Je nâai pas envie de te perdre⊠»Telle Ă©tait sa vĂ©ritable crainte. Se redressant lĂ©gĂšrement, il laissa sa main droite glisser le long du corps mouillĂ© de la jeune femme, frĂŽlant le haut de sa cuisse, ses hanches, gagnant ensuite son bras, son Ă©paule et finalement sa joue. Aaron nâavait pas prononcĂ© le moindre mot, il nâavait plus envie de parler, juste de profiter de cet instant,a fin de graver chaque dĂ©tail dans son esprit Ă tout jamais. De sa joue, sa main glissa sous le menton de la jeune femme, laissant tout de mĂȘme son pouce dessiner le contour de ses lĂšvres pulpeuses. A ses yeux, Lise Ă©tait comme une vĂ©ritable Ćuvre dâart dont il se devait de prendre le plus grand soin⊠Sa main glissa ensuite dans son cou et dâun geste dĂ©licat, il caressa sa nuque encore mouillĂ©e et approcha une nouvelle fois ses lĂšvres de la jeune femme, sâen lâembrasser pour autant. Aaron se contenta de frĂŽler ses lĂšvres, jouant la carte de la provocation. Sa main caressait toujours doucement sa nuque tandis quâil continuait, savourant chaque seconde. Finalement, il sâempara des lĂšvres de celle quâil aimait, lâembrassant avec une passion certaine, comme si ce baiser Ă©tait le dernier quâil avait le droit dâĂ©changer avec elle, comme si dâune minute Ă lâautre,elle allait disparaĂźtre. Un baiser passionnĂ©, intense, troublant Ă la fois⊠Sans cesser de lâembrasser, Aaron la souleva dans ses bras et la transporta jusquâau lit, lâincitant Ă sâallonger tandis quâil Ă©tait penchĂ© au dessus dâelle, lâembrassant toujours avec passion et dĂ©licatesse. Lâune de ses mains caressa le ventre de la jeune femme, tandis quâil dĂ©posait quelques baisers le long de sa mĂąchoire, puis dans son cou oĂč il sâattarda un instant. Ce nâest quâau bout dâune ou deux minutes quâAaron retira sa main et reprit son souffle, plongeant une nouvelle fois son regard dans les magnifiques prunelles de la jeune femme. Câest alors quâil reprit la parole, presque Ă voix basse esquissant un sourire tendre, sincĂšre et aimant. La fameuse distance de sĂ©curitĂ© est de rigueur⊠»Quelle distance ? CâĂ©tait trop tard dĂ©sormais et il en avait parfaitement conscience. Le jeune homme souria de nouveau avant de dĂ©poser un nouveau baiser sur les lĂšvres de Lizzie, trĂšs furtif certes, mais chaque baiser entre eux avait une saveur comparable Ă une drogue dure. Aaron souffla doucement, tentant de calmer le tumulte de son corps. Cela dit, il ne voulait surtout pas que Lise sâimagine des choses Ă son sujet. Aaron savait pertinemment que sa rĂ©putation âqui nâĂ©tait pas des moindres !- le prĂ©cĂ©dait dâun pas et câest aussi la raison pour laquelle il nâavait pas envie de prĂ©cipiter les choses avec elle. Je nâai pas envie de me comporter comme un abruti avec toi⊠je tiens sincĂšrement Ă toi Lise et⊠enfin ce que je veux dire, câest que je peux attendre. Je veux pas dâune relation comme les prĂ©cĂ©dentes⊠nous deux ce sera du sĂ©rieux⊠jâai peur que tu imagines que je vais agir avec toi de la mĂȘme maniĂšre que je lâai fait avec les autres⊠câest faux. Ce que je ressens pour toi est vraiment nouveau et je nâai pas envie de te faire le moindre mal. »DerniĂšre Ă©dition par Aaron J. Cooper le Lun 19 Juil - 1858, Ă©ditĂ© 1 fois InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Lun 19 Juil - 1840 Chut...Tais-toi⊠»Il ne fallait pas y entendre par lĂ une quelconque attaque de la part de Lise, bien au contraire. Cette phrase, murmurĂ©e telle une vĂ©ritable supplication, sonnait plus comme une demande profonde plutĂŽt que comme un ordre. Lise ne pouvait pas sâempĂȘcher de contempler le visage dâAaron, dont elle craignait de voir disparaĂźtre les traits si fins dâune seconde Ă lâautre. Finalement, la tentation sâempara complĂštement dâelle, et la demoiselle se permit de lever lĂ©gĂšrement son visage pour atteindre ce doux fruit dĂ©fendu reprĂ©sentĂ© par les lĂšvres du jeune homme. Ce nâĂ©tait pas vĂ©ritablement pour lâempĂȘcher de parler quâelle faisait cela, mais bien pour lui prouver quâil nây avait aucune crainte Ă avoir. Certes, ils nâavaient pas Ă©tĂ© des enfants de cĆur de ce cĂŽtĂ©-lĂ , autant lâun que lâautre, mais qui a dit que le passĂ© importait pour lâinstant ? Personne, et surtout pas Lise. Bien Ă©videmment quâelle Ă©tait tentĂ©e de jalouser chaque femme ayant eu la chance de partager une nuit avec Aaron, mais dâun autre cĂŽtĂ©, elle voulait se dire que dĂ©sormais, elle Ă©tait la seule qui hanterait ses nuits comme il hantait dĂ©sormais les siennes. Quâimporte quâils aient Ă©tĂ© des enfants sages ou non, quâils aient cĂŽtoyĂ© de prĂšs la dĂ©linquance ou quâils aient Ă©tĂ© de vĂ©ritables dĂ©mons, Lise ne voulait mĂȘme pas y penser. Elle perdait de vue cette petite fille quâelle avait Ă©tĂ©âŠElle perdait toute notion dâenfance dans les bras dâAaron, comme si elle grandissait de seconde en seconde, sans mĂȘme pouvoir contrĂŽler quoi que ce soit. Le fait est que sa gaminerie habituelle fondait comme neige au soleil dĂšs que leurs regards avaient le malheur de se croiser, dĂšs lors que leurs mains se frĂŽlaient ou que leurs lĂšvres sâentremĂȘlaient. Lise avait lâimpression de devenir meilleureâŠAlors pourquoi craindre le fait de sâabandonner dans ses bras ? Tout en gardant cette pensĂ©e bien ancrĂ©e dans son esprit, Lise intensifia le baiser quâelle donnait Ă Aaron, qui fut bientĂŽt teintĂ© dâune passion manifeste et irrĂ©vocable. Lorsque ce divin contact fut rompu, un long soupir sâĂ©chappa dĂ©licatement des lĂšvres de Lise. La demoiselle se permit de se relever en entraĂźnant Aaron avec elle, lâincitant Ă sâasseoir juste Ă cĂŽtĂ© dâelle sur le lit. Son regard Ă©tait devenu brillant, empli de dĂ©sir, trahissant manifestement la foule de sentiments quâelle ne parvenait plus Ă contrĂŽler. AprĂšs tout, elle nâĂ©tait pas ici pour faire preuve de contrĂŽle, bien au contraireâŠSi elle avait acceptĂ© ce tout premier rendez-vous avec Aaron, câĂ©tait en connaissance de cause. Elle voulait croire que cet instant serait magique et gravĂ© Ă jamais dans leurs mĂ©moires respectives⊠Oublie cette personne que tu as Ă©tĂ©, juste pour ce soir. Je me fiche que tu aies Ă©tĂ© un homme Ă femme ou bien un solitaire, mais peu mâimporte voyons ! Je ne suis pas une sainte, je ne lâai jamais Ă©tĂ© et je ne le serais jamais. MĂȘme si je peux ĂȘtre tentĂ©e de jalouser chaque femme qui sâest un jour endormie dans tes bras, je veux croire que câest maintenant moi et moi seule qui hante tes pensĂ©es et tes nuits. Qui que tu aies Ă©tĂ©, cela mâimporte peuâŠTant que je peux dire que tu es Ă moi. »Cette notion de propriĂ©tĂ© Ă©tait peut-ĂȘtre un peu extrĂȘme, bien quâelle soit tellement vĂ©ritable aux yeux de Lise ! Aaron sâĂ©tait complĂštement emparĂ© de ses pensĂ©es, de son cĆur et de ses moindres dĂ©sirs. Il nâexistait pas une chose en elle qui ne soit pas en rapport direct avec ce sentiment passionnĂ© quâelle ressentait envers lui. Certains diraient quâil sâagit lĂ dâune malĂ©diction capable de dĂ©truire complĂštement un ĂȘtre humain Ă lâallure si fragileâŠMais il existait en Lise des ressources inĂ©puisables et insoupçonnĂ©es. CâĂ©tait une demoiselle forte dans lâadversitĂ©, aussi ne craignait-elle pas le moins du monde dâaller plus loin avec Aaron, quitte Ă se brĂ»ler les ailes dans la seconde. Elle ne pouvait pas supporter lâidĂ©e de vivre dans le regret de ne pas avoir tentĂ© la chose⊠Je ne suis pas du genre Ă avoir peur, moi, en vĂ©ritĂ©. Je suis plutĂŽt du genre Ă me battre jusquâau bout, Ă dĂ©fendre des idĂ©es bien prĂ©cises bec et ongle, quitte Ă passer pour une folle furieuse. Je ne veux pas vivre de regretsâŠAussi, je sais que je nâaurais aucun regret dâavoir poussĂ© la situation Ă son paroxysme. Tu ne me feras pas de mal, AaronâŠLaisse moi ĂȘtre celle qui va te retenir quand tu es prĂȘt Ă tomber, celle qui te relĂšvera si jamais dâaventure tu trĂ©buches, et celle qui va tâempĂȘcher de commettre des actes que tu pourrais regretter. Laisse-moi tâaimerâŠAvec tout ce que cela importe. Nâest-ce pas toi qui disait Tu sautes, je sauteâ ? Câest exactement ça. Laisse-moi me brĂ»ler les ailes avec toi, ou alors laisse-moi mourir avec le sentiment dâavoir enfin vĂ©cu. »Lise se fichait que ses phrases soient caricaturales au point dâĂȘtre assimilĂ©es Ă RomĂ©o et Juliette. Elle nâavait aucune intention que leur propre histoire se termine mal, bien au contraire, mais il Ă©tait devenu vital Ă ses yeux de lui faire comprendre quâune seule chose vĂ©cue sans lui, une seule seconde vĂ©cue loin de lui nâĂ©tait pas utile. Lise dĂ©testait lâinutilitĂ©âŠEt si elle avait lâimpression de ne pas avoir vĂ©cu jusquâĂ lors, elle avait bien lâintention de faire en sorte que cela change. Doucement, avec dĂ©licatesse et contrĂŽle, mais en y allant tout de mĂȘme. Elle nâavait jamais prĂ©tendu quâil faille faire preuve de vitesse ou de prĂ©cipitation ! Mais partager une telle chose avec Aaron Ă©tait comme Ă©videnteâŠCâĂ©tait dans lâordre des choses, non ? Je nâai plus aucun contrĂŽle sur moi quand je suis avec toi. Tu tâes emparĂ© de toutes mes armures et tu les as rĂ©duites Ă nĂ©ant. »La laisserait-il ainsi sans dĂ©fense, alors que Lise Ă©tait littĂ©ralement prĂȘte Ă sauter le pas ? Elle ne lâavait jamais Ă©tĂ© davantage dans sa vie, dâailleurs. MĂȘme lors de sa premiĂšre fois, son envie nâĂ©tait pas aussi puissante quâĂ ce moment lĂ . Comme si elle savait que jamais personne ne la ferait se sentir vivante comme Aaron. Et, comme pour ponctuer ses propos, Lise sâapprocha davantage, frĂŽlant dĂ©licatement sa joue du bout de ses doigts, avant que celle-ci ne se mette Ă explorer davantage la peau de son bien aimĂ©. Son menton tout dâabord, dont elle semblait ĂȘtre lâartiste des contours, avant de sâaventurer sur son cou, frĂŽlant sa pomme dâAdam avec une douceur dont elle ne se serait jamais crue capable. Leurs deux visages nâĂ©taient quâĂ quelques millimĂštres et pourtant, Lise nâavait pas encore dĂ©cidĂ© de se rapprocher avant dâavoir terminĂ© sa dĂ©licate dĂ©couverte. Comme si Aaron Ă©tait une Ćuvre dont elle voulait connaĂźtre chaque dĂ©tail avant de pouvoir lâexposer comme la huitiĂšme merveille du monde. Ses yeux nâavaient pas quittĂ©s ceux dâAaron, tandis que ses doigts sâaventuraient dĂ©licatement sur ses Ă©paules, larges et puissantes. Elle aurait pu dĂ©vier vers le bras, mais ce fut le torse qui fut choisi en premier. Ses courbes parfaitement dessinĂ©es furent Ă lâorigine du mordillement de lĂšvres de la part de Lise, comme si elle se pinçait de peur de rĂȘver. Tant de perfection la laissait littĂ©ralement sans voix, et le silence sâĂ©tant instaurĂ© entre eux en devenait presque protecteur. Comme si effectivement, la terre sâĂ©tait arrĂȘtĂ©e de tourner et quâils Ă©taient seuls au monde, pour leur plus grand plaisir. Les yeux de Lise devenaient plus brillants de seconde en seconde, comme si son dĂ©sir devenait plus puissant au fur et Ă mesure quâelle le dĂ©couvrait. Comment avait-elle pu vivre sans lui pendant tant dâannĂ©es ? A cet instant dĂ©jĂ , elle Ă©tait tentĂ©e de se poser la question, sans oser la faire dĂ©passer de ses lĂšvres. CâĂ©tait son petit secret Ă elle, gardĂ© jalousement dans son esprit et dans son cĆur, avant de ses doigts continuaient de dĂ©couvrir la douceur incroyable de la peau dâAaron. Tout en lui nâĂ©tait que perfection et beautĂ©, si bien que bientĂŽt, ce fut sa main toute entiĂšre qui se mit Ă descendre le long de son torse. Elle ne voulait manquer aucun dĂ©tail, faire comme un aveugle avec un texte en braille et dĂ©tailler absolument chaque parcelle de peau dâAaron. Elle se rapprocha encore davantage de lui tandis que sa main sâaventurait dĂ©sormais sur son dos, le caressant doucement tandis que ses lĂšvres sâĂ©taient lĂ©gĂšrement entrouvertes. Ce ne fut que lorsque sa main remonta jusquâĂ sa nuque quâelle se permit dâexercer une nouvelle pression pour lier tendrement ses lĂšvres aux siennes. De longues secondes demeurĂšrent en suspend pendant ce baiser qui nâavait strictement rien de virulent, bien au contraire. Ses mains sâĂ©taient dĂ©sormais Ă©chouĂ©es sur ses Ă©paules, pour mieux commencer Ă essuyer les derniĂšres gouttes dâeau quâavait laissĂ©es la chemise mouillĂ©e ĂŽtĂ©e quelques instants plus tĂŽt par les bons soins dâAaron. Il nây a aucune raison de faire les choses de maniĂšre brutaleâŠOn a tout le temps et puis, câest notre premier rendez-vous, non ? JâespĂšre que tu veux autant que moi quâil soit unique. »Pour lâĂȘtre, il lâĂ©tait dĂ©jĂ . Lise nâavait pas idĂ©e Ă quel point il allait lâĂȘtre, du resteâŠElle se contenta dâexercer Ă nouveau une pression sur les Ă©paules puissantes dâAaron afin quâil se retrouve Ă nouveau sur elle, dans la mĂȘme position que tout Ă lâheure, avant de se mettre Ă caresser sa joue dĂ©licatement. Elle dĂ©posa un baiser chaste sur ses lĂšvres avant de reprendre, les yeux brillants de passion Je vais demander ce que jâai manquĂ© de laisser Ă©chapper tout Ă lâheureâŠJe voudrais que tu me fasses lâamour Aaron. » InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Mar 20 Juil - 1622 Les premiers rayons du soleil venaient tout juste de faire leur apparition. AllongĂ© sur le cĂŽtĂ© et la tĂȘte appuyĂ©e contre sa main, Aaron ne pouvait plus la quitter des yeux. Cela faisait prĂšs dâune demie heure maintenant quâil la regardait dormir, un lĂ©ger sourire en coin et totalement sous le charme. Dâun geste tendre qui ne lui ressemblait pourtant pas, il effleura sa joue, frĂŽlant sa peau du bout des doigts, son cou, puis son Ă©paule dĂ©nudĂ©e. Elle lui semblait incroyablement fragile⊠Lorsquâelle ouvrit les yeux, son sourire sâaccentua davantage encore. Elle Ă©tait tout juste divinement belle. Il avait envie de lui dire que cette nuit avait Ă©tĂ© la plus fabuleuse de toute sa vie et quâil ne voulait plus la quitter mais les mots Ă©taient dĂ©sormais superflus. Un simple regard suffisait Ă lui faire comprendre ce quâil ressentait. Câest alors quâĂ son tour, elle souria avant de venir se blottir dans ses bras, son corps dĂ©nudĂ© venant se plaquer contre le sien. Jamais encore il nâavait Ă©prouvĂ© une sensation aussi intense. DĂ©licatement, il passa sa main dans les cheveux de la jeune femme et dĂ©posa un baiser dans son cou. Je tâaime⊠»⊠voila les seules paroles quâil fut capable de murmurer prĂšs de son oreille. Il le savait dĂ©sormais câĂ©tait elle quâil aimerait jusquâĂ la fin de ses joursâŠDifficile dâexprimer quel Ă©tait lâĂ©tat dâesprit dâAaron en cette belle matinĂ©e ensoleillĂ©e. Le jeune homme afficha un lĂ©ger sourire qui ne le quitta pas de la matinĂ©e, ses pensĂ©es Ă©tant toutes tournĂ©es vers cette nuit fabuleuse quâils venaient de passer. Aaron Ă©tait surpris par lâampleur de ses propres sentiments et surtout, pour la premiĂšre fois de sa vie, il avait prononcĂ© les mots magiques, il avait dit Ă Lise quâil lâaimait⊠Jamais, pas une seule fois il nâavait prononcĂ© ces douces paroles en prĂ©sence dâune autre femme. A vrai dire, ses sentiments nâavaient jamais Ă©tĂ© aussi limpides. AprĂšs une matinĂ©e passĂ©e en amoureux, Ă savoir, petit dĂ©jeuner au lit, cĂąlin plein de tendresse et longue discussion au sujet de tout et de rien, les deux Ă©tudiants sâĂ©taient levĂ©s, douchĂ©s, habillĂ©s et sâĂ©taient finalement rendus Ă lâUniversitĂ© afin dâassister aux derniers cours de la journĂ©e. Certes lâenvie nâĂ©tait pas au rendez vous et si ça ne tenait quâĂ lui, Aaron aurait volontiers fermĂ© les volets, coupĂ© son tĂ©lĂ©phone portable et serait restĂ© encore une Ă©ternitĂ© Ă serrer Lizzie dans ses bras. Plus rien nâavait dâimportance Ă part elle dĂ©sormais⊠de façon totalement inexplicable, il savait que sa vie dĂ©pendrait entiĂšrement de son amour Ă partir de ce jour. La question qui lui revenait souvent en tĂȘte Ă©tait de savoir comment il avait pu tenir le coup jusquâĂ aujourdâhui. Sans Lise, sa vie paraissait totalement dĂ©nuĂ©e de sens. Certaines mauvaises langues hâhĂ©siteraient pas Ă dire quâil sâagit lĂ que de lâeuphorie des premiers jours, des premiers Ă©mois et des premiers instants passĂ©s ensemble. Aaron savait que câĂ©tait tout autre chose et que ses sentiments dĂ©passaient de loin les limites de lâentendement. Ce nâĂ©tait dĂ©cemment pas possible dâaimer quelquâun Ă ce point et en si peu de temps. Pourtant, le jeune homme ne pouvait nier ses sentiments et leur intensitĂ©. Pour la premiĂšre fois de sa vie, Aaron nâĂ©tait pas effrayĂ© Ă lâidĂ©e de sâengager dans une relation sĂ©rieuse. A vrai dire, ça lui semblait mĂȘme Ă©vident. Maintenant quâil avait goĂ»tĂ© au bonheur et Ă la perfection, il ne pourrait plus jamais sâen passer. Câest donc main dans la main quâils traversĂšrent les couloirs de lâUniversitĂ©, nâĂ©chappant pas aux regards abasourdis des Ă©tudiants incrĂ©dules qui croisĂšrent leur chemin. Aaron se demanda alors quelle serait la rĂ©action de Summer si elle apprenait quâil lâavait dĂ©laissĂ© pour Lise quâelle considĂ©rait dĂ©sormais comme sa pire ennemie. De toute Ă©vidence, Lloyd ne manquerait pas une occasion de la consoler, depuis le temps quâil rĂȘvait de lui mettre le grappin dessus !! Enfin bon, toutes ces histoires lui passaient par-dessus la tĂȘte dĂ©sormais et Aaron Ă©tait bien content dâavoir Ă©chappĂ© Ă cette bande dâhypocrites. Le jeune homme accompagna Lise jusque devant son amphi avant de glisser une main sous son menton pour lui voler un ultime baiser⊠Je risque de trouver le temps affreusement long sans toi⊠Le premier qui sort attend lâautre ? » InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Mar 20 Juil - 1703 Je tâaimeââŠcette simple phrase dictĂ©e par Aaron un peu plus tĂŽt avait eu lâeffet dâune vĂ©ritable bombe sur le cĆur de Lise. Si bien quâelle avait lâimpression quâil sâĂ©tait totalement emparĂ© de son cĆur en une seule seconde. Cette phrase, dieu sait quâelle lâavait attendueâŠEt savoir que ses sentiments Ă©taient partagĂ©s ne pouvait pas la rendre plus heureuse. CâĂ©tait bien simple, Lise pensait que rien nâaurait pu lui enlever ce sourire complĂštement bĂ©at, quâelle avait conservĂ© toute la journĂ©e, depuis lâinstant oĂč elle avait quittĂ© Aaron Ă lâentrĂ©e de son amphi. Le premier sorti attend lâautreâŠPour sĂ»r, dĂšs que la fin de son dernier cours allait retentir, elle allait sâempresser de courir le retrouver. Du moins, câĂ©tait ce quâelle prĂ©voyaitâŠJusquâĂ ce quâune vision dâhorreur dĂ©file sous ses yeux alors quâelle sortait de son propre amphi pour se rendre Ă son avant dernier cours. Son pĂšre, prĂ©sent au bout du couloir, la toisait hautainement avec une froideur qui nâĂ©tait digne que de lui. Lâespace dâun instant, elle tenta de fuir, Ă©videmment. Mais un des gardes du corps de son pĂšre sâĂ©tait positionnĂ© derriĂšre elle, lâempĂȘchant de prendre la poudre dâescampette. Evidemment, la discussion fut houleuse, trĂšs houleuse. James ne mĂącha pas ses mots, devant une Lise complĂštement atterrĂ©e. CâĂ©tait Ă peine si elle avait le temps dâen placer une, et du reste, elle ne savait mĂȘme pas ce quâelle pourrait dire pour sa dĂ©fense. De toute Ă©vidence, son pĂšre Ă©tait lĂ pour la ramener de force Ă San Francisco, mais Lise ne pu sâempĂȘcher de lui demander sâil faisait cela pour lui-mĂȘme, pour sa foutue rĂ©putation, ou bien par amour pour sa fille, parce quâelle lui manquait. Quelle idiote Ă©tait-elle, de poser une question pareille ! Dâailleurs, la rĂ©ponse fut nette et sans appel Tâaimer ? Comment pourrait-on aimer un caillou dans sa chaussureâŠIl nâen fallut pas plus pour que Lise soit prise par un Ă©lan de courage insoupçonnĂ© et parvienne Ă se faufiler entre les mailles du filet. Sans rĂ©flĂ©chir, elle sâĂ©tait mise Ă courir aussi vite quâelle le pouvait, faisant tomber son sac Ă bandouliĂšre dans la bataille, contenant son tĂ©lĂ©phone, ses papiers et ses livres de cours. Il fallait quâelle sâĂ©chappe, par consĂ©quent elle admit que câĂ©tait une perte supportable. Son pĂšre ne la fit pas chercher tout de suite, du reste. Il avait dâabord une affaire Ă rĂ©gler avant de courir dans toute la ville pour mettre le grappin sur LiseâŠIl ne devait pas ĂȘtre moins de dix sept heures lorsque la porte de lâamphithéùtre de lâUFR 8 sâouvrit doucement, laissant entrevoir une silhouette que Grant Spencer ne pu sâempĂȘcher de regarder avec un haut sentiment de dĂ©goĂ»t. Cette personne qui venait de se prĂ©senter devant lui, le mĂ©decin avait tant espĂ©rer ne jamais la recroiserâŠEt il nâosait mĂȘme pas espĂ©rer quâil vienne faire simplement un brin de causette, tout en interrompant un cours on ne peut plus important au programme de ses premiĂšres annĂ©es. Ce fut donc dans le silence le plus total, et sous le regard Ă©bahi dâune bonne trentaine dâĂ©tudiants que les hommes se toisĂšrent durant de longues minutes. Ils se connaissaient depuis de trĂšs nombreuses annĂ©es, et pourtant, ils ne se gratifiĂšrent lâun lâautre dâaucune marque dâaffection. Aucune poignĂ©e de main, aucune accolade au rendez-vous. Juste un regard froid Ă©changĂ©, Ă croire que le premier Ă baisser les yeux serait dĂ©finitivement qualifiĂ© de faible. Pour une fois, Spencer nâĂ©tait pas considĂ©rĂ© comme le professeur avenant et soucieux de lâavenir de ses Ă©lĂšvesâŠFace Ă cet homme quâil haĂŻssait cordialement, il devenait un vĂ©ritable chien enragĂ©, persuadĂ© que cette pourriture nâavait fait que lui voler la femme de sa vie. Vous lâaurez devinĂ©, lâhomme qui venait de faire irruption dans lâamphithéùtre nâĂ©tait autre que lâĂ©minent James Hawkins, ponte parmi les scientifiques, et milliardaire le plus influent de New York. Sa rĂ©putation nâĂ©tait plus Ă faire, et aussi vrai quâil Ă©tait respectĂ© et admirĂ© dans le monde des affaires, il Ă©tait aussi un piĂštre gĂ©niteur. Nâayant jamais eu aucun respect ni aucune affection pour sa fille Lise, sa seule prĂ©sence ici attestait du fait quâelle nâĂ©tait quâun objet quâil voulait sâempresser de contrĂŽler Ă nouveauâŠPour mieux sâen dĂ©barrasser par la suite, une fois quâelle serait dĂ©finitivement inutile Ă ses yeux. Cet homme pressĂ© et impitoyable nâavait aucune envie de faire dans la dentelle ce soirâŠAussi, Ă la surprise gĂ©nĂ©rale, ce fut lui et lui seul qui brisa le silence pesant lourdement dans la piĂšce, avec son habituel ton hautain et sĂ»r de lui. Je ne suis pas ici pour tergiverser. Ma requĂȘte est simple, et jâattends de toi que tu la respectes en faisant fi du passĂ©, Spencer. Je te demanderais Ă lâavenir dâoublier lâexistence mĂȘme de ma fille. Elle nâaura plus besoin de toi dĂ©sormais, puisque je compte bien la ramener Ă New York avec moi. » Je nâai aucun ordre Ă recevoir de toi, Hawkins, et aussi vrai que je suis mĂ©decin, je sais pertinemment comme tu traites Lise ! Ton dĂ©sintĂ©rĂȘt absolu pour ce quâelle ressent ou souhaite est bien la preuve que tu tâen moques comme de ta premiĂšre chemise. Nâen as-tu pas assez de briser constamment sa vie ? Nâaura-t-elle dâimportance que lorsquâelle sera parvenue Ă mettre fin Ă ses jours ?! » Dit celui qui nâa jamais eu dâenfantâŠAllons Spencer, maĂźtrise-toi donc, tu te rendrais encore plus ridicule que tu ne lâes dĂ©jĂ en poursuivant sur cette voie. » Je suis au moins assez fin pour constater que tu as profitĂ© de lâabsence dâAmaury Delierre pour venir contraindre ta fille Ă te suivre ! Ta lĂąchetĂ© suprĂȘme mâĂ©tonnera toujours. » Ah, ce cher AmauryâŠCâest un français. Il a un ton qui ne souffre aucune rĂ©plique et il connait trop bien Lise. Contrairement Ă toiâŠPenses-tu sincĂšrement quâun pĂšre puisse accepter de voir sa fille fuguer pendant deux ans pour devenir mannequin ? LâidĂ©e mĂȘme quâelle ait pu jouer les apprenties prostituĂ©es dans ce mĂ©tier me rĂ©vulse ! Elle a souillĂ© le nom quâelle porte depuis sa naissance, et il nâest pas question que je la laisse poursuivre dans cette voie. Câest une fille intelligente, trop peut-ĂȘtre, et je regrette ĂŽ combien quâelle ne soit pas un garçon. Je lâaurais volontiers formĂ©e pour devenir ma conseillĂšre, si seulement ses hormones fĂ©minines se taisaient. Il est plus que temps que cette petite capricieuse retrouve sa place ! En dĂ©finitiveâŠComme je te lâai dis, je ne suis pas ici pour Ă©couter tes sornettes. Je te demande juste de couper dĂ©finitivement les ponts avec Lise. Ne me force pas Ă tây contraindre, tu sais bien que tu ne gagnerais pas. Tu perdrais exactement de la mĂȘme façon que tu as perdu Anne, Ă lâĂ©poque⊠» Lise nâest pas un objet ! Tu as vu comment tu penses dâelle ? Ce nâest quâun paquet de neurones, Ă tâattendre, ou une prostituĂ©e ! Merde James, quand vas-tu comprendre que câest un ĂȘtre humain ? As-tu oubliĂ© le jour oĂč tu lâas rĂ©cupĂ©rĂ©e souillĂ©e du sang dâAnne ! » Fais silence ! Tu regretteras tes paroles, Spencer ! Encore un seul mot et je jure devant Dieu que je te briserais en mille morceaux, dussĂ©-je ne me concentrer que sur cela ! »Spencer Ă©tait le spĂ©cialiste pour faire sortir James Hawkins de ses gongs. Cela dit, en excellent comĂ©dien quâil Ă©tait, le milliardaire ne sâabandonna pas Ă une colĂšre absolue. Il se reprit, en remettant en place sa cravate hors de prix avant de se racler la gorge. Une fois parfaitement calme, il reprit dâun ton toujours aussi hautain Allons SpencerâŠNe me dis pas que Lise puisse motiver quelconque tempĂ©rament combattif chez toiâŠVois donc la vĂ©ritĂ© en face ! Ce nâest quâune idiote, une Ă©cervelĂ©e, une gamine gĂątĂ©e et capricieuse ! Si je peux encore la faire marier Ă son prĂ©tendant, il faut que je mâestime heureux ! Bon dieu, qui voudrait dâune folle furieuse comme elle ? » Tu parles de ta propre filleâŠTu la dĂ©nigres, devant toute une assemblĂ©e, alors quâelle surpasse trĂšs allĂšgrement ton QI et que sa culture est extraordinaire pour une fille de son Ăąge ! Hawkins, tu nâes mĂȘme pas quâun pourri, câest TOI lâinutile dans lâhistoire ! Pourquoi je me bats pour elle ? Mais parce quâelle a une valeur que tu nâauras jamais ! Câest la fille que je nâai jamais eue, et je sais Ă quel point elle est intelligente et douĂ©e dans beaucoup de domaines. Elle nâa pas mauvais caractĂšre, elle a DU caractĂšre. Nuance. Outre le fait que je la respecte autant que je respectais Anne, tu peux me briser si tu le veux, je continuerais Ă croire en elle et Ă lâaider. Sans quoi, je la pense capable de se flanquer une balle dans la tĂȘte ! Câest cela que tu veux ?! Câest donc ça ta finalitĂ©, ton but Hawkins ? » Et bienâŠSi elle a rĂ©ussi Ă se faire apprĂ©cier de toi Ă ce point, câest quâelle a amĂ©liorĂ© considĂ©rablement son talent de comĂ©dienne. Elle tâa embobinĂ© avec son numĂ©ro de fausse gentille, nâest-ce pas ? » Pauvre pourriâŠTon fric te rongeras dĂ©cidĂ©ment jusquâĂ ce que lâun de tes enfants se foute en lâair. OĂč est Lise ?! » Tu auras des nouvelles de mon avocat trĂšs prochainement, Spencer. On verra si tu es aussi loquace devant une cour. Pour le moment, Lise mâa filĂ© entre les doigtsâŠIl semble quâelle nâait pas acceptĂ© le fait que je rĂ©ponde Ă sa question. Quelle idĂ©e de me demander si je lâaime, aussi ? Tu nâauras pas le temps de lui dire au revoir, de toute maniĂšre, petit mĂ©decin. »Et James Hawkins avait quittĂ© la salle, non sans envoyer un dernier sourire proprement narquois et satisfait Ă la figure de Spencer. Le faire sortir de ses gongs pour avoir une raison de lâattaquer, voilĂ bien son seul et unique souhait. Une fois que la porte fut refermĂ©e derriĂšre lui, ce fut un Spencer parfaitement paniquĂ© qui se saisit de son cellulaire pour appeler toutes ses connaissances du coin. Connaissant la douceur lĂ©gendaire du milliardaire, il avait du sortir les pires horreurs Ă sa fille pour quâelle parvienne Ă lui filer entre les doigts une fois encore. Lise devait ĂȘtre dans un Ă©tat de colĂšre et de dĂ©tresse profonde, aussi, le mĂ©decin avait peur quâelle ne cherche Ă se foutre en lâair dĂ©finitivement. Il ne connaissait pas sa rĂ©sistance, mais il connaissait suffisamment James pour savoir Ă quel point il pouvait ĂȘtre pourri. Il passa un nombre incalculable de coups de fil, y compris Ă lâassistant dâAmaury Delierre, afin quâil prĂ©vienne son patron que Lise Ă©tait potentiellement en danger. Ce nâĂ©tait pas complĂštement faux, du resteâŠMais oĂč diable Ă©tait Lise ? CâĂ©tait une excellente question. AprĂšs avoir rĂ©ussi Ă sâĂ©chapper par on ne sait quel miracle, elle avait roulĂ© comme une folle au volant de son magnifique cabriolet, jusquâau moment oĂč elle lâavait garĂ© deux rues plus loin que le bar oĂč elle travaillait. A partir de dix sept heures, Lise avait commencĂ© Ă se souler gentiment, buvant verre de vodka sur verre de vodka, sans compter les nombreuses biĂšres quâelle sâenfila Ă une vitesse impressionnante, avant de se saisir de trois bouteilles de tequila pour mieux aller cuver son alcool plus loin. Mary avait bien essayĂ© dâintervenir, sans aucun rĂ©sultat. Alors quâelle cherchait Ă raisonner Lise, la demoiselle sâĂ©tait Ă©nervĂ©e et avait fuit la serveuse comme la peste. OĂč elle se rendait ? Lise lâignorait complĂštement elle-mĂȘmeâŠLa demoiselle ne reprit pas sa voiture, et commença Ă marcher droit devant elle, ses bouteilles dâalcool Ă la main. Elle avait un dĂ©bardeur qui recouvrait sa poitrine et montrait largement son ventre plat, ainsi quâun short qui ne pouvait pas ĂȘtre plus court, les deux de couleur noire. En somme, elle avait une vĂ©ritable tenue pour provoquer les violeursâŠPar chance, elle passa un temps considĂ©rable sur la premiĂšre plage quâelle trouva, dĂ©serte Ă cause de la grisaille qui pointait Ă lâhorizon. Lâeau Ă©tait bien trop fraĂźche pour tenter une quelconque baignade, et le vent Ă©tait si fort que les quelques fous qui avaient bronzĂ© cette aprĂšs-midi Ă©tait partis. En somme, Lise pu continuer sa soirĂ©e de beuverie sans craindre dâĂȘtre repĂ©rĂ©e. En lâespace dâune heure, Lise sâenfila la premiĂšre bouteille de tequila, commençant gentiment Ă sentir ses sens Ă©chapper Ă son contrĂŽle. Elle sâĂ©tait dĂ©sormais relevĂ©e du sable oĂč elle Ă©tait assise, ne sachant pas quâil Ă©tait maintenant vingt et une heure. Combien de temps avait-elle marchĂ©, ou passĂ© sur la plage ? MystĂšre et boule de gomme. Elle oublia une bouteille dans le sable, gardant la derniĂšre rescapĂ©e Ă la main, en recommençant Ă marcher, ou plutĂŽt Ă tituber comme une Ăąme en peine sur la route qui Ă©tait dĂ©serte. Lâesprit complĂštement ailleurs, elle ne vit pas ce malheureux petit caillou au bord de la route, contre lequel elle trĂ©bucha avant de tomber Ă terreâŠSur sa bouteille dâalcool pleine, qui se brisa sous le choc. RĂ©sultat des courses Un mollet droit complĂštement Ă©corchĂ©, couvert de bouts de verre, saignant relativement abondamment. Lise Ă©tait dans un Ă©tatâŠSi elle sâĂ©tait vue elle-mĂȘme, probablement aurait-elle eu peur de ce fameux reflet dans le miroir. Mais sans ressentir la moindre douleur, ni mĂȘme la moindre sensation Ă cause de la dose dâalcool quâelle avait ingurgitĂ©e, Lise se releva et se remit Ă marcher, dans un ultime effort. BientĂŽt, elle parvint jusquâĂ la rue quâelle avait quittĂ©e le matin mĂȘme, en compagnie dâAaronâŠDans cette rue se trouvait la maison de la mĂšre adoptive dâAaron, Sarah. Et Lise parvint Ă tituber jusquâau pallier de cette fameuse maison, avant de sâĂ©crouler littĂ©ralement sur le paillasson aprĂšs avoir sonnĂ© une fois Ă la porte. Avait-elle conscience quâelle se trouvait en danger ? Inconsciemment, sĂ»rement, puisquâelle avait rĂ©ussi Ă retrouver un chemin familier dans la brume. Mais Ă peine avait-elle appuyĂ© sur le bouton quâelle sâĂ©tait Ă©vanouie lĂ , le mollet en sang, le visage livide et les membres contractĂ©s au possible. Dans sa sorte de coma, elle ne murmurait quâun seul et unique mot⊠Aaron⊠» InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Jeu 22 Juil - 1828 Ne sois pas stupide !!! Je sais que tu lâas vu partir !! Ou est-elle allĂ©e ? » Hum⊠il est effectivement probable que je sache dans quelle direction Cendrillon sâen est allĂ©e mais⊠je ne sais pas si ça vaut le coup que je parle. Tu me donnes quoi en Ă©change ? » Ne joue pas avec ma patience Summer. » Ne tâemballe pas, je ne joue pas !! Câest juste que je ne vois pas pourquoi je ferais ça. Surtout pourâŠâelleâ. Pourquoi fuit-elle son paternel au juste ? DĂ©cidĂ©ment, cette fille est et demeurera toujours une vĂ©ritable idiote ! »AppuyĂ©e contre son casier, la jeune femme mĂąchouillait tranquillement son chewing-gum fruits de la passion, tout en tortillant une mĂšche de ses longs cheveux blonds. Summer avait assistĂ© au spectacle dans son intĂ©gralitĂ© et nâĂ©tait pas peu fiĂšre dâavoir rĂ©ussi Ă obtenir autant dâinformations au sujet de Lise. Voila de quoi alimenter ses conversations dĂ©jĂ riches en verbiages inutiles et mĂ©disants. La jeune femme se trouvait dans le couloir au moment oĂč Lise avait pris la fuite. En rĂ©alitĂ©, Summer Ă©tait en train de regagner le cours de mĂ©decine lorsquâelle avait croisĂ© la fille Hawkins qui prenait la tangente. Sur le coup, elle avait pensĂ© que Lise cherchait un nouveau moyen original et extravagant de se mettre en scĂšne, jusquâau moment oĂč elle avait aperçu James Hawkins entrer dans la salle de cours. Naturellement, elle lâavait suivi afin de prendre place et dâassister Ă la conversation entre le milliardaire et Spencer, comme on assiste Ă une piĂšce de théùtre. Cette situation cocasse nâavait pas manquĂ© de la faire rire. Aaron aurait mĂȘme jurĂ© lâavoir vu prendre des notes. DĂ©sormais, les deux Ă©tudiants qui formaient autrefois le couple le plus enviĂ© du campus, se lançaient de sombres regards, attendant impatiemment que lâun dâeux se dĂ©cide enfin Ă cĂ©der. Aaron Ă©tait sur le point de reprendre la parole au moment oĂč Spencer, qui se tenait prĂšs de lui depuis le dĂ©but, prit enfin la parole. Tu nâes dĂ©cidĂ©ment quâune enfant ridicule et Ă©cervelĂ©e comme tes derniĂšres frasques lâont prouvĂ© une Ă©niĂšme fois !! Alors sers toi de ta tĂȘte pour changer et dis nous ce que tu sais !! »Le mĂ©decin venait de perdre patience et le ton quâil venait dâemployer Ă©tait glacial et Ă©tonnement surprenant quand on connaĂźt la douceur et la patience qui Ă©manaient de cet homme en temps normal. Dâailleurs, la petite blonde qui nâavait pas lâhabitude de se trouver face Ă autant dâautoritĂ© sursauta lĂ©gĂšrement. Depuis quand son professeur de mĂ©decine la traitait-il dâĂ©cervelĂ©e ?? Surprenant le sourire narquois de MĂ©g, Summer lui assena un coup de coude avant de remettre en place les plis de sa jupe rose et blanche, tenue de la parfaite cheerleader selon la principale intĂ©ressĂ©e. Finalement, elle soupira et planta son regard dans celui de Spencer, comprenant que si elle ne se dĂ©cidait pas Ă parler, elle risquait de passer un sale quart dâheure. Je vous promets que je ne sais pas oĂč elle se trouve. Tout ce que jâai vu, câest que CendrâŠque Lise partait en courant, elle a dâailleurs laissĂ© tomber son sac en partant. » Elle a pris quelle direction ? »Avant de continuer, Summer se tourna, ouvrit son casier et au grand Ă©tonnement dâAaron en sortit le sac de Lise quâelle lui tendit. Le jeune homme ne doutait pas un seul instant du fait quâelle ait pu jeter un coup dâĆil Ă lâintĂ©rieur dans lâespoir de trouver quelque chose dâintĂ©ressant mais fut surtout surpris de constater quâelle ne cherchait pas Ă cacher quâil se trouvait en sa possession. Cette fille lĂ Ă©tait dĂ©finitivement incomprĂ©hensible. Elle est partie en direction du parking je crois. ⊠Je vous assure que je ne sais rien de plus ! Je ne suis pas la seule Ă avoir assistĂ© Ă la scĂšne !! A propos, son pĂšre semblait plutĂŽt en rogne contre vous, quâest-ce que vous lui avez fait ? » Ce ne sont pas tes affaires jeune fille. Aaron, vient avec moi ! »Laissant les deux jeunes femmes, Aaron suivit Spencer jusque sur le parking oĂč il jeta un rapide coup dâĆil circulaire avant de constater quâeffectivement, la voiture de Lise avait disparu. Il fallait impĂ©rativement la retrouver avant que James Hawkins ne le fasse lui-mĂȘme. AprĂšs le dĂ©part du pĂšre de Lise, Spencer lui avait vaguement expliquĂ© la situation et avait sollicitĂ© son aide afin de retrouver la jeune femme. Selon lui, elle Ă©tait capable du pire et cette simple pensĂ©e suffisait Ă effrayer Aaron. Tu nâas pas une idĂ©e de lâendroit oĂč elle pourrait ĂȘtre ? Yâa-t-il un lieu quâelle aime en particulier ? Un endroit oĂč elle pourrait se rĂ©fugier tout en sây sentant en sĂ©curitĂ© ? Bon sang, cette situation est infernale !! » Ne vous inquiĂ©tez pas, nous allons la retrouver, jâen suis certain. On va commencer par aller chez elle. » Aaron espĂ©rait sincĂšrement ne pas se tromper. Il fallait impĂ©rativement quâil retrouve Lise et quâil la protĂšge de ce pĂšre qui voulait la ramener de force Ă New York. Hors de question quâil prenne le risque de la perdre !! Le jeune homme conduisit Spencer jusquâĂ sa voiture et ensemble, les deux hommes se rendirent jusquâĂ la villa dâAmaury. Sachant pertinemment que le mĂ©decin serait absent, Aaron escalada le portail et couru jusquâĂ lâespace personnel de Lizzie, dans lâespoir de la trouver. Malheureusement, lorsquâil entra, la maison Ă©tait vide et Lise nâavait laissĂ© aucune trace de son passage. Aussi vite quâil Ă©tait entrĂ©, Aaron regagna la voiture et annonça Ă Spencer quâil fallait chercher dans une autre direction. Le mĂ©decin dĂ©cida quâil serait sans doute plus prudent de se sĂ©parer afin dâĂ©largir les recherches, chose que le jeune homme approuva immĂ©diatement. Rapidement, les deux hommes Ă©changĂšrent leurs numĂ©ros de tĂ©lĂ©phone afin de se tenir au courant de la tournure que prendraient les Ă©vĂšnements. Spencer sortit de la voiture et grimpa dans un taxi, tandis quâAaron prit lâinitiative de passer faire un saut au bar oĂč travaillaient Lise et Mary afin de savoir si cette derniĂšre avait eu des nouvelles. Quand il fut sur place, Aaron entra prĂ©cipitamment dans le bar, cherchant Mary du regard. A la place, il croisa les yeux Ă©berluĂ©s de Lloyd qui se demandait probablement quelle mouche lâavait piquĂ©. Quâest-ce qui se passe Aaron, tâas lâair de⊠» Ou est Mary ? » Mary ?! Elle est partie yâa une demie heure environ. Yâa un problĂšme ? » Faut que je retrouve Lise, je ne sais pas oĂč elle est. Jâai pas le temps dâen parler Lloyd, si tu vois lâune ou lâautre tu mâappelles, compris ? » CâĂ©tait donc vrai ce que Summer mâa ⊠»⊠racontĂ© ? » Aaron nâeu pas le temps dâentendre la fin de la question que dĂ©jĂ , il se trouvait dehors. Bon sang, mais oĂč pouvait-elle ĂȘtre passĂ©e ?! Il fallait impĂ©rativement quâil sillonne la ville et quâil la retrouve !! Le jeune homme remonta dans sa voiture et juste au moment oĂč il dĂ©marrait, entendit son tĂ©lĂ©phone sonner. IntĂ©rieurement, il pria pour que ce soir Spencer, prĂȘt Ă lui annoncer une bonne nouvelle ! Pas de chance câĂ©tait le numĂ©ro de Sarah qui venait de sâafficher ! Avec toute cette histoire, Aaron avait complĂštement oubliĂ© que sa mĂšre rentrait aujourdâhui et quâil lui avait promis de venir dĂźner pour fĂȘter son retour. Il sâapprĂȘtait Ă inventer une excuse lamentable mais Sarah ne lui laissa pas le temps de dire quoi que ce soit. Aaron, il faut que tu viennes immĂ©diatement. Je viens de trouver une jeune fille devant la porte et⊠elle demande Ă te voir. Oh je tâen prie, rentre, elle nâa pas lâair dâaller trĂšs bien et elle est blessĂ©e. » Quoi ?! Jâarrive immĂ©diatement !! »Le jeune homme dĂ©marra en trombe, empruntant la nationale menant au quartier rĂ©sidentiel dans lequel vivait Sarah. Tout en conduisant, il composa le numĂ©ro de tĂ©lĂ©phone de Spencer Spencer ? Je crois savoir oĂč se trouve Lise⊠» Aussi vite que lâĂ©clair, Aaron fut devant la villa. Il laissa sa voiture devant lâallĂ©e et entra Ă toute vitesse Ă lâintĂ©rieur. Sarah avait pris soin dâallonger Lise sur le canapĂ© et dĂ©sormais, elle se tenait debout Ă cĂŽtĂ© dâelle, lâair visiblement inquiet. Aaron se prĂ©cipita vers la jeune femme et constata rapidement lâampleur des dĂ©gĂąts avant de lâĂ©treindre doucement. Lise !! Bon sang ce que tu mâas fait peur !! Tâen fais pas mon amour, on va trouver une solutionâŠĂ§a va sâarranger. » Je nâai pas osĂ© la toucher, je crois que nous devrions appeler un mĂ©decin⊠» Pas de mĂ©decin !! »Sarah venait tout juste de dĂ©crocher le tĂ©lĂ©phone quâAaron le lui arracha des mains pour mieux le raccrocher. Sa mĂšre lui lança un regard interloquĂ© et croisa une nouvelle fois ses bras devant elle. Bon sang, mais tu vas enfin mâexpliquer ce qui se passe dans cette maison ?! Qui est cette fille ? »Aaron haussa les yeux au ciel, il se serait largement passĂ© des questions pour le moment. Sans rĂ©pondre immĂ©diatement, il observa attentivement les plaies de Lise puis sâempara de son tĂ©lĂ©phone portable pour appeler Spencer. Je peux savoir Ă qui tu tĂ©lĂ©phones ? » Un mĂ©decin ! »Nouveau regard choquĂ© de la part de Sarah qui ne semblait plus rien comprendre Ă la situation. Elle se laissa dâailleurs tomber dans lâun des fauteuils du salon tout en appuyant son front contre sa main. Elle avait toujours su que son fils Ă©tait Ă©trange, mais lĂ , ça dĂ©passait les limites de lâentendement !! Aaron expliqua Ă Spencer que Lise Ă©tait bien chez lui et quâelle Ă©tait blessĂ©e. Le mĂ©decin lui fit la promesse de venir le plus rapidement possible mais lui conseilla de nettoyer la plaie en attendant son arrivĂ©e. Lorsquâil raccrocha, Aaron surprit le regard Ă©trange de Sarah et dĂ©cida enfin de tout lui expliquer. Lise⊠que tu vois ici, est ma petite amie. Non, câest bien plus que ça en fait et⊠enfin câest compliquĂ© !! »Aaron sâĂ©tait redressĂ© et prĂ©cipitĂ© en direction de la salle de bain pour prendre de quoi nettoyer la plaie de Lise et retirer les morceaux de verre. Sarah sâĂ©tait levĂ©e Ă©galement et avait suivi son fils afin dâobtenir de plus amples informations au sujet de cette mystĂ©rieuse demoiselle, tout en ignorant sa prĂ©sence. Ta quoi ??? Non mais tu as perdu lâesprit ma parole !! Et Summer dans tout ça ? » Câest fini avec Summer ! » Câest du rapide avec toi !! Pourquoi vous avez rompu ? Je lâaime beaucoup moi cette petite, elle Ă©tait ravissante, adorable et⊠tu mâĂ©coutes ?! » Ouais ouais ⊠on verra ça plus tard ! » Et cette Lisa⊠Lise, enfin quâimporte, elle a lâhabitude de dĂ©barquer en Ă©tat dâĂ©briĂ©tĂ© avancĂ©e chez les gens quâelle ne connaĂźt pas ? Câest du beau !! Tu as dĂ©crochĂ© le pompon cette fois ! »Sarah prit MĂ©phisto dans les bras et sortit dans le jardin, le temps quâAaron sâoccupe des blessures de Lise. Le jeune homme sâinstalla prĂšs de sa dulcinĂ©e sur le canapĂ© et lui souria tendrement. Tu mâas vraiment fait peur⊠jâavais peur que tu prennes la fuite et que tu me laisses Ă tout jamais. Je suis au courant pour ton pĂšre⊠lui et Spencer ont eu une petite altercation tout Ă lâheure. Je dois reconnaĂźtre que je comprends mieux pourquoi tu as prit la fuite. »Pas la peine dâĂȘtre un expert pour remarquer que Lise avait dĂ» probablement boire plus dâun verre afin dâoublier toute cette histoire !! Quoi quâil en soit, Aaron nâallait certainement pas la blĂąmer pour ça, aprĂšs tout, il avait vu Ă quoi ressemblait le pĂšre Hawkins et comprenait beaucoup mieux pourquoi Lise Ă©tait effrayĂ©e Ă lâidĂ©e de repartir avec lui. Tout en sâoccupant des plaies de la jeune femme dont il retira les bouts de verre, il continua Tu nâas rien Ă craindre ici et tu peux rester autant que tu le voudras⊠je suis certain quâon va trouver une solution, hum ?! Ecoute mon cĆur, je pourrais peut-ĂȘtre essayer de parler avec ton pĂšre et mâarranger avec luiâŠenfin il nâa pas lâair trĂšs ouvert si je puis me permettre mais⊠ça vaut le coup dâessayer⊠Je veux pas te perdre⊠et je ne veux pas quâil te fasse du mal. Tout va sâarranger⊠»Tout nâĂ©tait pas aussi simple hĂ©las ! Aaron termina de soigner la blessure de Lise avant de lui faire un bandage dont Spencer ne serait pas peu fiĂšre aprĂšs quoi, il aida Lise Ă se redresser et alla lui chercher un grand verre de coca bien frais quâil lui tendit avant de rĂ©cupĂ©rer le sac de la demoiselle quâil avait emportĂ© dans sa voiture. Tu as laissĂ© tomber ton sac en partant⊠câest Summer qui lâa rĂ©cupĂ©rĂ©. » InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Jeu 22 Juil - 2011 Lâesprit de Lise Ă©tait complĂštement embrumĂ©, comme si elle avait soudainement perdu toute notion de rĂ©alitĂ©. Combien dâalcool avait-elle bu, au juste ? Beaucoup trop. Elle ne savait mĂȘme pas oĂč elle avait atterrit, et câĂ©tait Ă peine si elle Ă©tait capable dâouvrir les yeux pour lâinstant. Certes, elle entendait les voix qui sâĂ©levaient dans lâatmosphĂšre autour dâelle, mais elle ne discernait pas un motâŠComme si tout devenait soudainement lointain. Pourtant, elle sentit dĂ©licatement Aaron la prendre dans ses bras, provoquant chez elle une envie de ne plus les quitter. Elle sây sentait protĂ©gĂ©e, en sĂ©curitĂ©, et cela bien quâelle se souvienne exactement que trĂšs bientĂŽt, elle ne serait plus en sĂ©curitĂ©. Une fois que son pĂšre lâaurait remmenĂ©e Ă New York, sa vie allait devenir totalement vide de sensâŠComme il savait quâelle ne penserait quâĂ fuir, il renforcerait considĂ©rablement sa surveillance, et fatalement, elle se verrait contrainte de lui obĂ©ir. Cette simple idĂ©e lui donnait la nausĂ©eâŠComme si revenir Ă New York voulait dire quâelle abandonnait ce peu de libertĂ© et de bonheur quâelle avait trouvĂ© ici, Ă San Francisco. Personne ne pouvait dĂ©cemment comprendre ce quâelle ressentaitâŠPersonne ne pouvait savoir pourquoi elle avait autant bu, histoire de se rendre totalement amorphe et insensible Ă tout. HĂ©las, malgrĂ© tout lâalcool ingĂ©rĂ©, elle se sentait encore plus mal quâavant. Incapable dâoublier, incapable de faire abstraction des mots de son pĂšre. Il ne lâaimait pas, il la haĂŻssait cordialementâŠSes paroles rĂ©sonnaient dans son esprit comme un tambour infernal, si bien que lorsquâelle ouvrit les yeux, elle fut prise dâun haut le cĆur qui manqua de la faire fuir aux toilettes. Elle parvint Ă se maĂźtriser en se concentrant sur les paroles dâAaron, en train de soigner son mollet blessĂ©. CâĂ©tait drĂŽle, elle ne sentait rien de ce cĂŽtĂ©-lĂ . CâĂ©tait comme si son cĆur Ă©tait la seule partie atteinte dans tout son corpsâŠLe reste ne la faisait pas souffrir. A croire que son pĂšre savait exactement oĂč frapper pour la dĂ©truire de part en part. Si bien que pour lâinstant, mĂȘme si Aaron lui parlait et quâelle entendait tout ce quâil lui disait, elle adoptait un air absent. Lise se trouvait totalement amorphe, incapable de se raisonnerâŠJamais elle nâavait Ă©tĂ© dans un tel Ă©tat et dâailleurs, si elle avait eu un tant soit peu de conscience, elle se serait fait honte elle-mĂȘme. NON ! »Cette rĂ©ponse catĂ©gorique lui avait dĂ©jĂ demandĂ© un effort considĂ©rable. En vĂ©ritĂ©, Lise venait de rĂ©agir sur le fait quâAaron puisse vouloir parler Ă son pĂšre, et lâempĂȘcher de lâemmenerâŠMais il nây parviendrait pas, et nul ne le savait mieux quâelle. Cette discussion allait se finir en bain de sang et il fallait Ă tout prix quâelle empĂȘche cela. Mais pour lâinstant, Lise se contentait de regarder Aaron, lâair paniquĂ©, les yeux embuĂ©s des larmes qui refusaient de couler et de la libĂ©rer. Bien entendu, elle ne pouvait pas lui interdire de le faire, mais si elle pouvait mettre tout en Ćuvre pour lâen empĂȘcher, alors elle comptait bien le faire. Elle sâavança vers Aaron pour saisir lĂ©gĂšrement sa chemise, dâun geste plutĂŽt brusque, comme si elle ne pouvait pas se faire comprendre autrement. NonâŠJe tâen prie, ne fait pas ça, il faut pasâŠIl va dire des chosesâŠArrĂȘteâŠSTOP ! »Lise Ă©tait dans un Ă©tat second, incapable de rĂ©flĂ©chir ni mĂȘme dâavoir des pensĂ©es cohĂ©rentes. Tout son corps tremblait et, alors quâelle avait agrippĂ© la chemise dâAaron pendant quelques secondes, elle la lĂącha aussi brutalement que prĂ©cĂ©demment. Comment lui expliquer clairement la situation alors que les mots peinaient Ă arriver dans lâordre ? Pourtant, malgrĂ© les minutes qui passaient et son malaise qui ne se calmait pas, Lise ne parvenait pas Ă verser la moindre larme. Comme si la situation avait complĂštement gelĂ© ses pleursâŠElle se rallongea au bout de quelques instants, en soupirant bruyamment, sentant sa tĂȘte se mettre Ă tourner un peu trop violemment. A quoi bon sâacharner alors quâelle ne pourrait dĂ©cemment pas se faire comprendre ? Lise Ă©tait dĂ©sespĂ©rĂ©e par les Ă©vĂšnements. Incapable de rĂ©flĂ©chir, incapable de se reposer de peur de refaire des cauchemarsâŠElle se trouvait dans un vĂ©ritable cercle vicieux. Spencer fut en quelque sorte son sauveur, arrivant Ă point nommĂ© pour ainsi dire. Son premier rĂ©flexe la surprit, dâailleurs, puisquâil sâagenouilla prĂšs dâelle pour mieux la serrer contre lui. Il lui prouvait une fois encore quâelle aurait prĂ©fĂ©rĂ© quâil soit son pĂšreâŠEt cela mĂȘme si quelque part, câĂ©tait un peu le cas. Il veillait si ardemment sur elle que câĂ©tait impossible quâelle se sente seule. Et elle osait Ă peine imaginer les horreurs quâil avait du entendre de la part de James Hawkins en personne⊠Ne tâinquiĂštes pas Lise, tout va bien. Pourquoi tu ne mâas pas appelĂ© ? Tu sais trĂšs bien que tu peux toujours compter sur moi ! Il faut que tu restes calme. Tu nâes pas une Ă©trangĂšre ici, tu ne dĂ©ranges personne. »Dâun geste doux et maĂźtrisĂ©, il souleva Lise en faisant signe Ă Aaron quâil allait lâallonger dans une chambre, le temps quâelle reprenne ses esprits. Spencer avait le pouvoir » de calmer la demoiselle dĂšs quâelle faisait une crise dâangoisse, et cela depuis son arrivĂ©e Ă San Francisco. Combien de fois lâavait-elle appelĂ© au secours, en plein milieu de la nuit, parce quâelle paniquait ? Lise avait arrĂȘtĂ© de compter depuis bien longtemps. Ce nâĂ©tait pas la peine, en vĂ©ritĂ©âŠGrant Spencer veillait sur elle comme un vĂ©ritable pĂšre lâaurait fait sur sa fille, lorsque le monde tournait rond. James Hawkins lui-mĂȘme nâavait jamais eu autant dâattention, et cela envers aucun de ses trois enfantsâŠCâĂ©tait comme si Spencer prouvait encore et toujours quâil aurait fait un bien meilleur mari pour Anne, et un meilleur pĂšre pour Sam, Lise et Kitty. Il le prouva plus encore en bordant Lise, dans la chambre dâAaron quâil avait mis quelques minutes Ă trouver. La situation le gĂȘnait, car il nâĂ©tait pas chez lui et quâil sâen voulait de sâimposer ainsi dans lâespoir de raisonner Lise. Si elle parvenait Ă supporter les dires de son pĂšre, alors sans doute pourrait-il la convaincre de rester ici, Ă San Francisco. Ou en tout cas, de tout faire pour faire en sorte quâelle sâoppose Ă son pĂšre de toutes les façons possibles pour le faire changer dâavis. Alors quâil sentait que Lise Ă©tait dans un Ă©tat proche de lâOhio, il caressa doucement son front avant de froncer les sourcils. AussitĂŽt, il se dirigea vers la salle de bain pour aller y chercher un gant, quâil humidifia, avant de retourner Ă son chevet et de lui tamponner le front avec. Lise semblait Ă la fois prĂȘte Ă sâabandonner dans les bras de MorphĂ©e, et prĂȘte Ă lutter envers et contre tout pour ne surtout pas sâendormir. Heureusement que Spencer Ă©tait lĂ et la rassurait de sa simple prĂ©sence, sans quoi elle aurait probablement fait une autre crise dâangoisse. Lise, si tu ne dors pas tu nâiras pas mieux. Je resterais lĂ le temps quâil faudra, alors endors-toiâŠLaisse-toi aller, un peu. » Jâai peurâŠJe ne veux pas voir tout ce sang. Vous restez avec moi ? »Cette voix Ă©tait comme celle dâun enfant qui vient de faire un cauchemar. Pourtant, Ă peine avait-elle murmurĂ© cette rĂ©plique que Lise avait dĂ©jĂ fermĂ© les yeux, sâendormant sans mĂȘme sâen rendre compte. AprĂšs tout ce quâelle venait de vivre, le fait quâelle soit Ă©puisĂ©e Ă©tait un rĂ©flexe tellement normalâŠSpencer continua Ă lui frotter doucement le front avec le gant humide, avant de le lui laisser plaquĂ© sur le front, sâabsentant quelques minutes pour aller voir Aaron et Sarah dans la cuisine. Ne pas leur expliquer la situation nâĂ©tait pas correct de sa part, et nul ne le savait mieux que luiâŠAussi, il prit un air grave avant de se racler doucement la gorge, prenant peu Ă peu contenance malgrĂ© lâimmense service quâil comptait demander Ă Aaron et Ă sa mĂšre adoptive. Tout dâabord, je tiens Ă ce que vous sachiez que je suis passablement navrĂ© par la situation. Je pense quâil sâagit lĂ dâun appel au secours de la part de Lise. Jâavais peur dâarriver trop tard, mais heureusement, plus de peur que de mal. Un peu de repos et elle sera de nouveau sur pied, bien quâil vaille mieux surveiller cette vilaine blessure au mollet⊠»Spencer avait lâimpression de sâemmĂȘler les pinceaux, ne sachant pas oĂč commencer. AprĂšs tout, Sarah ne devait mĂȘme pas connaĂźtre la vĂ©ritable identitĂ© de la demoiselle quâelle avait trouvĂ© presque ivre morte sur son pallier. Il se racla Ă nouveau la gorge, comme sâil avait affaire Ă une assemblĂ©e de mĂ©decins nâayant aucune intention de lâĂ©couter. Lise est la fille de James Hawkins, dont vous avez sĂ»rement entendu parler. Câest le milliardaire le plus influent de New York, et lâune des plus importantes fortunes du monde. Sâil est ici, câest pour rĂ©cupĂ©rer Lise. Câest un homme dâaffaires remarquable, mais câest un trĂšs mauvais pĂšre. Je pense quâil nâa jamais aimĂ© Lise, quâil trouve bien trop semblable Ă sa mĂšre, que vous connaissiez je crois SarahâŠAnne Delierre, originaire de Paris. Enfin brefâŠJe pense que laisser James emporter Lise est la pire idĂ©e quâil soit. Malheureusement, nâĂ©tant pas majeure, aux yeux de la loi elle est responsable de JamesâŠJe vous demande de ne surtout pas vous interposerâŠNon seulement parce que câest un homme puissant et influent, mais aussi parce quâil sait mieux que personne Ă quel point il est dans son bon droit. Je vais essayer de le raisonner de mon cĂŽtĂ©. Cela fait des annĂ©es que je le connais, et je peux essayer de faire quelque chose. Mais je voudrais tout de mĂȘme vous demander un service⊠»Spencer poussa un lĂ©ger soupir, avant de reprendre dâune voix aussi sincĂšre que possible Je voudrais que vous preniez soin de Lise jusquâĂ demain midi. Je pense quâil sâagit lĂ du temps que mettra James Ă la retrouverâŠEt la cacher nâest pas la solution. Lise a besoin de se sentir acceptĂ©e. Essayez de la faire dormir, autant que possible, et soyez doux avec elle. Lise a vĂ©cu un traumatisme qui fait quâelle ne dort jamais, de peur de faire dâhorribles cauchemars. Vous ĂȘtes au courant Sarah, je crois. Vous comprendrez quâune enfant ne peut dĂ©cemment voir cela sans avoir de grosses sĂ©quelles. Ne la jugez pas trop rapidement. Je vais retourner un peu Ă son chevet, avec votre permission. Si elle se rĂ©veille, je saurais la raisonner, je croisâŠDifficile dâĂȘtre totalement sĂ»r avec elle. »AprĂšs un sourire on ne peut plus sincĂšre, Spencer esquissa un hochement de tĂȘte poli avant de remonter Ă lâĂ©tage, auprĂšs de Lise qui, par on ne sait quel miracle, dormait toujours paisiblement. A croire que lâalcool avait perturbĂ© tous ses sens, allant mĂȘme jusquâĂ lâempĂȘcher de faire dâhorribles cauchemarsâŠQuoi quâil en soit, le mĂ©decin demeura encore une heure, jusquâĂ ce que Lise ne se rĂ©veille dâelle-mĂȘme. Il venait juste de redescendre au moment mĂȘme oĂč elle ouvrit les yeux, pour dire au revoir et remercier Aaron et sa mĂšre. Elle se leva un peu brutalement, puis, sentant sa tĂȘte tournĂ©e, sâassit avec un peu plus de douceur sur le lit. Lise avait du mal Ă mettre de lâordre dans ses idĂ©es, elle se sentait nausĂ©euse et affreusement faible, mais elle se souvenait de la prĂ©sence dâAaron, puis de celle de Spencer. Lorsquâelle voulut se lever, elle manqua de justesse de hurler tant son mollet la faisait souffrir. En constatant le bandage, elle se mit sĂ©rieusement Ă se poser des questions, cherchant ardemment dans sa mĂ©moire pour y trouver un semblant dâexplication. Elle se souvenait avoir bu, et puis plus rienâŠLe blackout total ; du moins, jusquâĂ ce que les paroles de son propre pĂšre lui reviennent en tĂȘte, et explique dâun mĂȘme coup la motivation Ă boire dont elle avait Ă©tĂ© la victime plus quâautre chose. Puis, alors quâelle entendait la voix de Spencer au rez-de-chaussĂ©e, elle se leva non sans mal et descendit aussi vite que possible. Sa seule prĂ©sence suffit Ă arrĂȘter net le mĂ©decin, avant quâil ne prenne la peine de lui sourire. AttendezâŠJe voudrais mâexcuser pour le comportement de mon pĂšre envers vous. Je me doute bien quâil sâest comportĂ© comme un salaud avec vousâŠSalaud quâil est, en fait. » Ce nâest pas Ă toi de tâexcuser, Lise. Tu ne peux pas porter toutes les erreurs de ton pĂšre sur tes Ă©paulesâŠIl te rend dĂ©jĂ responsable de suffisamment de choses. » Y compris du fait que les derniĂšres paroles de ma mĂšre aient Ă©tĂ© pour vous. »En comprenant que cet ultime aveu avait Ă©mu Spencer, Lise manqua de regretter son manque de contrĂŽle. Peut-ĂȘtre nâĂ©tait-ce pas la chose Ă dire, en vĂ©ritĂ©âŠOu peut-ĂȘtre que si, puisquâil sâapprocha pour embrasser doucement son front, lui conseillant dây aller mollo pendant quelques temps, et dâapprendre Ă ne pas risquer sa peau inutilement. Cette derniĂšre rĂ©plique la fit sourire doucement, dâailleurs, parce que justement, elle semblait ĂȘtre particuliĂšrement douĂ©e en la matiĂšre. Seulement, maintenant que la porte sâĂ©tait refermĂ©e derriĂšre Spencer, et quâelle se retrouvait en prĂ©sence dâAaron et dâune femme dâune remarquable beautĂ© quâelle ne connaissait pas, elle se sentitâŠBĂȘte. CâĂ©tait la premiĂšre fois quâelle se retrouvait en face de ce quâelle imaginait ĂȘtre la mĂšre dâAaron, et elle aurait imaginĂ© bien mieux comme premiĂšre rencontre. Toutefois, elle sâavança vers elle en boitant, faisant lâeffort de ne surtout pas la fuir du regard, avant de lui serrer fermement la main pour la saluerâŠMais aussi la remercier. Je vous prĂ©sente mes plus plates excuses. Je ne voulais en aucun cas vous mĂȘler Ă une histoire qui fondamentalement ne concerne que mon pĂšre et moi-mĂȘme. JâespĂšre avoir lâoccasion de me racheter avant mon dĂ©part. Je vais abuser encore une fois et je vais vous emprunter Aaron une toute petite minute si vous le permettez. »A cet instant prĂ©cis, Lise ne se faisait aucune illusion. Ce nâĂ©tait quâune question de temps avant que James ne la retrouve et ne lâoblige Ă le suivre jusquâĂ New York. Mais elle nâavait pas lâintention de partir comme une voleuse, pour la premiĂšre fois de sa vie. Parce quâAaron Ă©tait tout ce quâil y avait de plus prĂ©cieux Ă ses yeux et quâelle ne pouvait dĂ©cemment pas lui faire une chose pareilleâŠElle le prit donc par la main pour lâemmener au salon, puis, une fois quâelle fut assurĂ©e du fait quâils Ă©taient bien seuls, elle prit le visage dâAaron dans ses mains pour capturer fougueusement ses lĂšvres. Comme sâils ne sâĂ©taient pas vus depuis des annĂ©es⊠JeâŠJe sais pas par oĂč commencer. Jâai perdu les pĂ©dales, jâaiâŠJe ressens une sensation affreuse, comme si jâĂ©tais Ă©crasĂ©e par une pierre ! Je crois me souvenir que tu as dis que tu voulais parler Ă mon pĂšre, mais câest flou, trĂšs flou. Tu dois pas le faire, Aaron, tu ne sais pas ce dont il est capable. Je tâen prie, je tâen supplie, laisse-moi rĂ©gler ça. CâestâŠLa premiĂšre fois de ma vie que je ne prends pas la fuite. Et que jâai une raison de rester quelque part⊠»Aaron allait-il la laisser faire, sachant quâaux yeux de la loi, elle nâavait pas dâautre choix que celui de suivre son pĂšre ? Quelque part, elle ne pouvait pas sâempĂȘcher de trouver cela injusteâŠParce quâelle ne voulait vraiment pas partir. Je pense que ta mĂšre va t'interdire prochainement de sortir avec une alcoolique fille d'un tarĂ© milliardaire! » InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Ven 6 AoĂ» - 1808 Aaron ? Je peux te parler une petite minute ? » Il faut prĂ©voir un plan dâattaque pour demain⊠je le laisserai pas la toucher, ni mĂȘme lâapprocher !! Elle ne repartira pas Ă New York, ça non, câest hors de question !! Et euh⊠tâas vraiment connu la mĂšre de Lise ? »Sarah sembla surprise par le discours de son fils quâelle trouvait un peu trop dĂ©monstratif avec cette fille quâil connaissait Ă peine. CâĂ©tait assez surprenant de le voir agir ainsi, dâautant quâelle connaissait Aaron mieux que quiconque et savait quâil nâĂ©tait pas homme Ă se dĂ©voiler avec autant de facilitĂ©. CâĂ©tait mĂȘme la premiĂšre fois quâelle avait lâimpression quâil Ă©tait sincĂšrement amoureux et tout ceci ne lui plaisait guĂšre tout le monde sait quâun homme Ă©perdument amoureux peut faire, dire et croire nâimporte quoi pour peu que cela vienne de sa bien aimĂ©e. Câest vrai, oui. Anne et moi avons Ă©tĂ© extrĂȘmement proches Ă une certaine Ă©poque. Tu sais, ça remonte Ă tellement loin tout ça !! Le plus important Aaron, câest que tu ne fasses pas de bĂȘtises. Tu as entendu ce quâa dit Spencer au sujet du pĂšre de Lise. Il est dans son bon droit et personne ne⊠» Tu veux bien arrĂȘter ton baratin une petite minute ? Bon sang mais tu es mieux placĂ©e que quiconque pour te rendre compte que Lise nâest pas heureuse et que la vie que lui fait mener son pĂšre ressemble Ă tout sauf Ă une vie saine et Ă©quilibrĂ©e !! Pourquoi refuses-tu dâadmettre quâil nâest pas un bon pĂšre ?! » Aaron, je nâai jamais prĂ©tendu le contraire. Je crois juste que tes sentiments sont exacerbĂ©s et que par consĂ©quent, tu ne portes pas un regard objectif sur la situation prĂ©sente. LĂ oĂč il faudrait sâinquiĂ©ter, câest sâil nâavait pas daignĂ© lever le petit doigt aprĂšs la fugue de sa fille. Nâimporte quel pĂšre rĂ©agirait de cette façon ! James Hawkins nâest sans doute pas parfait, mais il a toute autoritĂ© sur sa fille et nâa fait quâagir en rĂ©ponse Ă lâinconscience de sa fugue !» Jâarrive pas Ă croire que tu puisses dire une chose pareille ! Spencer Ă pourtant dit que⊠» Spencer est de parti pris !! Câest un homme bon et qui semble vouloir le bien de cette petite mais de toute Ă©vidence, son point de vue est loin dâĂȘtre objectif. Comment veux-tu quâil prenne la dĂ©fense de James tout en sachant quâil fut autrefois son pire rival ? Allons Aaron, rĂ©flĂ©chis un instant, cela nâa pas le moindre sens ! Je voudrais que toi aussi tu cesses de te cantonner aux paroles de Lise et que tu essaies de clarifier la situation Ă lâaide de ton bon sens. Tu es beaucoup plus pragmatique que ça en temps normal. » Tu sembles ne pas comprendre⊠ou plutĂŽt ne pas vouloir comprendre. Je suis incapable de lâexpliquer mais tout ce qui touche directement Ă Lise mâatteint Ă©galement. Son bonheur est Ă mes yeux bien plus vital que tout le reste dĂ©sormais. Ne me demande pas de changer de position, câest impossible. Soit tu nous aides soit on se dĂ©brouillera sans toi, câest aussi simple que ça. »Aaron nâavait que faire des Ă©ventuelles consĂ©quences de ses actes. Il voulait que Lise soit en sĂ©curitĂ© et il savait que si James Hawkins lui mettait la main dessus, ce ne serait pas le cas. Il avait Ă©tĂ© incapable de veiller sur elle durant les seize derniĂšres annĂ©es, alors en quoi ce serait diffĂ©rent dĂ©sormais ? Sans compter quâil ne fallait pas oublier lâesclandre quâil Ă©tait venu faire Ă lâUniversitĂ© ! De toute Ă©vidence, ce nâĂ©tait pas une attitude saine et convenable, surtout quand on prĂ©tend faire partie de la haute sociĂ©tĂ©. A force dâacharnement, il parviendrait peut-ĂȘtre Ă intimider Spencer, mais il pouvait toujours essayer dâen faire de mĂȘme avec lui, ça ne marcherait pas !! Aaron se battrait corps et Ăąme sâil le faut mais Lise resterait Ă ses cĂŽtĂ©s Ă San Francisco puisque câest ce quâelle souhaitait. Le jeune homme nâavait pas peur des reprĂ©sailles, il lui Ă©tait totalement impossible de rester lĂ sans rien faire tout en les regardant dĂ©molir celle quâil aimait. De son cĂŽtĂ©, Sarah semblait passablement lassĂ©e par le discours de son fils. Elle ne comprenait pas pourquoi il mettait tant de cĆur Ă vouloir aider cette jeune femme dont, elle en Ă©tait convaincue, il ne savait pas grand-chose, si ce nâest ce quâelle avait bien voulu lui raconter. Sarah Ă©tait pourtant une femme extrĂȘmement ouverte et gĂ©nĂ©reuse, toujours prĂȘte Ă aider et Ă faire le bien autour dâelle mais sur ce coup lĂ , elle ne savait pas vraiment ce quâelle devait croire ou non. Certes, elle avait Ă©tĂ© une amie intime dâAnne, la mĂšre de Lise, mais Ă©tait-ce une raison pour laisser les sentiments lâemporter sur la raison ? Pas de son point de vue en tout cas. Spencer Ă©tait son ami Ă©galement mais puisquâil Ă©tait le rival de James, son discours nâĂ©tait selon elle pas totalement lucide et elle Ă©tait femme Ă peser sĂ©rieusement le pour et le contre avant de prendre la moindre dĂ©cision. Alors quâAaron allait tourner le dos pour sâen retourner auprĂšs de Lise, Sarah lâattrapa par le bras, lâincitant Ă lui faire face une fois de plus. Elle nâavait pas lâintention dâen rester lĂ , dâautant quâelle nâavait encore jamais baissĂ© les bras face au tempĂ©rament assezâŠspĂ©cial de son fils. Tu veux bien mâexpliquer ce qui ne va pas chez toi en ce moment ? Est-ce que tu tâĂ©coutes parler ne serait-ce quâune minute ? Tu parles de cette fille comme si tu la connaissais depuis des lustres et tu tâentĂȘtes Ă vouloir la protĂ©ger alors que de toute Ă©vidence, elle nâa pas besoin de toi ! Qui te dit quâelle ne te mĂšne pas en bateau ? Tu sembles tellement amoureux quâelle pourrait facilement te mener par le bout du nez, tu nây verrais que du feu ! Je te connais Aaron⊠câest la premiĂšre fois que tu prends Ă cĆur une relation. Câest aussi la premiĂšre fois que je te vois tâinvestir de la sorte alors que dans le fond, tu ne sais pratiquement rien au sujet de cette fille.»Les paroles de Sarah semblĂšrent offenser le jeune homme au plus haut point, si bien que sa mĂąchoire se crispa avant quâil ne puisse prononcer des paroles quâil serait susceptible de regretter dans les minutes Ă venir. Il nâarrivait pas Ă comprendre comment Sarah pouvait croire que Lise le menait en bateau ou bien que James Ă©tait un pĂšre agissant dans son bon droit comme le ferait nâimporte quel pĂšre digne de ce nom ! Elle Ă©tait tombĂ©e sur la tĂȘte ou quoi ? Je ne prĂ©tends pas que câest bel et bien le cas, je dis juste quâil ne faut pas omettre cette Ă©ventualitĂ©. Lise est me semble-t-il, une jeune femme tout Ă fait respectable mais encore une fois, je ne me base que sur les dires de Spencer. Qui te dit que James nâa pas dâexcellentes raisons dâĂȘtre en colĂšre et de lui en vouloir ? Rien ne prouve que câest lui le mĂ©chant dans lâhistoire. Si ça se trouve, Lise sâest enfuit de chez elle sans aucune raison apparente ! Beaucoup dâenfants mĂšnent la vie dure Ă leurs parents en se faisant passer pour les victimes. Crois moi, je suis bien placĂ©e pour le savoir, jâen vois tous les jours !! De quoi se plaint-elle au juste ?! Toi tu avais toutes les raisons du monde dâĂȘtre enlevĂ© Ă ton pĂšre, mais elle ?! Que lui reproche t-elle ? Un manque dâamour et dâattention sans doute ?! Câest classique⊠mais tu sais, le jour oĂč elle comprendra quâelle nâest pas le centre du monde et de toutes les attentions de son pĂšre, peut-ĂȘtre que leur relation ne sâen verra que plus enrichissante et⊠» Laisse tomber !! Je ne vois pas pourquoi je suis encore lĂ Ă tâĂ©couter. On ne tombera jamais dâaccord Ă ce sujet et je dois dire que⊠que jâai du mal Ă croire que je ne puisse pas te faire confiance au moment oĂč jâai le plus besoin de toi. Si tu ne crois pas en elle, tu ne crois pas en moi non plusâŠÂ»Sarah qui avait dâordinaire un rĂ©pondant du tonnerre de dieu demeura silencieuse. CâĂ©tait la premiĂšre fois quâAaron lui faisait remarquer quâil ne pouvait pas lui faire confiance et mine de rien, cet Ă©tat de fait lâattristait au plus haut point. Ils avaient toujours Ă©tĂ© extrĂȘmement proches tous les deux et dâautant quâelle sâen souvienne, câĂ©tait bien la premiĂšre fois quâils se trouvaient dans une situation aussi conflictuelle. Aaron⊠je tâaime plus que tout au monde⊠plus que ma vie et mĂȘme au-delĂ si câĂ©tait possible⊠je pars du principe que je suis prĂȘte Ă faire nâimporte quoi pour tâaider. Tu pourrais me demander nâimporte quoi, mĂȘme si cela va Ă lâencontre de mes principes et de mes convictions les plus intimes, je nâhĂ©siterais pas Ă tâaider. Jâai lâintention de garder Lise ici, de lâaider de mon mieux et de la protĂ©ger de son pĂšre puisque câest ce que tu dĂ©sires au plus profond de toi. En Ă©change de ça, je te demande juste de faire preuve dâun peu plus dâouverture dâesprit au sujet de toute cette histoire. Tu ne sais pas dans quelle galĂšre tu es en train de mettre les pieds. Tout Ă©tait tellement plus simple avec Summer⊠quâest-ce qui sâest passĂ© pour que tu en viennes Ă dĂ©laisser ta petite amie pour une parfaite inconnue ? »Excellente question⊠A dire vrai, Aaron nâavait pas de rĂ©ponse concrĂȘte Ă lui fournir. Son amour pour Lise sâĂ©tait imposĂ© comme une Ă©vidence voila tout. Sa relation avec Summer Ă©tait superficielle Ă en crever et grĂące Ă Lise, il avait dĂ©couvert ce que signifiait lâauthenticitĂ© des sentiments. Tout cela relevait de lâordre du ressenti et aucun mot ne pouvait clairement lâexprimer. Summer nâest pas celle que tu crois⊠elle nâa rien Ă voir avec cette jeune fille charmante qui venait ici de temps Ă autre. Je me demande encore ce que jâai pu lui trouver⊠elle nâa rien Ă voir a avec Lise. » Ca câest certain⊠»Aaron lança un regard noir en direction de Sarah qui venait de commettre une vraie bourde en insinuant que Lise valait moins bien que Summer. Bon disons que ce nâest pas directement ce quâelle avait voulu dire mais câest ainsi quâAaron avait interprĂ©tĂ© la chose. Lorsquâelle se rendit compte quâune fois de plus, son fils Ă©tait sur le point de se braquer, Sarah tĂącha de sâexpliquer. Ce que je veux dire câest quâen dĂ©pit de son caractĂšre, Summer nâest pas une fille Ă problĂšme !! Tu penses vraiment que je suis dupe ? Je sais parfaitement quâelle jouait un rĂŽle en ma prĂ©sence mais toutes les filles que tu mâas prĂ©sentĂ© jusquâalors ont voulu se faire passer pour ce quâelles nâĂ©taient pas ! Dâun sens, câest bien normal de vouloir faire bonne figure devant la mĂšre de son petit ami, tu ne penses pas ?! MalgrĂ© tout, tu ne mâenlĂšveras pas de lâesprit que Summer est une fille bien !! Elle a toujours Ă©tĂ© gentille, polie et ne sâest jamais pointĂ©e chez nous avec plusieurs grammes dâalcool dans le sang, vautrĂ©e sur le paillasson⊠»Les propos de Sarah Ă©taient volontairement exagĂ©rĂ©s afin dâinsister sur le contraste Ă©vident quâelle percevait entre Lise et Summer. Dans le fond, elle Ă©tait vraiment prĂȘte Ă venir en aide Ă Lizzie pour peu quâelle soit convaincue de lâauthenticitĂ© de son mal ĂȘtre et de la sincĂ©ritĂ© des paroles de Spencer mais il Ă©tait important selon elle de ne pas occulter une Ă©ventuelle simulation de la part de la jeune femme. AprĂšs tout, Sarah travaillait pour les services sociaux et elle avait plus dâune fois Ă©tĂ© confrontĂ©e Ă des enfants ou des adolescents qui simulaient des sĂ©vices ou des histoires invraisemblables dans lâespoir de fuir des parents qui en fin de compte, nâavaient strictement rien Ă se reprocher. Tout cela nâavait donc rien Ă voir avec Lise de maniĂšre directe. Disons juste que câĂ©tait dans son instinct dâagir ainsi et de se montrer mĂ©fiante. Puis autant le reconnaĂźtre clairement⊠Sarah adorait Summer. Summer nâa pas les problĂšmes de Lise !! On tourne en rond depuis tout Ă lâheure. Tu nâarriveras pas Ă me faire croire que Lise nous mĂšne en bateau. » Ce nâest pas ce que je pense⊠je pose ça comme une Ă©ventualitĂ©. » Câest parce que tu ne la connais pas. » Toi non plus Aaron. Quelques semaines ne suffisent pas pour prĂ©tendre connaĂźtre quelquâun. Puis tu ne sais rien des problĂšmes de Lise! » Lise et moi, on a pas eu besoin de se connaĂźtre on sâest reconnus Ă la seconde mĂȘme oĂč nos regards se sont croisĂ©s. Tu ne peux pas comprendre⊠»Effectivement, Sarah ne le pouvait pas. Elle espĂ©rait seulement quâAaron ne soit pas en train de faire une grosse bĂȘtise en accordant une confiance aveugle Ă cette jeune femme. Je nâessaierai mĂȘme pas et la force de ta conviction et de tes sentiments suffit Ă me faire comprendre que jâai peut-ĂȘtre tort Ă son sujet. Mais, ne perds pas de vue quâil y a un tas de choses que tu ignores au sujet de la famille Hawkins⊠ayant eu la chance de connaĂźtre la mĂšre de Lise, je peux te garantir que plus tu te trouves loin de leur clan, mieux ce sera pour toi. Lise a vĂ©cu de drĂŽles de choses par le passĂ©âŠÂ»Sarah cessa soudainement de parler en regardant par-dessus lâĂ©paule dâAaron, croyant probablement avoir entendu du bruit. Elle soupira doucement avant de passer sa main sur la chemise dâAaron en un geste affectueux. Elle ne voulait pas quâil fasse de bĂȘtises et encore moins quâil se mette en danger pour une histoire qui ne durerait peut-ĂȘtre pas. AprĂšs tout, câĂ©tait lĂ©gitime dans son cas dâimaginer que la relation entre les deux jeunes gens ne durerait pas elle avait lâhabitude de voir Aaron enchainer les conquĂȘtes, en aucun cas elle nâaurait pu imaginer quâil puisse tomber sincĂšrement amoureux. ⊠tu peux compter sur moi quoi quâil arrive. »Aaron demeura sans voix lâespace dâun instant, se demandant pourquoi Sarah changeait soudainement de position. Elle lui avait soutenu jusquâĂ maintenant que Lise Ă©tait probablement une simulatrice et maintenant, elle affirmait que la jeune femme avait vĂ©cu de drĂŽles de choses ». CâĂ©tait Ă nây rien comprendre. Quel genre de choses ? » Je prĂ©fĂšrerai quâelle tâen parle elle-mĂȘme⊠»Aaron comprit au son de la voix de Sarah que celle-ci se tenait quelques pas derriĂšre eux et aussitĂŽt, se tourna afin de lâobserver. Une fois de plus, câest une vague de bonheur qui sâempara de tout son ĂȘtre. Difficile de croire quâun simple regard pouvait lui faire tant dâeffet mais câĂ©tait pourtant le cas. Silencieusement, il Ă©couta Lise prĂ©senter ses excuses Ă Sarah dont le regard sâĂ©tait adouci. Ce revirement de situation Ă©tait encore un vĂ©ritable mystĂšre aux yeux du jeune homme mais quâimporte, il voulait juste que Lise se sente chez elle, au moins pour ce soir. Il nâentendit mĂȘme pas la rĂ©ponse de Sarah qui se montra aimable et tendre comme toujours. Quand il se retrouva seul dans le salon en compagnie de Lise, une onde de soulagement se propagea dans son corps Lise semblait aller beaucoup mieux et câĂ©tait de loin le plus important. Mais les propos de la jeune femme le ramenĂšrent bien vite Ă la dure rĂ©alitĂ© et Aaron soupira doucement avant de rĂ©torquer. Si ce doit ĂȘtre toi et moi contre le monde entier, alors il en sera ainsi. Ne me demande pas de me tenir Ă lâĂ©cart, je tâen prie⊠Je ne veux pas renoncer Ă ce qui compte le plus Ă mes yeux⊠»Renoncer Ă Lise en la laissant repartir pour New York Ă©tait totalement inenvisageable. Il savait pourtant que Spencer et Sarah disaient vrai et que James Hawkins avait tous les droits sur sa fille, il avait la loi de son cĂŽtĂ©. Et merde !! CâĂ©tait vraiment trop injuste. Aaron ferma les yeux un court instant, juste le temps de faire le point dans son esprit. Câest dâaccord⊠je te promets de ne pas mâen mĂȘler si câest rĂ©ellement ce que tu souhaites. Si câest la derniĂšre chance que nous avons Ă disposition pour tenter de te garder ici, alors il faut tenter le coup. Dis toi juste que je ne pourrai jamais me rĂ©soudre Ă renoncer Ă toi⊠sâil faut que je traverse la planĂšte entiĂšre pour te retrouver, je le ferais. »Se rapprochant doucement, il dĂ©posa un baiser sur son front avant de lâenlacer tendrement une fois de plus. Aaron ne voulait pas courir le moindre risque de la perdre. Il savait que tout allait se jouer le lendemain mais hĂ©las, James ne semblait pas trĂšs ouvert aux nĂ©gociations, encore moins sâil sâagissait de lâavenir de sa fille. Effectivement, câĂ©tait trop injuste. Que se passerait-il si le pĂšre de la jeune femme ne voulait rien entendre ? De toute Ă©vidence, Aaron ne pourrait pas rester les bras croisĂ©s Ă attendre sagement que la situation se calme. RĂ©alisant les propos de Lise au sujet de sa mĂšre, il esquissa un lĂ©ger sourire et reprit Disons que votre premiĂšre rencontre fut⊠originale. Laisse lui le temps de te connaĂźtre et dâapprendre Ă tâapprĂ©cier. Hmm Ă propos⊠tu savais quâelle avait connu ta mĂšre ? Il parait que ça remonte Ă un bout de temps mais avoue que câest curieux quand mĂȘme⊠on aurait peut-ĂȘtre pu se rencontrer bien avant. »Aaron esquissa un nouveau sourire et embrassa la commissure des lĂšvres de la jeune femme avant de retrouver son sĂ©rieux. Il redoutait vraiment la journĂ©e du lendemain et ne savait pas sâil serait ou non en mesure de rester Ă lâĂ©cart si James refusait dâentendre raison. Jâai peur de te perdre⊠ça me terrifie mĂȘme. Ecoute Lise, je veux bien te laisser gĂ©rer ça toute seule mais au moindre problĂšme, je refuse de rester les bras croisĂ©s. J'en ai assez d'ĂȘtre spectateur quand les autres essaient de dĂ©molir ta vie... et par consĂ©quent, la mienne. Tu te souviens de ce que je t'ai dit? Tu ne seras plus jamais seule dĂ©sormais... »DerniĂšre Ă©dition par Aaron J. Cooper le Dim 8 AoĂ» - 1259, Ă©ditĂ© 1 fois InvitĂ© Empire State of MindInvitĂ© Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} Sam 7 AoĂ» - 1315 Ca va aller, AaronâŠJe vais mâen sortir, on va sâen sortir. Tu sautes je saute, tu te souviens ? MĂȘme si jâavoue que la perspective dâavoir manquĂ© de te rencontrer plus tĂŽt me fais presque mal au cĆur. Tu imagines ? Summer mâaurait dĂ©testĂ©e bien avant, et si ça se trouve, on serait ensemble depuis longtempsâŠA moins que tâavoir connu plus tĂŽt ait pu changer la donne ! Mais nonâŠQue ce soit mille ans avant, ou dans un millier dâannĂ©es, je serais toujours folle de toi. »Lise serra doucement Aaron contre elle, se laissant bercer par sa respiration avec un dĂ©lice non dissimulĂ©. Le moment qui venait de passer avait Ă©tĂ© particuliĂšrement Ă©prouvant pour elle, mais elle ne pouvait quâimaginer ce que le jeune homme ressentait. Il devait avoir paniquĂ©, et pour peu que Sarah nâait pas ressenti la moindre confiance vis-Ă -vis de la demoiselle, il ne devait pas avoir vraiment Ă©tĂ© soutenu. Lise soupira doucement Ă cette pensĂ©e, avant de lui prendre les mains et de faire en sorte quâil la suive jusquâĂ sa chambre. Si elle pouvait rester Ă©ternellement endormie dans ses bras, elle le ferait sans aucune espĂšce dâhĂ©sitation. DĂšs quâil se trouvait prĂšs dâelle, tout semblait plus simple, moins douloureux, moins empreint dâincertitude. Il ne fallait pas croire que Lise soit particuliĂšrement confiante quant Ă lâaltercation quâelle aurait le lendemain avec son pĂšreâŠAvait-elle seulement une seule maniĂšre de le faire changer dâavis ? CâĂ©tait peu probable. Dâun cĂŽtĂ©, elle ne supportait pas lâidĂ©e de devoir retourner Ă New York, mais dâun autre, la jeune fille savait que faire changer James Hawkins dâavis nâĂ©tait pas une mince affaire, voire mĂȘme une mission impossible. Pourtant, elle sâefforçait autant que faire se peut de ne pas penser au lendemain. Elle sâallongea doucement sur le lit, entraĂźnant Aaron avec elle, avant de se blottir doucement dans ses bras. Lise estimait quâils avaient mĂ©ritĂ© ce moment de rĂ©pit, et le soupir dâaise quâelle poussa en pu que le prouver. Je resterais bien ma vie entiĂšre ici, dans tes bras, sans bouger. Je crois que ça me suffiraitâŠAvancer, câest vain quand il nây a pas dâhorizon Seulement câest exactement ce que ta prĂ©sence mâa apportĂ©âŠUn horizon. »Le terme exacte Ă©tait avenirâ mais Lise se doutait quâil avait du comprendre ce quâelle avait voulu dire. Sa respiration se fit donc plus calme, et elle sentait le sommeil la gagner, pourtant elle eut le rĂ©flexe de lever un regard tendre avant de dĂ©poser un dĂ©licat baiser sur ses lĂšvres. Un bisou de bonne nuitâ en quelque sorte, avant de poser sa tĂȘte au creux de son Ă©paule et de fermer les yeux. Elle qui habituellement mettait environ vingt minutes Ă sâendormir, elle nâeut aucun mal. MorphĂ©e vint bientĂŽt lâenlacer, et pour la premiĂšre fois depuis longtemps, son sommeil fut calme, et sans aucun cauchemar. Cet Ă©tat de fait rĂ©sultait sĂ»rement de la prĂ©sence dâAaron. Un simple mot de lui, un regard mĂȘme anodin et Lise se sentait Ă la fois plus forte et plus calme. Elle, dont la vie Ă©tait chaotique et particuliĂšrement instable, trouvait dĂ©licieusement une raison de se poser quelque part. Entre Aaron et son grand pĂšre, la jeune fille trouvait une vie Ă San Francisco quâelle apprĂ©ciait enfin. Devoir dire adieu Ă ce semblant dâĂ©quilibre lui semblait insupportable. Elle ne comprenait dĂ©cidĂ©ment pas pourquoi son propre pĂšre sâacharnait Ă faire de sa vie quelque chose quâelle Ă©tait sĂ»re de dĂ©tester Ă la longue ; mais mĂȘme si elle ne comprenait pas cet Ă©tat de fait, cela ne la perturba pas dans son sommeil. Elle dormit mĂȘme comme une masse jusquâau lendemain, son mal de tĂȘte indicible ayant disparu au moment mĂȘme oĂč elle ouvrit les yeux, au petit matin. Quelle heure Ă©tait-il, au juste ? Excellente question. Lise du faire un effort considĂ©rable pour se hisser de lâautre cĂŽtĂ© du lit afin de pouvoir voir lâheure sur le radio rĂ©veil dâAaron. Neuf heuresâŠCâĂ©tait bien la premiĂšre fois depuis un lustre quâelle dormait aussi longtemps ! Lise se releva brutalement, trop peut-ĂȘtre, car elle se rassit la seconde dâaprĂšs sur le lit, sa main sur son front, prise dâun soudain vertige. Quelle idĂ©e de se faire peur comme çaâŠAaron avait du partir depuis peu de temps, car sa place portait encore un peu de sa chaleur. Ce fut Ă ce moment prĂ©cis que la voix de James Hawkins atteint ses oreilles ; si le jeune homme Ă©tait descendu au rez-de-chaussĂ©e, câĂ©tait sĂ»rement parce que le pĂšre de Lise Ă©tait dĂ©jĂ lĂ , avec lâidĂ©e bien arrĂȘtĂ©e de la ramener Ă New York par le premier avion quâils pourraient prendre. Autant dire que la demoiselle nâavait aucune envie de lâaffronter tout de suite, surtout Ă peine sortie du lit. Elle demeura donc assise, le regard rivĂ©e sur le mur lui faisant face. Il avait un soudain intĂ©rĂȘt, comparĂ© Ă tout ce que lui dirait son pĂšre une fois quâil lâaurait Hawkins sâĂ©tait prĂ©sentĂ© Ă la porte il y avait Ă peine dix minutes, et ne fut guĂšre surprit quant Ă lâaccueil plutĂŽt froid que lui rĂ©serva Sarah. La derniĂšre fois quâils sâĂ©taient parlĂ©, la discussion avait Ă©tĂ© particuliĂšrement animĂ©e. Aussi loin quâil sâen souvienne, câĂ©tait le jour de lâenterrement dâAnne, et si Lise nâen avait aucun souvenir visiblement, James nâen avait pas oubliĂ© un mot. Il Ă©tait toujours prĂȘt Ă faire face aux Ă©ventuelles attaques que son ancienne connaissance pourrait lui envoyer dans les gencives. CâĂ©tait Ă peine sâil nâavait pas Ă©crit un discours la veille, avec les arguments bien apposĂ©s sur le papier, au cas oĂč il se trouverait Ă cours de rĂ©ponse. Mais Ă sa grande surprise, Sarah ne lui parla pas de ce temps-lĂ âŠSans doute nâĂ©tait-elle pas dĂ©sireuse de remuer le passĂ© en sachant que le prĂ©sent Ă©tait dĂ©jĂ bien assez inquiĂ©tant. Sarah invita donc James Ă pĂ©nĂ©trer dans le salon, oĂč Aaron semblait lây attendre de pied ferme. Du moins, ce fut lâimpression quâeut lâhomme dâaffaires avant de lui serrer la main avec un respect somme toute mesurĂ©. AprĂšs tout, il nâĂ©tait pas lĂ pour perdre son temps en bavardages, bien au contraire. Il Ă©tait venu rĂ©cupĂ©rer sa fille, et non pour sâexpliquer au sujet de ses agissements. Spencer lâavait dit, Lise en avait Ă©galement conscience, James Ă©tait dans son bon droit. Il restait son pĂšre, et la demoiselle Ă©tant majeure, il Ă©tait responsable dâelleâŠBien quâil nâait jamais vraiment endossĂ© son rĂŽle de pĂšre en tant que tel, il trouvait pratiqueâ de ramener Lise Ă New York Si quelquâun apprenait quâelle avait fait une fugue, sa popularitĂ© allait en prendre un sacrĂ© coup. CâĂ©tait un homme dâaffaires, impitoyable et respectĂ©, il Ă©tait donc bien Ă©vident quâil nâabandonnerait le commandement de son empire pour rien au monde, et surtout pas Ă cause des folies de sa fille. En somme, et comme Lise lâavait toujours dit, James aimait plus son travail quâil nâavait jamais aimĂ© et nâaimerait ses propres enfants. Je vous remercie pour lâhospitalitĂ© que vous avez donnĂ© Ă Lise. Câest une petite Ă©cervelĂ©e qui ne sait pas ce quâelle fait, en vĂ©ritĂ©. Elle a Ă©tĂ© trop gĂątĂ©e, câest ma faute, je nâaurais jamais du tout lui cĂ©der ainsi. Enfin, tout va trĂšs bientĂŽt rentrer dans lâordre. Jâai fais une rĂ©servation sur le prochain vol pour New York, et je compte bien la reprendre en main dĂšs notre arrivĂ©e. Je ne souhaite pas quâelle continue Ă enquiquiner de la sorte des personnes responsables comme vous. »Nâallez pas croire que Lise nâentendait rien du discours de son pĂšre Ă propos dâelle. La demoiselle avait beau ne pas sâĂȘtre encore levĂ©e du lit dâAaron, il aurait Ă©tĂ© difficile quâelle nâentende pas. En homme charismatique, James possĂ©dait une voix portant facilement, si bien quâelle nâavait pas perdu une miette de ce qui sâĂ©tait dit. Elle se boucha les oreilles virulemment si bien quâelle nâentendit pas une hypothĂ©tique rĂ©ponse de la part de Sarah ou dâAaron. Elle attendit quelques secondes de calmer les battements effrĂ©nĂ©s de son cĆur, avant de se lever brusquement et de descendre dâun pas dĂ©cidĂ©. Si elle ne lâaffrontait pas maintenant, elle ne le ferait jamais, elle le savait bien. Cependant, Lise ne sâattendait pas du tout Ă ce que son pĂšre accourt pour la serrer dans ses bras dĂšs quâelle apparut dans le salon. Le choc fut tel quâelle ne lui rendit pas son Ă©treinte, dâailleurs ; ses bras demeurĂšrent tendus le long de son corps, et elle espĂ©rait dans son Ăąme et conscience quâil la lĂącherait trĂšs vite. James ne semblait pas surpris de sa rĂ©action, du reste. Il sâĂ©carta bien vite, commençant Ă marcher dans la piĂšce comme sâil sâapprĂȘtait Ă faire un discours magistral. Lise attendait sa sentence sans rien dire, tout en sachant que si elle parlait la premiĂšre, il lui clouerait le bec sans aucune pitiĂ©. Il valait mieux se dĂ©fendre habilement plutĂŽt que dâattaquer lâĂ©minent James Hawkins⊠Je suis déçu par ton attitude. Aucun de mes efforts ne te paraĂźtra jamais suffisant, nâest-ce pas ? Que faut-il que je fasse pour que tu te mettes enfin du plomb dans la cervelle, Lise ? » ArrĂȘter de prendre tes enfants pour tes employĂ©s, apprendre Ă les Ă©couter quand ils en ont besoin et prendre conscience quâils vont finir par te dĂ©testerâŠMais tu en es incapable. Tu ne sais pas aimer, dĂ©jĂ , Maman sâĂ©cartait toujours plus de toi Ă chaque fois que tu la dĂ©laissais pour tes foutues rĂ©unions. Sam est sous ta croupe, tu nâas que faire de KittyâŠEt tu te demandes encore pourquoi je veux surtout pas te voir ?! Mais tu vois pas que je te dĂ©teste ?! »James ne lâavait pas giflĂ©e pour son impudence, mais câĂ©tait tout juste. Comme Ă chaque fois que Lise parlait Ă son pĂšre en face Ă face, la discussion manquait de partir en vĂ©ritable combat. Sauf que cette fois, il lâavait juste saisie par le col, pour dĂ©montrer son autoritĂ© ultime par la force, sans pour autant passer pour un bourreau. Au dĂ©part, il avait juste dĂ©cidĂ© de la dĂ©molir en public, mais cela signifiait quâil devait se contrĂŽler Ă©galementâŠOubliĂ©es, les gifles mĂ©ritĂ©es pour lâinstant. Tu vas me faire le plaisir dâaller chercher tes affaires et de monter dans la limousine. Tu vas Ă©galement enfiler ce tailleur, et mâaccompagner Ă mon rendez-vous oĂč tu vas faire la traductrice. Tu traduiras face Ă mon acheteur allemand exactement ce que je te dirais, est-ce bien entendu ? La moindre incartade et je peux tâassurer que tu vas regretter dâĂȘtre nĂ©e, Lise ! DĂ©pĂȘche-toi dâaller te changer, je nâai pas que cela Ă faire. »Il la relĂącha en la poussant lĂ©gĂšrement, le regard sĂ©vĂšre et glacial, preuve que sa colĂšre nâĂ©tait pas loin dâexploser. Quant Ă Lise, câĂ©tait Ă peine si elle nâĂ©tait pas tĂ©tanisĂ©e. Elle qui avait tant de rĂ©pondant dâhabitude, elle avait lâimpression dâĂȘtre une enfant complĂštement sans dĂ©fense. James avait trop dâexpĂ©rience en la matiĂšre pour quâelle puisse lui tenir tĂȘte bien longtemps, hĂ©lasâŠElle remit donc son col en place, avant de prendre sur le divan ledit tailleur, quâil avait fait faire sur mesure et quâil avait apportĂ© pour lâoccasion. Lise nâosa mĂȘme pas regarder Sarah ou mĂȘme Aaron tant elle avait honteâŠSe faire traiter de la sorte Ă©tait dĂ©jĂ insupportable, mais le fait de lâĂȘtre en public Ă©tait encore pire. Lise rĂȘvait dâĂȘtre une petite souris, afin de pouvoir retourner se cacher dans son trou pour mieux ne jamais en ressortir. Mais oĂč quâelle aille, son pĂšre parviendrait toujours Ă la retrouver et Ă la dĂ©truire avec une facilitĂ© dĂ©concertante. Lise se dirigea donc vers les escaliers, bien peu dĂ©cidĂ©e par rapport Ă tout Ă lâheure. Câest bien ce que je dis, Papa. Je te dĂ©teste dĂ©jĂ âŠMais Kitty suivra le mĂȘme chemin, exactement comme Sam ou comme moi. Profite bien de ta popularitĂ© auprĂšs de tes clients Ă la con, parce que ce seront les seuls Ă peupler ta vie dâici quelques annĂ©es. »Oh, Lise avait bien lâintention de jouer les petites filles sages jusquâau bout. Elle allait remonter dans la chambre dâAaron, enfiler ce foutu tailleur Ă la noix et accompagner son pĂšre Ă son rendez-vous. Elle allait traduire chaque mot quâil lui dirait de dire Ă son acheteur allemand, et elle retournerait sâenchaĂźner Ă New York, au cours dâune vie dont elle dĂ©testerait chaque seconde. Chaque moment passĂ© loin dâAaron allait lui apparaĂźtre comme un suppliceâŠEt ce fut exactement cette idĂ©e qui manqua de la faire fondre en larmes alors quâelle avait passĂ© la porte de la chambre du jeune homme. La sensation dâĂȘtre dĂ©jĂ loin de lui alors quâil nâĂ©tait que dans le salon, son odeur, le souvenir de sa voixâŠTant dâĂ©motions quâelle aimait et qui allaient ĂȘtre Ă lâorigine de sa souffrance. Pourtant, Lise enleva ses vĂȘtements jusquâĂ se trouver en sous-vĂȘtement, et elle commença Ă ouvrir la pochette contenant son tailleur. Elle brossa dĂ©licatement ses cheveux en sâobservant Ă la glace, ses yeux devenant brillants. Il ne fallait surtout pas quâil y ait la moindre trace de larmes sur son visage, aussi se retenir paraissait indispensable. Mais la simple idĂ©e dâenfiler ce fichu tailleur Ă©tait insupportableâŠElle sâassit donc sur le lit, Ă cĂŽtĂ© de ce vĂȘtement dont le prix devait ĂȘtre trop Ă©levĂ© pour ĂȘtre Ă©noncĂ© dĂ©cemment. Elle poussa un long soupir, avant de se laisser tomber lourdement contre le lit. Jâaimerais disparaĂźtre, aussi facilement que dans un tour de passe-passe⊠» Contenu sponsorisĂ© Empire State of Mind Sujet Re OUR beautiful never-ending story {Aaron} OUR beautiful never-ending story {Aaron} Page 1 sur 3Aller Ă la page 1, 2, 3 Permission de ce forumVous ne pouvez pas rĂ©pondre aux sujets dans ce forumNEW YORK CITY LIFE Archives Corbeille
Fixezensuite la bouteille dans lâarbre, tĂȘte en bas. Ăa câest la partie la plus facile. Il faut bien sĂ»r mettre en bouteille plusieurs poires pour ĂȘtre sĂ»r dâen obtenir une belle, pas abĂźmĂ©e! Quand le fruit est mĂ»r, on rĂ©colte la bouteille. Puis remplissez celle-ci avec de lâalcool de poire. Comment filtrer et mettre en bouteilles? Filtrer et mettre en bouteilles. Un dĂ©pot blanc
Pour refroidir une bouteille au congĂ©lateur, il faudra attendre au minimum 20 minutes avant quâelle ne soit bien refroidir une bouteille sans glace?Pour refroidir une bouteille sans glaceHumidifiez bien un torchon et essorez-le. Il doit rester suffisamment enveloppez soigneusement la bouteille dans le la bouteille emmaillotĂ©e Ă la lumiĂšre directe du refroidir une bouteille plus vite?Pour refroidir une bouteille plus vite, vous pouvez aussi la mettre dans un seau rempli dâeau, de glace et dâun peu de sel. En quelques minutes, la tempĂ©rature de votre bouteille baissera considĂ©rablement. En effet, le mĂ©lange de sel et dâeau va absorber la chaleur du congeler une bouteille dâeau?Pour congeler une bouteille dâeau, remplissez la aux trois quarts et placez-la ensuite au congĂ©lateur toute la nuit. Il suffit de remplir le dernier quart Ă tempĂ©rature ambiante. Cela permettra de conserver la fraĂźcheur de la boisson pendant plusieurs une bouteille dâeau Ă©clate au congĂ©lateur?Contrairement Ă la plupart des matĂ©riaux, lâeau solide la glace, prend plus de place quâune eau liquide. Donc, ne mettez pas une bouteille dâeau pleine dans le congĂ©lateur. Sinon, elle Ă©clatera !Comment dĂ©congeler une bouteille de biĂšre?Pour dĂ©congeler une bouteille de biĂšre, vous pouvez la mettre au rĂ©frigĂ©rateur et la dĂ©congeler lentement. Pour garantir une dĂ©congĂ©lation uniforme, la bouteille doit ĂȘtre tournĂ©e de 180 degrĂ©s toutes les 12 SimilairesCet article vous a Ă©tĂ© utile ?OuiNon 1 Remplissez des rĂ©cipients. Versez le produit que vous voulez pasteuriser dans des bocaux ou des bouteilles en verre stĂ©rilisĂ©s. Laissez un espace vide de 3 Ă 5 cm en haut de chacun. Fermez les rĂ©cipients avec des couvercles hermĂ©tiques. Il est impĂ©ratif quâils soient hermĂ©tiques pour que cette mĂ©thode fonctionne.Voltaire Contes en vers et en prose II Le Blanc et le noir Tout le monde... Tout le monde dans la province de Candahar connaĂt l'aventure du jeune Rustan. Il Ă©tait fils unique d'un mirza du pays c'est comme qui dirait marquis parmi nous, ou baron chez les Allemands. Le mirza son pĂšre avait un bien honnĂÂȘte. On devait marier le jeune Rustan Ă une demoiselle, ou mirzasse de sa sorte. Les deux familles le dĂ©siraient passionnĂ©ment. Il devait faire la consolation de ses parents, rendre sa femme heureuse, et l'ĂÂȘtre avec elle. Mais par malheur il avait vu la princesse de Cachemire Ă la foire de Kaboul, qui est la foire la plus considĂ©rable du monde, et incomparablement plus frĂ©quentĂ©e que celles de Bassora et d'Astrakan; et voici pourquoi le vieux prince de Cachemire Ă©tait venu Ă la foire avec sa fille. Il avait perdu les deux plus rares piĂšces de son trĂ©sor l'une Ă©tait un diamant gros comme le pouce, sur lequel sa fille Ă©tait gravĂ©e par un art que les Indiens possĂ©daient alors, et qui s'est perdu depuis; l'autre Ă©tait un javelot qui allait de lui-mĂÂȘme oĂÂč l'on voulait ce qui n'est pas une chose bien extraordinaire parmi nous, mais qui l'Ă©tait Ă Cachemire. Un faquir de Son Altesse lui vola ces deux bijoux; il les porta Ă la princesse. "Gardez soigneusement ces deux piĂšces, lui dit-il; votre destinĂ©e en dĂ©pend." Il partit alors, et on ne le revit plus. Le duc de Cachemire, au dĂ©sespoir, rĂ©solut d'aller voir Ă la foire de Kaboul si de tous les marchands qui s'y rendent des quatre coins du monde il n'y en aurait pas un qui eĂ»t son diamant et son arme. Il menait sa fille avec lui dans tous ses voyages. Elle porta son diamant bien enfermĂ© dans sa ceinture; mais pour le javelot, qu'elle ne pouvait si bien cacher, elle l'avait enfermĂ© soigneusement Ă Cachemire dans son grand coffre de la Chine. Rustan et elle se virent Ă Kaboul; ils s'aimĂšrent avec toute la bonne foi de leur ĂÂąge, et toute la tendresse de leur pays. La princesse, pour gage de son amour, lui donna son diamant, et Rustan lui promit Ă son dĂ©part de l'aller voir secrĂštement Ă Cachemire. Le jeune mirza avait deux favoris qui lui servaient de secrĂ©taires, d'Ă©cuyers, de maĂtres d'hĂÂŽtel et de valets de chambre. L'un s'appelait Topaze il Ă©tait beau, bien fait, blanc comme une Circassienne, doux et serviable comme un ArmĂ©nien, sage comme un GuĂšbre. L'autre se nommait EbĂšne c'Ă©tait un nĂšgre fort joli, plus empressĂ©, plus industrieux que Topaze, et qui ne trouvait rien de difficile. Il leur communiqua le projet de son voyage. Topaze tĂÂącha de l'en dĂ©tourner avec le zĂšle circonspect d'un serviteur qui ne voulait pas lui dĂ©plaire; il lui reprĂ©senta tout ce qu'il hasardait. Comment laisser deux familles au dĂ©sespoir? comment mettre le couteau dans le coeur de ses parents? Il Ă©branla Rustan; mais EbĂšne le raffermit et leva tous ses scrupules. Le jeune homme manquait d'argent pour un si long voyage. Le sage Topaze ne lui en aurait pas fait prĂÂȘter; EbĂšne y pourvut. Il prit adroitement le diamant de son maĂtre, en fit faire un faux tout semblable, qu'il remit Ă sa place, et donna le vĂ©ritable en gage Ă un ArmĂ©nien pour quelques milliers de roupies. Quand le marquis eut ses roupies, tout fut prĂšs pour le dĂ©part. On chargea un Ă©lĂ©phant de son bagage; on monta Ă cheval. Topaze dit Ă son maĂtre "J'ai pris la libertĂ© de vous faire des remontrances sur votre entreprise; mais, aprĂšs avoir remontrĂ©, il faut obĂ©ir; je suis Ă vous, je vous aime, je vous suivrai jusqu'au bout du monde; mais consultons en chemin l'oracle qui est Ă deux parasanges d'ici." Rustan y consentit. L'oracle rĂ©pondit "Si tu vas Ă l'orient, tu seras Ă l'occident." Rustan ne comprit rien Ă cette rĂ©ponse. Topaze soutint qu'elle ne contenait rien de bon. EbĂšne, toujours complaisant, lui persuada qu'elle Ă©tait trĂšs favorable. Il y avait encore un autre oracle dans Kaboul; ils y allĂšrent. L'oracle de Kaboul rĂ©pondit en ces mots "Si tu possĂšdes, tu ne possĂ©deras pas; si tu es vainqueur, tu ne vaincras pas; si tu es Rustan, tu ne le seras pas." Cet oracle parut encore plus inintelligible que l'autre. "Prenez garde Ă vous, disait Topaze. - Ne redoutez rien", disait EbĂšne; et ce ministre, comme on peut le croire, avait toujours raison auprĂšs de son maĂtre, dont il encourageait la passion et l'espĂ©rance. Au sortir de Kaboul, on marcha par une grande forĂÂȘt, on s'assit sur l'herbe pour manger, on laissa les chevaux paĂtre. On se prĂ©parait Ă dĂ©charger l'Ă©lĂ©phant qui portait le dĂner et le service, lorsqu'on s'aperçut que Topaze et EbĂšne n'Ă©taient plus avec la petite caravane. On les appelle; la forĂÂȘt retentit des noms d'EbĂšne et de Topaze. Les valets les cherchent de tous cĂÂŽtĂ©s, et remplissent la forĂÂȘt de leurs cris; ils reviennent sans avoir rien vu, sans qu'on leur ait rĂ©pondu. "Nous n'avons trouvĂ©, dirent-ils Ă Rustan, qu'un vautour qui se battait avec un aigle, et qui lui ĂÂŽtait toutes ses plumes." Le rĂ©cit de ce combat piqua la curiositĂ© de Rustan; il alla Ă pied sur le lieu, il n'aperçut ni vautour ni aigle; mais il vit son Ă©lĂ©phant, encore tout chargĂ© de son bagage, qui Ă©tait assailli par un gros rhinocĂ©ros. L'un frappait de sa corne, l'autre de sa trompe. Le rhinocĂ©ros lĂÂącha prise Ă la vue de Rustan; on ramena son Ă©lĂ©phant, mais on ne trouva plus les chevaux. "Il arrive d'Ă©tranges choses dans les forĂÂȘts quand on voyage!" s'Ă©criait Rustan. Les valets Ă©taient consternĂ©s, et le maĂtre au dĂ©sespoir d'avoir perdu Ă la fois ses chevaux, son cher nĂšgre, et le sage Topaze, pour lequel il avait toujours de l'amitiĂ©, quoiqu'il ne fĂ»t jamais de son avis. L'espĂ©rance d'ĂÂȘtre bientĂÂŽt aux pieds de la belle princesse de Cachemire le consolait, quand il rencontra un grand ĂÂąne rayĂ©, Ă qui un rustre vigoureux et terrible donnait cent coups de bĂÂąton. Rien n'est si beau, ni si rare, ni si lĂ©ger Ă la course que les ĂÂąnes de cette espĂšce. Celui-ci rĂ©pondait aux coups redoublĂ©s du vilain par des ruades qui auraient pu dĂ©raciner un chĂÂȘne. Le jeune mirza prit, comme de raison, le parti de l'ĂÂąne, qui Ă©tait une crĂ©ature charmante. Le rustre s'enfuit en disant Ă l'ĂÂąne "Tu me le payeras." L'ĂÂąne remercia son libĂ©rateur en son langage, s'approcha, se laissa caresser, et caressa. Rustan monte dessus aprĂšs avoir dĂnĂ©, et prend le chemin de Cachemire avec ses domestiques, qui suivent, les uns Ă pied, les autres montĂ©s sur l'Ă©lĂ©phant. A peine Ă©tait-il sur son ĂÂąne que cet animal tourne vers Kaboul, au lieu de suivre la route de Cachemire. Son maĂtre a beau tourner la bride, donner des saccades, serrer les genoux, appuyer des Ă©perons, rendre la bride, tirer Ă lui, fouetter Ă droite et Ă gauche, l'animal opiniĂÂątre courait toujours vers Kaboul. Rustan suait, se dĂ©menait, se dĂ©sespĂ©rait, quand il rencontra un marchand de chameaux qui lui dit "MaĂtre, vous avez lĂ un ĂÂąne bien malin qui vous mĂšne oĂÂč vous ne voulez pas aller; si vous voulez me le cĂ©der, je vous donnerai quatre de mes chameaux Ă choisir." Rustan remercia la Providence de lui avoir procurĂ© un si bon marchĂ©. "Topaze avait grand tort, dit-il, de me dire que mon voyage serait malheureux." Il montre sur le plus beau chameau, les trois autres suivent; il rejoint sa caravane, et se voit dans le chemin de son bonheur. A peine a-t-il marchĂ© quatre parasanges qu'il est arrĂÂȘtĂ© par un torrent profond, large et impĂ©tueux, qui roulait des rochers blanchis d'Ă©cume. Les deux rivages Ă©taient des prĂ©cipices affreux qui Ă©blouissaient la vue et glaçaient le courage; nul moyen de passer, nul d'aller Ă droite ou Ă gauche. "Je commence Ă craindre, dit Rustan, que Topaze n'ait eu raison de blĂÂąmer mon voyage, et moi grand tort de l'entreprendre; encore, s'il Ă©tait ici, il me pourrait donner quelques bons avis. Si j'avais EbĂšne, il me consolerait, et il trouverait des expĂ©dients; mais tout me manque." Son embarras Ă©tait augmentĂ© par la consternation de sa troupe la nuit Ă©tait noire, on la passa Ă se lamenter. Enfin la fatigue et l'abattement endormirent l'amoureux voyageur. Il se rĂ©veille au point du jour, et voit un beau pont de marbre Ă©levĂ© sur le torrent d'une rive Ă l'autre. Ce furent des exclamations, des cris d'Ă©tonnement et de joie. "Est-il possible? est-ce un songe? quel prodige! quel enchantement! oserons-nous passer?" Toute la troupe se mettait Ă genoux, se relevait, allait au pont, baisait la terre, regardait le ciel, Ă©tendait les mains, posait le pied en tremblant, allait, revenait, Ă©tait en extase; et Rustan disait "Pour le coup le ciel me favorise Topaze ne savait ce qu'il disait; les oracles Ă©taient en ma faveur; EbĂšne avait raison; mais pourquoi n'est-il pas ici?" A peine la troupe fut-elle au-delĂ du torrent que voilĂ le pont qui s'abĂme dans l'eau avec un fracas Ă©pouvantable. "Tant mieux! tant mieux! s'Ă©cria Rustan; Dieu soit louĂ©! le ciel soit bĂ©ni! il ne veut pas que je retourne dans mon pays, oĂÂč je n'aurais Ă©tĂ© qu'un simple gentilhomme; il veut que j'Ă©pouse ce que j'aime. Je serais prince de Cachemire; c'est ainsi qu'en possĂ©dant ma maĂtresse, je ne possĂ©derai pas mon petit marquisat Ă Candahar. Je serai Rustan, et je ne le serai pas, puisque je deviendrai un grand prince voilĂ une grande partie de l'oracle expliquĂ©e nettement en ma faveur, le reste s'expliquera de mĂÂȘme; je suis trop heureux. Mais pourquoi EbĂšne n'est-il pas auprĂšs de moi? je le regrette mille fois plus que Topaze." Il avança encore quelques parasanges avec la plus grande allĂ©gresse; mais, sur la fin du jour, une enceinte de montagnes plus roides qu'une contrescarpe, et plus hautes que n'aurait Ă©tĂ© la tour de Babel si elle avait Ă©tĂ© achevĂ©e, barra entiĂšrement la caravane saisie de crainte. Tout le monde s'Ă©cria "Dieu veut que nous pĂ©rissions ici! il n'a brisĂ© le pont que pour nous ĂÂŽter tout espoir de retour; il n'a Ă©levĂ© la montagne que pour nous priver de tout moyen d'avancer. O Rustan! ĂÂŽ malheureux marquis! nous ne verrons jamais Cachemire, nous ne rentrons jamais dans la terre de Candahar." La plus cuisante douleur, l'abattement le plus accablant; succĂ©daient dans l'ĂÂąme de Rustan Ă la joie immodĂ©rĂ©e qu'il avait ressentie, aux espĂ©rances dont il s'Ă©tait enivrĂ©. Il Ă©tait bien loin d'interprĂ©ter les prophĂ©ties Ă son avantage. "O ciel! ĂÂŽ Dieu paternel! faut-il que j'aie perdu mon ami Topaze!" Comme il prononçait ces paroles en poussant de profonds soupirs, et en versant des larmes au milieu de ses suivants dĂ©sespĂ©rĂ©s, voilĂ la base de la montagne qui s'ouvre, une longue galerie en voĂ»te, Ă©clairĂ©e de cent mille flambeaux, se prĂ©sente aux yeux Ă©blouis; et Rustan de s'Ă©crier, et ses gens de se jeter Ă genoux, et de tomber d'Ă©tonnement Ă la renverse, et de crier "miracle!" et de dire "Rustan est le favori de Vitsnou, le bien-aimĂ© de Brama; il sera le maĂtre du monde." Rustan le croyait, il Ă©tait hors de lui, Ă©levĂ© au-dessus de lui-mĂÂȘme. "Ah! EbĂšne, mon cher EbĂšne! oĂÂč ĂÂȘtes-vous? que n'ĂÂȘtes-vous tĂ©moin de toutes ces merveilles! comment vous ai-je perdu? belle princesse de Cachemire, quand reverrai-je vos charmes?" Il avance avec ses domestiques, son Ă©lĂ©phant, ses chameaux, sous la voĂ»te de la montagne, au bout de laquelle il entre dans une prairie Ă©maillĂ©e de fleurs et bordĂ©e de ruisseaux et au bout de la prairie ce sont des allĂ©es d'arbres Ă perte de vue; et au bout de ces allĂ©es, une riviĂšre, le long de laquelle sont mille maisons de plaisance, avec des jardins dĂ©licieux. Il entend partout des concerts de voix et d'instruments; il voit des danses; il se hĂÂąte de passer un des ponts de la riviĂšre; il demande au premier homme qu'il rencontre quel est ce beau pays. Celui auquel il s'adressait lui rĂ©pondit "Vous ĂÂȘtes dans la province de Cachemire; vous voyez les habitants dans la joie et dans les plaisirs; nous cĂ©lĂ©brons les noces de notre belle princesse, qui va se marier avec le seigneur Barbabou, Ă qui son pĂšre l'a promise; que Dieu perpĂ©tue leur fĂ©licitĂ©!" A ces paroles Rustan tomba Ă©vanoui, et le seigneur cachemirien crut qu'il Ă©tait sujet Ă l'Ă©pilepsie; il le fit porter dans sa maison, oĂÂč il fut longtemps sans connaissance. On alla chercher les deux plus habiles mĂ©decins du canton; ils tĂÂątĂšrent le pouls du malade, qui, ayant repris un peu ses esprits, poussait des sanglots, roulait les yeux, et s'Ă©criait de temps en temps "Topaze, Topaze, vous aviez bien raison!" L'un des deux mĂ©decins dit au seigneur cachemirien "Je vois Ă son accent que c'est un jeune homme de Candahar, Ă qui l'air de ce pays ne vaut rien; il faut le renvoyer chez lui; je vois Ă ses yeux qu'il est devenu fou; confiez-le-moi, je le ramĂšnerai dans sa patrie, et je le guĂ©rirai." L'autre mĂ©decin assura qu'il n'Ă©tait malade que de chagrin, qu'il fallait le mener aux noces de la princesse, et le faire danser. Pendant qu'ils consultaient, le malade reprit ses forces; les deux mĂ©decins furent congĂ©diĂ©s, et Rustan demeura tĂÂȘte Ă tĂÂȘte avec son hĂÂŽte. "Seigneur, lui dit-il, je vous demande pardon de m'ĂÂȘtre Ă©vanoui devant vous; je sais que cela n'est pas poli; je vous supplie de vouloir bien accepter mon Ă©lĂ©phant en reconnaissance des bontĂ©s dont vous m'avez honorĂ©." Il lui conta ensuite toutes ses aventures, en se gardant bien de lui parler de l'objet de son voyage. "Mais, au nom de Vitsnou et de Brama, lui dit-il, apprenez-moi quel est cet heureux Barbabou qui Ă©pouse la princesse de Cachemire; pourquoi son pĂšre l'a choisi pour gendre, et pourquoi la princesse l'a acceptĂ© pour son Ă©poux. - Seigneur, lui dit le Cachemirien, la princesse n'a point du tout acceptĂ© Barbabou; au contraire, elle est dans les pleurs, tandis que toute la province cĂ©lĂšbre avec joie son mariage; elle s'est enfermĂ©e dans la tour de son palais; elle ne veut voir aucune des rĂ©jouissances qu'on fait pour elle." Rustan, en entendant ces paroles, se sentit renaĂtre; l'Ă©clat de ses couleurs, que la douleur avait flĂ©tries, reparut sur son visage. "Dites-moi, je vous prie, continua-t-il, pourquoi le prince de Cachemire s'obstine Ă donner sa fille Ă un Barbabou dont elle ne veut pas. - Voici le fait, rĂ©pondit le Cachemirien. Savez-vous que notre auguste prince avait perdu un gros diamant et un javelot qui lui tenaient fort au coeur? - Ah! je le sais trĂšs bien, dit Rustan. - Apprenez donc, dit l'hĂÂŽte, que notre prince, au dĂ©sespoir de n'avoir point de nouvelles de ses deux bijoux, aprĂšs les avoir fait longtemps chercher par toute la terre, a promis sa fille Ă quiconque lui rapporterait l'un ou l'autre. Il est venu un seigneur Barbabou qui Ă©tait muni du diamant, et il Ă©pouse demain la princesse." Rustan pĂÂąlit, bĂ©gaya un compliment, prit congĂ© de son hĂÂŽte, et courut sur son dromadaire Ă la ville capitale oĂÂč se devait faire la cĂ©rĂ©monie. Il arrive au palais du prince; il dit qu'il a des choses importantes Ă lui communiquer; il demande une audience; on lui rĂ©pond que le prince est occupĂ© des prĂ©paratifs de la noce "C'est pour cela mĂÂȘme, dit-il, que je veux lui parler." Il presse tant qu'il est introduit. "Monseigneur, dit-il, que Dieu couronne tous vos jours de gloire et de magnificence! votre gendre est un fripon. - Comment? un fripon! qu'osez-vous dire? est-ce ainsi qu'on parle Ă un duc de Cachemire du gendre qu'il a choisi? - Oui, un fripon, reprit Rustan; et pour le prouver Ă Votre Altesse, c'est que voici votre diamant que je vous rapporte." Le duc, tout Ă©tonnĂ©; confronta les deux diamants; et comme il ne s'y connaissait guĂšre, il ne put dire quel Ă©tait le vĂ©ritable. "VoilĂ deux diamants, dit-il, et je n'ai qu'une fille; me voilĂ dans un Ă©trange embarras!" Il fit venir Barbabou, et lui demanda s'il ne l'avait point trompĂ©. Barbabou jura qu'il avait achetĂ© son diamant d'un ArmĂ©nien; l'autre ne disait pas de qui il tenait le sien, mais il proposa un expĂ©dient ce fut qu'il plĂ»t Ă Son Altesse de le faire combattre sur-le-champ contre son rival. "Ce n'est pas assez que votre gendre donne un diamant, disait-il; il faut aussi qu'il donne des preuves de valeur ne trouvez-vous pas bon que celui qui tuera l'autre Ă©pouse la princesse? - TrĂšs bon, rĂ©pondit le prince, ce sera un fort beau spectacle pour la cour; battez-vous vite tous deux le vainqueur prendra les armes du vaincu, selon l'usage de Cachemire, et il Ă©pousera ma fille." Les deux prĂ©tendants descendent aussitĂÂŽt dans la cour. Il y avait sur l'escalier une pie et un corbeau. Le corbeau criait "Battez-vous, battez-vous"; la pie "Ne vous battez pas". Cela fit rire le prince; les deux rivaux y prirent garde Ă peine ils commencent le combat; tous les courtisans faisaient un cercle autour d'eux. La princesse, se tenant toujours renfermĂ©e dans sa tour, ne voulut point assister Ă ce spectacle; elle Ă©tait bien loin de se douter que son amant fĂ»t Ă Cachemire, et elle avait tant d'horreur pour Barbabou qu'elle ne voulait rien voir. Le combat se passa le mieux du monde; Barbabou fut tuĂ© roide, et le peuple en fut charmĂ©, parce qu'il Ă©tait laid, et que Rustan Ă©tait fort joli c'est presque toujours ce qui dĂ©cide de la faveur publique. Le vainqueur revĂÂȘtit la cotte de mailles, l'Ă©charpe et le casque du vaincu, et vint, suivi de toute la cour, au son des fanfares, se prĂ©senter sous les fenĂÂȘtres de sa maĂtresse. Tout le monde criait "Belle princesse, venez voir votre beau mari qui a tuĂ© son vilain rival"; ses femmes rĂ©pĂ©taient ces paroles. La princesse mit par malheur la tĂÂȘte Ă la fenĂÂȘtre, et voyant l'armure d'un homme qu'elle abhorrait, elle courut en dĂ©sespĂ©rĂ©e Ă son coffre de la Chine, et tira le javelot fatal qui alla percer son cher Rustan au dĂ©faut de la cuirasse; il jeta un grand cri, et Ă ce cri la princesse crut reconnaĂtre la voix de son malheureux amant. Elle descend Ă©chevelĂ©e, la mort dans les yeux et dans le coeur. Rustan Ă©tait dĂ©jĂ tombĂ© tout sanglant dans les bras de son pĂšre. Elle le voit ĂÂŽ moment! ĂÂŽ vue! ĂÂŽ reconnaissance dont on ne peut exprimer ni la douleur, ni la tendresse, ni l'horreur! Elle se jette sur lui, elle l'embrasse "Tu reçois, lui dit-elle; les premiers et les derniers baisers de ton amante et de ta meurtriĂšre." Elle retire le dard de la plaie, l'enfonce dans son coeur, et meurt sur l'amant qu'elle adore. Le pĂšre, Ă©pouvantĂ©, Ă©perdu, prĂÂȘt Ă mourir comme elle, tĂÂąche en vain de la rappeler Ă la vie; elle n'Ă©tait plus; il maudit ce dard fatal, le brise en morceaux, jette au loin ses deux diamants funestes; et, tandis qu'on prĂ©pare les funĂ©railles de sa fille au lieu de son mariage, il fait transporter dans son palais Rustan ensanglantĂ©, qui avait encore un reste de vie. On le porte dans un lit. La premiĂšre chose qu'il voit aux deux cĂÂŽtĂ©s de ce lit mort, c'est Topaze et EbĂšne. Sa surprise lui rendit un peu de force. "Ah! cruels, dit-il, pourquoi m'avez-vous abandonnĂ©? Peut-ĂÂȘtre la princesse vivrait encore, si vous aviez Ă©tĂ© prĂšs du malheureux Rustan. - Je ne vous ai pas abandonnĂ© un seul moment, dit Topaze. - J'ai toujours Ă©tĂ© prĂšs de vous, dit EbĂšne. - Ah! que dites-vous? pourquoi insulter Ă mes derniers moments? rĂ©pondit Rustan d'une voix languissante. - Vous pouvez m'en croire, dit Topaze; vous savez que je n'approuvai jamais ce fatal voyage dont je prĂ©voyais les horribles suites. C'est moi qui Ă©tais l'aigle qui a combattu contre le vautour, et qu'il a dĂ©plumĂ©; j'Ă©tais l'Ă©lĂ©phant qui emportait le bagage pour vous forcer Ă retourner dans votre patrie; j'Ă©tais l'ĂÂąne rayĂ© qui vous ramenait malgrĂ© vous chez votre pĂšre; c'est moi, qui ai Ă©garĂ© vos chevaux; c'est moi qui ai formĂ© le torrent qui vous empĂÂȘchait de passer; c'est moi qui ai Ă©levĂ© la montagne qui vous fermait un chemin si funeste; j'Ă©tais le mĂ©decin qui vous conseillait l'air natal; j'Ă©tais la pie qui vous criait de ne point combattre. - Et moi, dit EbĂšne, j'Ă©tais le vautour qui a dĂ©plumĂ© l'aigle, le rhinocĂ©ros qui donnait cent coups de corne Ă l'Ă©lĂ©phant, le vilain qui battait l'ĂÂąne rayĂ©; le marchand qui vous donnait des chameaux pour courir Ă votre perte; j'ai bĂÂąti le pont sur lequel vous avez passĂ©; j'ai creusĂ© la caverne que vous avez traversĂ©e, je suis le mĂ©decin qui vous encourageait Ă marcher; le corbeau qui vous criait de vous battre. - HĂ©las! souviens-toi de oracles, dit Topaze Si tu vas Ă l'orient, tu seras Ă l'occident. - Oui, dit EbĂšne, on ensevelit ici les morts le visage tournĂ© Ă l'occident l'oracle Ă©tait clair, que ne l'as-tu compris? Tu as possĂ©dĂ©, et tu ne possĂ©dais pas car tu avais le diamant, mais il Ă©tait faux, et tu n'en savais rien. Tu es vainqueur, et tu meurs; tu es Rustan, et tu cesses de l'ĂÂȘtre tout a Ă©tĂ© accompli." Comme il parlait ainsi, quatre ailes blanches couvrirent le corps de Topaze, et quatre ailes noires celui d'EbĂšne. "Que vois-je?" s'Ă©cria Rustan. Topaze et EbĂšne rĂ©pondirent ensemble "Tu vois tes deux gĂ©nies. - Eh! messieurs, leur dit le malheureux Rustan, de quoi vous mĂÂȘliez-vous? et pourquoi deux gĂ©nies pour un pauvre homme? - C'est la loi, dit Topaze; chaque homme a ses deux gĂ©nies, c'est Platon qui l'a dit le premier, et d'autre l'on rĂ©pĂ©tĂ© ensuite; tu vois que rien n'est plus vĂ©ritable moi qui te parle, je suis ton bon gĂ©nie, et ma charge Ă©tait de veiller auprĂšs de toi jusqu'au dernier moment de ta vie; je m'en suis fidĂšlement acquittĂ©. - Mais, dit le mourant, si ton emploi Ă©tait de me servir, je suis donc d'une nature fort supĂ©rieure Ă la tienne; et puis comment oses-tu dire que tu es mon bon gĂ©nie, quand tu m'as laissĂ© tromper dans tout ce que j'ai entrepris, et que tu me laisses mourir, moi et ma maĂtresse, misĂ©rablement? - HĂ©las! c'Ă©tait ta destinĂ©e, dit Topaze. - Si c'est la destinĂ©e qui fait tout, dit le mourant, Ă quoi un gĂ©nie est-il bon? Et toi, EbĂšne, avec tes quatre ailes noires, tu es apparemment mon mauvais gĂ©nie? - Vous l'avez dit, rĂ©pondit EbĂšne. - Mais tu Ă©tais donc aussi le mauvais gĂ©nie de ma princesse? - Non, elle avait le sien, et je l'ai parfaitement secondĂ©. - Ah! maudit EbĂšne, si tu es si mĂ©chant, tu n'appartiens donc pas au mĂÂȘme maĂtre que Topaze? vous avez Ă©tĂ© formĂ©s tous deux par deux principes diffĂ©rents, dont l'un est bon, et l'autre mĂ©chant de sa nature? - Ce n'est pas une consĂ©quence, dit EbĂšne, mais c'est une grande difficultĂ©. - Il n'est pas possible, reprit l'agonisant, qu'un ĂÂȘtre favorable ait fait un gĂ©nie si funeste. - Possible ou non possible, repartit EbĂšne, la chose est comme je te le dis. - HĂ©las! dit Topaze, mon pauvre ami, ne vois-tu pas que ce coquin-lĂ a encore la malice de te faire disputer pour allumer ton sang et prĂ©cipiter l'heure de ta mort? - Va, je ne suis guĂšre plus content de toi que de lui, dit le triste Rustan il avoue du moins qu'il a voulu me faire du mal; et toi, qui prĂ©tendais me dĂ©fendre, tu ne m'as servi de rien. - J'en suis bien fĂÂąchĂ©, dit le bon gĂ©nie. - Et moi aussi, dit le mourant; il y a quelque chose lĂ -dessous que je ne comprends pas. - Ni moi non plus, dit le pauvre bon gĂ©nie. - J'en serai instruit dans un moment, dit Rustan. - C'est ce que nous verrons, dit Topaze." Alors tout disparut. Rustan se retrouva dans la maison de son pĂšre, dont il n'Ă©tait pas sorti, et dans son lit, oĂÂč il avait dormi une heure. Il se rĂ©veille en sursaut, tout en sueur, tout Ă©garĂ©; il se tĂÂąte, il appelle, il crie, il sonne. Son valet de chambre, Topaze, accourt en bonnet de nuit, et tout en bĂÂąillant. "Suis-je mort, suis-je en vie? s'Ă©cria Rustan; la belle princesse de Cachemire en rĂ©chappera-t-elle?... - Monseigneur rĂÂȘve-t-il? rĂ©pondit froidement Topaze. - Ah! s'Ă©criait Rustan, qu'est donc devenu ce barbare EbĂšne avec ses quatre ailes noires? c'est lui qui me fait mourir d'une mort si cruelle. - Monseigneur, je l'ai laissĂ© lĂ -haut, qui ronfle voulez-vous qu'on le fasse descendre? - Le scĂ©lĂ©rat! il y a six mois entiers qu'il me persĂ©cute; c'est lui qui me mena Ă cette fatale foire de Kaboul; c'est lui qui m'escamota le diamant que m'avait donnĂ© la princesse; il est seul la cause de mon voyage, de la mort de ma princesse, et du coup de javelot dont je meurs Ă la fleur de mon ĂÂąge. - Rassurez-vous, dit Topaze; vous n'avez jamais Ă©tĂ© Ă Kaboul; il n'y a point de princesse de Cachemire; son pĂšre n'a jamais eu que deux garçons qui sont actuellement au collĂšge. Vous n'avez jamais eu de diamant; la princesse ne peut ĂÂȘtre morte, puisqu'elle n'est pas nĂ©e; et vous vous portez Ă merveille. - Comment! il n'est pas vrai que tu m'assistais Ă la mort dans le lit du prince de Cachemire? Ne m'as-tu pas avouĂ© que, pour me garantir de tant de malheurs, tu avais Ă©tĂ© aigle, Ă©lĂ©phant, ĂÂąne rayĂ©, mĂ©decin, et pie? - Monseigneur, vous avez rĂÂȘvĂ© tout cela nos idĂ©es ne dĂ©pendent pas plus de nous dans le sommeil que dans la veille. Dieu a voulu que cette file d'idĂ©es vous ai passĂ© par la tĂÂȘte, pour vous donner apparemment quelque instruction dont vous ferez votre profit. - Tu te moques de moi, reprit Rustan; combien de temps ai-je dormi? - Monseigneur, vous n'avez encore dormi qu'une heure. - Eh bien! maudit raisonneur, comment veux-tu qu'en une heure de temps j'aie Ă©tĂ© Ă la foire de Kaboul il y a six mois, que j'en sois revenu, que j'aie fait le voyage de Cachemire, et que nous soyons morts, Barbabou, la princesse, et moi? - Monseigneur, il n'y a rien de plus aisĂ© et de plus ordinaire, et vous auriez pu rĂ©ellement faire le tour du monde, et avoir beaucoup plus d'aventures en bien moins de temps. "N'est-il pas vrai que vous pouvez lire en une heure l'abrĂ©gĂ© de l'histoire des Perses, Ă©crite par Zoroastre? cependant cet abrĂ©gĂ© contient huit cent mille annĂ©es. Tous ces Ă©vĂ©nements passent sous vos yeux l'un aprĂšs l'autre en une heure; or vous m'avouerez qu'il est aussi aisĂ© Ă Brama de les resserrer tous dans l'espace d'une heure que de les Ă©tendre dans l'espace de huit cent mille annĂ©es; c'est prĂ©cisĂ©ment la mĂÂȘme chose. Figurez-vous que le temps tourne sur une roue dont le diamĂštre est infini. Sous cette roue immense sont une multitude innombrable de roues les unes dans les autres; celle du centre est imperceptible, et fait un nombre infini de tours prĂ©cisĂ©ment dans le mĂÂȘme temps que la grande roue n'en achĂšve qu'un. Il est clair que tous les Ă©vĂ©nements, depuis le commencement du monde jusqu'Ă sa fin, peuvent arriver successivement en beaucoup moins de temps que la cent milliĂšme partie d'une seconde; et on peu dire mĂÂȘme que la chose est ainsi. - Je n'y entends rien, dit Rustan. - Si vous voulez, dit Topaze, j'ai un perroquet qui vous le fera aisĂ©ment comprendre. Il est nĂ© quelque temps avant le dĂ©luge, il a Ă©tĂ© dans l'arche; il a beaucoup vu; cependant il n'a encore qu'un an et demi il vous contera son histoire, qui est fort intĂ©ressante. - Allez vite chercher votre perroquet, dit Rustan; il m'amusera jusqu'Ă ce que je puisse me rendormir. - Il est chez ma soeur la religieuse, dit Topaze; je vais le chercher, vous en serez content; sa mĂ©moire est fidĂšle, il conte simplement, sans chercher Ă montrer de l'esprit Ă tout propos, et sans faire; des phrases. - Tant mieux, dit Rustan, voilĂ comme j'aime les contes." On lui amena le perroquet, lequel parla ainsi. Mademoiselle Catherine VadĂ© n'a jamais pu trouver l'histoire du perroquet dans le portefeuille de feu son cousin Antoine VadĂ©, auteur de ce conte. C'est grand dommage, vu le temps auquel vivait ce perroquet. Jeannot et Colin Plusieurs personnes... Plusieurs personnes dignes de foi ont vu Jeannot et Colin Ă l'Ă©cole dans la ville d'Issoire, en Auvergne, ville fameuse dans tout l'univers par son collĂšge et par ses chaudrons. Jeannot Ă©tait fils d'un marchand de mulets trĂšs renommĂ©, et Colin devait le jour Ă un brave laboureur des environs, qui cultivait la terre avec quatre mulets, et qui, aprĂšs avoir payĂ© la taille, le taillon, les aides et gabelles, le sou pour livre, la capitation et les vingtiĂšmes, ne se trouvait pas puissamment riche au bout de l'annĂ©e. Jeannot et Colin Ă©taient fort jolis pour des Auvergnats; ils s'aimaient beaucoup, et ils avaient ensemble de petites privautĂ©s, de petites familiaritĂ©s, dont on se ressouvient toujours avec agrĂ©ment quand on se rencontre ensuite dans le monde. Le temps de leurs Ă©tudes Ă©tait sur le point de finir, quand un tailleur apporta Ă Jeannot un habit de velours Ă trois couleurs, avec une veste de Lyon de fort bon goĂ»t; le tout Ă©tait accompagnĂ© d'une lettre Ă monsieur de La JeannotiĂšre. Colin admira l'habit, et ne fut point jaloux; mais Jeannot prit un air de supĂ©rioritĂ© qui affligea Colin. DĂšs ce moment Jeannot n'Ă©tudia plus, se regarda au miroir, et mĂ©prisa tout le monde. Quelque temps aprĂšs un valet de chambre arrive en poste, et apporte une seconde lettre Ă monsieur le marquis de La JeannotiĂšre c'Ă©tait un ordre de monsieur son pĂšre de faire venir monsieur son fils Ă Paris. Jeannot monta en chaise en tendant la main Ă Colin avec un sourire de protection assez noble. Colin sentit son nĂ©ant, et pleura. Jeannot partit dans toute la pompe de sa gloire. Les lecteurs qui aiment Ă s'instruire doivent savoir que monsieur Jeannot le pĂšre avait acquis assez rapidement des biens immenses dans les affaires. Vous demandez comment on fait ces grandes fortunes? C'est parce qu'on est heureux. Monsieur Jeannot Ă©tait bien fait, sa femme aussi, et elle avait encore de la fraĂcheur. Ils allĂšrent Ă Paris pour un procĂšs qui les ruinait, lorsque la fortune, qui Ă©lĂšve et qui abaisse les hommes Ă son grĂ©, les prĂ©senta Ă la femme d'un entrepreneur des hĂÂŽpitaux des armĂ©es, homme d'un grand talent, et qui pouvait se vanter d'avoir tuĂ© plus de soldats en un an que le canon n'en fait pĂ©rir en dix. Jeannot plut Ă madame; la femme de Jeannot plut Ă monsieur. Jeannot fut bientĂÂŽt de part dans l'entreprise; il entra dans d'autres affaires. DĂšs qu'on est dans le fil de l'eau, il n'y a qu'Ă se laisser aller; on fait sans peine une fortune immense. Les gredins, qui du rivage vous regardent voguer Ă pleines voiles; ouvrent des yeux Ă©tonnĂ©s; ils ne savent comment vous avez pu parvenir; ils vous envient au hasard, et font contre vous des brochures que vous ne lisez point. C'est ce qui arriva Ă Jeannot le pĂšre, qui fut bientĂÂŽt monsieur de La JeannotiĂšre, et qui ayant achetĂ© un marquisat au bout de six mois, retira de l'Ă©cole monsieur le marquis son fils, pour le mettre Ă Paris dans le beau monde. Colin, toujours tendre, Ă©crivit une lettre de compliments Ă son ancien camarade; et lui fit ces lignes pour le congratuler. Le petit marquis ne lui fit point de rĂ©ponse Colin en fut malade de douleur. Le pĂšre et la mĂšre donnĂšrent d'abord un gouverneur au jeune marquis ce gouverneur, qui Ă©tait un homme du bel air, et qui ne savait rien, ne put rien enseigner Ă son pupille. Monsieur voulait que son fils apprĂt le latin, madame ne le voulait pas. Ils prirent pour arbitre un auteur qui Ă©tait cĂ©lĂšbre alors par des ouvrages agrĂ©ables. Il fut priĂ© Ă dĂner. Le maĂtre de la maison commença par lui dire d'abord "Monsieur, comme vous savez le latin, et que vous ĂÂȘtes un homme de la cour... - Moi, monsieur, du latin! je n'en sais pas un mot, rĂ©pondit le bel esprit, et bien m'en a pris; il est clair qu'on parle beaucoup mieux sa langue quand on ne partage pas son application entre elle et les langues Ă©trangĂšres. Voyez toutes nos dames, elles ont l'esprit plus agrĂ©able que les hommes; leurs lettres sont Ă©crites avec cent fois plus de grĂÂące; elles n'ont sur nous cette supĂ©rioritĂ© que parce qu'elles ne savent pas le latin. - Eh bien! n'avais-je pas raison? dit madame. Je veux que mon fils soit un homme d'esprit, qu'il rĂ©ussisse dans le monde; et vous voyez bien que, s'il savait le latin, il serait perdu. Joue-t-on, s'il vous plaĂt, la comĂ©die et l'opĂ©ra en latin? Plaide-t-on en latin quand on a un procĂšs? Fait-on l'amour en latin?" Monsieur, Ă©bloui de ces raisons, passa condamnation, et il fut conclu que le jeune marquis ne perdrait point son temps Ă connaĂtre CicĂ©ron, Horace, et Virgile. "Mais qu'apprendra-t-il donc? car encore faut-il qu'il sache quelque chose; ne pourrait-on pas lui montrer un peu de gĂ©ographie? - A quoi cela lui servira-t-il? rĂ©pondit le gouverneur. Quand monsieur le marquis ira dans ses terres les postillons ne sauront-ils pas les chemins? ils ne l'Ă©gareront certainement pas. On n'a pas besoin d'un quart de cercle pour voyager, et on va trĂšs commodĂ©ment de Paris en Auvergne, sans qu'il soit besoin de savoir sous quelle latitude on se trouve. - Vous avez raison, rĂ©pliqua le pĂšre; mais j'ai entendu parler d'une belle science qu'on appelle, je crois, l'astronomie. - Quelle pitiĂ©! repartit le gouverneur; se conduit-on par les astres dans ce monde? et faudra-t-il que monsieur le marquis se tue Ă calculer une Ă©clipse, quand il la trouve Ă point nommĂ© dans l'almanach, qui lui enseigne de plus les fĂÂȘtes mobiles, l'ĂÂąge de la lune, et celui de toutes les princesses de l'Europe?" Madame fut entiĂšrement de l'avis du gouverneur. Le petit marquis Ă©tait au comble de la joie; le pĂšre Ă©tait trĂšs indĂ©cis. "Que faudra-t-il donc apprendre Ă mon fils? disait-il. - A ĂÂȘtre aimable, rĂ©pondit l'ami que l'on consultait; et s'il sait les moyens de plaire, il saura tout c'est un art qu'il apprendra chez madame sa mĂšre, sans que ni l'un ni l'autre se donnent la moindre peine." Madame, Ă ce discours, embrassa le gracieux ignorant, et lui dit "On voit bien, monsieur, que vous ĂÂȘtes l'homme du monde le plus savant; mon fils vous devra toute son Ă©ducation je m'imagine pourtant qu'il ne serait pas mal qu'il sĂ»t un peu d'histoire. - HĂ©las! madame, Ă quoi cela est-il bon? rĂ©pondit-il; il n'y a certainement d'agrĂ©able et d'utile que l'histoire du jour. Toutes les histoires anciennes, comme le disait un de nos beaux esprits, ne sont que des fables convenues; et pour les modernes; c'est un chaos qu'on ne peut dĂ©brouiller. Qu'importe Ă monsieur votre fils que Charlemagne ait instituĂ© les douze pairs de France, et que son successeur ait Ă©tĂ© bĂšgue? - Rien n'est mieux dit! s'Ă©cria le gouverneur on Ă©touffe l'esprit des enfants sous un amas de connaissances inutiles; mais de toutes les sciences la plus absurde, Ă mon avis, et celle qui est la plus capable d'Ă©touffer toute espĂšce de gĂ©nie, c'est la gĂ©omĂ©trie. Cette science ridicule a pour objet des surfaces, des lignes, et des points, qui n'existent pas dans la nature. On fait passer en esprit cent mille lignes courbes entre un cercle et une ligne droite qui le touche, quoique dans la rĂ©alitĂ© on n'y puisse pas passer un fĂ©tu. La gĂ©omĂ©trie, en vĂ©ritĂ©, n'est qu'une mauvaise plaisanterie." Monsieur et madame n'entendaient pas trop ce que le gouverneur voulait dire; mais ils furent entiĂšrement de son avis. "Un seigneur comme monsieur le marquis, continua-t-il, ne doit pas se dessĂ©cher le cerveau dans ces vaines Ă©tudes. Si un jour il a besoin d'un gĂ©omĂštre sublime pour lever le plan de ses terres, il les fera arpenter pour son argent. S'il veut dĂ©brouiller l'antiquitĂ© de sa noblesse, qui remonte aux temps les plus reculĂ©s, il enverra chercher un bĂ©nĂ©dictin. Il en est de mĂÂȘme de tous les arts. Un jeune seigneur heureusement nĂ© n'est ni peintre, ni musicien, ni architecte, ni sculpteur; mais il fait fleurir tous ces arts en les encourageant par sa magnificence. Il vaut sans doute mieux les protĂ©ger que de les exercer; il suffit que monsieur le marquis ait du goĂ»t; c'est aux artistes Ă travailler pour lui; et c'est en quoi on a trĂšs grande raison de dire que les gens de qualitĂ© j'entends ceux qui sont trĂšs riches savent tout sans avoir rien appris, parce qu'en effet ils savent Ă la longue juger de toutes les choses qu'ils commandent et qu'ils payent". L'aimable ignorant prit alors la parole, et dit "Vous avez trĂšs bien remarquĂ©, madame, que la grande fin de l'homme est de rĂ©ussir dans la sociĂ©tĂ©. De bonne foi, est-ce par les sciences qu'on obtient ce succĂšs? S'est-on jamais avisĂ© dans la bonne compagnie de parler de gĂ©omĂ©trie? Demande-t-on jamais Ă un honnĂÂȘte homme quel astre se lĂšve aujourd'hui avec le soleil? S'informe-t-on Ă souper si Clodion le Chevelu passa le Rhin? - Non, sans doute, s'Ă©cria la marquise de La JeannotiĂšre, que ses charmes avaient initiĂ©e quelquefois dans le beau monde; et monsieur mon fils ne doit point Ă©teindre son gĂ©nie par l'Ă©tude de tous ces fatras, mais enfin que lui apprendra-t-on? Car il est bon qu'un jeune seigneur puisse briller dans l'occasion, comme dit monsieur mon mari. Je me souviens d'avoir ouĂÂŻ dire Ă un abbĂ© que la plus agrĂ©able des sciences Ă©tait une chose dont j'ai oubliĂ© le nom, mais qui commence par un B. - Par un B, madame? ne serait-ce point la botanique? - Non, ce n'Ă©tait point de botanique qu'il me parlait; elle commençait, vous dis-je, par un B, et finissait par un on. - Ah! j'entends, madame; c'est le blason c'est, Ă la vĂ©ritĂ©, une science fort profonde; mais elle n'est plus Ă la mode depuis qu'on a perdu l'habitude de faire peindre ses armes aux portiĂšres de son carrosse; c'Ă©tait la chose du monde la plus utile dans un Etat bien policĂ©. D'ailleurs, cette Ă©tude serait infinie il n'y a point aujourd'hui de barbier qui n'ait ses armoiries; et vous savez que tout ce qui devient commun est peu fĂÂȘtĂ©." Enfin, aprĂšs avoir examinĂ© le fort et le faible des sciences, il fut dĂ©cidĂ© que monsieur le marquis apprendrait Ă danser. La nature, qui fait tout, lui avait donnĂ© un talent qui se dĂ©veloppa bientĂÂŽt avec un succĂšs prodigieux c'Ă©tait de chanter agrĂ©ablement des vaudevilles. Les grĂÂąces de la jeunesse, jointes Ă ce don supĂ©rieur, le firent regarder comme le jeune homme de la plus grande espĂ©rance. Il fut aimĂ© des femmes; et ayant la tĂÂȘte toute pleine de chansons, il en fit pour ses maĂtresses. Il pillait Bacchus et l'Amour dans un vaudeville, la nuit et le jour dans un autre, les charmes et les alarmes dans un troisiĂšme; mais, comme il y avait toujours dans ses vers quelques pieds de plus ou de moins qu'il ne fallait, il les faisait corriger moyennant vingt louis d'or par chanson; et il fut mis dans L'AnnĂ©e littĂ©raire au rang des La Fare, des Chaulieu, des Hamilton, des Sarrasin et des Voiture. Madame la marquise crut alors ĂÂȘtre la mĂšre d'un bel esprit, et donna Ă souper aux beaux esprits de Paris. La tĂÂȘte du jeune homme fut bientĂÂŽt renversĂ©e; il acquit l'art de parler sans s'entendre, et se perfectionna dans l'habitude de n'ĂÂȘtre propre Ă rien. Quand son pĂšre le vit si Ă©loquent, il regretta vivement de ne lui avoir pas fait apprendre le latin, car il lui aurait achetĂ© une grande charge dans la robe. La mĂšre, qui avait des sentiments plus nobles, se chargea de solliciter un rĂ©giment pour son fils; et en attendant il fit l'amour. L'amour est quelquefois plus cher qu'un rĂ©giment. Il dĂ©pensa beaucoup, pendant que ses parents s'Ă©puisaient encore davantage Ă vivre en grands seigneurs. Une jeune veuve de qualitĂ©, leur voisine, qui n'avait qu'une fortune mĂ©diocre, voulut bien se rĂ©soudre Ă mettre en sĂ»retĂ© les grands biens de monsieur et de madame de La JeannotiĂšre, en se les appropriant, et en Ă©pousant le jeune marquis. Elle l'attira chez elle, se laissa aimer, lui fit entrevoir qu'il ne lui Ă©tait pas indiffĂ©rent, le conduisit par degrĂ©s, l'enchanta, le subjugua sans peine. Elle lui donnait tantĂÂŽt des Ă©loges, tantĂÂŽt des conseils; elle devint la meilleure amie du pĂšre et de la mĂšre. Une vieille voisine proposa le mariage; les parents, Ă©blouis de la splendeur de cette alliance, acceptĂšrent avec joie la proposition ils donnĂšrent leur fils unique Ă leur amie intime. Le jeune marquis allait Ă©pouser une femme qu'il adorait et dont il Ă©tait aimĂ©; les amis de la maison les fĂ©licitaient; on allait rĂ©diger les articles, en travaillant aux habits de noce et Ă l'Ă©pithalame. Il Ă©tait, un matin, aux genoux de la charmante Ă©pouse que l'amour, l'estime, et l'amitiĂ©, allaient lui donner; ils goĂ»taient, dans une conversation tendre et animĂ©e, les prĂ©mices de leur bonheur; ils s'arrangeaient pour mener une vie dĂ©licieuse, lorsqu'un valet de chambre de madame la mĂšre arrive tout effarĂ©. "Voici bien d'autres nouvelles, dit-il; des huissiers dĂ©mĂ©nagent la maison de monsieur et de madame; tout est saisi par des crĂ©anciers; on parle de prise de corps, et je vais faire mes diligences pour ĂÂȘtre payĂ© de mes gages. - Voyons un peu, dit le marquis, que c'est que ça, ce que c'est que cette aventure-lĂ . - Oui, dit la veuve, allez punir ces coquins-lĂ , allez vite." Il y court, il arrive Ă la maison; son pĂšre Ă©tait dĂ©jĂ emprisonnĂ© tous les domestiques avaient fui chacun de leur cĂÂŽtĂ©, en emportant tout ce qu'ils avaient pu. Sa mĂšre Ă©tait seule, sans secours, sans consolation, noyĂ©e dans les larmes; il ne lui restait rien que le souvenir de sa fortune, de sa beautĂ©, de ses fautes et de ses folles dĂ©penses. AprĂšs que le fils eut longtemps pleurĂ© avec la mĂšre, il lui dit enfin "Ne nous dĂ©sespĂ©rons pas; cette jeune veuve m'aime Ă©perdument; elle est plus gĂ©nĂ©reuse encore que riche, je rĂ©ponds d'elle; je vole Ă elle, et je vais vous l'amener." Il retourne donc chez sa maĂtresse, il la trouve tĂÂȘte Ă tĂÂȘte avec un jeune officier fort aimable. "Quoi! c'est vous, monsieur de La JeannotiĂšre; que venez-vous faire ici? abandonne-t-on ainsi sa mĂšre? Allez chez cette pauvre femme, et dites-lui que je lui veux toujours du bien j'ai besoin d'une femme de chambre, et je lui donnerai la prĂ©fĂ©rence. - Mon garçon, tu me parais assez bien tournĂ©, lui dit l'officier; si tu veux entrer dans ma compagnie je te donnerai un bon engagement." Le marquis stupĂ©fait, la rage dans le coeur, alla chercher son ancien gouverneur, dĂ©posa ses douleurs dans son sein, et lui demanda des conseils. Celui-ci lui proposa de se faire, comme lui, gouverneur d'enfants. "HĂ©las! je ne sais rien, vous ne m'avez rien appris, et vous ĂÂȘtes la premiĂšre cause de mon malheur"; et il sanglotait en lui parlant ainsi. "Faites des romans, lui dit un bel esprit qui Ă©tait lĂ ; c'est une excellente ressource Ă Paris." Le jeune homme, plus dĂ©sespĂ©rĂ© que jamais, courut chez le confesseur de sa mĂšre c'Ă©tait un thĂ©atin trĂšs accrĂ©ditĂ©, qui ne dirigeait que les femmes de la premiĂšre considĂ©ration; dĂšs qu'il le vit, il se prĂ©cipita vers lui. "Eh! mon Dieu! monsieur le marquis, oĂÂč est votre carrosse? comment se porte la respectable madame la marquise votre mĂšre?" Le pauvre malheureux lui conta le dĂ©sastre de sa famille. A mesure qu'il s'expliquait, le thĂ©atin prenait un mine plus grave, plus indiffĂ©rente, plus imposante "Mon fils, voilĂ oĂÂč Dieu vous voulait; les richesses ne servent qu'Ă corrompre le coeur; Dieu a donc fait la grĂÂące Ă votre mĂšre de la rĂ©duire Ă la mendicitĂ©? - Oui monsieur. - Tant mieux, elle est sĂ»re de son salut. - Mais, mon pĂšre, en attendant, n'y aurait-il pas moyen d'obtenir quelque secours dans ce monde? - Adieu, mon fils; il y a une dame de la cour qui m'attend." Le marquis fut prĂÂȘt Ă s'Ă©vanouir; il fut traitĂ© Ă peu prĂšs de mĂÂȘme tous par ses amis, et apprit mieux Ă connaĂtre le monde dans une demi-journĂ©e que dans tout le reste de sa vie. Comme il Ă©tait plongĂ© dans l'accablement du dĂ©sespoir, il vit avancer une chaise roulante Ă l'antique, espĂšce de tombereau couvert, accompagnĂ© de rideaux de cuir, suivi de quatre charrettes Ă©normes toutes chargĂ©es. Il y avait dans la chaise un jeune homme grossiĂšrement vĂÂȘtu; c'Ă©tait un visage rond et frais qui respirait la douceur et la gaietĂ©. Sa petite femme brune et assez grossiĂšrement agrĂ©able Ă©tait cahotĂ©e Ă cĂÂŽtĂ© de lui. La voiture n'allait pas comme le char d'un petit-maĂtre le voyageur eut tout le temps de contempler le marquis immobile, abĂmĂ© dans sa douleur. "Eh! mon Dieu! s'Ă©cria-t-il, je crois que c'est lĂ Jeannot." A ce nom, le marquis lĂšve les yeux, la voiture s'arrĂÂȘte "C'est Jeannot lui-mĂÂȘme, c'est Jeannot." Le petit homme rebondi ne fait qu'un saut, et court embrasser son ancien camarade. Jeannot reconnut Colin; la honte et les pleurs couvrirent son visage. "Tu m'as abandonnĂ©, dit Colin; mais tu as beau ĂÂȘtre grand seigneur, je t'aimerai toujours." Jeannot, confus et attendri; lui conta en sanglotant une partie de son histoire. "Viens dans l'hĂÂŽtellerie oĂÂč je loge me conter le reste, lui dit Colin; embrasse ma petite femme, et allons dĂner ensemble." Ils vont tous trois Ă pied, suivis du bagage. "Qu'est-ce donc que tout cet attirail? vous appartient-il? - Oui, tout est Ă moi et Ă ma femme. Nous arrivons du pays; je suis Ă la tĂÂȘte d'une bonne manufacture de fer Ă©tamĂ© et de cuivre. J'ai Ă©pousĂ© la fille d'un riche nĂ©gociant en ustensiles nĂ©cessaires aux grands et aux petits; nous travaillons beaucoup; Dieu nous bĂ©nit; nous n'avons point changĂ© d'Ă©tat; nous sommes heureux, nous aiderons notre ami Jeannot. Ne sois plus marquis; toutes les grandeurs de ce monde ne valent pas un bon ami. Tu reviendras avec moi au pays, je t'apprendrai le mĂ©tier, il n'est pas bien difficile; je te mettrai de part, et nous vivrons gaiement dans le coin de terre oĂÂč nous sommes nĂ©s." Jeannot, Ă©perdu, se sentait partagĂ© entre la douleur et la joie, la tendresse et la honte; et il se disait tout bas "Tous mes amis du bel air m'ont trahi, et Colin, que j'ai mĂ©prisĂ©, vient seul Ă mon secours. Quelle instruction!" La bontĂ© d'ĂÂąme de Colin dĂ©veloppa dans le coeur de Jeannot le germe du bon naturel, que le monde n'avait pas encore Ă©touffĂ©. Il sentit qu'il ne pouvait abandonner son pĂšre et sa mĂšre. "Nous aurons soin de ta mĂšre, dit Colin; et quant Ă ton bonhomme de pĂšre, qui est en prison, j'entends un peu les affaires; ses crĂ©anciers, voyant qu'il n'a plus rien, s'accommoderont pour peu de chose; je me charge de tout." Colin fit tant qu'il tira le pĂšre de prison. Jeannot retourna dans sa patrie avec ses parents, qui reprirent leur premiĂšre profession. Il Ă©pousa une soeur de Colin, laquelle, Ă©tant de mĂÂȘme humeur que le frĂšre, le rendit trĂšs heureux. Et Jeannot le pĂšre, et Jeannotte la mĂšre, et Jeannot le fils, virent que le bonheur n'est pas dans la vanitĂ©. Pot-pourri I BriochĂ© fut le pĂšre de Polichinelle, non pas son propre pĂšre, mais pĂšre de gĂ©nie. Le pĂšre de BriochĂ© Ă©tait Guillot Gorju, qui fut fils de Gilles, qui fut fils de Gros-RenĂ©, qui tirait son origine du Prince des sots et de la MĂšre sotte c'est ainsi que l'Ă©crit l'auteur de l'Almanach de la Foire. Monsieur Parfaict, Ă©crivain non moins digne de foi, donne pour pĂšre Ă BriochĂ© Tabarin, Ă Tabarin Gros-Guillaume, Ă Gros-Guillaume Jean Boudin, mais en remontant toujours au Prince des sots. Si ces deux historiens se contredisent, c'est une preuve de la vĂ©ritĂ© du fait pour le pĂšre Daniel, qui les concilie avec une merveilleuse sagacitĂ©, et qui dĂ©truit par lĂ le pyrrhonisme de l'histoire. II Comme je finissais ce premier paragraphe des cahiers de Merri Hissing dans mon cabinet, dont la fenĂÂȘtre donne sur la rue St-Antoine, j'ai vu passer les syndics des apothicaires, qui allaient saisir des drogues et du vert-de-gris que les jĂ©suites de la rue St-Antoine vendaient en contrebande; mon voisin monsieur Husson, qui est une bonne tĂÂȘte, est venu chez moi, et m'a dit "Mon ami, vous riez de voir les jĂ©suites vilipendĂ©s; vous ĂÂȘtes bien aise de savoir qu'ils sont convaincus d'un parricide au Portugal, et d'une rĂ©bellion au Paraguay; le cri public qui s'Ă©lĂšve en France contre eux, la haine qu'on leur porte, les opprobres multipliĂ©s dont ils sont couverts, semblent ĂÂȘtre pour vous une consolation; mais sachez que, s'ils sont perdus comme tous les honnĂÂȘtes gens le dĂ©sirent, vous n'y gagnerez rien vous serez accablĂ© par la faction des jansĂ©nistes. Ce sont des enthousiastes fĂ©roces, des ĂÂąmes de bronze, pires que les presbytĂ©riens qui renversĂšrent le trĂÂŽne de Charles Ier. Songez que les fanatiques sont plus dangereux que les fripons. On ne peut jamais faire entendre raison Ă un Ă©nergumĂšne; les fripons l'entendent." Je disputai longtemps contre monsieur Husson; je lui dis enfin "Monsieur, consolez-vous; peut-ĂÂȘtre que les jansĂ©nistes seront un jour aussi adroits que les jĂ©suites." Je tĂÂąchai de l'adoucir; mais c'est une tĂÂȘte de fer qu'on ne fait jamais changer de sentiment. III BriochĂ©, voyant que Polichinelle Ă©tait bossu par-devant et par-derriĂšre, lui voulut apprendre Ă lire et Ă Ă©crire. Polichinelle, au bout de deux ans, Ă©pela assez passablement; mais il ne put jamais parvenir Ă se servir d'une plume. Un des Ă©crivains de sa vie remarque qu'il essaya un jour d'Ă©crire son nom, mais que personne ne put le lire. BriochĂ© Ă©tait fort pauvre; sa femme et lui n'avaient pas de quoi nourrir Polichinelle, encore moins de quoi lui faire apprendre un mĂ©tier. Polichinelle leur dit "Mon pĂšre et ma mĂšre, je suis bossu, et j'ai de la mĂ©moire; trois ou quatre de mes amis et moi, nous pouvons Ă©tablir de marionnettes je gagnerai quelque argent; les hommes ont toujours aimĂ© les marionnettes; il y a quelquefois de la perte Ă en vendre de nouvelles, mais aussi il y a de grands profits." Monsieur et madame BriochĂ© admirĂšrent le bon sens du jeune homme; la troupe se forma, et elle alla Ă©tablir ses petits trĂ©teaux dans une bourgade suisse, sur le chemin d'Appenzel Ă Milan. C'Ă©tait justement dans ce village que des charlatans d'OrviĂšte avaient Ă©tabli le magasin de leur orviĂ©tan. Ils s'aperçurent qu'insensiblement la canaille allait aux marionnettes, et qu'ils vendaient dans le pays la moitiĂ© moins de savonnettes et d'onguent pour la brĂ»lure. Ils accusĂšrent Polichinelle de plusieurs mauvais dĂ©portements, et portĂšrent leurs plaintes devant le magistrat. La requĂÂȘte disait que c'Ă©tait un ivrogne dangereux; qu'un jour il avait donnĂ© cent coups de pied dans le ventre, en plein marchĂ©, Ă des paysans qui vendaient des nĂšfles. On prĂ©tendit aussi qu'il avait molestĂ© un marchand de coqs d'Inde; enfin ils l'accusĂšrent d'ĂÂȘtre sorcier. Monsieur Parfaict, dans son Histoire du ThĂ©ĂÂątre, prĂ©tend qu'il fut avalĂ© par un crapaud; mais le pĂšre Daniel pense, ou du moins parle autrement. On ne sait pas ce que devint BriochĂ©. Comme il n'Ă©tait que le pĂšre putatif de Polichinelle, l'historien n'a pas jugĂ© Ă propos de nous dire de ses nouvelles. IV Feu monsieur Du Marsais assurait que le plus grand des abus Ă©tait la vĂ©nalitĂ© des charges. "C'est un grand malheur pour l'Etat, disait-il, qu'un homme de mĂ©rite, sans fortune, ne puisse parvenir Ă rien. Que de talents enterrĂ©s, et que de sots en place! Quelle dĂ©testable politique d'avoir Ă©teint l'Ă©mulation!" Monsieur Du Marsais, sans y penser, plaidait sa propre cause il a Ă©tĂ© rĂ©duit Ă enseigner le latin, et il aurait rendu de grands services Ă l'Etat s'il avait Ă©tĂ© employĂ©. Je connais des barbouilleurs de papier qui eussent enrichi une province, s'ils avaient Ă©tĂ© Ă la place de ceux qui l'ont volĂ©e. Mais, pour avoir cette place, il faut ĂÂȘtre fils d'un riche qui vous laisse de quoi acheter une charge, un office, et ce qu'on appelle une dignitĂ©. Du Marsais assurait qu'un Montaigne, un Charron, un Descartes, un Gassendi, un Bayle, n'eussent jamais condamnĂ© aux galĂšres des Ă©coliers soutenant thĂšse contre la philosophie d'Aristote, ni n'auraient fait brĂ»ler le curĂ© Urbain Grandier, le curĂ© GaufrĂ©di, et qu'ils n'eussent point, etc., etc. V Il n'y a pas longtemps que le chevalier Roginante, gentilhomme ferrarois, qui voulait faire une collection de tableaux de l'Ă©cole flamande, alla faire des emplettes dans Amsterdam. Il marchanda un assez beau Christ chez le sieur Vandergru. "Est-il possible, dit le Ferrarois au Batave, que vous qui n'ĂÂȘtes pas chrĂ©tien car vous ĂÂȘtes Hollandais vous ayez chez vous un JĂ©sus? - Je suis chrĂ©tien et catholique", rĂ©pondit monsieur Vandergru, sans se fĂÂącher; et il vendit son tableau assez cher. "Vous croyez donc JĂ©sus-Christ Dieu? lui dit Roginante. - AssurĂ©ment", dit Vandergru. Un autre curieux logeait Ă la porte attenant, c'Ă©tait un socinien; il lui vendit une Sainte Famille. "Que pensez-vous de l'enfant? dit le Ferrarois. - Je pense, rĂ©pondit l'autre, que ce fut la crĂ©ature la plus parfaite que Dieu ait mise sur la terre." De lĂ le Ferrarois alla chez MoĂÂŻse Mansebo, qui n'avait que de beaux paysages; et point de Sainte Famille. Roginante lui demanda pourquoi on ne trouvait pas chez lui de pareils sujets. "C'est, dit-il, que nous avons cette famille en exĂ©cration." Roginante passa chez un fameux anabaptiste, qui avait les plus jolis enfants du monde; il leur demanda dans quelle Ă©glise ils avaient Ă©tĂ© baptisĂ©s. "Fi donc! monsieur, lui dirent les enfants; grĂÂąces Ă Dieu, nous ne sommes point encore baptisĂ©s." Roginante n'Ă©tait pas au milieu de la rue qu'il avait dĂ©jĂ vu une douzaine de sectes entiĂšrement opposĂ©es les unes aux autres. Son compagnon de voyage, monsieur Sacrito, lui dit "Enfuyons-nous vite, voilĂ l'heure de la bourse; tous ces gens-ci vont s'Ă©gorger sans doute, selon l'antique usage, puisqu'ils pensent tous diversement; et la populace nous assommera, pour ĂÂȘtre sujets du pape." Ils furent bien Ă©tonnĂ©s quand ils virent toutes ces bonnes gens-lĂ sortir de leurs maisons avec leurs commis, se saluer civilement, et aller Ă la bourse de compagnie. Il y avait ce jour-lĂ , de compte fait, cinquante-trois religions sur la place, en comptant les ArmĂ©niens et les jansĂ©nistes. On fit pour cinquante-trois millions d'affaires le plus paisiblement du monde, et le Ferrarois retourna dans son pays, oĂÂč il trouva plus d'Agnus Dei que de lettres de change. On voit tous les jours la mĂÂȘme scĂšne Ă Londres, Ă Hambourg, Ă Dantzig, Ă Venise mĂÂȘme, etc. Mais ce que j'ai vu de plus Ă©difiant, c'est Ă Constantinople. J'eus l'honneur d'assister, il y a cinquante ans, Ă l'installation d'un patriarche grec par le sultan Achmet III, dont Dieu veuille avoir l'ĂÂąme. Il donna Ă ce prĂÂȘtre chrĂ©tien l'anneau, et le bĂÂąton fait en forme de bĂ©quille. Il y eut ensuite une procession de chrĂ©tiens dans la rue ClĂ©obule; deux janissaires marchĂšrent Ă la tĂÂȘte de la procession. J'eus le plaisir de communier publiquement dans l'Ă©glise patriarcale, et il ne tint qu'Ă moi d'obtenir un canonicat. J'avoue qu'Ă mon retour Ă Marseille je fus fort Ă©tonnĂ© de ne point y trouver de mosquĂ©e. J'en marquai ma surprise Ă monsieur l'intendant et Ă monsieur l'Ă©vĂÂȘque. Je leur dis que cela Ă©tait fort incivil, et que si les chrĂ©tiens avaient des Ă©glises chez les musulmans on pouvait au moins faire aux Turcs la galanterie de quelques chapelles. Ils me promirent tous deux qu'ils en Ă©criraient en cour; mais l'affaire en demeure lĂ , Ă cause de la constitution Unigenitus. O mes frĂšres les jĂ©suites! vous n'avez pas Ă©tĂ© tolĂ©rants, et on ne l'est pas pour vous. Consolez-vous; d'autres Ă leur tour deviendront persĂ©cuteurs, et Ă leur tour ils seront abhorrĂ©s. VI Je contais ces choses, il y a quelques jours Ă monsieur de Boucacous, Languedocien trĂšs chaud et huguenot trĂšs zĂ©lĂ©. "Cavalisque! me dit-il, on nous traite donc en France comme les Turcs; on leur refuse des mosquĂ©es, et on ne nous accorde point de temples! - Pour des mosquĂ©es, lui dis-je, les Turcs ne nous en ont encore point demandĂ©, et j'ose me flatter qu'ils en obtiendront quand ils voudront, parce qu'ils sont nos bons alliĂ©s; mais je doute fort qu'on rĂ©tablisse vos temples, malgrĂ© toute la politesse dont nous nous piquons la raison en est que vous ĂÂȘtes un peu nos ennemis. - Vos ennemis! s'Ă©cria monsieur de Boucacous, nous qui sommes les plus ardents serviteurs du roi! - Vous ĂÂȘtes fort ardents, lui rĂ©pliquai-je, et si ardents que vous avez fait neuf guerres civiles, sans compter les massacres des CĂ©vennes. - Mais, dit-il, si nous avons fait des guerres civiles, c'est que vous nous cuisiez en place publique; on se lasse Ă la longue d'ĂÂȘtre brĂ»lĂ©, il n'y a patience de saint qui puisse y tenir qu'on nous laisse en repos, et je vous jure que nous serons des sujets trĂšs fidĂšles. - C'est prĂ©cisĂ©ment ce qu'on fait, lui dis-je; on ferme les yeux sur vous, on vous laisse faire votre commerce, vous avez une libertĂ© assez honnĂÂȘte. - VoilĂ une plaisante libertĂ©! dit monsieur de Boucacous; nous ne pouvons nous assembler en pleine campagne quatre ou cinq mille seulement, avec des psaumes Ă quatre parties, que sur-le-champ il ne vienne un rĂ©giment de dragons qui nous fait rentrer chacun chez nous. Est-ce lĂ vivre? est-ce lĂ ĂÂȘtre libre?" Alors je lui parlai ainsi "Il n'y a aucun pays dans le monde oĂÂč l'on puisse s'attrouper sans l'ordre du souverain; tout attroupement est contre les lois. Servez Dieu Ă votre mode dans vos maisons; n'Ă©tourdissez personne par des hurlements que vous appelez musique. Pensez-vous que Dieu soit bien content de vous quand vous chantez ses commandements sur l'air de RĂ©veillez-vous, belle endormie et quand vous dites avec les Juifs, en parlant d'un peuple voisin Heureux qui doit te dĂ©truire Ă jamais! Qui, t'arrachant les enfants des mamelles, Ecrasera leurs tĂÂȘtes infidĂšles! Dieu veut-il absolument qu'on Ă©crase les cervelles des petits enfants? Cela est-il humain? De plus, Dieu aime-t-il tant les mauvais vers et la mauvaise musique?" Monsieur de Boucacous m'interrompit, et me demanda si le latin de cuisine de nos psaumes valait mieux. "Non, sans doute, lui dis-je; je conviens mĂÂȘme qu'il y a un peu de stĂ©rilitĂ© d'imagination Ă ne prier Dieu que dans une traduction trĂšs vicieuse de vieux cantiques d'un peuple que nous abhorrons; nous sommes tous juifs Ă vĂÂȘpres, comme nous sommes tous paĂÂŻens Ă l'OpĂ©ra. Ce qui me dĂ©plaĂt seulement, c'est que les MĂ©tamorphoses d'Ovide sont, par la malice du dĂ©mon, bien mieux Ă©crites, et plus agrĂ©ables que les cantiques juifs car il faut avouer que cette montagne de Sion, et ces gueules de basilic, et ces collines, qui sautent comme des bĂ©liers, et toutes ces rĂ©pĂ©titions fastidieuses, ne valent ni la poĂ©sie grecque, ni la latine, ni la française. Le froid petit Racine a beau faire, cet enfant dĂ©naturĂ© n'empĂÂȘchera pas profanement parlant que son pĂšre ne soit un meilleur poĂšte que David. Mais enfin, nous sommes la religion dominante chez nous; il ne vous est pas permis de vous attrouper en Angleterre pourquoi voudriez-vous avoir cette libertĂ© en France? Faites ce qu'il vous plaira dans vos maisons, et j'ai parole de monsieur le gouverneur et de monsieur l'intendant qu'en Ă©tant sages vous serez tranquilles l'imprudence seule fit et fera les persĂ©cutions. Je trouve trĂšs mauvais que vos mariages, l'Ă©tat de vos enfants, le droit d'hĂ©ritage, souffrent la moindre difficultĂ©. Il n'est pas juste de vous saigner et de vous purger parce que vos pĂšres ont Ă©tĂ© malades; mais que voulez-vous? ce monde est un grand Bedlam, oĂÂč des fous enchaĂnent d'autres fous." VII Les compagnons de Polichinelle rĂ©duits Ă la mendicitĂ©, qui Ă©tait leur Ă©tat naturel, s'associĂšrent avec quelques bohĂšmes, et coururent de village en village. Ils arrivĂšrent dans une petite ville, et logĂšrent dans un quatriĂšme Ă©tage, oĂÂč ils se mirent Ă composer des drogues dont la vente les aida quelque temps Ă subsister. Ils guĂ©rirent mĂÂȘme de la gale l'Ă©pagneul d'une dame de considĂ©ration; les voisins criĂšrent au prodige, mais malgrĂ© toute leur industrie la troupe ne fit pas fortune. Ils se lamentaient de leur obscuritĂ© et de leur misĂšre, lorsqu'un jour ils entendirent un bruit sur leur tĂÂȘte, comme celui d'une brouette qu'on roule sur le plancher. Ils montĂšrent au cinquiĂšme Ă©tage, et y trouvĂšrent un petit homme qui faisait des marionnettes pour son compte; il s'appelait le sieur Bienfait; il avait tout juste le gĂ©nie qu'il fallait pour son art. On n'entendait pas un mot de ce qu'il disait; mais il avait un galimatias fort convenable, et il ne faisait pas mal ses bamboches. Un compagnon, qui excellait aussi en galimatias, lui parla ainsi Nous croyons que vous ĂÂȘtes destinĂ© Ă relever nos marionnettes, car nous avons lu dans Nostradamus ces propres paroles Nelle chi li po rate icsus res fait en bi, lesquelles prises Ă rebours font Ă©videmment Bienfait ressuscitera Polichinelle. Le nĂÂŽtre a Ă©tĂ© avalĂ© par un crapaud; mais nous avons retrouvĂ© son chapeau, sa bosse, et sa pratique. Vous fournirez le fil d'archal. Je crois d'ailleurs qu'il vous sera aisĂ© de lui faire une moustache toute semblable Ă celle qu'il avait, et quand nous serons unis ensemble, il est Ă croire que nous aurons beaucoup de succĂšs. Nous ferons valoir Polichinelle par Nostradamus, et Nostradamus par Polichinelle. Le sieur Bienfait accepta la proposition. On lui demanda ce qu'il voulait pour sa peine. "Je veux, dit-il, beaucoup d'honneurs et beaucoup d'argent. - Nous n'avons rien de cela, dit l'orateur de la troupe; mais avec le temps on a de tout." Le sieur Bienfait se lia donc avec les bohĂšmes, et tous ensemble allĂšrent Ă Milan Ă©tablir leur thĂ©ĂÂątre, sous la protection de madame Carminetta. On afficha que le mĂÂȘme Polichinelle, qui avait Ă©tĂ© mangĂ© par un crapaud du village du canton d'Appenzel, reparaĂtrait sur le thĂ©ĂÂątre de Milan, et qu'il danserait avec madame Gigogne. Tous les vendeurs d'orviĂ©tan eurent beau s'y opposer, le sieur Bienfait, qui avait aussi le secret de l'orviĂ©tan, soutint que le sien Ă©tait le meilleur il en vendit beaucoup aux femmes, qui Ă©taient folles de Polichinelle, et il devint si riche qu'il se mit Ă la tĂÂȘte de la troupe. DĂšs qu'il eut ce qu'il voulait et que tout le monde veut, des honneurs et du bien, il fut trĂšs ingrat envers madame Carminetta. Il acheta une belle maison vis-Ă -vis de celle de sa bienfaitrice, et il trouva le secret de la faire payer par ses associĂ©s. On ne le vit plus faire sa cour Ă madame Carminetta; au contraire, il voulut qu'elle vĂnt dĂ©jeuner chez lui, et un jour qu'elle daigna y venir il lui fit fermer la porte au nez, etc. VIII N'ayant rien entendu au prĂ©cĂ©dent chapitre de Merri Hissing, je me transportai chez mon ami monsieur Husson, pour lui en demander l'explication. Il me dit que c'Ă©tait une profonde allĂ©gorie sur le pĂšre La Valette, marchand banqueroutier d'AmĂ©rique, mais que d'ailleurs il y avait longtemps qu'il ne s'embarrassait plus de ces sottises, qu'il n'allait jamais aux marionnettes; qu'on jouait ce jour-lĂ Polyeucte, et qu'il voulait l'entendre. Je l'accompagnai Ă la comĂ©die. Monsieur Husson, pendant le premier acte, branlait toujours la tĂÂȘte. Je lui demandai dans l'entr'acte pourquoi sa tĂÂȘte branlait tant. "J'avoue, dit-il, que je suis indignĂ© contre ce sot. Polyeucte et contre cet impudent NĂ©arque. Que diriez-vous d'un gendre de monsieur le gouverneur de Paris, qui serait huguenot et qui, accompagnant son beau-pĂšre le jour de PĂÂąques Ă Notre-Dame, irait mettre en piĂšces le ciboire et le calice, et donner des coups de pied dans le ventre Ă monsieur l'archevĂÂȘque et aux chanoines? Serait-il bien justifiĂ©, en nous disant que nous sommes des idolĂÂątres; qu'il l'a entendu dire au sieur Lubolier, prĂ©dicant d'Amsterdam, et au sieur MorfyĂ©, compilateur Ă Berlin, auteur de la BibliothĂšque germanique, qui le tenait du prĂ©dicant Urieju? C'est lĂ le fidĂšle portrait de la conduite de Polyeucte. Peut-on s'intĂ©resser Ă ce plat fanatique, sĂ©duit par le fanatique NĂ©arque?" Monsieur Husson me disait ainsi son avis amicalement dans les entr'actes. Il se mit Ă rire quand il vit Polyeucte rĂ©signer sa femme Ă son rival; et il la trouva un peu bourgeoise quand elle dit Ă son amant qu'elle va dans sa chambre, au lieu d'aller avec lui Ă l'Ă©glise Adieu, trop vertueux objet, et trop charmant; Adieu, trop gĂ©nĂ©reux et trop parfait amant; Je vais seule en ma chambre enfermer mes regrets. Mais il admira la scĂšne oĂÂč elle demande Ă son amant la grĂÂące de son mari. "Il y a lĂ , dit-il, un gouverneur d'ArmĂ©nie qui est bien le plus lĂÂąche, le plus bas des hommes; ce pĂšre de Pauline avoue mĂÂȘme qu'il a les sentiments d'un coquin Polyeucte est ici l'appui de ma famille; Mais si par son trĂ©pas l'autre Ă©pousait ma fille, J'acquerrais bien par lĂ de plus puissants appuis, Qui me mettraient plus haut cent fois que je ne suis. "Un procureur au ChĂÂątelet ne pourrait guĂšre ni penser ni s'exprimer autrement. Il y a de bonnes ĂÂąmes qui avalent tout cela; je ne suis pas du nombre. Si ces pauvretĂ©s peuvent entrer dans une tragĂ©die du pays des Gaules, il faut brĂ»ler l'Oedipe des Grecs." Monsieur Husson est un rude homme. J'ai fait ce que j'ai pu pour l'adoucir; mais je n'ai pu en venir Ă bout. Il a persistĂ© dans son avis, et moi dans le mien. IX Nous avons laissĂ© le sieur Bienfait fort riche et fort insolent. Il fit tant par ses menĂ©es qu'il fut reconnu pour entrepreneur d'un grand nombre de marionnettes. DĂšs qu'il fut revĂÂȘtu de cette dignitĂ©, il fit promener Polichinelle dans toutes les villes, et afficha que tout le monde serait tenu de l'appeler Monsieur, sans quoi il ne jouerait point. C'est de lĂ que, dans toutes les reprĂ©sentations des marionnettes, il ne rĂ©pond jamais Ă son compĂšre que quand le compĂšre l'appelle "M. Polichinelle". Peu Ă peu Polichinelle devint si important qu'on ne donna plus aucun spectacle sans lui payer une rĂ©tribution, comme les OpĂ©ras des provinces en payent une Ă l'OpĂ©ra de Paris. Un jour, un de ses domestiques, receveur des billets et ouvreur de loges, ayant Ă©tĂ© cassĂ© aux gages, se souleva contre Bienfait, et institua d'autres marionnettes qui dĂ©criĂšrent toutes les danses de madame Gigogne et tous les tours de passe-passe de Bienfait. Il retrancha plus de cinquante ingrĂ©dients qui entraient dans l'orviĂ©tan, composa le sien de cinq ou six drogues, et, le vendant beaucoup meilleur marchĂ©, il enleva une infinitĂ© de pratiques Ă Bienfait; ce qui excita un furieux procĂšs, et on se battit longtemps Ă la porte des marionnettes, dans le prĂ©au de la Foire. X Monsieur Husson me parlait hier de ses voyages en effet, il a passĂ© plusieurs annĂ©es dans les Echelles du Levant, il est allĂ© en Perse, il a demeurĂ© longtemps dans les Indes, et a vu toute l'Europe. "J'ai remarquĂ©, me disait-il, qu'il y a un nombre prodigieux de Juifs qui attendent le Messie, et qui se feraient empaler plutĂÂŽt que de convenir qu'il est venu. J'ai vu mille Turcs persuadĂ©s que Mahomet avait mis la moitiĂ© de la lune dans sa manche. Le petit peuple, d'un bout du monde Ă l'autre, croit fermement les choses les plus absurdes. Cependant, qu'un philosophe ait un Ă©cu Ă partager avec le plus imbĂ©cile de ces malheureux, en qui la raison humaine est si horriblement obscurcie, il est sĂ»r que s'il y a un sou Ă gagner l'imbĂ©cile l'emportera sur le philosophe. Comment des taupes, si aveugles sur le plus grand des intĂ©rĂÂȘts, sont-elles lynx sur les plus petits? Pourquoi le mĂÂȘme juif qui vous Ă©gorge le vendredi ne voudrait-il pas voler un liard le jour du sabbat? Cette contradiction de l'espĂšce humaine mĂ©rite qu'on l'examine. - N'est-ce pas, dis-je Ă monsieur Husson, que les hommes sont superstitieux par coutume, et coquins par instinct? - J'y rĂÂȘverai, me dit-il; cette idĂ©e me paraĂt assez bonne." XI Polichinelle, depuis l'aventure de l'ouvreur de loges, a essuyĂ© bien des disgrĂÂąces. Les Anglais, qui sont raisonneurs et sombres, lui ont prĂ©fĂ©rĂ© Shakespeare; mais ailleurs ses farces ont Ă©tĂ© fort en vogue, et, sans l'opĂ©ra-comique, son thĂ©ĂÂątre Ă©tait le premier des thĂ©ĂÂątres. Il a eu de grandes querelles avec Scaramouche et Arlequin, et on ne sait pas encore qui l'emportera. Mais... XII "Mais, mon cher monsieur, disais-je, comment peut-on ĂÂȘtre Ă la fois si barbare et si drĂÂŽle? Comment, dans l'histoire d'un peuple, trouve-t-on Ă la fois la Saint-BarthĂ©lemy et les Contes de La Fontaine, etc.? Est-ce l'effet du climat? Est-ce l'effet des lois? - Le genre humain, rĂ©pondit M. Husson, est capable de tout. NĂ©ron pleura quand il fallut signer l'arrĂÂȘt de mort d'un criminel, joua des farces, et assassina sa mĂšre. Les singes font des tours extrĂÂȘmement plaisants, et Ă©touffent leurs petits. Rien n'est plus doux, plus timide qu'une levrette; mais elle dĂ©chire un liĂšvre, et baigne son long museau dans son sang. - Vous devriez, lui dis-je, nous faire un beau livre qui dĂ©veloppĂÂąt toutes ces contradictions. - Ce livre est tout fait, dit-il; vous n'avez qu'Ă regarder une girouette; elle tourne tantĂÂŽt au doux souffle du zĂ©phyr, tantĂÂŽt au vent violent du nord; voilĂ l'homme." XIII Rien n'est souvent plus convenable que d'aimer sa cousine. On peut aussi aimer sa niĂšce; mais il en coĂ»te dix-huit mille livres, payables Ă Rome, pour Ă©pouser une cousine, et quatre-vingt mille francs pour coucher avec sa niĂšce en lĂ©gitime mariage. Je suppose quarante niĂšces par an, mariĂ©es avec leurs oncles, et deux cents cousins et cousines conjoints, cela fait en sacrements six millions huit cent mille livres par an, qui sortent du royaume. Ajoutez-y environ six cent mille francs pour ce qu'on appelle les annates des terres de France, que le roi de France donne Ă des Français en bĂ©nĂ©fices; joignez-y encore quelques menus frais c'est environ huit millions quatre cent mille livres que nous donnons libĂ©ralement au Saint PĂšre par an chacun. Nous exagĂ©rons peut-ĂÂȘtre un peu; mais on conviendra que si nous avons beaucoup de cousines et de niĂšces jolies, et si la mortalitĂ© se met parmi les bĂ©nĂ©ficiers, la somme peut aller au double. Le fardeau serait lourd, tandis que nous avons des vaisseaux Ă construire, des armĂ©es et des rentiers Ă payer. Je m'Ă©tonne que, dans l'Ă©norme quantitĂ© de livres dont les auteurs ont gouvernĂ© l'Etat depuis vingt ans, aucun n'ait pensĂ© Ă rĂ©former ces abus. J'ai priĂ© un docteur de Sorbonne de mes amis de me dire dans quel endroit de l'Ecriture on trouve que la France doive payer Ă Rome la somme susdite il n'a jamais pu le trouver. J'en ai parlĂ© Ă un jĂ©suite il m'a rĂ©pondu que cet impĂÂŽt fut mis par St Pierre sur les Gaules, dĂšs la premiĂšre annĂ©e qu'il vint Ă Rome; et comme je doutais que St Pierre eĂ»t fait ce voyage, il m'en a convaincu en me disant qu'on voit encore Ă Rome les clefs du paradis qu'il portait toujours Ă sa ceinture. "Il est vrai, m'a-t-il dit, que nul auteur canonique ne parle de ce voyage de Simon Barjone; mais nous avons une belle lettre de lui, datĂ©e de Babylone; or, certainement Babylone veut dire Rome; donc vous devez de l'argent au pape quand vous Ă©pousez vos cousines." J'avoue que j'ai Ă©tĂ© frappĂ© de la force de cet argument. XIV J'ai un vieux parent qui a servi le roi cinquante-deux ans. Il s'est retirĂ© dans la haute Alsace, oĂÂč il a une petite terre qu'il cultive, dans le diocĂšse de Porentru. Il voulut un jour faire donner le dernier labour Ă son champ; la saison avançait, l'ouvrage pressait. Ses valets refusĂšrent le service, et dirent pour raison que c'Ă©tait la fĂÂȘte de Ste Barbe, la sainte la plus fĂÂȘtĂ©e Ă Porentru. "Eh! mes amis, leur dit mon parent, vous avez Ă©tĂ© Ă la messe en l'honneur de Barbe, vous avez rendu Ă Barbe ce qui lui appartient; rendez-moi ce que vous me devez cultivez mon champ, au lieu d'aller au cabaret. Ste Barbe ordonne-t-elle qu'on s'enivre pour lui faire honneur, et que je manque de blĂ© cette annĂ©e?" Le maĂtre-valet lui dit "Monsieur, vous voyez bien que je serais damnĂ© si je travaillais dans un si saint jour. Ste Barbe est la plus grande sainte du paradis; elle grava le signe de la croix sur une colonne de marbre avec le bout du doigt; et du mĂÂȘme doigt, et du mĂÂȘme signe, elle fit tomber toutes les dents d'un chien qui lui avait mordu les fesses je ne travaillerai point le jour de Ste Barbe." Mon parent envoya chercher des laboureurs luthĂ©riens, et son champ fut cultivĂ©. L'Ă©vĂÂȘque de Porentru l'excommunia. Mon parent en appela comme d'abus; le procĂšs n'est pas encore jugĂ©. Personne assurĂ©ment n'est plus persuadĂ© que mon parent qu'il faut honorer les saints; mais il prĂ©tend aussi qu'il faut cultiver la terre. Je suppose en France environ cinq millions d'ouvriers, soit manoeuvres, soit artisans, qui gagnent chacun, l'un portant l'autre, vingt sous par jour, et qu'on force saintement de ne rien gagner pendant trente jours de l'annĂ©e, indĂ©pendamment des dimanches cela fait cent cinquante millions de moins dans la circulation, et cent cinquante millions de moins en main-d'oeuvre. Quelle prodigieuse supĂ©rioritĂ© ne doivent point avoir sur nous les royaumes voisins qui n'ont ni Ste Barbe, ni d'Ă©vĂÂȘque de Porentru! On rĂ©pondait Ă cette objection que les cabarets, ouverts les saints jours de fĂÂȘte, produisent beaucoup aux fermes gĂ©nĂ©rales. Mon parent en convenait; mais il prĂ©tendait que c'est un lĂ©ger dĂ©dommagement; et que d'ailleurs, si on peut travailler aprĂšs la messe, on peut aller au cabaret aprĂšs le travail. Il soutient que cette affaire est purement de police, et point du tout Ă©piscopale; il soutient qu'il vaut encore mieux labourer que de s'enivrer. J'ai bien peur qu'il ne perde son procĂšs. XV Il y a quelques annĂ©es qu'en passant par la Bourgogne avec monsieur Evrard, que vous connaissez tous, nous vĂmes un vaste palais, dont une partie commençait Ă s'Ă©lever. Je demandai Ă quel prince il appartenait. Un maçon me rĂ©pondit que c'Ă©tait Ă monseigneur l'abbĂ© de CĂteaux; que le marchĂ© avait Ă©tĂ© fait Ă dix-sept cent mille livres, mais que probablement il en coĂ»terait bien davantage. Je bĂ©nis Dieu qui avais mis son serviteur en Ă©tat d'Ă©lever un si beau monument, et de rĂ©pandre tant d'argent dans le pays. "Vous moquez-vous? dit monsieur Evrard; n'est-il pas abominable que l'oisivetĂ© soit rĂ©compensĂ©e par deux cent cinquante mille livres de rente, et que la vigilance d'un pauvre curĂ© de campagne soit punie par une portion congrue de cent Ă©cu? Cette inĂ©galitĂ© n'est-elle pas la chose du monde la plus injuste et la plus odieuse? Qu'en reviendra-t-il Ă l'Etat quand un moine sera logĂ© dans un palais de deux millions? Vingt familles de pauvres officiers, qui partageraient ces deux millions, auraient chacune un bien honnĂÂȘte, et donneraient au roi de nouveaux officiers. Les petits moines, qui sont aujourd'hui les sujets inutiles d'un de leurs moines Ă©lu par eux, deviendraient des membres de l'Etat au lieu qu'ils ne sont que des chancres qui le rongent." Je rĂ©pondis Ă monsieur Evrard "Vous allez trop loin, et trop vite; ce que vous dites arrivera certainement dans deux ou trois cents ans; ayez patience. - Et c'est prĂ©cisĂ©ment, rĂ©pondit-il, parce que la chose n'arrivera que dans deux ou trois siĂšcles que je perds toute patience; je suis las de tous les abus que je vois il me semble que je marche dans les dĂ©serts de la Lybie, oĂÂč notre sang est sucĂ© par des insectes quand les lions ne nous dĂ©vorent pas. "J'avais, continua-t-il, une soeur assez imbĂ©cile pour ĂÂȘtre jansĂ©niste de bonne foi, et non par esprit de parti. La belle aventure des billets de confession, la fit mourir de dĂ©sespoir. Mon frĂšre avait un procĂšs qu'il avait gagnĂ© en premiĂšre instance; sa fortune en dĂ©pendait. Je ne sais comment il est arrivĂ© que les juges ont cessĂ© de rendre la justice, et mon frĂšre a Ă©tĂ© ruinĂ©. J'ai un vieil oncle criblĂ© de blessures, qui faisait passer ses meubles et sa vaisselle d'une province Ă une autre; des commis alertes ont saisi le tout sur un petit manque de formalitĂ©; mon oncle n'a pu payer les trois vingtiĂšmes, et il est mort en prison." Monsieur Evrard me conta des aventures de cette espĂšce pendant deux heures entiĂšres. Je lui dis "Mon cher monsieur Evrard, j'en ai essuyĂ© plus que vous; les hommes sont ainsi faits d'un bout du monde Ă l'autre nous nous imaginons que les abus ne rĂšgnent que chez nous; nous sommes tous deux comme Astolphe et Joconde, qui pensaient d'abord qu'il n'y avait que leurs femmes d'infidĂšles; ils se mirent Ă voyager, et ils trouvĂšrent partout des gens de leur confrĂ©rie. - Oui, dit monsieur Evrard, mais ils eurent le plaisir de rendre partout ce qu'on avait eu la bontĂ© de leur prĂÂȘter chez eux. - TĂÂąchez, lui dis-je, d'ĂÂȘtre seulement pendant trois ans directeur de..., ou de..., ou de..., ou de..., et vous vous vengerez avec usure." Monsieur Evrard me crut c'est Ă prĂ©sent l'homme de France qui vole le roi, l'Etat et les particuliers, de la maniĂšre la plus dĂ©gagĂ©e et la plus noble qui fait la meilleure chĂšre, et qui juge le plus fiĂšrement d'une piĂšce nouvelle. Annexe Nous raisonnions ainsi, monsieur de Boucacous et moi, quand nous vĂmes passer Jean-Jacques Rousseau avec grande prĂ©cipitation. "Eh! oĂÂč allez-vous donc si vite, monsieur Jean-Jacques? - Je m'enfuis, parce que maĂtre Joly de Fleury a dit, dans un rĂ©quisitoire, que je prĂÂȘchais contre l'intolĂ©rance et contre l'existence de la religion chrĂ©tienne. - Il a voulu dire Ă©vidence, lui rĂ©pondis-je; il ne faut pas prendre feu pour un mot. - Eh! mon Dieu, je n'ai que trop pris feu, dit Jean-Jacques; on brĂ»le partout mon livre. Je sors de Paris comme monsieur d'Assouci de Montpellier, de peur qu'on ne brĂ»le ma personne. - Cela Ă©tait bon, lui dis-je, du temps d'Anne Dubourg et de Michel Servet, mais Ă prĂ©sent on est plus humain. Qu'est-ce donc que ce livre qu'on a brĂ»lĂ©? - J'Ă©levais, dit-il, Ă ma maniĂšre un petit garçon en quatre tomes. Je sentais bien que j'ennuierais peut-ĂÂȘtre, et j'ai voulu, pour Ă©gayer la matiĂšre, glisser adroitement une cinquantaine de pages en faveur du thĂ©isme. J'ai cru qu'en disant des injures aux philosophes, mon thĂ©isme serait bien reçu, et je me suis trompĂ©. - Qu'est-ce que thĂ©isme? fis-je. - C'est, me dit-il, l'adoration d'un Dieu, en attendant que je sois mieux instruit. - Ah! dis-je, si c'est lĂ tout votre crime, consolez-vous. Mais pourquoi injurier les philosophes? - J'ai tort, fit-il. - Mais, monsieur Jean-Jacques, comment vous ĂÂȘtes-vous fait thĂ©iste? quelle cĂ©rĂ©monie faut-il pour cela? - Aucune, nous dit Jean-Jacques. Je suis nĂ© protestant, j'ai retranchĂ© tout ce que les protestants condamnent dans la religion romaine. Ensuite, j'ai retranchĂ© tout ce que les autres religions condamnent dans le protestantisme il ne m'est restĂ© que Dieu; je l'ai adorĂ©, et maĂtre Joly de Fleury a prĂ©sentĂ© contre moi un rĂ©quisitoire." Nous parlĂÂąmes Ă fond du thĂ©isme avec Jean-Jacques, il m'apprit qu'il y avait trois cent mille thĂ©istes Ă Londres, et environ cinquante mille seulement Ă Paris, parce que les Parisiens n'arrivent jamais Ă rien que longtemps aprĂšs les Anglais, tĂ©moin l'inoculation, la gravitation, le semoir, etc., etc. Il ajouta que le nord de l'Allemagne fourmillait de thĂ©istes et de gens qui se battent bien. Monsieur de Boucacous l'Ă©couta attentivement, et promit de se faire thĂ©iste. Pour moi, je restai ferme. Je ne sais cependant si on ne brĂ»lera pas ce petit Ă©crit, comme une oeuvre de Jean-Jacques, ou comme un mandement d'Ă©vĂÂȘque; mais un mal qui nous menace n'empĂÂȘche pas toujours d'ĂÂȘtre sensible au mal d'autrui, et comme j'ai le coeur bon, je plaignis les tribulations de Jean-Jacques. L'IngĂ©nu Chapitre premier. Comment le prieur de Notre-Dame de la Montagne et mademoiselle sa soeur rencontrĂšrent un huron Histoire vĂ©ritable TirĂ©e des manuscrits du pĂšre Quesnel Chapitre premier Comment le prieur de Notre-Dame de la Montagne et mademoiselle sa soeur rencontrĂšrent un huron Un jour saint Dunstan, Irlandais de nation et saint de profession, partit d'Irlande sur une petite montagne qui vogua vers les cĂÂŽtes de France, et arriva par cette voiture Ă la baie de Saint-Malo. Quand il fut Ă bord, il donna la bĂ©nĂ©diction Ă sa montagne, qui lui fit de profondes rĂ©vĂ©rences et s'en retourna en Irlande par le mĂÂȘme chemin qu'elle Ă©tait venue. Dunstan fonda un petit prieurĂ© dans ces quartiers-lĂ , et lui donna le nom de prieurĂ© de la Montagne, qu'il porte encore, comme un chacun sait. En l'annĂ©e 1689, le 15 juillet au soir, l'abbĂ© de Kerkabon, prieur de Notre-Dame de la Montagne, se promenait sur le bord de la mer avec mademoiselle de Kerkabon, sa soeur, pour prendre le frais. Le prieur, dĂ©jĂ un peu sur l'ĂÂąge, Ă©tait un trĂšs bon ecclĂ©siastique, aimĂ© de ses voisins, aprĂšs l'avoir Ă©tĂ© autrefois de ses voisines. Ce qui lui avait donnĂ© surtout une grande considĂ©ration, c'est qu'il Ă©tait le seul bĂ©nĂ©ficier du pays qu'on ne fĂ»t pas obligĂ© de porter dans son lit quand il avait soupĂ© avec ses confrĂšres. Il savait assez honnĂÂȘtement de thĂ©ologie; et quand il Ă©tait las de lire saint Augustin, il s'amusait avec Rabelais; aussi tout le monde disait du bien de lui. Mademoiselle de Kerkabon, qui n'avait jamais Ă©tĂ© mariĂ©e, quoiqu'elle eĂ»t grande envie de l'ĂÂȘtre, conservait de la fraĂcheur Ă l'ĂÂąge de quarante-cinq ans; son caractĂšre Ă©tait bon et sensible; elle aimait le plaisir et Ă©tait dĂ©vote. Le prieur disait Ă sa soeur, en regardant la mer "HĂ©las! c'est ici que s'embarqua notre pauvre frĂšre avec notre chĂšre belle-soeur madame de Kerkabon, sa femme, sur la frĂ©gate l'Hirondelle, en 1669, pour aller servir en Canada. S'il n'avait pas Ă©tĂ© tuĂ©, nous pourrions espĂ©rer de le revoir encore. - Croyez-vous, disait mademoiselle de Kerkabon, que notre belle-soeur ait Ă©tĂ© mangĂ©e par les Iroquois, comme on nous l'a dit? Il est certain que si elle n'avait pas Ă©tĂ© mangĂ©e, elle serait revenue au pays. Je la pleurerai toute ma vie c'Ă©tait une femme charmante; et notre frĂšre, qui avait beaucoup d'esprit, aurait fait assurĂ©ment un grande fortune." Comme ils s'attendrissaient l'un et l'autre Ă ce souvenir, ils virent entrer dans la baie de Rance un petit bĂÂątiment qui arrivait avec la marĂ©e c'Ă©taient des Anglais qui venaient vendre quelques denrĂ©es de leur pays. Ils sautĂšrent Ă terre, sans regarder monsieur le prieur ni mademoiselle sa soeur, qui fut trĂšs choquĂ©e du peu d'attention qu'on avait pour elle. Il n'en fut pas de mĂÂȘme d'un jeune homme trĂšs bien fait qui s'Ă©lança d'un saut par-dessus la tĂÂȘte de ses compagnons, et se trouva vis-Ă -vis mademoiselle. Il lui fit un signe de tĂÂȘte, n'Ă©tant pas dans l'usage de faire la rĂ©vĂ©rence. Sa figure et son ajustement attirĂšrent les regards du frĂšre et de la soeur. Il Ă©tait nu-tĂÂȘte et nu-jambes, les pieds chaussĂ©s de petites sandales, le chef ornĂ© de longs cheveux en tresses, un petit pourpoint qui serrait une taille fine et dĂ©gagĂ©e; l'air martial et doux. Il tenait dans sa main une petite bouteille d'eau des Barbades, et dans l'autre une espĂšce de bourse dans laquelle Ă©tait un gobelet et de trĂšs bon biscuit de mer. Il parlait français fort intelligiblement. Il prĂ©senta de son eau des Barbades Ă mademoiselle de Kerkabon et Ă monsieur son frĂšre; il en but avec eux; il leur en fit reboire encore, et tout cela d'un air si simple et si naturel que le frĂšre et la soeur en furent charmĂ©s. Ils lui offrirent leurs services, en lui demandant qui il Ă©tait et oĂÂč il allait. Le jeune homme leur rĂ©pondit qu'il n'en savait rien, qu'il Ă©tait curieux, qu'il avait voulu voir comment les cĂÂŽtes de France Ă©taient faites, qu'il Ă©tait venu, et allait s'en retourner. Monsieur le prieur, jugeant Ă son accent qu'il n'Ă©tait pas anglais, prit la libertĂ© de lui demander de quel pays il Ă©tait. "Je suis Huron", lui rĂ©pondit le jeune homme. Mademoiselle de Kerkabon, Ă©tonnĂ©e et enchantĂ©e de voir un Huron qui lui avait fait des politesses, pria le jeune homme Ă souper; il ne se fit pas prier deux fois, et tous trois allĂšrent de compagnie au prieurĂ© de Notre-Dame de la Montagne. La courte et ronde demoiselle le regardait de tous ses petits yeux, et disait de temps en temps au prieur "Ce grand garçon-lĂ a un teint de lis et de rose! qu'il a une belle peau pour un Huron! - Vous avez raison, ma soeur, disait le prieur." Elle faisait cent questions coup sur coup, et le voyageur rĂ©pondait toujours fort juste. Le bruit se rĂ©pandit bientĂÂŽt qu'il y avait un Huron au prieurĂ©. La bonne compagnie du canton s'empressa d'y venir souper. L'abbĂ© de Saint-Yves y vint avec mademoiselle sa soeur, jeune basse-brette, fort jolie et trĂšs bien Ă©levĂ©e. Le bailli, le receveur des tailles, et leurs femmes, furent du souper. On plaça l'Ă©tranger entre mademoiselle de Kerkabon et mademoiselle de Saint-Yves. Tout le monde le regardait avec admiration; tout le monde lui parlait et l'interrogeait Ă la fois; le Huron ne s'en Ă©mouvait pas. Il semblait qu'il eĂ»t pris pour sa devise celle de milord Bolingbroke nihil admirari. Mais Ă la fin, excĂ©dĂ© de tant de bruit, il leur dit avec un peu de douceur, mais avec un peu de fermetĂ© "Messieurs, dans mon pays on parle l'un aprĂšs l'autre; comment voulez-vous que je vous rĂ©ponde quand vous m'empĂÂȘchez de vous entendre?" La raison fait toujours rentrer les hommes en eux-mĂÂȘmes pour quelques moments il se fit un grand silence. Monsieur le bailli, qui s'emparait toujours des Ă©trangers dans quelque maison qu'il se trouvĂÂąt et qui Ă©tait le plus grand questionneur de la province, lui dit en ouvrant la bouche d'un demi-pied "Monsieur, comment vous nommez-vous? - On m'a toujours appelĂ© l'IngĂ©nu, reprit le Huron, et on m'a confirmĂ© ce nom en Angleterre, parce que je dis toujours naĂÂŻvement ce que je pense, comme je fais tout ce que je veux. - Comment, Ă©tant nĂ© Huron, avez-vous pu, monsieur, venir en Angleterre? - C'est qu'on m'y a menĂ©; j'ai Ă©tĂ© fait, dans un combat, prisonnier par les Anglais, aprĂšs m'ĂÂȘtre assez bien dĂ©fendu; et les Anglais, qui aiment la bravoure, parce qu'ils sont braves et qu'ils sont aussi honnĂÂȘtes que nous, m'ayant proposĂ© de me rendre Ă mes parents ou de venir en Angleterre, j'acceptai le dernier parti, parce que de mon naturel j'aime passionnĂ©ment Ă voir du pays. - Mais, monsieur, dit le bailli avec son ton imposant, comment avez-vous pu abandonner ainsi pĂšre et mĂšre? - C'est que je n'ai jamais connu ni pĂšre ni mĂšre", dit l'Ă©tranger. La compagnie s'attendrit, et tout le monde rĂ©pĂ©tait Ni pĂšre, ni mĂšre! "Nous lui en servirons, dit la maĂtresse de la maison Ă son frĂšre le prieur; que ce monsieur le Huron est intĂ©ressant!" L'IngĂ©nu la remercia avec une cordialitĂ© noble et fiĂšre, et lui fit comprendre qu'il n'avait besoin de rien. "Je m'aperçois, monsieur l'IngĂ©nu, dit le grave bailli, que vous parlez mieux français qu'il n'appartient Ă un Huron. - Un Français, dit-il, que nous avions pris dans ma grande jeunesse en Huronie, et pour qui je conçus beaucoup d'amitiĂ©, m'enseigna sa langue; j'apprends trĂšs vite ce que je veux apprendre. J'ai trouvĂ© en arrivant Ă Plymouth un de vos Français rĂ©fugiĂ©s que vous appelez huguenots, je ne sais pourquoi; il m'a fait faire quelques progrĂšs dans la connaissance de votre langue; et dĂšs que j'ai pu m'exprimer intelligiblement, je suis venu voir votre pays, parce que j'aime assez les Français quand ils ne font pas trop de questions." L'abbĂ© de Saint-Yves, malgrĂ© ce petit avertissement, lui demanda laquelle des trois langues lui plaisait davantage, la huronne, l'anglaise, ou la française. - La huronne, sans contredit, rĂ©pondit l'IngĂ©nu. - Est-il possible? s'Ă©cria mademoiselle de Kerkabon; j'avais toujours cru que le français Ă©tait la plus belle de toutes les langues aprĂšs le bas-breton." Alors ce fut Ă qui demanderait Ă l'IngĂ©nu comment on disait en huron du tabac, et il rĂ©pondait taya; comment on disait manger, et il rĂ©pondait essenten. Mademoiselle de Kerkabon voulut absolument savoir comment on disait faire l'amour; il lui rĂ©pondit trovander, et soutint, non sans apparence de raison, que ces mots-lĂ valaient bien les mots français et anglais qui leur correspondaient. Trovander parut trĂšs joli Ă tous les convives. Monsieur le prieur, qui avait dans sa bibliothĂšque la grammaire huronne dont le rĂ©vĂ©rend PĂšre Sagar ThĂ©odat, rĂ©collet, fameux missionnaire, lui avait fait prĂ©sent, sortit de table un moment pour l'aller consulter. Il revint tout haletant de tendresse et de joie; il reconnut l'IngĂ©nu pour un vrai Huron. On disputa un peu sur la multiplicitĂ© des langues, et on convint que, sans l'aventure de la tour de Babel, toute la terre aurait parlĂ© français. L'interrogant bailli, qui jusque-lĂ s'Ă©tait dĂ©fiĂ© un peu du personnage, conçut pour lui un profond respect; il lui parla avec plus de civilitĂ© qu'auparavant, de quoi l'IngĂ©nu ne s'aperçut pas. Mademoiselle de Saint-Yves Ă©tait fort curieuse de savoir comment on faisait l'amour au pays des Hurons. "En faisant de belles actions, rĂ©pondit-il, pour plaire aux personnes qui vous ressemblent." Tous les convives applaudirent avec Ă©tonnement. Mademoiselle de Saint-Yves rougit et fut fort aise. Mademoiselle de Kerkabon rougit aussi, mais elle n'Ă©tait pas si aise elle fut un peu piquĂ©e que la galanterie ne s'adressĂÂąt pas Ă elle; mais elle Ă©tait si bonne personne que son affection pour le Huron n'en fut point du tout altĂ©rĂ©e. Elle lui demanda, avec beaucoup de bontĂ©, combien il avait eu de maĂtresses en Huronie. "Je n'en ai jamais eu qu'une, dit l'IngĂ©nu; c'Ă©tait mademoiselle Abacaba, la bonne amie de ma chĂšre nourrice; les joncs ne sont pas plus droits, l'hermine n'est pas plus blanche, les moutons sont moins doux, les aigles moins fiers, et les cerfs ne sont pas si lĂ©gers que l'Ă©tait Abacaba. Elle poursuivait un jour un liĂšvre dans notre voisinage, environ Ă cinquante lieues de notre habitation; un Algonquin mal Ă©levĂ©, qui habitait cent lieues plus loin, vint lui prendre son liĂšvre; je le sus, j'y courus, je terrassai l'Algonquin d'un coup de massue, je l'amenai aux pieds de ma maĂtresse, pieds et poings liĂ©s. Les parents d'Abacaba voulurent le manger; mais je n'eus jamais de goĂ»t pour ces sortes de festins; je lui rendis sa libertĂ©, j'en fis un ami. Abacaba fut si touchĂ©e de mon procĂ©dĂ© qu'elle me prĂ©fĂ©ra Ă tous ses amants. Elle m'aimerait encore si elle n'avait pas Ă©tĂ© mangĂ©e par un ours j'ai puni l'ours, j'ai portĂ© longtemps sa peau; mais cela ne m'a pas consolĂ©." Mademoiselle de Saint-Yves, Ă ce rĂ©cit, sentait un plaisir secret d'apprendre que l'IngĂ©nu n'avait eu qu'une maĂtresse, et qu'Abacaba n'Ă©tait plus; mais elle ne dĂ©mĂÂȘlait pas la cause de son plaisir. Tout le monde fixait les yeux sur l'IngĂ©nu; on le louait beaucoup d'avoir empĂÂȘchĂ© ses camarades de manger un Algonquin. L'impitoyable bailli, qui ne pouvait rĂ©primer sa fureur de questionner, poussa enfin la curiositĂ© jusqu'Ă s'informer de quelle religion Ă©tait monsieur le Huron; s'il avait choisi la religion anglicane, ou la gallicane, ou la huguenote. "Je suis de ma religion, dit-il, comme vous de la vĂÂŽtre. - HĂ©las! s'Ă©cria la Kerkabon, je vois bien que ces malheureux Anglais n'ont pas seulement songĂ© Ă le baptiser. - Eh! mon Dieu, disait mademoiselle de Saint-Yves, comment se peut-il que les Hurons ne soient pas catholiques? Est-ce que les RĂ©vĂ©rends PĂšres jĂ©suites ne les ont pas tous convertis?" L'IngĂ©nu l'assura que dans son pays on ne convertissait personne; que jamais un vrai Huron n'avait changĂ© d'opinion, et que mĂÂȘme il n'y avait point dans sa langue de terme qui signifiĂÂąt inconstance. Ces derniers mots plurent extrĂÂȘmement Ă mademoiselle de Saint-Yves. "Nous le baptiserons, nous le baptiserons, disait la Kerkabon Ă monsieur le prieur; vous en aurez l'honneur, mon cher frĂšre; je veux absolument ĂÂȘtre sa marraine monsieur l'abbĂ© de Saint-Yves le prĂ©sentera sur les fonts, ce sera une cĂ©rĂ©monie bien brillante; il en sera parlĂ© dans toute la Basse-Bretagne, et cela nous fera un honneur infini." Toute la compagnie seconda la maĂtresse de la maison; tous les convives criaient "Nous le baptiserons!" L'IngĂ©nu rĂ©pondit qu'en Angleterre on laissait vivre les gens Ă leur fantaisie. Il tĂ©moigna que la proposition ne lui plaisait point du tout, et que la loi des Hurons valait pour le moins la loi des Bas-Bretons; enfin il dit qu'il repartait le lendemain. On acheva de vider sa bouteille d'eau des Barbades, et chacun s'alla coucher. Quand on eut reconduit l'IngĂ©nu dans sa chambre, mademoiselle de Kerkabon et son amie mademoiselle de Saint-Yves ne purent se tenir de regarder par le trou d'une large serrure pour voir comment dormait un Huron. Elles virent qu'il avait Ă©tendu la couverture du lit sur le plancher, et qu'il reposait dans la plus belle attitude du monde. Chapitre second. Le Huron, nommĂ© l'IngĂ©nu, reconnu de ses parents Le Huron, nommĂ© l'IngĂ©nu, reconnu de ses parents L'IngĂ©nu, selon sa coutume, s'Ă©veilla avec le soleil, au chant du coq, qu'on appelle en Angleterre et en Huronie la trompette du jour. Il n'Ă©tait pas comme la bonne compagnie, qui languit dans son lit oiseux jusqu'Ă ce que le soleil ait fait la moitiĂ© de son tour, qui ne peut ni dormir ni se lever, qui perd tant d'heures prĂ©cieuses dans cet Ă©tat mitoyen entre la vie et la mort, et qui se plaint encore que la vie est trop courte. Il avait dĂ©jĂ fait deux ou trois lieues, il avait tuĂ© trente piĂšces de gibier Ă balle seule, lorsqu'en rentrant il trouva monsieur le prieur de Notre-Dame de la Montagne et sa discrĂšte soeur, se promenant en bonnet de nuit dans leur petit jardin. Il leur prĂ©senta toute sa chasse, et en tirant de sa chemise une espĂšce de petit talisman qu'il portait toujours Ă son cou, il les pria de l'accepter en reconnaissance de leur bonne rĂ©ception. "C'est ce que j'ai de plus prĂ©cieux, leur dit-il; on m'a assurĂ© que je serais toujours heureux tant que je porterais ce petit brimborion sur moi, et je vous le donne afin que vous soyez toujours heureux." Le prieur et mademoiselle sourirent avec attendrissement de la naĂÂŻvetĂ© de l'IngĂ©nu. Ce prĂ©sent consistait en deux petits portraits assez mal faits, attachĂ©s ensemble avec une courroie fort grasse. Mademoiselle de Kerkabon lui demanda s'il y avait des peintres en Huronie. "Non, dit l'IngĂ©nu; cette raretĂ© me vient de ma nourrice; son mari l'avait eue par conquĂÂȘte, en dĂ©pouillant quelques Français du Canada qui nous avaient fait la guerre; c'est tout ce que j'en ai su." Le prieur regardait attentivement ces portraits; il changea de couleur, il s'Ă©mut, ses mains tremblĂšrent. "Par Notre-Dame de la Montagne, s'Ă©cria-t-il, je crois que voilĂ le visage de mon frĂšre le capitaine et de sa femme!" Mademoiselle, aprĂšs les avoir considĂ©rĂ©s avec la mĂÂȘme Ă©motion, en jugea de mĂÂȘme. Tous deux Ă©taient saisis d'Ă©tonnement et d'une joie mĂÂȘlĂ©e de douleur; tous deux s'attendrissaient; tous deux pleuraient; leur coeur palpitait; ils poussaient des cris; ils s'arrachaient les portraits; chacun d'eux les prenait et les rendait vingt fois en une seconde; ils dĂ©voraient des yeux les portraits et le Huron; ils lui demandaient l'un aprĂšs l'autre, et tous deux Ă la fois, en quel lieu, en quel temps, comment ces miniatures Ă©taient tombĂ©es entre les mains de sa nourrice; ils rapprochaient, ils comptaient les temps depuis le dĂ©part du capitaine; il se souvenaient d'avoir eu nouvelle qu'il avait Ă©tĂ© jusqu'au pays des Hurons, et que depuis ce temps ils n'en avaient jamais entendu parler. L'IngĂ©nu leur avait dit qu'il n'avait connu ni pĂšre ni mĂšre. Le prieur, qui Ă©tait homme de sens, remarqua que l'IngĂ©nu avait un peu de barbe; il savait trĂšs bien que les Hurons n'en ont point. "Son menton est cotonnĂ©, il est donc fils d'un homme d'Europe; mon frĂšre et ma belle-soeur ne parurent plus aprĂšs l'expĂ©dition contre les Hurons, en 1669; mon neveu devait alors ĂÂȘtre Ă la mamelle; la nourrice huronne lui a sauvĂ© la vie et lui a servi de mĂšre." Enfin, aprĂšs cent questions et cent rĂ©ponses, le prieur et sa soeur conclurent que le Huron Ă©tait leur propre neveu. Ils l'embrassaient en versant des larmes; et l'IngĂ©nu riait, ne pouvant s'imaginer qu'un Huron fĂ»t neveu d'un prieur bas-breton. Toute la compagnie descendit; monsieur de Saint-Yves, qui Ă©tait grand physionomiste, compara les deux portraits avec le visage de l'IngĂ©nu; il fit trĂšs habilement remarquer qu'il avait les yeux de sa mĂšre, le front et le nez de feu monsieur le capitaine de Kerkabon, et des joues qui tenaient de l'un et de l'autre. Mademoiselle de Saint-Yves, qui n'avait jamais vu le pĂšre ni la mĂšre, assura que l'IngĂ©nu leur ressemblait parfaitement. Ils admiraient tous la Providence et l'enchaĂnement des Ă©vĂ©nements de ce monde. Enfin on Ă©tait si persuadĂ©, si convaincu de la naissance de l'IngĂ©nu, qu'il consentit lui-mĂÂȘme Ă ĂÂȘtre neveu de monsieur le prieur, en disant qu'il aimait autant l'avoir pour son oncle qu'un autre. On alla rendre grĂÂące Ă Dieu dans l'Ă©glise de Notre-Dame de la Montagne, tandis que le Huron, d'un air indiffĂ©rent, s'amusait Ă boire dans la maison. Les Anglais qui l'avaient amenĂ©, et qui Ă©taient prĂÂȘts Ă mettre Ă la voile, vinrent lui dire qu'il Ă©tait temps de partir. "Apparemment, leur dit-il, que vous n'avez pas retrouvĂ© vos oncles et vos tantes je reste ici; retournez Ă Plymouth, je vous donne toutes mes hardes, je n'ai plus besoin de rien au monde puisque je suis le neveu d'un prieur." Les Anglais mirent Ă la voile, en se souciant fort peu que l'IngĂ©nu eĂ»t des parents ou non en Basse-Bretagne. AprĂšs que l'oncle, la tante et la compagnie eurent chantĂ© le Te Deum, aprĂšs que le bailli eut encore accablĂ© l'IngĂ©nu de questions; aprĂšs qu'on eut Ă©puisĂ© tout ce que l'Ă©tonnement, la joie, la tendresse, peuvent faire dire, le prieur de la Montagne et l'abbĂ© de Saint-Yves conclurent Ă faire baptiser l'IngĂ©nu au plus vite. Mais il n'en Ă©tait pas d'un grand Huron de vingt-deux ans comme d'un enfant qu'on rĂ©gĂ©nĂšre sans qu'il en sache rien. Il fallait l'instruire, et cela paraissait difficile car l'abbĂ© de Saint-Yves supposait qu'un homme qui n'Ă©tait pas nĂ© en France n'avait pas le sens commun. Le prieur fit observer Ă la compagnie que, si en effet monsieur l'IngĂ©nu, son neveu, n'avait pas eu le bonheur de naĂtre en Basse-Bretagne, il n'en avait pas moins d'esprit; qu'on en pouvait juger par toutes ses rĂ©ponses, et que sĂ»rement la nature l'avait beaucoup favorisĂ©, tant du cĂÂŽtĂ© paternel que du maternel. On lui demanda d'abord s'il avait jamais lu quelque livre. Il dit qu'il avait lu Rabelais traduit en anglais, et quelques morceaux de Shakespeare qu'il savait par coeur; qu'il avait trouvĂ© ces livres chez le capitaine du vaisseau qui l'avait amenĂ© de l'AmĂ©rique Ă Plymouth, et qu'il en Ă©tait fort content. Le bailli ne manqua pas de l'interroger sur ces livres. "Je vous avoue, dit l'IngĂ©nu, que j'ai cru en deviner quelque chose, et que je n'ai pas entendu le reste." L'abbĂ© de Saint-Yves, Ă ce discours, fit rĂ©flexion que c'Ă©tait ainsi que lui-mĂÂȘme avait toujours lu, et que la plupart des hommes ne lisaient guĂšre autrement. "Vous avez sans doute lu la Bible? dit-il au Huron. - Point du tout, monsieur l'abbĂ©; elle n'Ă©tait pas parmi les livres de mon capitaine; je n'en ai jamais entendu parler. - VoilĂ comme sont ces maudits Anglais, criait mademoiselle de Kerkabon; ils feront plus de cas d'une piĂšce de Shakespeare, d'un plum-pudding et d'une bouteille rhum que du Pentateuque. Aussi n'ont-ils jamais converti personne en AmĂ©rique. Certainement ils sont maudits de Dieu; et nous leur prendrons la JamaĂÂŻque et la Virginie avant qu'il soit peu de temps." Quoi qu'il en soit, on fit venir le plus habile tailleur de Saint-Malo pour habiller l'IngĂ©nu de pied en cap. La compagnie se sĂ©para; le bailli alla faire ses questions ailleurs. Mademoiselle de Saint-Yves, en partant, se retourna plusieurs fois pour regarder l'IngĂ©nu; et il lui fit des rĂ©vĂ©rences plus profondes qu'il n'en avait jamais fait Ă personne en sa vie. Le bailli, avant de prendre congĂ©, prĂ©senta Ă mademoiselle de Saint-Yves un grand nigaud de fils qui sortait du collĂšge; mais Ă peine le regarda-t-elle, tant elle Ă©tait occupĂ©e de la politesse du Huron. Chapitre troisiĂšme. Le Huron, nommĂ© l'IngĂ©nu, converti Le Huron, nommĂ© l'IngĂ©nu, converti Monsieur le prieur, voyant qu'il Ă©tait un peu sur l'ĂÂąge, et que Dieu lui envoyait un neveu pour sa consolation, se mit en tĂÂȘte qu'il pourrait lui rĂ©signer son bĂ©nĂ©fice s'il rĂ©ussissait Ă le baptiser et Ă le faire entrer dans les ordres. L'IngĂ©nu avait une mĂ©moire excellente. La fermetĂ© des organes de Basse-Bretagne, fortifiĂ©e par le climat du Canada, avait rendu sa tĂÂȘte si vigoureuse que, quand on frappait dessus, Ă peine le sentait-il; et quand on gravait dedans, rien ne s'effaçait; il n'avait jamais rien oubliĂ©. Sa conception Ă©tait d'autant plus vive et plus nette que, son enfance n'ayant point Ă©tĂ© chargĂ©e des inutilitĂ©s et des sottises qui accablent la nĂÂŽtre, les choses entraient dans sa cervelle sans nuage. Le prieur rĂ©solut enfin de lui faire lire le Nouveau Testament. L'IngĂ©nu le dĂ©vora avec beaucoup de plaisir; mais, ne sachant ni dans quel temps ni dans quel pays toutes les aventures rapportĂ©es dans ce livre Ă©taient arrivĂ©es, il ne douta point que le lieu de la scĂšne ne fĂ»t en Basse-Bretagne; et il jura qu'il couperait le nez et les oreilles Ă CaĂÂŻphe et Ă Pilate si jamais il rencontrait ces marauds-lĂ . Son oncle, charmĂ© de ces bonnes dispositions, le mit au fait en peu de temps il loua son zĂšle; mais il lui apprit que ce zĂšle Ă©tait inutile, attendu que ces gens-lĂ Ă©taient morts il y avait environ seize cent quatre-vingt-dix annĂ©es. L'IngĂ©nu sut bientĂÂŽt presque tout le livre par coeur. Il proposait quelquefois des difficultĂ©s qui mettaient le prieur fort en peine. Il Ă©tait obligĂ© souvent de consulter l'abbĂ© de Saint-Yves, qui, ne sachant que rĂ©pondre, fit venir un jĂ©suite bas-breton pour achever la conversion du Huron. Enfin la grĂÂące opĂ©ra; l'IngĂ©nu promit de se faire chrĂ©tien; il ne douta pas qu'il ne dĂ»t commencer par ĂÂȘtre circoncis; "car, disait-il, je ne vois pas dans le livre qu'on m'a fait lire un seul personnage qui ne l'ait Ă©tĂ©; il est donc Ă©vident que je dois faire le sacrifice de mon prĂ©puce le plus tĂÂŽt c'est le mieux". Il ne dĂ©libĂ©ra point il envoya chercher le chirurgien du village, et le pria de lui faire l'opĂ©ration, comptant rĂ©jouir infiniment mademoiselle de Kerkabon et toute la compagnie quand une fois la chose serait faite. Le frater, qui n'avait point encore fait cette opĂ©ration, en avertit la famille, qui jeta les hauts cris. La bonne Kerkabon trembla que son neveu, qui paraissait rĂ©solu et expĂ©ditif, ne se fĂt lui-mĂÂȘme l'opĂ©ration trĂšs maladroitement, et qu'il n'en rĂ©sultĂÂąt de tristes effets auxquels les dames s'intĂ©ressent toujours par bontĂ© d'ĂÂąme. Le prieur redressa les idĂ©es du Huron; il lui remontra que la circoncision n'Ă©tait plus de mode; que le baptĂÂȘme Ă©tait beaucoup plus doux et plus salutaire; que la loi de grĂÂące n'Ă©tait pas comme la loi de rigueur. L'IngĂ©nu, qui avait beaucoup de bon sens et de droiture, disputa, mais reconnut son erreur; ce qui est assez rare en Europe aux gens qui disputent; enfin il promit de se faire baptiser quand on voudrait. Il fallait auparavant se confesser; et c'Ă©tait lĂ le plus difficile. L'IngĂ©nu avait toujours en poche le livre que son oncle lui avait donnĂ©. Il n'y trouvait pas qu'un seul apĂÂŽtre se fĂ»t confessĂ©, et cela le rendait trĂšs rĂ©tif. Le prieur lui ferma la bouche en lui montrant, dans l'Ă©pĂtre de saint Jacques le Mineur, ces mots qui font tant de peine aux hĂ©rĂ©tiques Confessez vos pĂ©chĂ©s les uns aux autres. Le Huron se tut, et se confessa Ă un rĂ©collet. Quand il eut fini, il tira le rĂ©collet du confessionnal, et, saisissant son homme d'un bras vigoureux, il se mit Ă sa place, et le fit mettre Ă genoux devant lui "Allons, mon ami, il est dit Confessez-vous les uns aux autres; je t'ai contĂ© mes pĂ©chĂ©s, tu ne sortiras pas d'ici que tu ne m'aies contĂ© les tiens." En parlant ainsi, il appuyait son large genou contre la poitrine de son adverse partie. Le rĂ©collet pousse des hurlements qui font retentir l'Ă©glise. On accourt au bruit, on voit le catĂ©chumĂšne qui gourmait le moine au nom de saint Jacques le Mineur. La joie de baptiser un Bas-Breton huron et anglais Ă©tait si grande qu'on passa par-dessus ces singularitĂ©s. Il y eut mĂÂȘme beaucoup de thĂ©ologiens qui pensĂšrent que la confession n'Ă©tait pas nĂ©cessaire, puisque le baptĂÂȘme tenait lieu de tout. On prit jour avec l'Ă©vĂÂȘque de Saint-Malo, qui, flattĂ©, comme on peut le croire, de baptiser un Huron, arriva dans un pompeux Ă©quipage, suivi de son clergĂ©. Mademoiselle de Saint-Yves, en bĂ©nissant Dieu, mit sa plus belle robe et fit venir une coiffeuse de Saint-Malo pour briller Ă la cĂ©rĂ©monie. L'interrogant bailli accourut avec toute la contrĂ©e. L'Ă©glise Ă©tait magnifiquement parĂ©e; mais quand il fallut prendre le Huron pour le mener aux fonts baptismaux, on ne le trouva point. L'oncle et la tante le cherchĂšrent partout. On crut qu'il Ă©tait Ă la chasse, selon sa coutume. Tous les conviĂ©s Ă la fĂÂȘte parcoururent les bois et les villages voisins point de nouvelles du Huron. On commençait Ă craindre qu'il ne fĂ»t retournĂ© en Angleterre. On se souvenait de lui avoir entendu dire qu'il aimait fort ce pays-lĂ . Monsieur le prieur et sa soeur Ă©taient persuadĂ©s qu'on n'y baptisait personne, et tremblaient pour l'ĂÂąme de leur neveu. L'Ă©vĂÂȘque Ă©tait confondu et prĂÂȘt Ă s'en retourner; le prieur et l'abbĂ© de Saint-Yves se dĂ©sespĂ©raient; le bailli interrogeait tous les passants avec sa gravitĂ© ordinaire. Mademoiselle de Kerkabon pleurait. Mademoiselle de Saint-Yves ne pleurait pas, mais elle poussait de profonds soupirs qui semblaient tĂ©moigner son goĂ»t pour les sacrements. Elles se promenaient tristement le long des saules et des roseaux qui bordent la petite riviĂšre de Rance, lorsqu'elles aperçurent au milieu de la riviĂšre une grande figure assez blanche, les deux mains croisĂ©es sur la poitrine Elles jetĂšrent un grand cri et se dĂ©tournĂšrent. Mais, la curiositĂ© l'emportant bientĂÂŽt sur toute autre considĂ©ration, elles se coulĂšrent doucement entre les roseaux; et quand elles furent bien sĂ»res de n'ĂÂȘtre point vues, elles voulurent voir de quoi il s'agissait. Chapitre quatriĂšme. L'IngĂ©nu baptisĂ© L'IngĂ©nu baptisĂ© Le prieur et l'abbĂ©, Ă©tant accourus, demandĂšrent Ă l'IngĂ©nu ce qu'il faisait lĂ . "Eh parbleu! Messieurs, j'attends le baptĂÂȘme il y a une heure que je suis dans l'eau jusqu'au cou, et il n'est pas honnĂÂȘte de me laisser morfondre. - Mon cher neveu, lui dit tendrement le prieur, ce n'est pas ainsi qu'on baptise en Basse-Bretagne; reprenez vos habits et venez avec nous." Mademoiselle de Saint-Yves, en entendant ce discours, disait tout bas Ă sa compagne "Mademoiselle, croyez-vous qu'il reprenne si tĂÂŽt ses habits?" Le Huron cependant rĂ©partit au prieur "Vous ne m'en ferez pas accroire cette fois-ci comme l'autre; j'ai bien Ă©tudiĂ© depuis ce temps-lĂ , et je suis trĂšs certain qu'on ne se baptise pas autrement. L'eunuque de la reine Candace fut baptisĂ© dans un ruisseau; je vous dĂ©fie de me montrer dans le livre que vous m'avez donnĂ© qu'on s'y soit jamais pris d'une autre façon. Je ne serai point baptisĂ© du tout, ou je le serai dans la riviĂšre." On eut beau lui remontrer que les usages avaient changĂ©, l'IngĂ©nu Ă©tait tĂÂȘtu, car il Ă©tait Breton et Huron. Il revenait toujours Ă l'eunuque de la reine Candace; et quoique mademoiselle sa tante et mademoiselle de Saint-Yves, qui l'avaient observĂ© entre les saules, fussent en droit de lui dire qu'il ne lui appartenait pas de citer un pareil homme, elles n'en firent pourtant rien, tant Ă©tait grande leur discrĂ©tion. L'Ă©vĂÂȘque vint lui-mĂÂȘme lui parler, ce qui est beaucoup; mais il ne gagna rien le Huron disputa contre l'Ă©vĂÂȘque. "Montrez-moi, lui dit-il, dans le livre que m'a donnĂ© mon oncle, un seul homme qui n'ait pas Ă©tĂ© baptisĂ© dans la riviĂšre, et je ferai tout ce que vous voudrez." La tante, dĂ©sespĂ©rĂ©e, avait remarquĂ© que la premiĂšre fois que son neveu avait fait la rĂ©vĂ©rence, il en avait fait une plus profonde Ă mademoiselle de Saint-Yves qu'Ă aucune autre personne de la compagnie, qu'il n'avait pas mĂÂȘme saluĂ© monsieur l'Ă©vĂÂȘque avec ce respect mĂÂȘlĂ© de cordialitĂ© qu'il avait tĂ©moignĂ© Ă cette belle demoiselle. Elle prit le parti de s'adresser Ă elle dans ce grand embarras; elle la pria d'interposer son crĂ©dit pour engager le Huron Ă se faire baptiser de la mĂÂȘme maniĂšre que les Bretons, ne croyant pas que son neveu pĂ»t jamais ĂÂȘtre chrĂ©tien s'il persistait Ă vouloir ĂÂȘtre baptisĂ© dans l'eau courante. Mademoiselle de Saint-Yves rougit du plaisir secret qu'elle sentait d'ĂÂȘtre chargĂ©e d'une si importante commission. Elle s'approcha modestement de l'IngĂ©nu, et, lui serrant la main d'une maniĂšre tout Ă fait noble "Est-ce que vous ne ferez rien pour moi?" lui dit-elle; et en prononçant ces mots elle baissait les yeux, et les relevait avec une grĂÂące attendrissante. "Ah! tout ce que vous voudrez, mademoiselle, tout ce que vous me commanderez baptĂÂȘme d'eau, baptĂÂȘme de feu, baptĂÂȘme de sang, il n'y a rien que je vous refuse." Mademoiselle de Saint-Yves eut la gloire de faire en deux paroles ce que si les empressements du prieur, ni les interrogations rĂ©itĂ©rĂ©es du bailli, ni les raisonnements mĂÂȘme de monsieur l'Ă©vĂÂȘque, n'avaient pu faire. Elle sentit son triomphe; mais elle n'en sentait pas encore toute l'Ă©tendue. Le baptĂÂȘme fut administrĂ© et reçu avec toute la dĂ©cence, toute la magnificence, tout l'agrĂ©ment possibles. L'oncle et la tante cĂ©dĂšrent Ă monsieur l'abbĂ© de Saint-Yves et Ă sa soeur l'honneur de tenir l'IngĂ©nu sur les fonts. Mademoiselle de Saint-Yves rayonnait de joie de se voir marraine. Elle ne savait pas Ă quoi ce grand titre l'asservissait; elle accepta cet honneur sans en connaĂtre les fatales consĂ©quences. Comme il n'y a jamais eu de cĂ©rĂ©monie qui ne fĂ»t suivie d'un grand dĂner, on se mit Ă table au sortir du baptĂÂȘme. Les goguenards de Basse-Bretagne dirent qu'il ne fallait pas baptiser son vin. Monsieur le prieur disait que le vin, selon Salomon, rĂ©jouit le coeur de l'homme. Monsieur l'Ă©vĂÂȘque ajoutait que le patriarche Juda devait lier son ĂÂąnon Ă la vigne, et tremper son manteau dans le sang du raisin, et qu'il Ă©tait bien triste qu'on n'en pĂ»t faire autant en Basse-Bretagne, Ă laquelle Dieu a dĂ©niĂ© les vignes. Chacun tĂÂąchait de dire un bon mot sur le baptĂÂȘme de l'IngĂ©nu, et des galanteries Ă la marraine. Le bailli, toujours interrogant, demandait au Huron s'il serait fidĂšle Ă ses promesses. "Comment voulez-vous que je manque Ă mes promesses, rĂ©pondit le Huron, puisque je les ai faites entre les mains de mademoiselle de Saint-Yves?" Le Huron s'Ă©chauffa; il but beaucoup Ă la santĂ© de sa marraine. "Si j'avais Ă©tĂ© baptisĂ© de votre main, dit-il, je sens que l'eau froide qu'on m'a versĂ©e sur le chignon m'aurait brĂ»lĂ©." Le bailli trouva cela trop poĂ©tique, ne sachant pas combien l'allĂ©gorie est familiĂšre au Canada. Mais la marraine en fut extrĂÂȘmement contente. On avait donnĂ© le nom d'Hercule au baptisĂ©. L'Ă©vĂÂȘque de Saint-Malo demandait toujours quel Ă©tait ce patron dont il n'avait jamais entendu parler. Le jĂ©suite, qui Ă©tait fort savant, lui dit que c'Ă©tait un saint qui avait fait douze miracles. Il y en avait un treiziĂšme qui valait les douze autres; mais dont il ne convenait pas Ă un jĂ©suite de parler c'Ă©tait celui d'avoir changĂ© cinquante filles en femmes en une seule nuit. Un plaisant qui se trouva lĂ releva ce miracle avec Ă©nergie. Toutes les dames baissĂšrent les yeux, et jugĂšrent Ă la physionomie de l'IngĂ©nu qu'il Ă©tait digne du saint dont il portait le nom. Chapitre cinquiĂšme. L'IngĂ©nu amoureux L'IngĂ©nu amoureux Il faut avouer que depuis ce baptĂÂȘme et ce dĂner mademoiselle de Saint-Yves souhaita passionnĂ©ment que monsieur l'Ă©vĂÂȘque la fĂt encore participante de quelque beau sacrement avec monsieur Hercule l'IngĂ©nu. Cependant, comme elle Ă©tait bien Ă©levĂ©e et fort modeste, elle n'osait convenir tout Ă fait avec elle-mĂÂȘme de ses tendres sentiments; mais, s'il lui Ă©chappait un regard, un mot, un geste, une pensĂ©e, elle enveloppait tout cela d'un voile de pudeur infiniment aimable. Elle Ă©tait tendre, vive et sage. DĂšs que monsieur l'Ă©vĂÂȘque fut parti, l'IngĂ©nu et mademoiselle de Saint-Yves se rencontrĂšrent sans avoir fait rĂ©flexion qu'ils se cherchaient. Ils se parlĂšrent sans avoir imaginĂ© ce qu'ils se diraient. L'IngĂ©nu lui dit d'abord qu'il l'aimait de tout son coeur, et que la belle Abacaba, dont il avait Ă©tĂ© fou dans son pays, n'approchait pas d'elle. Mademoiselle lui rĂ©pondit, avec sa modestie ordinaire, qu'il fallait en parler au plus vite Ă monsieur le prieur son oncle et Ă mademoiselle sa tante, et que de son cĂÂŽtĂ© elle en dirait deux mots Ă son cher frĂšre l'abbĂ© de Saint-Yves, et qu'elle se flattait d'un consentement commun. L'IngĂ©nu lui rĂ©pond qu'il n'avait besoin du consentement de personne, qu'il lui paraissait extrĂÂȘmement ridicule d'aller demander Ă d'autres ce qu'on devait faire; que, quand deux parties sont d'accord, on n'a pas besoin d'un tiers pour les accommoder. "Je ne consulte personne, dit-il, quand j'ai envie de dĂ©jeuner, ou de chasser, ou de dormir je sais bien qu'en amour il n'est pas mal d'avoir le consentement de la personne Ă qui on en veut; mais, comme ce n'est ni de mon oncle ni de ma tante que je suis amoureux, ce n'est pas Ă eux que je dois m'adresser dans cette affaire, et, si vous m'en croyez, vous vous passerez aussi de monsieur l'abbĂ© de Saint-Yves." On peut juger que la belle Bretonne employa toute la dĂ©licatesse de son esprit Ă rĂ©duire son Huron aux termes de la biensĂ©ance. Elle se fĂÂącha mĂÂȘme, et bientĂÂŽt se radoucit. Enfin on ne sait comment aurait fini cette conversation si, le jour baissant, monsieur l'abbĂ© n'avait ramenĂ© sa soeur Ă son abbaye. L'IngĂ©nu laissa coucher son oncle et sa tante, qui Ă©taient un peu fatiguĂ©s de la cĂ©rĂ©monie et de leur long dĂner. Il passa une partie de la nuit Ă faire des vers en langue huronne pour sa bien-aimĂ©e car il faut savoir qu'il n'y a aucun pays de la terre oĂÂč l'amour n'ait rendu les amants poĂštes. Le lendemain, son oncle lui parla ainsi aprĂšs le dĂ©jeuner, en prĂ©sence de mademoiselle Kerkabon, qui Ă©tait tout attendrie "Le ciel soit louĂ© de ce que vous avez l'honneur, mon cher neveu, d'ĂÂȘtre chrĂ©tien et Bas-Breton! Mais cela ne suffit pas; je suis un peu sur l'ĂÂąge; mon frĂšre n'a laissĂ© qu'un petit coin de terre qui est trĂšs peu de chose; j'ai un bon prieurĂ©; si vous voulez seulement vous faire sous-diacre, comme je l'espĂšre, je vous rĂ©signerai mon prieurĂ©, et vous vivrez fort Ă votre aise, aprĂšs avoir Ă©tĂ© la consolation de ma vieillesse." L'IngĂ©nu rĂ©pondit "Mon oncle, grand bien vous fasse! vivez tant que vous pourrez. Je ne sais pas ce que c'est que d'ĂÂȘtre sous-diacre ni que de rĂ©signer; mais tout me sera bon pourvu que j'aie mademoiselle de Saint-Yves Ă ma disposition. - Eh! mon Dieu! mon neveu, que me dites-vous lĂ ? Vous aimez donc cette belle demoiselle Ă la folie? - Oui, mon oncle. - HĂ©las! mon neveu, il est impossible que vous l'Ă©pousiez. - Cela est trĂšs possible, mon oncle; car non seulement elle m'a serrĂ© la main en me quittant, mais elle m'a promis qu'elle me demanderait en mariage; et assurĂ©ment je l'Ă©pouserai. - Cela est impossible, vous dis-je; elle est votre marraine c'est un pĂ©chĂ© Ă©pouvantable Ă une marraine de serrer la main de son filleul; il n'est pas permis d'Ă©pouser sa marraine; les lois divines et humaines s'y opposent. - Morbleu! mon oncle, vous vous moquez de moi; pourquoi serait-il dĂ©fendu d'Ă©pouser sa marraine, quand elle est jeune et jolie? Je n'ai point vu dans le livre que vous m'avez donnĂ© qu'il fĂ»t mal d'Ă©pouser les filles qui ont aidĂ© les gens Ă ĂÂȘtre baptisĂ©s. Je m'aperçois tous les jours qu'on fait ici une infinitĂ© de choses qui ne sont point dans votre livre, et qu'on n'y fait rien de tout ce qu'il dit je vous avoue que cela m'Ă©tonne et me fĂÂąche. Si on me prive de la belle Saint-Yves, sous prĂ©texte de mon baptĂÂȘme, je vous avertis que je l'enlĂšve, et que je me dĂ©baptise." Le prieur fut confondu; sa soeur pleura. "Mon cher frĂšre, dit-elle, il ne faut pas que notre neveu se damne; notre saint-pĂšre le pape peut lui donner dispense, et alors il pourra ĂÂȘtre chrĂ©tiennement heureux avec ce qu'il aime." L'IngĂ©nu embrassa sa tante. "Quel est donc, dit-il, cet homme charmant qui favorise avec tant de bontĂ© les garçons et les filles dans leurs amours? Je veux lui aller parler tout Ă l'heure." On lui expliqua ce que c'Ă©tait que le pape; et l'IngĂ©nu fut encore plus Ă©tonnĂ© qu'auparavant. "Il n'y a pas un mot de tout cela dans votre livre, mon cher oncle; j'ai voyagĂ©, je connais la mer; nous sommes ici sur la cĂÂŽte de l'OcĂ©an; et je quitterai mademoiselle de Saint-Yves pour aller demander la permission de l'aimer Ă un homme qui demeure vers la MĂ©diterranĂ©e, Ă quatre cents lieues d'ici, et dont je n'entends point la langue! Cela est d'un ridicule incomprĂ©hensible. Je vais sur-le-champ chez monsieur l'abbĂ© de Saint-Yves, qui ne demeure qu'Ă une lieue de vous, et je vous rĂ©ponds que j'Ă©pouserai ma maĂtresse dans la journĂ©e." Comme il parlait encore, entra le bailli, qui, selon sa coutume, lui demanda oĂÂč il allait. "Je vais me marier", dit l'IngĂ©nu en courant; et au bout d'un quart d'heure il Ă©tait dĂ©jĂ chez sa belle et chĂšre basse-brette, qui dormait encore. "Ah! mon frĂšre! disait mademoiselle de Kerkabon au prieur, jamais vous ne ferez un sous-diacre de notre neveu." Le bailli fut trĂšs mĂ©content de ce voyage car il prĂ©tendait que son fils Ă©pousĂÂąt la Saint-Yves et ce fils Ă©tait encore plus sot et plus insupportable que son pĂšre. Chapitre sixiĂšme. L'IngĂ©nu court chez sa maĂtresse et devient furieux L'IngĂ©nu court chez sa maĂtresse et devient furieux A peine l'IngĂ©nu Ă©tait arrivĂ©, qu'ayant demandĂ© Ă une vieille servante oĂÂč Ă©tait la chambre de sa maĂtresse, il avait poussĂ© fortement la porte mal fermĂ©e, et s'Ă©tait Ă©lancĂ© vers le lit. Mademoiselle de Saint-Yves, se rĂ©veillant en sursaut, s'Ă©tait Ă©criĂ©e "Quoi! c'est vous! ah! c'est vous! arrĂÂȘtez-vous, que faites-vous?" Il avait rĂ©pondu "Je vous Ă©pouse", et en effet il l'Ă©pousait, si elle ne s'Ă©tait pas dĂ©battue avec toute l'honnĂÂȘtetĂ© d'une personne qui a de l'Ă©ducation. L'IngĂ©nu n'entendait pas raillerie; il trouvait toutes ces façons-lĂ extrĂÂȘmement impertinentes. "Ce n'Ă©tait pas ainsi qu'en usait mademoiselle Abacaba, ma premiĂšre maĂtresse; vous n'avez point de probitĂ©; vous m'avez promis mariage, et vous ne voulez point faire mariage c'est manquer aux premiĂšres lois de l'honneur; je vous apprendrai Ă tenir votre parole, et je vous remettrai dans le chemin de la vertu." L'IngĂ©nu possĂ©dait une vertu mĂÂąle et intrĂ©pide, digne de son patron Hercule, dont on lui avait donnĂ© le nom Ă son baptĂÂȘme; il allait l'exercer dans toute son Ă©tendue, lorsqu'aux cris perçants de la demoiselle plus discrĂštement vertueuse accourut le sage abbĂ© de Saint-Yves, avec sa gouvernante, un vieux domestique dĂ©vot, et un prĂÂȘtre de la paroisse. Cette vue modĂ©ra le courage de l'assaillant. "Eh, mon Dieu! mon cher voisin, lui dit l'abbĂ©, que faites-vous lĂ ? - Mon devoir, rĂ©pliqua le jeune homme; je remplis mes promesses, qui sont sacrĂ©es." Mademoiselle de Saint-Yves se rajusta en rougissant. On emmena l'IngĂ©nu dans un autre appartement. L'abbĂ© lui remontra l'Ă©normitĂ© du procĂ©dĂ©. L'IngĂ©nu se dĂ©fendit sur les privilĂšges de la loi naturelle, qu'il connaissait parfaitement. L'abbĂ© voulut prouver que la loi positive devait avoir tout l'avantage, et que sans les conventions faites entre les hommes, la loi de nature ne serait presque jamais qu'un brigandage naturel. "Il faut, lui disait-il, des notaires, des prĂÂȘtres, des tĂ©moins, des contrats, des dispenses." L'IngĂ©nu lui rĂ©pondit par la rĂ©flexion que les sauvages ont toujours faite "Vous ĂÂȘtes donc de bien malhonnĂÂȘtes gens, puisqu'il faut entre vous tant de prĂ©cautions." L'abbĂ© eut de la peine Ă rĂ©soudre cette difficultĂ©. "Il y a, dit-il, je l'avoue, beaucoup d'inconstants et de fripons parmi nous; et il y en aurait autant chez les Hurons s'ils Ă©taient rassemblĂ©s dans une grande ville; mais aussi il y a des ĂÂąmes sages, honnĂÂȘtes, Ă©clairĂ©es, et ce sont ces hommes-lĂ qui ont fait les lois. Plus on est homme de bien, plus on doit s'y soumettre on donne l'exemple aux vicieux, qui respectent un frein que la vertu s'est donnĂ© elle-mĂÂȘme." Cette rĂ©ponse frappa l'IngĂ©nu. On a dĂ©jĂ remarquĂ© qu'il avait l'esprit juste. On l'adoucit par des paroles flatteuses; on lui donna des espĂ©rances ce sont les deux piĂšges oĂÂč les hommes des deux hĂ©misphĂšres se prennent; on lui prĂ©senta mĂÂȘme mademoiselle de Saint-Yves, quand elle eut fait sa toilette. Tout se passa avec la plus grande biensĂ©ance; mais, malgrĂ© cette dĂ©cence, les yeux Ă©tincelants de l'IngĂ©nu Hercule firent toujours baisser ceux de sa maĂtresse, et trembler la compagnie. On eut une peine extrĂÂȘme Ă le renvoyer chez ses parents. Il fallut encore employer le crĂ©dit de la belle Saint-Yves; plus elle sentait son pouvoir sur lui, et plus elle l'aimait. Elle le fit partir, et en fut trĂšs affligĂ©e; enfin, quand il fut parti, l'abbĂ©, qui non seulement Ă©tait le frĂšre trĂšs aĂnĂ© de mademoiselle de Saint-Yves, mais qui Ă©tait aussi son tuteur, prit le parti de soustraire sa pupille aux empressements de cet amant terrible. Il alla consulter le bailli, qui, destinant toujours son fils Ă la soeur de l'abbĂ©, lui conseilla de mettre la pauvre fille dans une communautĂ©. Ce fut un coup terrible une indiffĂ©rente qu'on mettrait en couvent jetterait les hauts cris; mais une amante, et une amante aussi sage que tendre, c'Ă©tait de quoi la mettre au dĂ©sespoir. L'IngĂ©nu, de retour chez le prieur, raconta tout avec sa naĂÂŻvetĂ© ordinaire. Il essuya les mĂÂȘmes remontrances, qui firent quelque effet sur son esprit, et aucun sur ses sens; mais le lendemain, quand il voulut retourner chez sa belle maĂtresse pour raisonner avec elle sur la loi naturelle et sur la loi de convention, monsieur le bailli lui apprit avec une joie insultante qu'elle Ă©tait dans un couvent. "Eh bien! dit-il, j'irai raisonner dans ce couvent. - Cela ne se peut", dit le bailli. Il lui expliqua fort au long ce que c'Ă©tait qu'un couvent ou un convent; que ce mot venait du latin conventus, qui signifie assemblĂ©e; et le Huron ne pouvait comprendre pourquoi il ne pouvait pas ĂÂȘtre admis dans l'assemblĂ©e. SitĂÂŽt qu'il fut instruit que cette assemblĂ©e Ă©tait une espĂšce de prison oĂÂč l'on tenait les filles renfermĂ©es, chose horrible, inconnue chez les Hurons et chez les Anglais, il devint aussi furieux que le fut son patron Hercule lorsque Euryte, roi d'Oechalie, non moins cruel que l'abbĂ© de Saint-Yves, lui refusa la belle Iole sa fille, non moins belle que la soeur de l'abbĂ©. Il voulait aller mettre le feu au couvent, enlever sa maĂtresse, ou se brĂ»ler avec elle. Mademoiselle de Kerkabon, Ă©pouvantĂ©e, renonçait plus que jamais Ă toutes les espĂ©rances de voir son neveu sous-diacre, et disait en pleurant qu'il avait le diable au corps depuis qu'il Ă©tait baptisĂ©. Chapitre septiĂšme. L'IngĂ©nu repousse les Anglais L'IngĂ©nu repousse les Anglais L'IngĂ©nu, plongĂ© dans une sombre et profonde mĂ©lancolie, se promena vers le bord de la mer, son fusil Ă deux coups sur l'Ă©paule, son grand coutelas au cĂÂŽtĂ©, tirant de temps en temps sur quelques oiseaux, et souvent tentĂ© de tirer sur lui-mĂÂȘme; mais il aimait encore la vie, Ă cause de mademoiselle de Saint-Yves. TantĂÂŽt il maudissait son oncle, sa tante, et toute la Basse-Bretagne, et son baptĂÂȘme; tantĂÂŽt il les bĂ©nissait, puisqu'ils lui avaient fait connaĂtre celle qu'il aimait. Il prenait sa rĂ©solution d'aller brĂ»ler le couvent, et il s'arrĂÂȘtait tout court, de peur de brĂ»ler sa maĂtresse. Les flots de la Manche ne sont pas plus agitĂ©s par les vents d'est et d'ouest que son coeur l'Ă©tait par tant de mouvements contraires. Il marchait Ă grands pas, sans savoir oĂÂč, lorsqu'il entendit le son du tambour. Il vit de loin tout un peuple dont une moitiĂ© courait au rivage, et l'autre s'enfuyait. Mille cris s'Ă©lĂšvent de tous cĂÂŽtĂ©s; la curiositĂ© et le courage le prĂ©cipitent Ă l'instant vers l'endroit d'oĂÂč partaient ces clameurs il y vole en quatre bonds. Le commandant de la milice, qui avait soupĂ© avec lui chez le prieur, le reconnut aussitĂÂŽt; il court Ă lui, les bras ouverts "Ah! c'est l'IngĂ©nu, il combattra pour nous." Et les milices, qui mouraient de peur, se rassurĂšrent et criĂšrent aussi "C'est l'IngĂ©nu! c'est l'IngĂ©nu! - Messieurs, dit-il, de quoi s'agit-il? Pourquoi ĂÂȘtes-vous si effarĂ©s? A-t-on mis vos maĂtresses dans des couvents?" Alors cent voix confuses s'Ă©crient "Ne voyez-vous pas les Anglais qui abordent? - Eh bien! rĂ©pliqua le Huron, ce sont de braves gens; ils ne m'ont jamais proposĂ© de me faire sous-diacre; ils ne m'ont point enlevĂ© ma maĂtresse." Le commandant lui fit entendre que les Anglais venaient piller l'abbaye de la Montagne, boire le vin de son oncle, et peut-ĂÂȘtre enlever mademoiselle de Saint-Yves; que le petit vaisseau sur lequel il avait abordĂ© en Bretagne n'Ă©tait venu que pour reconnaĂtre la cĂÂŽte; qu'ils faisaient des actes d'hostilitĂ© sans avoir dĂ©clarĂ© la guerre au roi de France, et que la province Ă©tait exposĂ©e. "Ah! si cela est, ils violent la loi naturelle; laissez-moi faire; j'ai demeurĂ© longtemps parmi eux, je sais leur langue, je leur parlerai; je ne crois pas qu'ils puissent avoir un si mĂ©chant dessein." Pendant cette conversation, l'escadre anglaise approchait; voilĂ le Huron qui court vers elle, se jette dans un petit bateau, arrive, monte au vaisseau amiral, et demande s'il est vrai qu'ils viennent ravager le pays sans avoir dĂ©clarĂ© la guerre honnĂÂȘtement. L'amiral et tout son bord firent de grand Ă©clats de rire, lui firent boire du punch, et le renvoyĂšrent. L'IngĂ©nu, piquĂ©, ne songea plus qu'Ă se bien battre contre ses anciens amis, pour ses compatriotes et pour monsieur le prieur. Les gentilshommes du voisinage accouraient de toutes parts; il se joint Ă eux on avait quelques canons; il les charge, il les pointe, il les tire l'un aprĂšs l'autre. Les Anglais dĂ©barquent; il court Ă eux, il en tue trois de sa main, il blesse mĂÂȘme l'amiral, qui s'Ă©tait moquĂ© de lui. Sa valeur anime le courage de toute la milice; les Anglais se rembarquent, et toute la cĂÂŽte retentissait des cris de victoire "Vive le roi, vive l'IngĂ©nu!" Chacun l'embrassait, chacun s'empressait d'Ă©tancher le sang de quelques blessures lĂ©gĂšres qu'il avait reçues. "Ah! disait-il, si mademoiselle de Saint-Yves Ă©tait lĂ , elle me mettrait une compresse." Le bailli, qui s'Ă©tait cachĂ© dans sa cave pendant le combat, vint lui faire compliment comme les autres. Mais il fut bien surpris quand il entendit Hercule l'IngĂ©nu dire Ă une douzaine de jeunes gens de bonne volontĂ©, dont il Ă©tait entourĂ© "Mes amis, ce n'est rien d'avoir dĂ©livrĂ© l'abbaye de la Montagne; il faut dĂ©livrer une fille." Toute cette bouillante jeunesse prit feu Ă ces seules paroles. On le suivait dĂ©jĂ en foule, on courait au couvent. Si le bailli n'avait pas sur-le-champ averti le commandant, si on n'avait pas couru aprĂšs la troupe joyeuse, c'en Ă©tait fait. On ramena l'IngĂ©nu chez son oncle et sa tante, qui le baignĂšrent de larmes de tendresse. "Je vois bien que vous ne serez jamais ni sous-diacre ni prieur, lui dit l'oncle; vous serez un officier encore plus brave que mon frĂšre le capitaine, et probablement aussi gueux." Et mademoiselle de Kerkabon pleurait toujours en l'embrassant, et en disant "Il se fera tuer comme mon frĂšre; il vaudrait bien mieux qu'il fĂ»t sous-diacre." L'IngĂ©nu, dans le combat, avait ramassĂ© une grosse bourse remplie de guinĂ©es, que probablement l'amiral avait laissĂ© tomber. Il ne douta pas qu'avec cette bourse il ne pĂ»t acheter toute la Basse-Bretagne, et surtout faire mademoiselle de Saint-Yves grande dame. Chacun l'exhorta de faire le voyage de Versailles pour y recevoir le prix de ses services. Le commandant, les principaux officiers le comblĂšrent de certificats. L'oncle et la tante approuvĂšrent le voyage du neveu. Il devait ĂÂȘtre, sans difficultĂ©, prĂ©sentĂ© au roi cela seul lui donnerait un prodigieux relief dans la province. Ces deux bonnes gens ajoutĂšrent Ă la bourse anglaise un prĂ©sent considĂ©rable de leurs Ă©pargnes. L'IngĂ©nu disait en lui-mĂÂȘme "Quand je verrai le roi, je lui demanderai mademoiselle de Saint-Yves en mariage et certainement il ne me refusera pas." Il partit donc aux acclamations de tout le canton, Ă©touffĂ© d'embrassements, baignĂ© des larmes de sa tante, bĂ©ni par son oncle, et se recommandant Ă la belle Saint-Yves. Chapitre huitiĂšme. L'IngĂ©nu va en cour. Il soupe en chemin avec des huguenots L'IngĂ©nu va en cour. Il soupe en chemin avec des huguenots L'IngĂ©nu prit le chemin de Saumur par le coche, parce qu'il n'y avait point alors d'autre commoditĂ©. Quand il fut Ă Saumur, il s'Ă©tonna de trouver la ville presque dĂ©serte; et de voir plusieurs familles qui dĂ©mĂ©nageaient. On lui dit que, six ans auparavant, Saumur contenait plus de quinze mille ĂÂąmes, et qu'Ă prĂ©sent il n'y en avait pas six mille. Il ne manqua pas d'en parler Ă souper dans son hĂÂŽtellerie. Plusieurs protestants Ă©taient Ă table les uns se plaignaient amĂšrement, d'autres frĂ©missaient de colĂšre, d'autres disaient en pleurant Nos dulcia linquimus arva, Nos patriam fugimus. L'IngĂ©nu, qui ne savait pas le latin, se fit expliquer ces paroles, qui signifient "nous abandonnons nos douces campagnes, nous fuyons notre patrie". "Et pourquoi fuyez-vous votre patrie, messieurs? - C'est qu'on veut que nous reconnaissions le pape. - Et pourquoi ne le reconnaĂtriez-vous pas? Vous n'avez donc point de marraines que vous vouliez Ă©pouser? Car on m'a dit que c'Ă©tait lui qui en donnait la permission. - Ah! monsieur, ce pape dit qu'il est le maĂtre du domaine des rois. - Mais, messieurs, de quelle profession ĂÂȘtes-vous? - Monsieur, nous sommes pour la plupart des drapiers et des fabricants. - Si votre pape dit qu'il est le maĂtre de vos draps et de vos fabriques, vous faites trĂšs bien de ne le pas reconnaĂtre; mais pour les rois, c'est leur affaire; de quoi vous mĂÂȘlez-vous?" Alors un petit homme noir prit la parole, et exposa trĂšs savamment les griefs de la compagnie. Il parla de la rĂ©vocation de l'Ă©dit de Nantes avec tant d'Ă©nergie, il dĂ©plora d'une maniĂšre si pathĂ©tique le sort de cinquante mille familles fugitives et de cinquante mille autres converties par les dragons, que l'IngĂ©nu Ă son tour versa des larmes. "D'oĂÂč vient donc, disait-il, qu'un si grand roi, dont la gloire s'Ă©tend jusque chez les Hurons, se prive ainsi de tant de coeurs qui l'auraient aimĂ©, et de tant de bras qui l'auraient servi? - C'est qu'on l'a trompĂ© comme les autres grands rois, rĂ©pondit, l'homme noir. On lui a fait croire que, dĂšs qu'il aurait dit un mot, tous les hommes penseraient comme lui; et qu'il nous ferait changer de religion comme son musicien Lulli fait changer en un moment les dĂ©corations de ses opĂ©ras. Non seulement il perd dĂ©jĂ cinq Ă six cent mille sujets trĂšs utiles, mais il s'en fait des ennemis; et le roi Guillaume, qui est actuellement maĂtre de l'Angleterre, a composĂ© plusieurs rĂ©giments de ces mĂÂȘmes Français qui auraient combattu pour leur monarque. "Un tel dĂ©sastre est d'autant plus Ă©tonnant que le pape rĂ©gnant, Ă qui Louis XIV sacrifie une partie de son peuple, est son ennemi dĂ©clarĂ©. Ils ont encore tous deux, depuis neuf ans, une querelle violente. Elle a Ă©tĂ© poussĂ©e si loin que la France a espĂ©rĂ© enfin de voir briser le joug qui la soumet depuis tant de siĂšcles Ă cet Ă©tranger et surtout de ne lui plus donner d'argent, ce qui est le premier mobile des affaires de ce monde. Il paraĂt donc Ă©vident qu'on a trompĂ© ce grand roi sur ses intĂ©rĂÂȘts comme sur l'Ă©tendue de son pouvoir, et qu'on a donnĂ© atteinte Ă la magnanimitĂ© de son coeur." L'IngĂ©nu, attendri de plus en plus, demanda quels Ă©taient les Français qui trompaient ainsi un monarque si cher aux Hurons. "Ce sont les jĂ©suites, lui rĂ©pondit-on; c'est surtout le pĂšre de La Chaise, confesseur de Sa MajestĂ©. Il faut espĂ©rer que Dieu les en punira un jour, et qu'ils seront chassĂ©s comme ils nous chassent. Y a-t-il un malheur Ă©gal aux nĂÂŽtres? Mons de Louvois nous envoie de tous cĂÂŽtĂ©s des jĂ©suites et des dragons. - Oh bien! messieurs, rĂ©pliqua l'IngĂ©nu, qui ne pouvait plus se contenir, je vais Ă Versailles recevoir la rĂ©compense due Ă mes services; je parlerai Ă ce mons de Louvois on m'a dit que c'est lui qui fait la guerre, de son cabinet. Je verrai le roi, je lui ferai connaĂtre la vĂ©ritĂ©; il est impossible qu'on ne se rende pas Ă cette vĂ©ritĂ© quand on la sent. Je reviendrai bientĂÂŽt pour Ă©pouser mademoiselle de Saint-Yves, et je vous prie Ă la noce." Ces bonnes gens le prirent alors pour un grand seigneur qui voyageait incognito par le coche. Quelques-uns le prirent pour le fou du roi. Il y avait Ă table un jĂ©suite dĂ©guisĂ© qui servait d'espion au rĂ©vĂ©rend pĂšre de La Chaise. Il lui rendait compte de tout, et le pĂšre de La Chaise en instruisait mons de Louvois. L'espion Ă©crivit. L'IngĂ©nu et la lettre arrivĂšrent presque en mĂÂȘme temps Ă Versailles. Chapitre neuviĂšme. ArrivĂ©e de l'IngĂ©nu Ă Versailles. Sa rĂ©ception Ă la cour ArrivĂ©e de l'IngĂ©nu Ă Versailles. Sa rĂ©ception Ă la cour L'IngĂ©nu dĂ©barque en pot de chambre dans la cour des cuisines. Il demande aux porteurs de chaise Ă quelle heure on peut voir le roi. Les porteurs lui rient au nez, tout comme avait fait l'amiral anglais. Il les traita de mĂÂȘme, il les battit; ils voulurent le lui rendre, et la scĂšne allait ĂÂȘtre sanglante s'il n'eĂ»t passĂ© un garde du corps, gentilhomme breton, qui Ă©carta la canaille. "Monsieur, lui dit le voyageur, vous me paraissez un brave homme; je suis le neveu de monsieur le prieur de Notre-Dame de la Montagne; j'ai tuĂ© des Anglais, je viens parler au roi; je vous prie de me mener dans sa chambre." Le garde, ravi de trouver un brave de sa province, qui ne paraissait pas au fait des usages de la cour, lui apprit qu'on ne parlait pas ainsi au roi, et qu'il fallait ĂÂȘtre prĂ©sentĂ© par monseigneur de Louvois. "Eh bien! menez-moi donc chez ce monseigneur de Louvois, qui sans doute me conduira chez Sa MajestĂ©. - Il est encore plus difficile, rĂ©pliqua le garde, de parler Ă monseigneur de Louvois qu'Ă Sa MajestĂ©; mais je vais vous conduire chez monsieur Alexandre, le premier commis de la guerre c'est comme si vous parliez au ministre." Ils vont donc chez ce monsieur Alexandre, premier commis, et ils ne purent ĂÂȘtre introduits; il Ă©tait en affaire avec une dame de la cour, et il y avait ordre de ne laisser entrer personne. "Eh bien! dit le garde, il n'y a rien de perdu; allons chez le premier commis de monsieur Alexandre c'est comme si vous parliez Ă monsieur Alexandre lui-mĂÂȘme." Le Huron, tout Ă©tonnĂ©, le suit; ils restent ensemble une demi-heure dans une petite antichambre. "Qu'est-ce donc que tout ceci? dit l'IngĂ©nu; est-ce que tout le monde est invisible dans ce pays-ci? Il est bien plus aisĂ© de se battre en Basse-Bretagne contre des Anglais que de rencontrer Ă Versailles les gens Ă qui on a affaire." Il se dĂ©sennuya en racontant ses amours Ă son compatriote. Mais l'heure en sonnant rappela le garde du corps Ă son poste. Il se promirent de se revoir le lendemain, et l'IngĂ©nu resta encore une autre demi-heure dans l'antichambre, en rĂÂȘvant Ă mademoiselle de Saint-Yves, et Ă la difficultĂ© de parler aux rois et aux premiers commis. Enfin le patron parut. "Monsieur, lui dit l'IngĂ©nu, si j'avais attendu pour repousser les Anglais aussi longtemps que vous m'avez fait attendre mon audience, ils ravageraient actuellement la Basse-Bretagne tout Ă leur aise." Ces paroles frappĂšrent le commis. Il dit enfin au Breton "Que demandez-vous? - RĂ©compense, dit l'autre; voici mes titres." Il lui Ă©tala tous ses certificats. Le commis lut, et lui dit que probablement on lui accorderait la permission d'acheter une lieutenance. "Moi! que je donne de l'argent pour avoir repoussĂ© les Anglais? que je paye le droit de me faire tuer pour vous, pendant que vous donnez ici vos audiences tranquillement? Je crois que vous voulez rire. Je veux une compagnie de cavalerie pour rien; je veux que le roi fasse sortir mademoiselle de Saint-Yves du couvent,. et qu'il me la donne par mariage; je veux parler au roi en faveur de cinquante mille familles que je prĂ©tends lui rendre. En un mot, je veux ĂÂȘtre utile; qu'on m'emploie et qu'on m'avance. - Comment vous nommez-vous, monsieur; qui parlez si haut? - Oh! oh! reprit l'IngĂ©nu, vous n'avez donc pas lu mes certificats? C'est donc ainsi qu'on en use? Je m'appelle Hercule de Kerkabon; je suis baptisĂ©, je loge au Cadran bleu, et je me plaindrai de vous au roi." Le commis conclut comme les gens de Saumur, qu'il n'avait pas la tĂÂȘte bien saine, et n'y fit pas grande attention. Ce mĂÂȘme jour, le rĂ©vĂ©rend pĂšre La Chaise, confesseur de Louis XIV, avait reçu la lettre de son espion, qui accusait le Breton Kerkabon de favoriser dans son coeur les huguenots, et de condamner la conduite des jĂ©suites. Monsieur de Louvois, de son cĂÂŽtĂ©, avait reçu une lettre de l'interrogant bailli, qui dĂ©peignait l'IngĂ©nu comme un garnement qui voulait brĂ»ler les couvents et enlever les filles. L'IngĂ©nu, aprĂšs s'ĂÂȘtre promenĂ© dans les jardins de Versailles, oĂÂč il s'ennuya, aprĂšs avoir soupĂ© en Huron et en Bas-Breton, s'Ă©tait couchĂ© dans la douce espĂ©rance de voir le roi le lendemain, d'obtenir mademoiselle de Saint-Yves en mariage, d'avoir au moins une compagnie de cavalerie, et de faire cesser la persĂ©cution contre les huguenots. Il se berçait de ces flatteuses idĂ©es, quand la marĂ©chaussĂ©e entra dans sa chambre. Elle se saisit d'abord de son fusil Ă deux coups et de son grand sabre. On fit un inventaire de son argent comptant, et on le mena dans le chĂÂąteau que fit construire le roi Charles V, fils de Jean II, auprĂšs de la rue St Antoine, Ă la porte des Tournelles. Quel Ă©tait en chemin l'Ă©tonnement de l'IngĂ©nu, je vous le laisse Ă penser. Il crut d'abord que c'Ă©tait un rĂÂȘve. Il resta dans l'engourdissement, puis tout Ă coup transportĂ© d'une fureur qui redoublait ses forces, il prend Ă la gorge deux de ses conducteurs; qui Ă©taient avec lui dans le carrosse, les jette par la portiĂšre, se jette aprĂšs eux, et entraĂne le troisiĂšme, qui voulait le retenir. Il tombe de l'effort, on le lie, on le remonte dans la voiture. "VoilĂ donc, disait-il, ce que l'on gagne Ă chasser les Anglais de la Basse-Bretagne! Que dirais-tu, belle Saint-Yves, si tu me voyais dans cet Ă©tat?" On arrive enfin au gĂte qui lui Ă©tait destinĂ©. On le porte en silence dans la chambre oĂÂč il devait ĂÂȘtre enfermĂ©, comme un mort qu'on porte dans un cimetiĂšre. Cette chambre Ă©tait dĂ©jĂ occupĂ©e par un vieux solitaire de Port-Royal, nommĂ© Gordon, qui y languissait depuis deux ans. "Tenez, lui dit le chef des sbires, voilĂ de la compagnie que je vous amĂšne"; et sur-le-champ on referma les Ă©normes verrous de la porte Ă©paisse, revĂÂȘtue de larges barres. Les deux captifs restĂšrent sĂ©parĂ©s de l'univers entier. Chapitre dixiĂšme. L'IngĂ©nu enfermĂ© Ă la bastille avec un jansĂ©niste L'IngĂ©nu enfermĂ© Ă la bastille avec un jansĂ©niste M. Gordon Ă©tait un vieillard frais et serein, qui savait deux grandes choses supporter l'adversitĂ©, et consoler les malheureux. Il s'avança d'un air ouvert et compatissant vers son compagnon, et lui dit en l'embrassant "Qui que vous soyez, qui venez partager mon tombeau, soyez sĂ»r que je m'oublierai toujours moi-mĂÂȘme pour adoucir vos tourments dans l'abĂme infernal oĂÂč nous sommes plongĂ©s. Adorons la Providence qui nous y a conduits, souffrons en paix, et espĂ©rons." Ces paroles firent sur l'ĂÂąme de l'IngĂ©nu l'effet des gouttes d'Angleterre, qui rappellent un mourant Ă la vie, et lui font entr'ouvrir des yeux Ă©tonnĂ©s. AprĂšs les premiers compliments, Gordon, sans le presser de lui apprendre la cause de son malheur, lui inspira, par la douceur de son entretien, et par cet intĂ©rĂÂȘt que prennent deux malheureux l'un Ă l'autre, le dĂ©sir d'ouvrir son coeur et de dĂ©poser le fardeau qui l'accablait, mais il ne pouvait deviner le sujet de son malheur; cela lui paraissait un effet sans cause, et le bonhomme Gordon Ă©tait aussi Ă©tonnĂ© que lui-mĂÂȘme. "Il faut, dit le jansĂ©niste au Huron, que Dieu ait de grands desseins sur vous, puisqu'il vous a conduit du lac Ontario en Angleterre et en France, qu'il vous a fait baptiser en Basse-Bretagne, et qu'il vous a mis ici pour votre salut. - Ma foi, rĂ©pondit l'IngĂ©nu, je crois que le diable s'est mĂÂȘlĂ© seul de ma destinĂ©e. Mes compatriotes d'AmĂ©rique ne m'auraient jamais traitĂ© avec la barbarie que j'Ă©prouve ils n'en ont pas d'idĂ©e. On les appelle sauvages; ce sont des gens de bien grossiers, et les hommes de ce pays-ci sont des coquins raffinĂ©s. Je suis, Ă la vĂ©ritĂ©, bien surpris d'ĂÂȘtre venu d'un autre monde pour ĂÂȘtre enfermĂ© dans celui-ci sous quatre verrous avec un prĂÂȘtre; mais je fais rĂ©flexion au nombre prodigieux d'hommes qui partent d'un hĂ©misphĂšre pour aller se faire tuer dans l'autre, ou qui font naufrage en chemin, et qui sont mangĂ©s des poissons. Je ne vois pas les gracieux desseins de Dieu sur tous ces gens-lĂ ." On leur apporta Ă dĂner par un guichet. La conversation roula sur la Providence, sur les lettres de cachet, et sur l'art de ne pas succomber aux disgrĂÂąces auxquelles tout homme est exposĂ© dans ce monde. "Il y a deux ans que je suis ici, dit le vieillard, sans autre consolation que moi-mĂÂȘme et des livres; je n'ai pas eu un moment de mauvaise humeur. - Ah! monsieur Gordon, s'Ă©cria l'IngĂ©nu, vous n'aimez donc pas votre marraine? Si vous connaissiez comme moi mademoiselle de Saint-Yves, vous seriez au dĂ©sespoir." A ces mots il ne put retenir ses larmes, et il se sentit alors un peu moins oppressĂ©. "Mais, dit-il, pourquoi donc les larmes soulagent-elles? Il me semble qu'elles devraient faire un effet contraire. - Mon fils, tout est physique en nous, dit le bon vieillard; toute sĂ©crĂ©tion fait du bien au corps; et tout ce qui le soulage soulage l'ĂÂąme; nous sommes les machines de la Providence." L'IngĂ©nu, qui, comme nous l'avons dit plusieurs fois, avait un grand fonds d'esprit, fit de profondes rĂ©flexions sur cette idĂ©e, dont il semblait qu'il avait la semence en lui-mĂÂȘme. AprĂšs quoi il demanda Ă son compagnon pourquoi sa machine Ă©tait depuis deux ans sous quatre verrous. "Par la grĂÂące efficace, rĂ©pondit Gordon; je passe pour jansĂ©niste j'ai connu Arnauld et Nicole; les jĂ©suites nous ont persĂ©cutĂ©s. Nous croyons que le pape n'est qu'un Ă©vĂÂȘque comme un autre; et c'est pour cela que le pĂšre de La Chaise a obtenu du roi, son pĂ©nitent, un ordre de me ravir, sans aucune formalitĂ© de justice, le bien le plus prĂ©cieux des hommes, la libertĂ©. - VoilĂ qui est bien Ă©trange, dit l'IngĂ©nu; tous les malheureux que j'ai rencontrĂ©s ne le sont qu'Ă cause du pape. A l'Ă©gard de votre grĂÂące efficace, je vous avoue que je n'y entends rien; mais je regarde comme une grande grĂÂące que Dieu m'ait fait trouver dans mon malheur un homme comme vous, qui verse dans mon coeur des consolations dont je me croyais incapable." Chaque jour la conversation devenait plus intĂ©ressante et plus instructive. Les ĂÂąmes des deux captifs s'attachaient l'une Ă l'autre. Le vieillard savait beaucoup, et le jeune homme voulait beaucoup apprendre. Au bout d'un mois il Ă©tudia la gĂ©omĂ©trie; il la dĂ©vorait. Gordon lui fit lire la Physique de Rohault, qui Ă©tait encore Ă la mode, et il eut le bon esprit de n'y trouver que des incertitudes. Ensuite il lut le premier volume de la Recherche de la vĂ©ritĂ©. Cette nouvelle lumiĂšre l'Ă©claira. "Quoi! dit-il, notre imagination et nos sens nous trompent Ă ce point! quoi! les objets ne forment point nos idĂ©es, et nous ne pouvons nous les donner nous-mĂÂȘmes!" Quand il eut lu le second volume, il ne fut plus si content, et il conclut qu'il est plus aisĂ© de dĂ©truire que de bĂÂątir. Son confrĂšre, Ă©tonnĂ© qu'un jeune ignorant fĂt cette rĂ©flexion, qui n'appartient qu'aux ĂÂąmes exercĂ©es, conçut une grande idĂ©e de son esprit, et s'attacha Ă lui davantage. "Votre Malebranche, lui dit un jour l'IngĂ©nu, me paraĂt avoir Ă©crit la moitiĂ© de son livre avec sa raison, et l'autre avec son imagination et ses prĂ©jugĂ©s." Quelques jours aprĂšs, Gordon lui demanda "Que pensez-vous donc de l'ĂÂąme, de la maniĂšre dont nous recevons nos idĂ©es? de notre volontĂ©, de la grĂÂące, du libre arbitre? - Rien, lui repartit l'IngĂ©nu; si je pensais quelque chose, c'est que nous sommes sous la puissance de l'Etre Ă©ternel comme les astres et les Ă©lĂ©ments; qu'il fait tout en nous, que nous sommes de petites roues de la machine immense dont il est l'ĂÂąme; qu'il agit par des lois gĂ©nĂ©rales, et non par des vues particuliĂšres cela seul me paraĂt intelligible; tout le reste est pour moi un abĂme de tĂ©nĂšbres. - Mais, mon fils, ce serait faire Dieu auteur du pĂ©chĂ©! - Mais, mon pĂšre, votre grĂÂące efficace ferait Dieu auteur du pĂ©chĂ© aussi car il est certain que tous ceux Ă qui cette grĂÂące serait refusĂ©e pĂ©cheraient; et qui nous livre au mal n'est-il pas l'auteur du mal?" Cette naĂÂŻvetĂ© embarrassait fort le bonhomme; il sentait qu'il faisait de vains efforts pour se tirer de ce bourbier; et il entassait tant de paroles qui paraissaient avoir du sens et qui n'en avaient point dans le goĂ»t de la prĂ©motion physique, que l'IngĂ©nu en avait pitiĂ©. Cette question tenait Ă©videmment Ă l'origine du bien et du mal; et alors il fallait que le pauvre Gordon passĂÂąt en revue la boĂte de Pandore, l'oeuf d'Orosmade percĂ© par Arimane, l'inimitiĂ© entre Typhon et Osiris, et enfin le pĂ©chĂ© originel, et ils couraient l'un et l'autre dans cette nuit profonde, sans jamais se rencontrer. Mais enfin ce roman de l'ĂÂąme dĂ©tournait leur vue de la contemplation de leur propre misĂšre, et, par un charme Ă©trange, la foule des calamitĂ©s rĂ©pandues sur l'univers diminuait la sensation de leurs peines ils n'osaient se plaindre quand tout souffrait. Mais, dans le repos de la nuit, l'image de la belle Saint-Yves effaçait dans l'esprit de son amant toutes les idĂ©es de mĂ©taphysique et de morale. Il se rĂ©veillait les yeux mouillĂ©s de larmes; et le vieux jansĂ©niste oubliait sa grĂÂące efficace, et l'abbĂ© de Saint-Cyran, et JansĂ©nius, pour consoler un jeune homme qu'il croyait en pĂ©chĂ© mortel. AprĂšs leurs lectures, aprĂšs leurs raisonnements, ils parlaient encore de leurs aventures; et, aprĂšs en avoir inutilement parlĂ©, ils lisaient ensemble ou sĂ©parĂ©ment. L'esprit du jeune homme se fortifiait de plus en plus. Il serait surtout allĂ© trĂšs loin en mathĂ©matiques sans les distractions que lui donnait mademoiselle de Saint-Yves. Il lut des histoires, elles l'attristĂšrent. Le monde lui parut trop mĂ©chant et trop misĂ©rable. En effet, l'histoire n'est que le tableau des crimes et des malheurs. La foule des hommes innocents et paisibles disparaĂt toujours sur ces vastes thĂ©ĂÂątres. Les personnages ne sont que des ambitieux pervers. Il semble que l'histoire ne plaise que comme la tragĂ©die, qui languit si elle n'est animĂ©e par les passions, les forfaits et les grandes infortunes. Il faut armer Clio du poignard comme MelpomĂšne. Quoique l'histoire de France soit remplie d'horreurs, ainsi que toutes les autres, cependant elle lui parut si dĂ©goĂ»tante dans ses commencements, si sĂšche dans son milieu, si petite enfin, mĂÂȘme du temps de Henri IV, toujours si dĂ©pourvue de grands monuments, si Ă©trangĂšre Ă ces belles dĂ©couvertes qui ont illustrĂ© d'autres nations, qu'il Ă©tait obligĂ© de lutter contre l'ennui pour lire tous ces dĂ©tails de calamitĂ©s obscures resserrĂ©es dans un coin du monde. Gordon pensait comme lui. Tous deux riaient de pitiĂ© quand il Ă©tait question des souverains de Fezensac, de Fesansaguet, et d'Astarac. Cette Ă©tude en effet en serait bonne que pour leurs hĂ©ritiers, s'ils en avaient. Les beaux siĂšcles de la rĂ©publique romaine le rendirent quelque temps indiffĂ©rent pour le reste de la terre. Le spectacle de Rome victorieuse et lĂ©gislatrice des nations occupait son ĂÂąme entiĂšre. Il s'Ă©chauffait en contemplant ce peuple qui fut gouvernĂ© sept cents ans par l'enthousiasme de la libertĂ© et de la gloire. Ainsi se passaient les jours, les semaines, les mois; et il se serait cru heureux dans le sĂ©jour du dĂ©sespoir, s'il n'avait point aimĂ©. Son bon naturel s'attendrissait encore sur le bon prieur de Notre-Dame de la Montagne, et sur la sensible Kerkabon. "Que penseront-ils, rĂ©pĂ©tait-il souvent quand ils n'auront point de mes nouvelles? Ils me croiront un ingrat." Cette idĂ©e le tourmentait; il plaignait ceux qui l'aimaient, beaucoup plus qu'il ne se plaignait lui-mĂÂȘme. Chapitre onziĂšme. Comment l'IngĂ©nu dĂ©veloppe son gĂ©nie Comment l'IngĂ©nu dĂ©veloppe son gĂ©nie La lecture agrandit l'ĂÂąme, et un ami Ă©clairĂ© la console. Notre captif jouissait de ces deux avantages qu'il n'avait pas soupçonnĂ©s auparavant. "Je serais tentĂ©, dit-il, de croire aux mĂ©tamorphoses, car j'ai Ă©tĂ© changĂ© de brute en homme." Il se forma une bibliothĂšque choisie d'une partie de son argent dont on lui permettait de disposer. Son ami l'encouragea Ă mettre par Ă©crit ses rĂ©flexions. Voici ce qu'il Ă©crivit sur l'histoire ancienne "Je m'imagine que les nations ont Ă©tĂ© longtemps comme moi, qu'elles ne se sont instruites que fort tard, qu'elles n'ont Ă©tĂ© occupĂ©es pendant des siĂšcles que du moment prĂ©sent qui coulait, trĂšs peu du passĂ©, et jamais de l'avenir. J'ai parcouru cinq ou six cents lieues du Canada, je n'y ai pas trouvĂ© un seul monument; personne n'y sait rien de ce qu'a fait son bisaĂÂŻeul. Ne serait-ce pas lĂ l'Ă©tat naturel de l'homme? L'espĂšce de ce continent-ci me paraĂt supĂ©rieure Ă celle de l'autre. Elle a augmentĂ© son ĂÂȘtre depuis plusieurs siĂšcles par les arts et par les connaissances. Est-ce parce qu'elle a de la barbe au menton, et que Dieu a refusĂ© la barbe aux AmĂ©ricains? Je ne le crois pas car je vois que les Chinois n'ont presque point de barbe, et qu'ils cultivent les arts depuis plus de cinq mille annĂ©es. En effet, s'ils ont plus de quatre mille ans d'annales, il faut bien que la nation ait Ă©tĂ© rassemblĂ©e et florissante depuis plus de cinq cents siĂšcles. "Une chose me frappe surtout dans cette ancienne histoire de la Chine, c'est que presque tout y est vraisemblable et naturel. Je l'admire en ce qu'il n'y a rien de merveilleux. "Pourquoi toutes les autres nations se sont-elles donnĂ© des origines fabuleuses? Les anciens chroniqueurs de l'histoire de France, qui ne sont pas fort anciens, font venir les Français d'un Francus, fils d'Hector; les Romains se disaient issus d'un Phrygien, quoiqu'il n'y eĂ»t pas dans leur langue un seul mot qui eĂ»t le moindre rapport Ă la langue de Phrygie; les dieux avaient habitĂ© dix mille ans en Egypte, et les diables, en Scythie, oĂÂč ils avaient engendrĂ© les Huns. Je ne vois avant Thucydide que des romans semblables aux Amadis, et beaucoup moins amusants. Ce sont partout des apparitions, des oracles, des prodiges, des sortilĂšges, des mĂ©tamorphoses, des songes expliquĂ©s, et qui font la destinĂ©e des plus grands empires et des plus petits Etats ici des bĂÂȘtes qui parlent, lĂ des bĂÂȘtes qu'on adore, des dieux transformĂ©s en hommes, et des hommes transformĂ©s en dieux. Ah! s'il nous faut des fables, que ces fables soient du moins l'emblĂšme de la vĂ©ritĂ©! J'aime les fables des philosophes, je ris de celles des enfants, et je hais celles des imposteurs." Il tomba un jour sur une histoire de l'empereur Justinien. On y lisait que des apĂ©deutes de Constantinople avaient donnĂ©, en trĂšs mauvais grec, un Ă©dit contre le plus grand capitaine du siĂšcle, parce que ce hĂ©ros avait prononcĂ© ces paroles dans la chaleur de la conversation "La vĂ©ritĂ© luit de sa propre lumiĂšre, et on n'Ă©claire pas les esprits avec les flammes des bĂ»chers." Les apĂ©deutes assurĂšrent que cette proposition Ă©tait hĂ©rĂ©tique, sentant l'hĂ©rĂ©sie, et que l'axiome contraire Ă©tait catholique, universel, et grec "On n'Ă©claire les esprits qu'avec la flamme des bĂ»chers, et la vĂ©ritĂ© ne saurait luire de sa propre lumiĂšre." Ces linostoles condamnĂšrent ainsi plusieurs discours du capitaine, et donnĂšrent un Ă©dit. "Quoi! s'Ă©cria l'IngĂ©nu, des Ă©dits rendus par ces gens-lĂ ! - Ce ne sont point des Ă©dits, rĂ©pliqua Gordon, ce sont des contrĂ©dits dont tout le monde se moquait Ă Constantinople, et l'empereur tout le premier c'Ă©tait un sage prince, qui avait su rĂ©duire les apĂ©deutes linostoles Ă ne pouvoir faire que du bien. Il savait que ces messieurs-lĂ et plusieurs autres pastophores avaient lassĂ© de contrĂ©dits la patience des empereurs ses prĂ©dĂ©cesseurs en matiĂšre plus grave. - Il fit fort bien, dit l'IngĂ©nu; on doit soutenir les pastophores et les contenir." Il mit par Ă©crit beaucoup d'autres rĂ©flexions qui Ă©pouvantĂšrent le vieux Gordon. "Quoi! dit-il en lui-mĂÂȘme, j'ai consumĂ© cinquante ans Ă m'instruire, et je crains de ne pouvoir atteindre au bon sens naturel de cet enfant presque sauvage! je tremble d'avoir laborieusement fortifiĂ© des prĂ©jugĂ©s; il n'Ă©coute que la simple nature." Le bonhomme avait quelques-uns de ces petits livres de critique, de ces brochures pĂ©riodiques oĂÂč des hommes incapables de rien produire dĂ©nigrent les productions des autres, oĂÂč les VisĂ© insultent aux Racine, et les Faydit aux FĂ©nelon. L'IngĂ©nu en parcourut quelques-uns. "Je les compare, disait-il, Ă certains moucherons qui vont dĂ©poser leurs oeufs dans le derriĂšre des plus beaux chevaux cela ne les empĂÂȘche pas de courir." A peine les deux philosophes daignĂšrent jeter les yeux sur ces excrĂ©ments de la littĂ©rature. Ils lurent bientĂÂŽt ensemble les Ă©lĂ©ments de l'astronomie; l'IngĂ©nu fit venir des sphĂšres ce grand spectacle le ravissait. "Qu'il est dur, disait-il, de ne commencer Ă connaĂtre le ciel que lorsqu'on me ravit le droit de le contempler! Jupiter et Saturne roulent dans ces espaces immenses; des millions de soleils Ă©clairent des milliards de mondes; et dans le coin de terre oĂÂč je suis jetĂ©, il se trouve des ĂÂȘtres qui me privent, moi ĂÂȘtre voyant et pensant, de tous ces mondes oĂÂč ma vue pourrait atteindre, et de celui oĂÂč Dieu m'a fait naĂtre! La lumiĂšre faite pour tout l'univers est perdue pour moi. On ne me la cachait pas dans l'horizon septentrional oĂÂč j'ai passĂ© mon enfance et ma jeunesse. Sans vous, mon cher Gordon, je serais ici dans le nĂ©ant." Chapitre douziĂšme. Ce que l'IngĂ©nu pense des piĂšces de thĂ©ĂÂątre Ce que l'IngĂ©nu pense des piĂšces de thĂ©ĂÂątre Le jeune IngĂ©nu ressemblait Ă un de ces arbres vigoureux qui, nĂ©s dans un sol ingrat, Ă©tendent en peu de temps leurs racines et leurs branches quand ils sont transplantĂ©s dans un terrain favorable; et il Ă©tait bien extraordinaire qu'une prison fĂ»t ce terrain. Parmi les livres qui occupaient le loisir des deux captifs, il se trouva des poĂ©sies, des traductions de tragĂ©dies grecques, quelques piĂšces du thĂ©ĂÂątre français. Les vers qui parlaient d'amour portĂšrent Ă la fois dans l'ĂÂąme de l'IngĂ©nu le plaisir et la douleur. Ils lui parlaient tous de sa chĂšre Saint-Yves. La fable des Deux pigeons lui perça le coeur; il Ă©tait bien loin de pouvoir revenir Ă son colombier. MoliĂšre l'enchanta. Il lui faisait connaĂtre les moeurs de Paris et du genre humain. "A laquelle de ses comĂ©dies donnez-vous la prĂ©fĂ©rence? - Au Tartuffe, sans difficultĂ©. - Je pense comme vous, dit Gordon; c'est un tartuffe qui m'a plongĂ© dans ce cachot, et peut-ĂÂȘtre ce sont des tartuffes qui ont fait votre malheur. Comment trouvez-vous ces tragĂ©dies grecques? - Bonnes pour des Grecs, dit l'IngĂ©nu." Mais quand il lut l'IphigĂ©nie moderne, PhĂšdre, Andromaque, Athalie, il fut en extase, il soupira, il versa des larmes, il les sut par coeur sans avoir envie de les apprendre. "Lisez Rodogune, lui dit Gordon; on dit que c'est le chef-d'oeuvre du thĂ©ĂÂątre; les autres piĂšces qui vous ont fait tant de plaisir sont peu de chose en comparaison." Le jeune homme, dĂšs la premiĂšre page, lui dit "Cela n'est pas du mĂÂȘme auteur. - A quoi le voyez-vous? - Je n'en sais rien encore; mais ces vers-lĂ ne vont ni Ă mon oreille ni Ă mon coeur. - Oh! ce n'est rien que les vers", rĂ©pliqua Gordon. L'IngĂ©nu rĂ©pondit "Pourquoi donc en faire?" AprĂšs avoir lu trĂšs attentivement la piĂšce, sans autre dessein que celui d'avoir du plaisir, il regardait son ami avec des yeux secs et Ă©tonnĂ©s, et ne savait que dire. Enfin, pressĂ© de rendre compte de ce qu'il avait senti, voici ce qu'il rĂ©pondit "Je n'ai guĂšre entendu le commencement; j'ai Ă©tĂ© rĂ©voltĂ© du milieu; la derniĂšre scĂšne m'a beaucoup Ă©mu, quoiqu'elle me paraisse peu vraisemblable je ne me suis intĂ©ressĂ© pour personne, et je n'ai pas retenu vingt vers, moi qui les retiens tous quand ils me plaisent. - Cette piĂšce passe pourtant pour la meilleure que nous ayons. - Si cela est, rĂ©pliqua-t-il, elle est peut-ĂÂȘtre comme bien des gens qui ne mĂ©ritent pas leurs places. AprĂšs tout, c'est ici une affaire de goĂ»t; le mien ne doit pas encore ĂÂȘtre formĂ©; je peux me tromper; mais vous savez que je suis accoutumĂ© Ă dire ce que je pense, ou plutĂÂŽt ce que je sens. Je soupçonne qu'il y a souvent de l'illusion; de la mode, du caprice, dans les jugements des hommes. J'ai parlĂ© d'aprĂšs la nature; il se peut que chez moi la nature soit trĂšs imparfait; mais il se peut aussi qu'elle soit quelquefois peu consultĂ©e par la plupart des hommes." Alors il rĂ©cita des vers d'IphigĂ©nie, dont il Ă©tat plein; et quoiqu'il ne dĂ©clamĂÂąt pas bien, il y mit tant de vĂ©ritĂ© et d'onction qu'il fit pleurer le vieux jansĂ©niste. Il lut ensuite Cinna; il ne pleura point, mais il admira. Chapitre treiziĂšme. La belle Saint-Yves va Ă Versailles La belle Saint-Yves va Ă Versailles Pendant que notre infortunĂ© s'Ă©clairait plus qu'il ne se consolait; pendant que son gĂ©nie, Ă©touffĂ© depuis si longtemps, se dĂ©ployait avec tant de rapiditĂ© et de force; pendant que la nature, qui se perfectionnait en lui, le vengeait des outrages de la fortune, que devinrent monsieur le prieur et sa bonne soeur, et la belle recluse Saint-Yves? Le premier mois, on fut inquiet; et au troisiĂšme on fut plongĂ© dans la douleur. Les fausses conjectures, les bruits mal fondĂ©s, alarmĂšrent. Au bout de six mois, on le crut mort. Enfin monsieur et mademoiselle de Kerkabon apprirent, par une ancienne lettre qu'un garde du roi avait Ă©crite en Bretagne, qu'un jeune homme, semblable Ă l'IngĂ©nu Ă©tait arrivĂ© un soir Ă Versailles, mais qu'il avait Ă©tĂ© enlevĂ© pendant la nuit, et que depuis ce temps personne n'en avait entendu parler. "HĂ©las! dit mademoiselle de Kerkabon, notre neveu aura fait quelque sottise, et se sera attirĂ© de fĂÂącheuses affaires. Il est jeune, il est Bas-Breton, il ne peut savoir comme on doit se comporter Ă la cour. Mon cher frĂšre, je n'ai jamais vu Versailles ni Paris; voici une belle occasion, nous retrouverons peut-ĂÂȘtre notre pauvre neveu c'est le fils de notre frĂšre; notre devoir est de le secourir. Qui sait si nous ne pourrons point parvenir enfin Ă le faire sous-diacre, quand la fougue de la jeunesse sera amortie? Il avait beaucoup de dispositions pour les sciences. Vous souvenez-vous comme il raisonnait sur l'Ancien et sur le Nouveau Testament? Nous sommes responsables de son ĂÂąme; c'est nous qui l'avons fait baptiser; sa chĂšre maĂtresse Saint-Yves passe les journĂ©es Ă pleurer. En vĂ©ritĂ© il faut aller Ă Paris. S'il est cachĂ© dans quelqu'une de ces vilaines maisons de joie dont on m'a fait tant de rĂ©cits, nous l'en tirerons." Le prieur fut touchĂ© des discours de sa soeur. Il alla trouver l'Ă©vĂÂȘque de Saint-Malo; qui avait baptisĂ© le Huron, et lui demanda sa protection et ses conseils. Le prĂ©lat approuva le voyage. Il donna au prieur des lettres de recommandation pour le pĂšre de La Chaise, confesseur du roi, qui avait la premiĂšre dignitĂ© du royaume, pour l'archevĂÂȘque de Paris Harlay, et pour l'Ă©vĂÂȘque de Meaux Bossuet. Enfin le frĂšre et la soeur partirent; mais, quand ils furent arrivĂ©s Ă Paris, ils se trouvĂšrent Ă©garĂ©s comme dans un vaste labyrinthe, sans fil et sans issue. Leur fortune Ă©tait mĂ©diocre, il leur fallait tous les jours des voitures pour aller Ă la dĂ©couverte, et ils ne dĂ©couvraient rien. Le prieur se prĂ©senta chez le rĂ©vĂ©rend pĂšre de La Chaise il Ă©tait avec mademoiselle Du Tron, et ne pouvait donner audience Ă des prieurs. Il alla Ă la porte de l'archevĂÂȘque le prĂ©lat Ă©tait enfermĂ© avec la belle madame de LesdiguiĂšres pour les affaires de l'Eglise. Il courut Ă la maison de campagne de l'Ă©vĂÂȘque de Meaux celui-ci examinait, avec mademoiselle de MaulĂ©on, l'amour mystique de madame Guyon. Cependant il parvint Ă se faire entendre de ces deux prĂ©lats; tous deux lui dĂ©clarĂšrent qu'ils ne pouvaient se mĂÂȘler de son neveu, attendu qu'il n'Ă©tait pas sous-diacre. Enfin il vit le jĂ©suite; celui-ci le reçut Ă bras ouverts, lui protesta qu'il avait toujours eu pour lui une estime particuliĂšre, ne l'ayant jamais connu. Il jura que la SociĂ©tĂ© avait toujours Ă©tĂ© attachĂ©e aux Bas-Bretons. "Mais, dit-il, votre neveu n'aurait-il pas le malheur d'ĂÂȘtre huguenot? - Non, assurĂ©ment, mon rĂ©vĂ©rend pĂšre. - Serait-il point jansĂ©niste? - Je puis assurer Ă Votre RĂ©vĂ©rence qu'Ă peine est-il chrĂ©tien il y a environ onze mois que nous l'avons baptisĂ©. - VoilĂ qui est bien, voilĂ qui est bien; nous aurons soin de lui. Votre bĂ©nĂ©fice est-il considĂ©rable? - Oh! fort peu de chose, et mon neveu nous coĂ»te beaucoup. - Y a-t-il quelques jansĂ©nistes dans le voisinage? Prenez bien garde, mon cher monsieur le prieur; ils sont plus dangereux que les huguenots et les athĂ©es. - Mon rĂ©vĂ©rend pĂšre, nous n'en avons point; on ne sait ce que c'est que le jansĂ©nisme Ă Notre-Dame de la Montagne. - Tant mieux; allez, il n'y a rien que je ne fasse pour vous." Il congĂ©dia affectueusement le prieur, et n'y pensa plus. Le temps s'Ă©coulait, le prieur et la bonne soeur se dĂ©sespĂ©raient. Cependant le maudit bailli pressait le mariage de son grand benĂÂȘt de fils avec la belle Saint-Yves, qu'on avait fait sortir exprĂšs du couvent. Elle aimait toujours son cher filleul autant qu'elle dĂ©testait le mari qu'on lui prĂ©sentait. L'affront d'avoir Ă©tĂ© mise dans un couvent augmentait sa passion; l'ordre d'Ă©pouser le fils du bailli y mettait le comble. Les regrets, la tendresse, et l'horreur bouleversaient son ĂÂąme. L'amour, comme on sait, est bien plus ingĂ©nieux et plus hardi dans une jeune fille que l'amitiĂ© ne l'est dans un vieux prieur et dans une tante de quarante-cinq ans passĂ©s. De plus, elle s'Ă©tait bien formĂ©e dans son couvent par les romans qu'elle avait lus Ă la dĂ©robĂ©e. La belle Saint-Yves se souvenait de la lettre qu'un garde du corps avait Ă©crite en Basse-Bretagne, et dont on avait parlĂ© dans la province. Elle rĂ©solut d'aller elle-mĂÂȘme prendre des informations Ă Versailles; de se jeter aux pieds des ministres si son mari Ă©tait en prison, comme on le disait, et d'obtenir justice pour lui. Je ne sais quoi l'avertissait secrĂštement qu'Ă la cour on ne refuse rien Ă une jolie fille. Mais elle ne savait pas ce qu'il en coĂ»tait. Sa rĂ©solution prise, elle est consolĂ©e, elle est tranquille, elle ne rebute plus son sot prĂ©tendu; elle accueille le dĂ©testable beau-pĂšre, caresse son frĂšre, rĂ©pand l'allĂ©gresse dans la maison; puis, le jour destinĂ© Ă la cĂ©rĂ©monie, elle part secrĂštement Ă quatre heures du matin avec ses petits prĂ©sents de noce, et tout ce qu'elle a pu rassembler. Ses mesures Ă©taient si bien prises qu'elle Ă©tait dĂ©jĂ Ă plus de dix lieues lorsqu'on entra dans sa chambre, vers le midi. La surprise et la consternation furent grandes. L'interrogant bailli fit ce jour-lĂ plus de questions qu'il n'en avait faites dans toute la semaine; le mari resta plus sot qu'il ne l'avait jamais Ă©tĂ©. L'abbĂ© de Saint-Yves, en colĂšre, prit le parti de courir aprĂšs sa soeur. Le bailli et son fils voulurent l'accompagner. Ainsi la destinĂ©e conduisait Ă Paris presque tout ce canton de la Basse-Bretagne. La belle Saint-Yves se doutait bien qu'on la suivrait. Elle Ă©tait Ă cheval; elle s'informait adroitement des courriers s'ils n'avaient point rencontrĂ© un gros abbĂ©, un Ă©norme bailli, et un jeune benĂÂȘt, qui couraient sur le chemin de Paris. Ayant appris au troisiĂšme jour qu'ils n'Ă©taient pas loin, elle prit une route diffĂ©rente, et eut assez d'habiletĂ© et de bonheur pour arriver Ă Versailles tandis qu'on la cherchait inutilement dans Paris. Mais comment se conduire Ă Versailles? Jeune, belle, sans conseil, sans appui, inconnue, exposĂ©e Ă tout, comment oser chercher un garde du roi? Elle imagina de s'adresser Ă un jĂ©suite du bas Ă©tage; il y en avait pour toutes les conditions de la vie, comme Dieu, disaient-ils, a donnĂ© diffĂ©rentes nourritures aux diverses espĂšces d'animaux. Il avait donnĂ© au roi son confesseur, que tous les solliciteurs de bĂ©nĂ©fices appelaient le chef de l'Eglise gallicane; ensuite venaient les confesseurs des princesses; les ministres n'en avaient point ils n'Ă©taient pas si sots. Il y avait les jĂ©suites du grand commun, et surtout les jĂ©suites des femmes de chambre par lesquelles on savait les secrets des maĂtresses; et ce n'Ă©tait pas un petit emploi. La belle Saint-Yves s'adressa Ă un de ces derniers, qui s'appelait le pĂšre Tout-Ă -tous. Elle se confessa Ă lui, lui exposa ses aventures, son Ă©tat, son danger, et le conjura de la loger chez quelque bonne dĂ©vote qui la mĂt Ă l'abri des tentations. Le pĂšre Tout-Ă -tous l'introduisit chez la femme d'un officier du gobelet, l'une de ses plus affidĂ©es pĂ©nitentes. DĂšs qu'elle y fut, elle s'empressa de gagner la confiance et l'amitiĂ© de cette femme; elle s'informa du garde breton, et le fit prier de venir chez elle. Ayant su de lui que son amant avait Ă©tĂ© enlevĂ© aprĂšs avoir parlĂ© Ă un premier commis, elle court chez ce commis; la vue d'une belle femme l'adoucit, car il faut convenir que Dieu n'a créé les femmes que pour apprivoiser les hommes. Le plumitif attendri lui avoua tout. "Votre amant est Ă la Bastille depuis prĂšs d'un an, et sans vous il y serait peut-ĂÂȘtre toute sa vie." La tendre Saint-Yves s'Ă©vanouit. Quand elle eut repris ses sens, le plumitif lui dit "Je suis sans crĂ©dit pour faire du bien; tout mon pouvoir se borne Ă faire du mal quelquefois. Croyez-moi, allez chez monsieur de Saint-Pouange, qui fait le bien et le mal, cousin et favori de monseigneur de Louvois. Ce ministre a deux ĂÂąmes monsieur de Saint-Pouange en est une; madame du Belloy, l'autre; mais elle n'est pas Ă prĂ©sent Ă Versailles; il ne vous reste que de flĂ©chir le protecteur que je vous indique." La belle Saint-Yves, partagĂ©e entre un peu de joie et d'extrĂÂȘmes douleurs, entre quelque espĂ©rance et de tristes craintes, poursuivie par son frĂšre, adorant son amant, essuyant ses larmes et en versant encore, tremblante, affaiblie, et reprenant courage, courut vite chez monsieur de Saint-Pouange. Chapitre quatorziĂšme. ProgrĂšs de l'esprit de l'IngĂ©nu ProgrĂšs de l'esprit de l'IngĂ©nu L'IngĂ©nu faisait des progrĂšs rapides dans les sciences, et surtout dans la science de l'homme. La cause du dĂ©veloppement rapide de son esprit Ă©tait due Ă son Ă©ducation sauvage presque autant qu'Ă la trempe de son ĂÂąme car, n'ayant rien appris dans son enfance, il n'avait point appris de prĂ©jugĂ©s. Son entendement, n'ayant point Ă©tĂ© courbĂ© par l'erreur, Ă©tait demeurĂ© dans toute sa rectitude. Il voyait les choses comme elles sont, au lieu que les idĂ©es qu'on nous donne dans l'enfance nous les font voir toute notre vie comme elles ne sont point. "Vos persĂ©cuteurs sont abominables, disait-il Ă son ami Gordon. Je vous plains d'ĂÂȘtre opprimĂ©, mais je vous plains d'ĂÂȘtre jansĂ©niste. Toute secte me paraĂt le ralliement de l'erreur. Dites-moi s'il y a des sectes en gĂ©omĂ©trie? - Non, mon cher enfant, lui dit en soupirant le bon Gordon; tous les hommes sont d'accord sur la vĂ©ritĂ© quand elle est dĂ©montrĂ©e, mais ils sont trop partagĂ©s sur les vĂ©ritĂ©s obscures. - Dites sur les faussetĂ©s obscures. S'il y avait eu une seule vĂ©ritĂ© cachĂ©e dans vos amas d'arguments qu'on ressasse depuis tant de siĂšcles, on l'aurait dĂ©couverte sans doute; et l'univers aurait Ă©tĂ© d'accord au moins sur ce point-lĂ . Si cette vĂ©ritĂ© Ă©tait nĂ©cessaire comme le soleil l'est Ă la terre, elle serait brillante comme lui. C'est une absurditĂ©, c'est un outrage au genre humain, c'est un attentat contre l'Etre infini et suprĂÂȘme de dire il y a une vĂ©ritĂ© essentielle Ă l'homme, et Dieu l'a cachĂ©e." Tout ce que disait ce jeune ignorant instruit par la nature faisait une impression profonde sur l'esprit du vieux savant infortunĂ©. "Serait-il bien vrai, s'Ă©cria-t-il, que je me fusse rendu rĂ©ellement malheureux pour des chimĂšres? Je suis bien plus sĂ»r de mon malheur que de la grĂÂące efficace. J'ai consumĂ© mes jours Ă raisonner sur la libertĂ© de Dieu et du genre humain; mais j'ai perdu la mienne; ni saint Augustin ni saint Prosper ne me tireront de l'abĂme oĂÂč je suis." L'IngĂ©nu, livrĂ© Ă son caractĂšre, dit enfin "Voulez-vous que je vous parle avec une confiance hardie? Ceux qui se font persĂ©cuter pour ces vaines disputes de l'Ă©cole me semblent peu sages; ceux qui persĂ©cutent me paraissent des monstres." Les deux captifs Ă©taient fort d'accord sur l'injustice de leur captivitĂ©. "Je suis cent fois plus Ă plaindre que vous, disait l'IngĂ©nu; je suis nĂ© libre comme l'air; j'avais deux vies, la libertĂ© et l'objet de mon amour on me les ĂÂŽte. Nous sommes tous deux dans les fers, sans savoir qui nous y a mis, sans pouvoir mĂÂȘme le demander. J'ai vĂ©cu Huron vingt ans; on dit que ce sont des barbares, parce qu'ils se vengent de leurs ennemis; mais ils n'ont jamais opprimĂ© leurs amis. A peine ai-je mis le pied en France, que j'ai versĂ© mon sang pour elle; j'ai peut-ĂÂȘtre sauvĂ© une province, et pour rĂ©compense je suis englouti dans ce tombeau des vivants, oĂÂč je serais mort de rage sans vous. Il n'y a donc point de lois dans ce pays? On condamne les hommes sans les entendre! Il n'en est pas ainsi en Angleterre. Ah! ce n'Ă©tait pas contre les Anglais que je devais me battre." Ainsi sa philosophie naissante ne pouvait dompter la nature outragĂ©e dans le premier de ses droits, et laissait un libre cours Ă sa juste colĂšre. Son compagnon ne le contredit point. L'absence augmente toujours l'amour qui n'est pas satisfait, et la philosophie ne le diminue pas. Il parlait aussi souvent de sa chĂšre Saint-Yves que de morale et de mĂ©taphysique. Plus ses sentiments s'Ă©puraient, et plus il aimait. Il lut quelques romans nouveaux; il en trouva peu qui lui peignissent la situation de son ĂÂąme. Il sentait que son coeur allait toujours au-delĂ de ce qu'il lisait. "Ah! disait-il, presque tous ces auteurs-lĂ n'ont que de l'esprit et de l'art." Enfin le bon prĂÂȘtre jansĂ©niste devenait insensiblement le confident de sa tendresse. Il ne connaissait l'amour auparavant que comme un pĂ©chĂ© dont on s'accuse en confession. Il apprit Ă le connaĂtre comme un sentiment aussi noble que tendre, qui peut Ă©lever l'ĂÂąme autant que l'amollir, et produire mĂÂȘme quelquefois des vertus. Enfin, pour dernier prodige, un Huron convertissait un jansĂ©niste. Chapitre quinziĂšme. La belle Saint-Yves rĂ©siste Ă des propositions dĂ©licates La belle Saint-Yves rĂ©siste Ă des propositions dĂ©licates La belle Saint-Yves, plus tendre encore que son amant, alla donc chez monsieur de Saint-Pouange, accompagnĂ©e de l'amie chez qui elle logeait, toutes deux cachĂ©es dans leurs coiffes. La premiĂšre chose qu'elle vit Ă la porte ce fut l'abbĂ© de Saint-Yves, son frĂšre, qui en sortait. Elle fut intimidĂ©e; mais la dĂ©vote amie la rassura. "C'est prĂ©cisĂ©ment parce qu'on a parlĂ© contre vous qu'il faut que vous parliez. Soyez sĂ»re que dans ce pays les accusateurs ont toujours raison si on ne se hĂÂąte de les confondre. Votre prĂ©sence d'ailleurs, ou je me trompe fort, fera plus d'effet que les paroles de votre frĂšre." Pour peu qu'on encourage une amante passionnĂ©e, elle est intrĂ©pide. La Saint-Yves se prĂ©sente Ă l'audience. Sa jeunesse, ses charmes, ses yeux tendres, mouillĂ©s de quelques pleurs, attirĂšrent tous les regards. Chaque courtisan du sous-ministre oublia un moment l'idole du pouvoir pour contempler celle de la beautĂ©. Le Saint-Pouange la fit entrer dans un cabinet; elle parla avec attendrissement et avec grĂÂące. Saint-Pouange se sentit touchĂ©. Elle tremblait, il la rassura. "Revenez ce soir, lui dit-il; vos affaires mĂ©ritent qu'on y pense et qu'on en parle Ă loisir; il y a ici trop de monde; on expĂ©die les audiences trop rapidement il faut que je vous entretienne Ă fond de tout ce qui vous regarde." Ensuite, ayant fait l'Ă©loge de sa beautĂ© et de ses sentiments, il lui recommanda de venir Ă sept heures du soir. Elle n'y manqua pas; la dĂ©vote amie l'accompagna encore, mais elle se tint dans le salon, et lut le PĂ©dagogue chrĂ©tien, pendant que le Saint-Pouange et la belle Saint-Yves Ă©taient dans l'arriĂšre-cabinet. "Croiriez-vous bien, mademoiselle, lui dit-il d'abord, que votre frĂšre est venu me demander une lettre de cachet contre vous? En vĂ©ritĂ© j'en expĂ©dierais plutĂÂŽt une pour le renvoyer en basse-Bretagne. - HĂ©las! monsieur, on est donc bien libĂ©ral de lettres de cachet dans vos bureaux, puisqu'on en vient solliciter du fond du royaume, comme des pensions. Je suis bien loin d'en demander une contre mon frĂšre. J'ai beaucoup Ă me plaindre de lui, mais je respecte la libertĂ© des hommes; je demande celle d'un homme que je veux Ă©pouser, d'un homme Ă qui le roi doit la conservation d'une province, qui peut le servir utilement, et qui est fils d'un officier tuĂ© Ă son service. De quoi est-il accusĂ©? Comment a-t-on pu le traiter si cruellement sans l'entendre?" Alors le sous-ministre lui montra la lettre du jĂ©suite espion et celle du perfide bailli. "Quoi! il y a de pareils monstres sur la terre! et on veut me forcer ainsi Ă Ă©pouser le fils ridicule d'un homme ridicule et mĂ©chant! et c'est sur de pareils avis qu'on dĂ©cide ici de la destinĂ©e des citoyens!" Elle se jeta Ă genoux, elle demanda avec des sanglots la libertĂ© du brave homme qui l'adorait. Ses charmes dans cet Ă©tat parurent dans leur plus grand avantage. Elle Ă©tait si belle que le Saint-Pouange, perdant toute honte, lui insinua qu'elle rĂ©ussirait si elle commençait par lui donner les prĂ©mices de ce qu'elle rĂ©servait Ă son amant. La Saint-Yves, Ă©pouvantĂ©e et confuse, feignit longtemps de ne le pas entendre; il fallut s'expliquer plus clairement. Un mot lĂÂąchĂ© d'abord avec retenue en produisait un plus fort, suivi d'un autre plus expressif. On offrit non seulement la rĂ©vocation de la lettre de cachet, mais des rĂ©compenses, de l'argent, des honneurs, des Ă©tablissements; et plus on promettait, plus le dĂ©sir de n'ĂÂȘtre pas, refusĂ© augmentait. La Saint-Yves pleurait, elle Ă©tait suffoquĂ©e, Ă demi renversĂ©e sur un sofa, croyant Ă peine ce qu'elle voyait, ce qu'elle entendait. Le Saint-Pouange, Ă son tour, se jeta Ă ses genoux. Il n'Ă©tait pas sans agrĂ©ments, et aurait pu ne pas effaroucher un coeur moins prĂ©venu; mais Saint-Yves adorait son amant, et croyait que c'Ă©tait un crime horrible de le trahir pour le servir. Saint-Pouange redoublait les priĂšres et les promesses enfin la tĂÂȘte lui tourna au point qu'il lui dĂ©clara que c'Ă©tait le seul moyen de tirer de sa prison l'homme auquel elle prenait un intĂ©rĂÂȘt si violent et si tendre. Cet Ă©trange entretien se prolongeait. La dĂ©vote de l'antichambre, en lisant son PĂ©dagogue chrĂ©tien, disait "Mon Dieu! que peuvent-ils faire lĂ depuis deux heures? Jamais monseigneur de Saint-Pouange, n'a donnĂ© une si longue audience; peut-ĂÂȘtre qu'il a tout refusĂ© Ă cette pauvre fille, puisqu'elle le prie encore." Enfin sa compagne sortit de l'arriĂšre-cabinet tout Ă©perdue, sans pouvoir parler, rĂ©flĂ©chissant profondĂ©ment sur le caractĂšre des grands et des demi-grands qui sacrifient si lĂ©gĂšrement la libertĂ© des hommes et l'honneur des femmes. Elle ne dit pas un mot pendant tout le chemin. ArrivĂ©e chez l'amie, elle Ă©clata, elle lui conta tout. La dĂ©vote fit de grands signes de croix. "Ma chĂšre amie, il faut consulter dĂšs demain le pĂšre Tout-Ă -tous, notre directeur; il a beaucoup de crĂ©dit auprĂšs de monsieur de Saint-Pouange; il confesse plusieurs servantes de sa maison; c'est un homme pieux et accommodant, qui dirige aussi des femmes de qualitĂ©. Abandonnez-vous Ă lui, c'est ainsi que j'en use, je m'en suis toujours bien trouvĂ©e. Nous autres, pauvres femmes, nous avons besoin d'ĂÂȘtre conduites par un homme. - Eh bien donc! ma chĂšre amie, j'irai trouver demain le pĂšre Tout-Ă -tous." Chapitre seiziĂšme. Elle consulte un jĂ©suite Elle consulte un jĂ©suite DĂšs que la belle et dĂ©solĂ©e Saint-Yves fut avec son bon confesseur, elle lui confia qu'un homme puissant et voluptueux lui proposait de faire sortir de prison celui qu'elle devait Ă©pouser lĂ©gitimement, et qu'il demandait un grand prix de son servie; qu'elle avait une rĂ©pugnance horrible pour un telle infidĂ©litĂ©, et que, s'il ne s'agissait que de sa propre vie, elle la sacrifierait plutĂÂŽt que de succomber. "VoilĂ un abominable pĂ©cheur! lui dit le pĂšre Tout-Ă -tous. Vous devriez bien me dire le nom de ce vilain homme c'est Ă coup sĂ»r quelque jansĂ©niste; je le dĂ©noncerai Ă sa rĂ©vĂ©rence le pĂšre de La Chaise, qui le fera mettre dans le gĂte oĂÂč est Ă prĂ©sent la chĂšre personne que vous devez Ă©pouser." La pauvre fille, aprĂšs un long embarras et de grandes irrĂ©solutions, lui nomma enfin Saint-Pouange. "Monseigneur de Saint-Pouange! s'Ă©cria le jĂ©suite; ah! ma fille, c'est tout autre chose; il est cousin du plus grand ministre que nous ayons jamais eu, homme de bien, protecteur de la bonne cause, bon chrĂ©tien; il ne peut avoir eu une telle pensĂ©e; il faut que vous ayez mal entendu. - Ah! mon pĂšre, je n'ai entendu que trop bien; je suis perdue, quoi que je fasse; je n'ai que le choix du malheur et de la honte il faut que mon amant reste enseveli tout vivant, ou que je me rende indigne de vivre. Je ne puis le laisser pĂ©rir, et je ne puis le sauver." Le pĂšre Tout-Ă -tous tĂÂącha de la calmer par ces douces paroles "PremiĂšrement, ma fille, ne dites jamais ce mot mon amant; il y a quelque chose de mondain, qui pourrait offenser Dieu. Dites mon mari; car, bien qu'il ne le soit pas encore, vous le regardez comme tel; et rien n'est plus honnĂÂȘte. Secondement, bien qu'il soit votre Ă©poux en idĂ©e, en espĂ©rance, il ne l'est pas en effet ainsi vous ne commettriez pas un adultĂšre, pĂ©chĂ© Ă©norme qu'il faut toujours Ă©viter autant qu'il est possible. TroisiĂšmement, les actions ne sont pas d'une malice de couple, quand l'intention est pure, et rien n'est plus pur que de dĂ©livrer votre mari. QuatriĂšmement, vous avez des exemples dans la sainte antiquitĂ©, qui peuvent merveilleusement servir Ă votre conduite. Saint Augustin rapporte que sous le proconsulat de Septimius Acyndinus, en l'an 340 de notre salut, un pauvre homme, ne pouvant payer Ă CĂ©sar ce qui appartenait Ă CĂ©sar, fut condamnĂ© Ă la mort, comme il est juste, malgrĂ© la maxime OĂÂč il n'y a rien le roi perd ses droits. Il s'agissait d'une livre d'or; le condamnĂ© avait une femme en qui Dieu avait mis la beautĂ© et la prudence. Un vieux richard promit de donner une livre d'or, et mĂÂȘme plus, Ă la dame, Ă condition qu'il commettrait avec elle le pĂ©chĂ© immonde. La dame ne crut point mal faire en sauvant la vie Ă son mari. Saint Augustin approuve fort sa gĂ©nĂ©reuse rĂ©signation. Il est vrai que le vieux richard la trompa, et peut-ĂÂȘtre mĂÂȘme son mari n'en fut pas moins pendu; mais elle avait fait tout ce qui Ă©tait en elle pour sauver sa vie. Soyez sĂ»re, ma fille, que quand un jĂ©suite vous cite saint Augustin, il faut bien que ce saint ait pleinement raison. Je ne vous conseille rien, vous ĂÂȘtes sage; il est Ă prĂ©sumer que vous serez utile Ă votre mari. Monseigneur de Saint-Pouange est un honnĂÂȘte homme, il ne vous trompera pas c'est tout ce que je puis vous dire; je prierai Dieu pour vous, et j'espĂšre que tout se passera Ă sa plus grande gloire." La belle Saint-Yves, non moins effrayĂ©e des discours du jĂ©suite que des propositions du sous-ministre, s'en retourna Ă©perdue chez son amie. Elle Ă©tait tentĂ©e de se dĂ©livrer, par lĂ mort, de l'horreur de laisser dans une captivitĂ© affreuse l'amant qu'elle adorait, et de la honte de le dĂ©livrer au prix de ce qu'elle avait de plus cher, et qui ne devait appartenir qu'Ă cet amant infortunĂ©. Chapitre dix-septiĂšme. Elle consulte un jĂ©suite Elle succombe par vertu Elle priait son amie de la tuer; mais cette femme, non moins indulgente que le jĂ©suite, lui parla plus clairement encore. "HĂ©las! dit-elle, les affaires ne se font guĂšre autrement dans cette cour si aimable, si galante, et si renommĂ©e. Les places les plus mĂ©diocres et les plus considĂ©rables n'ont souvent Ă©tĂ© donnĂ©es qu'au prix qu'on exige de vous. Ecoutez, vous m'avez inspirĂ© de l'amitiĂ© et de la confiance; je vous avouerai que si j'avais Ă©tĂ© aussi difficile que vous l'ĂÂȘtes, mon mari ne jouirait pas du petit poste qui le fait vivre; il le sait, et loin d'en ĂÂȘtre fĂÂąchĂ©, il voit en moi sa bienfaitrice, et il se regarde comme ma crĂ©ature. Pensez-vous que tous ceux qui ont Ă©tĂ© Ă la tĂÂȘte des provinces, ou mĂÂȘme des armĂ©es, aient dĂ» leurs honneurs et leur fortune Ă leurs seuls services? Il en est qui en sont redevables Ă mesdames leurs femmes. Les dignitĂ©s de la guerre ont Ă©tĂ© sollicitĂ©es par l'amour, et la place a Ă©tĂ© donnĂ©e au mari de la plus belle. Vous ĂÂȘtes dans une situation bien plus intĂ©ressante il s'agit de rendre votre amant au jour et de l'Ă©pouser; c'est un devoir sacrĂ© qu'il vous faut remplir. On n'a point blĂÂąmĂ© les belles et grandes dames dont je vous parle; on vous applaudira, on dira que vous ne vous ĂÂȘtes permise une faiblesse que par un excĂšs de vertu. - Ah! quelle vertu! s'Ă©cria la belle Saint-Yves; quel labyrinthe d'iniquitĂ©s! quel pays! et que j'apprends Ă connaĂtre les hommes! Un pĂšre de La Chaise et un bailli ridicule font mettre mon amant en prison, ma famille me persĂ©cute, on ne me tend la main dans mon dĂ©sastre que pour me dĂ©shonorer. Un jĂ©suite a perdu un brave homme, un autre jĂ©suite veut me perdre; je ne suis entourĂ©e que de piĂšges, et je touche au moment de tomber dans la misĂšre. Il faut que je me tue, ou que je parle au roi; je me jetterai Ă ses pieds sur son passage, quand il ira Ă la messe ou Ă la comĂ©die. - On ne vous laissera pas approcher, lui dit sa bonne amie; et si vous aviez le malheur de parler, mons de Louvois et le rĂ©vĂ©rend pĂšre de La Chaise pourraient vous enterrer dans le fond d'un couvent pour le reste de vos jours." Tandis que cette brave personne augmentait ainsi les perplexitĂ©s de cette ĂÂąme dĂ©sespĂ©rĂ©e, et enfonçait le poignard dans son coeur, arrive un exprĂšs de monsieur de Saint-Pouange avec une lettre et deux beaux pendants d'oreilles. Saint-Yves rejeta le tout en pleurant; mais l'amie s'en chargea. DĂšs que le messager fut parti, notre confidente lit la lettre dans laquelle on propose un petit souper aux deux amies pour le soir. Saint-Yves jure qu'elle n'ira point. La dĂ©vote veut lui essayer les deux boucles de diamants. Saint-Yves ne le put souffrir. Elle combattit la journĂ©e entiĂšre. Enfin, n'ayant en vue que son amant, vaincue, entraĂnĂ©e, ne sachant oĂÂč on la mĂšne, elle se laisse conduire au souper fatal. Rien n'avait pu la dĂ©terminer Ă se parer de ses pendants d'oreilles; la confidente les apporta, elle les lui ajusta malgrĂ© elle avant qu'on se mĂt Ă table. Saint-Yves Ă©tait si confuse, si troublĂ©e, qu'elle se laissait tourmenter; et le patron en tirait un augure trĂšs favorable. Vers la fin du repas, la confidente se retira discrĂštement. Le patron montra alors la rĂ©vocation de la lettre de cachet, le brevet d'une gratification considĂ©rable, celui d'une compagnie, et n'Ă©pargna pas les promesses. "Ah! lui dit Saint-Yves, que je vous aimerais si vous ne vouliez pas ĂÂȘtre tant aimĂ©!" Enfin, aprĂšs une longue rĂ©sistance, aprĂšs des sanglots, des cris, des larmes, affaiblie du combat, Ă©perdue, languissante, il fallut se rendre. Elle n'eut d'autre ressource que de se promettre de ne penser qu'Ă l'IngĂ©nu; tandis que le cruel jouirait impitoyablement de la nĂ©cessitĂ© oĂÂč elle Ă©tait rĂ©duite. Chapitre dix-huitiĂšme. Elle dĂ©livre son amant et un jansĂ©niste Elle dĂ©livre son amant et un jansĂ©niste Au point du jour elle vole Ă Paris, munie de l'ordre du ministre. Il est difficile de peindre ce qui se passait dans son coeur pendant ce voyage. Qu'on imagine une ĂÂąme vertueuse et noble, humiliĂ©e de son opprobre; enivrĂ©e de tendresse, dĂ©chirĂ©e des remords d'avoir trahi son amant, pĂ©nĂ©trĂ©e du plaisir de dĂ©livrer ce qu'elle adore! Ses amertumes, ses combats, son succĂšs partageaient toutes ses rĂ©flexions. Ce n'Ă©tait plus cette fille simple dont une Ă©ducation provinciale avait rĂ©trĂ©ci les idĂ©es. L'amour et le malheur l'avaient formĂ©e. Le sentiment avait fait autant de progrĂšs en elle que la raison en avait fait dans l'esprit de son amant infortunĂ©. Les filles apprennent Ă sentir plus aisĂ©ment que les hommes n'apprennent Ă penser. Son aventure Ă©tait plus instructive que quatre ans de couvent. Son habit Ă©tait d'une simplicitĂ© extrĂÂȘme. Elle voyait avec horreur les ajustements sous lesquels elle avait paru devant son funeste bienfaiteur; elle avait laissĂ© ses boucles de diamants Ă sa compagne sans mĂÂȘme les regarder. Confuse et charmĂ©e, idolĂÂątre de l'IngĂ©nu, et se haĂÂŻssant elle-mĂÂȘme, elle arrive enfin Ă la porte. De cet affreux chĂÂąteau, palais de la vengeance, Qui renferma souvent le crime et l'innocence. Quand il fallut descendre du carrosse, les forces lui manquĂšrent; on l'aida; elle entra, le coeur palpitant, les yeux humides, le front consternĂ©. On la prĂ©sente au gouverneur; elle veut lui parler, sa voix expire; elle montre son ordre en articulant Ă peine quelques paroles. Le gouverneur aimait son prisonnier; il fut trĂšs aise de sa dĂ©livrance. Son coeur n'Ă©tait pas endurci comme celui de quelques honorables geĂÂŽliers ses confrĂšres, qui, ne pensant qu'Ă la rĂ©tribution attachĂ©e Ă la garde de leurs captifs, fondant leurs revenus sur leurs victimes, et vivant du malheur d'autrui, se faisaient en secret une joie affreuse des larmes des infortunĂ©s. Il fait venir le prisonnier dans son appartement. Les deux amants se voient, et tous deux s'Ă©vanouissent. La belle Saint-Yves resta longtemps sans mouvement et sans vie l'autre rappela bientĂÂŽt son courage. "C'est apparemment lĂ madame votre femme, lui dit le gouverneur; vous ne m'aviez point dit que vous fussiez mariĂ©. On me mande que c'est Ă ses soins gĂ©nĂ©reux que vous devez votre dĂ©livrance - Ah! je ne suis pas digne d'ĂÂȘtre sa femme," dit la belle Saint-Yves d'une voix tremblante; et elle retomba encore en faiblesse. Quand elle eut repris ses sens, elle prĂ©senta, toujours tremblante, le brevet de la gratification, et la promesse par Ă©crit d'une compagnie. L'IngĂ©nu, aussi Ă©tonnĂ© qu'attendri, s'Ă©veillait d'un songe pour retomber dans un autre. "Pourquoi ai-je Ă©tĂ© enfermĂ© ici? comment avez-vous pu m'en tirer? oĂÂč sont les monstres qui m'y ont plongĂ©? Vous ĂÂȘtes une divinitĂ© qui descendez du ciel Ă mon secours." La belle Saint-Yves baissait la vue, regardait son amant, rougissait et dĂ©tournait, le moment d'aprĂšs, ses yeux mouillĂ©s de pleurs. Elle lui apprit enfin tout ce qu'elle savait, et tout ce qu'elle avait Ă©prouvĂ©, exceptĂ© ce qu'elle aurait voulu se cacher pour jamais, et ce qu'un autre que l'IngĂ©nu, plus accoutumĂ© au monde et plus instruit des usages de la cour, aurait devinĂ© facilement. "Est-il possible qu'un misĂ©rable comme ce bailli ait eu le pouvoir de me ravir ma libertĂ©? Ah! je vois bien qu'il en est des hommes comme des plus vils animaux; tous peuvent nuire. Mais est-il possible qu'un moine, un jĂ©suite confesseur du roi, ait contribuĂ© Ă mon infortune autant que ce bailli, sans que je puisse imaginer sous quel prĂ©texte ce dĂ©testable fripon m'a persĂ©cutĂ©? M'a-t-il fait passer pour un jansĂ©niste? Enfin, comment vous ĂÂȘtes-vous souvenue de moi? je ne le mĂ©ritais pas, je n'Ă©tais alors qu'un sauvage. Quoi? vous avez pu, sans conseil, sans secours, entreprendre le voyage de Versailles! Vous y avez paru, et on a brisĂ© mes fers! Il est donc dans la beautĂ© et dans la vertu un charme invincible qui fait tomber les portes de fer, et qui amollit les coeurs de bronze!" A ce mot de vertu, des sanglots Ă©chappĂšrent Ă la belle Saint-Yves. Elle ne savait pas combien elle Ă©tait vertueuse dans le crime qu'elle se reprochait. Son amant continua ainsi "Ange qui avez rompu mes liens, si vous avez eu ce que je ne comprends pas encore assez de crĂ©dit pour me faire rendre justice, faites-la donc rendre aussi Ă un vieillard qui m'a le premier appris Ă penser, comme vous m'avez appris Ă aimer. La calamitĂ© nous a unis; je l'aime comme un pĂšre, je ne peux vivre ni sans vous ni sans lui. - Moi! que je sollicite le mĂÂȘme homme qui... - Oui, je veux tout vous devoir, et je ne veux devoir jamais rien qu'Ă vous Ă©crivez Ă cet homme puissant; comblez-moi de vos bienfaits, achevez ce que vous avez commencĂ©, achevez vos prodiges." Elle sentait qu'elle devait faire tout ce que son amant exigeait elle voulut Ă©crire, sa main ne pouvait obĂ©ir. Elle recommença trois fois sa lettre, la dĂ©chira trois fois; elle Ă©crivit enfin, et les deux amants sortirent aprĂšs avoir embrassĂ© le vieux martyr de la grĂÂące efficace. L'heureuse et dĂ©solĂ©e Saint-Yves savait dans quelle maison logeait son frĂšre; elle y alla; son amant prit un appartement dans la mĂÂȘme maison. A peine y furent-ils arrivĂ©s que son protecteur lui envoya l'ordre de l'Ă©largissement du bonhomme Gordon, et lui demanda un rendez-vous pour le lendemain. Ainsi, Ă chaque action honnĂÂȘte et gĂ©nĂ©reuse qu'elle faisait, son dĂ©shonneur en Ă©tait le prix. Elle regardait avec exĂ©cration cet usage de vendre le malheur et le bonheur des hommes. Elle donna l'ordre de l'Ă©largissement Ă son amant, et refusa le rendez-vous d'un bienfaiteur qu'elle ne pouvait plus voir sans expirer de douleur et de honte. L'IngĂ©nu ne pouvait se sĂ©parer d'elle que pour aller dĂ©livrer un ami il y vola. Il remplit ce devoir en rĂ©flĂ©chissant sur les Ă©tranges Ă©vĂ©nements de ce monde, et en admirant la vertu courageuse d'une jeune fille Ă qui deux infortunĂ©s devaient plus que la vie. Chapitre dix-neuviĂšme. L'IngĂ©nu, la belle Saint-Yves, et leurs parents sont rassemblĂ©s L'IngĂ©nu, la belle Saint-Yves, et leurs parents sont rassemblĂ©s La gĂ©nĂ©reuse et respectable infidĂšle Ă©tait avec son frĂšre abbĂ© de Saint-Yves, le bon prieur de la Montagne, et la dame de Kerkabon. Tous Ă©taient Ă©galement Ă©tonnĂ©s; mais leur situation et leurs sentiments Ă©taient bien diffĂ©rents. L'abbĂ© de Saint-Yves pleurait ses torts aux pieds de sa soeur, qui lui pardonnait. Le prieur et sa tendre soeur pleuraient aussi, mais de joie; le vilain bailli et son insupportable fils ne troublaient point cette scĂšne touchante. Ils Ă©taient partis au premier bruit de l'Ă©largissement de leur ennemi; ils couraient ensevelir dans leur province leur sottise et leur crainte. Les quatre personnages, agitĂ©s de cent mouvements divers, attendaient que le jeune homme revĂnt avec l'ami qu'il devait dĂ©livrer. L'abbĂ© de Saint-Yves n'osait lever les yeux devant sa soeur; la bonne Kerkabon disait "Je reverrai donc mon cher neveu! - Vous le reverrez, dit la charmante Saint-Yves, mais ce n'est plus le mĂÂȘme homme; son maintien, son ton, ses idĂ©es, son esprit, tout est changĂ©; il est devenu aussi respectable qu'il Ă©tait naĂÂŻf et Ă©tranger Ă tout. Il sera l'honneur et la consolation de votre famille que ne puis-je ĂÂȘtre aussi l'honneur de la mienne! - Vous n'ĂÂȘtes point non plus la mĂÂȘme, dit le prieur; que vous est-il donc arrivĂ© qui ait fait en vous un si grand changement?" Au milieu de cette conversation l'IngĂ©nu arrive, tenant par la main son jansĂ©niste. La scĂšne alors devint plus neuve et plus intĂ©ressante. Elle commença par les tendres embrassements de l'oncle et de la tante. L'abbĂ© de Saint-Yves se mettait presque aux genoux de l'IngĂ©nu, qui n'Ă©tait plus l'IngĂ©nu. Les deux amants se parlaient par des regards qui exprimaient tous les sentiments dont ils Ă©taient pĂ©nĂ©trĂ©s. On voyait Ă©clater la satisfaction, la reconnaissance, sur le front de l'un; l'embarras Ă©tait peint dans les yeux tendres et un peu Ă©garĂ©s de l'autre. On Ă©tait Ă©tonnĂ© qu'elle mĂÂȘlĂÂąt de la douleur Ă tant de joie. Le vieux Gordon devint en peu de moments cher Ă toute la famille. Il avait Ă©tĂ© malheureux avec le jeune prisonnier, et c'Ă©tait un grand titre. Il devait sa dĂ©livrance aux deux amants, cela seul le rĂ©conciliait avec l'amour; l'ĂÂąpretĂ© de ses anciennes opinions sortait de son coeur, il Ă©tait changĂ© en homme, ainsi que le Huron. Chacun raconta ses aventures avant le souper. Les deux abbĂ©s, la tante, Ă©coutaient comme des enfants qui entendent des histoires de revenants, et comme des hommes qui s'intĂ©ressaient tous Ă tant de dĂ©sastres. "HĂ©las! dit Gordon, il y a peut-ĂÂȘtre plus de cinq cents personnes vertueuses qui sont Ă prĂ©sent dans les mĂÂȘmes fers que mademoiselle de Saint-Yves a brisĂ©s leurs malheurs sont inconnus. On trouve assez de mains qui frappent sur la foule des malheureux, et rarement une secourable." Cette rĂ©flexion si vraie augmentait sa sensibilitĂ© et sa reconnaissance tout redoublait le triomphe de la belle Saint-Yves; on admirait la grandeur et la fermetĂ© de son ĂÂąme. L'admiration Ă©tait mĂÂȘlĂ©e de ce respect qu'on sent malgrĂ© soi pour une personne qu'on croit avoir du crĂ©dit Ă la cour. Mais l'abbĂ© de Saint-Yves disait quelquefois "Comment ma soeur a-t-elle pu faire pour obtenir si tĂÂŽt ce crĂ©dit?" On allait se mettre Ă table de trĂšs bonne heure. VoilĂ que la bonne amie de Versailles arrive sans rien savoir de tout ce qui s'Ă©tait passĂ©; elle Ă©tait en carrosse Ă six chevaux, et on voit bien Ă qui appartenait l'Ă©quipage. Elle entre avec l'air imposant d'une personne de cour qui a de grandes affaires, salue trĂšs lĂ©gĂšrement la compagnie, et tirant la belle Saint-Yves Ă l'Ă©cart "Pourquoi vous faire tant attendre? Suivez-moi; voilĂ vos diamants que vous aviez oubliĂ©s." Elle ne put dire ces paroles si bas que l'IngĂ©nu ne les entendĂt il vit les diamants; le frĂšre fut interdit; l'oncle et la tante n'Ă©prouvĂšrent qu'une surprise de bonnes gens qui n'avaient jamais vu une telle magnificence. Le jeune homme, qui s'Ă©tait formĂ© par un an de rĂ©flexions, en fit malgrĂ© lui, et parut troublĂ© un moment. Son amante s'en aperçut; une pĂÂąleur mortelle se rĂ©pandit sur son beau visage, un frisson la saisit, elle se soutenait Ă peine. "Ah! madame, dit-elle Ă la fatale amie, vous m'avez perdue! vous me donnez la mort!" Ces paroles percĂšrent le coeur de l'IngĂ©nu; mais il avait dĂ©jĂ appris Ă se possĂ©der; il ne les releva point, de peur d'inquiĂ©ter sa maĂtresse devant son frĂšre; mais il pĂÂąlit comme elle. Saint-Yves, Ă©perdue de l'altĂ©ration qu'elle apercevait sur le visage de son amant, entraĂne cette femme hors de la chambre dans un petit passage, jette les diamants Ă terre devant elle. "Ah! ce ne sont pas eux qui m'ont sĂ©duite, vous le savez; mais celui qui les a donnĂ©s ne me reverra jamais." L'amie les ramassait, et Saint-Yves ajoutait "Qu'il les reprenne ou qu'il vous les donne; allez, ne me rendez plus honteuse de moi-mĂÂȘme." L'ambassadrice enfin, s'en retourna, ne pouvant comprendre les remords dont elle Ă©tait tĂ©moin. La belle Saint-Yves, oppressĂ©e, Ă©prouvant dans son corps une rĂ©volution qui la suffoquait, fut obligĂ©e de se mettre au lit; mais pour n'alarmer personne elle ne parla point de ce qu'elle souffrait, et, ne prĂ©textant que sa lassitude, elle demanda la permission de prendre du repos; mais ce fut aprĂšs avoir rassurĂ© la compagnie par des paroles consolantes et flatteuses, et jetĂ© sur son amant des regards qui portaient le feu dans son ĂÂąme. Le souper, qu'elle n'animait pas, fut triste dans le commencement, mais de cette tristesse intĂ©ressante qui fournit des conversations attachantes et utiles, si supĂ©rieures Ă la frivole joie qu'on recherche, et qui n'est d'ordinaire qu'un bruit importun. Gordon fit en peu de mots l'histoire du jansĂ©nisme et du molinisme, des persĂ©cutions dont un parti accablait l'autre, et de l'opiniĂÂątretĂ© de tous les deux. L'IngĂ©nu en fit la critique, et plaignit les hommes qui, non contents de tant de discorde que leurs intĂ©rĂÂȘts allument, se font de nouveaux maux pour des intĂ©rĂÂȘts chimĂ©riques, et pour des absurditĂ©s inintelligibles. Gordon racontait, l'autre jugeait; les convives Ă©coutaient avec Ă©motion, et s'Ă©clairaient d'une lumiĂšre nouvelle. On parla de la longueur de nos infortunes et de la briĂšvetĂ© de la vie. On remarqua que chaque profession a un vice et un danger qui lui sont attachĂ©s, et que, depuis le Prince jusqu'au dernier des mendiants, tout semble accuser la nature. Comment se trouve-t-il tant d'hommes qui, pour si peu d'argent, se font les persĂ©cuteurs, les satellites, les bourreaux des autres hommes? Avec quelle indiffĂ©rence inhumaine un homme en place signe la destruction d'une famille, et avec quelle joie plus barbare des mercenaires l'exĂ©cutent! "J'ai vu dans ma jeunesse, dit le bonhomme Gordon, un parent du marĂ©chal de Marillac, qui, Ă©tant poursuivi dans sa province pour la cause de cet illustre malheureux, se cachait dans Paris sous un nom supposĂ©. C'Ă©tait un vieillard de soixante et douze ans. Sa femme, qui l'accompagnait, Ă©tait Ă peu prĂšs de son ĂÂąge. Ils avaient eu un fils libertin qui, Ă l'ĂÂąge de quatorze ans, s'Ă©tait enfui de la maison paternelle devenu soldat, puis dĂ©serteur, il avait passĂ© par tous les degrĂ©s de la dĂ©bauche et de la misĂšre; enfin, ayant pris un nom de terre, il Ă©tait dans les gardes du cardinal de Richelieu car ce prĂÂȘtre, ainsi que le Mazarin, avait des gardes; il avait obtenu un bĂÂąton d'exempt dans cette compagnie de satellites. Cet aventurier fut chargĂ© d'arrĂÂȘter le vieillard et son Ă©pouse, et s'en acquitta avec toute la duretĂ© d'un homme qui voulait plaire Ă son maĂtre. Comme il les conduisait, il entendit ces deux victimes dĂ©plorer la longue suite des malheurs qu'elles avaient Ă©prouvĂ©s depuis leur berceau. Le pĂšre et la mĂšre comptaient parmi leurs plus grandes infortunes les Ă©garements et la perte de leur fils. Il les reconnut; il ne les conduisit pas moins en prison, en les assurant que Son Eminence devait ĂÂȘtre servie de prĂ©fĂ©rence Ă tout. Son Eminence rĂ©compensa son zĂšle. "J'ai vu un espion du pĂšre de La Chaise trahir son propre frĂšre, dans l'espĂ©rance d'un petit bĂ©nĂ©fice qu'il n'eut point; et je l'ai vu mourir, non de remords, mais de douleur d'avoir Ă©tĂ© trompĂ© par le jĂ©suite. L'emploi de confesseur que j'ai longtemps exercĂ© m'a fait connaĂtre l'intĂ©rieur des familles; je n'en ai guĂšre vu qui ne fussent plongĂ©es dans l'amertume, tandis qu'au dehors, couvertes du masque du bonheur, elles paraissaient nager dans la joie; et j'ai toujours remarquĂ© que les grands chagrins Ă©taient le fruit de notre cupiditĂ© effrĂ©nĂ©e. - Pour moi, dit l'IngĂ©nu, je pense qu'une ĂÂąme noble, reconnaissante et sensible, peut vivre heureuse; et je compte bien jouir d'une fĂ©licitĂ© sans mĂ©lange avec la belle et gĂ©nĂ©reuse Saint-Yves. Car je me flatte, ajouta-t-il, en s'adressant Ă son frĂšre avec le sourire de l'amitiĂ©, que vous ne me refuserez pas, comme l'annĂ©e passĂ©e, et que je m'y prendrai d'une maniĂšre plus dĂ©cente." L'abbĂ© se confondit en excuses du passĂ© et en protestations d'un attachement Ă©ternel. L'oncle Kerkabon dit que ce serait le plus beau jour de sa vie. La bonne tante, en s'extasiant et en pleurant de joie, s'Ă©criait "Je vous l'avais bien dit que vous ne seriez jamais sous-diacre! ce sacrement-ci vaut bien mieux que l'autre; plĂ»t Ă Dieu que j'en eusse Ă©tĂ© honorĂ©e! mais je vous servirai de mĂšre." Alors ce fut Ă qui renchĂ©rirait sur les louanges de tendre Saint-Yves. Son amant avait le coeur trop plein de ce qu'elle avait fait pour lui, il l'aimait trop pour que l'aventure des diamants eĂ»t fait sur son coeur une impression dominante. Mais ces mots qu'il avait trop entendus, vous me donnez la mort, l'effrayaient encore en secret et corrompaient toute sa joie, tandis que les Ă©loges de sa belle maĂtresse augmentaient encore son amour. Enfin on n'Ă©tait plus occupĂ© que d'elle; on ne parlait que du bonheur que ces deux amants mĂ©ritaient; on s'arrangeait pour vivre tous ensemble dans Paris; on faisait des projets de fortune et d'agrandissement; on se livrait Ă toutes ces espĂ©rances que la moindre lueur de fĂ©licitĂ© fait naĂtre si aisĂ©ment. Mais l'IngĂ©nu, dans le fond de son coeur, Ă©prouvait un sentiment secret qui repoussait cette illusion. Il relisait ces promesses signĂ©es Saint-Pouange, et les brevets signĂ©s Louvois; on lu dĂ©peignit ces deux hommes tels qu'ils Ă©taient, ou qu'on les croyait ĂÂȘtre. Chacun parla des ministres et du ministĂšre avec cette libertĂ© de table regardĂ©e en France comme la plus prĂ©cieuse libertĂ© qu'on puisse goĂ»ter sur la terre. "Si j'Ă©tais roi de France, dit l'IngĂ©nu, voici le ministre de la guerre que je choisirais je voudrais un homme de la plus haute naissance, par la raison qu'il donne des ordres Ă la noblesse. J'exigerais qu'il eĂ»t Ă©tĂ© lui-mĂÂȘme officier, qu'il eĂ»t passĂ© par tous les grades, qu'il fĂ»t au moins lieutenant gĂ©nĂ©ral des armĂ©es, et digne d'ĂÂȘtre marĂ©chal de France car n'est-il pas nĂ©cessaire qu'il ait servi lui-mĂÂȘme pour mieux connaĂtre les dĂ©tails du service? et les officiers n'obĂ©iront-ils pas avec cent fois plus d'allĂ©gresse Ă un homme de guerre, qui aura comme eux signalĂ© son courage, qu'Ă un homme de cabinet qui ne peut que deviner tout au plus les opĂ©rations d'une campagne, quelque esprit qu'il puisse avoir? Je ne serais pas fĂÂąchĂ© que mon ministre fĂ»t gĂ©nĂ©reux, quoique mon garde du trĂ©sor royal en fĂ»t quelquefois un peu embarrassĂ©. J'aimerais qu'il eĂ»t un travail facile, et que mĂÂȘme il se distinguĂÂąt par cette gaietĂ© d'esprit, partage d'un homme supĂ©rieur aux affaires, qui plaĂt tant Ă la nation, et qui rend tous les devoirs moins pĂ©nibles." Il dĂ©sirait qu'un ministre eĂ»t ce caractĂšre; parce qu'il avait toujours remarquĂ© que cette belle humeur est incompatible avec la cruautĂ©. Mons de Louvois n'aurait peut-ĂÂȘtre pas Ă©tĂ© satisfait des souhaits de l'IngĂ©nu; il avait une autre sorte de mĂ©rite. Mais pendant qu'on Ă©tait Ă table, la maladie de cette fille malheureuse prenait un caractĂšre funeste; son sang s'Ă©tait allumĂ©, une fiĂšvre dĂ©vorante s'Ă©tait dĂ©clarĂ©e, elle souffrait et ne se plaignait point, attentive Ă ne pas troubler la joie des convives. Son frĂšre, sachant qu'elle ne dormait pas, alla au chevet de son lit; il fut surpris de l'Ă©tat oĂÂč elle Ă©tait. Tout le monde accourut; l'amant se prĂ©sentait Ă la suite du frĂšre. Il Ă©tait, sans doute, le plus alarmĂ© et le plus attendri de tous; mais il avait appris Ă joindre la discrĂ©tion Ă tous les dons heureux que la nature lui avait prodiguĂ©s, et le sentiment prompt des biensĂ©ances commençait Ă dominer dans lui. On fit venir aussitĂÂŽt un mĂ©decin du voisinage. C'Ă©tait un de ceux qui visitent leurs malades en courant, qui confondent la maladie qu'ils viennent de voir avec celles qu'ils voient, qui mettent une pratique aveugle dans une science Ă laquelle toute la maturitĂ© d'un discernement sain et rĂ©flĂ©chi ne peut ĂÂŽter son incertitude et ses dangers. Il redoubla le mal par sa prĂ©cipitation Ă prescrire un remĂšde alors Ă la mode. De la mode jusque dans la mĂ©decine! Cette manie Ă©tait trop commune dans Paris. La triste Saint-Yves contribuait encore plus que son mĂ©decin Ă rendre sa maladie dangereuse. Son ĂÂąme tuait son corps. La foule des pensĂ©es qui l'agitaient portait dans ses veines un poison plus dangereux que celui de la fiĂšvre la plus brĂ»lante. Chapitre vingtiĂšme. La belle Saint-Yves meurt, et ce qui en arrive La belle Saint-Yves meurt, et ce qui en arrive On appela un autre mĂ©decin celui-ci, au lieu d'aider la nature et de la laisser agir dans une jeune personne dans qui tous les organes rappelaient la vie, ne fut occupĂ© que de contrecarrer son confrĂšre. La maladie devint mortelle en deux jours. Le cerveau, qu'on croit le siĂšge de l'entendement, fut attaquĂ© aussi violemment que le coeur, qui est, dit-on, le siĂšge des passions. Quelle mĂ©canique incomprĂ©hensible a soumis les organes au sentiment et Ă la pensĂ©e? Comment une seule idĂ©e douloureuse dĂ©range-t-elle le cours du sang? Et comment le sang Ă son tour porte-t-il ses irrĂ©gularitĂ©s dans l'entendement humain? Quel est ce fluide inconnu et dont l'existence est certaine, qui, plus prompt, plus actif que la lumiĂšre, vole, en moins d'un clin d'oeil, dans tous les canaux de la vie, produit les sensations, la mĂ©moire, la tristesse ou la joie, la raison ou le vertige, rappelle avec horreur ce qu'on voudrait oublier, et fait d'un animal pensant ou un objet d'admiration, ou un sujet de pitiĂ© et de larmes? C'Ă©tait lĂ ce que disait le bon Gordon; et cette rĂ©flexion si naturelle, que rarement font les hommes, ne dĂ©robait rien Ă son attendrissement; car il n'Ă©tait pas de ces malheureux philosophes qui s'efforcent d'ĂÂȘtre insensibles. Il Ă©tait touchĂ© du sort de cette jeune fille, comme un pĂšre qui voit mourir lentement son enfant chĂ©ri. L'abbĂ© de Saint-Yves Ă©tait dĂ©sespĂ©rĂ©, le prieur et sa soeur rĂ©pandaient des ruisseaux de larmes. Mais qui pourrait peindre l'Ă©tat de son amant? Nulle langue n'a des expressions qui rĂ©pondent Ă ce comble des douleurs; les langues sont trop imparfaites. La tante, presque sans vie, tenait la tĂÂȘte de la mourante dans ses faibles bras; son frĂšre Ă©tait Ă genoux au pied du lit; son amant pressait sa main, qu'il baignait de pleurs, et Ă©clatait en sanglots il la nommait sa bienfaitrice; son espĂ©rance, sa vie, la moitiĂ© de lui-mĂÂȘme, sa maĂtresse, son Ă©pouse. A ce mot d'Ă©pouse elle soupira, le regarda avec une tendresse inexprimable, et soudain jeta un cri d'horreur; puis, dans un de ces intervalles oĂÂč l'accablement, et l'oppression des sens, et les souffrances suspendues, laissent Ă l'ĂÂąme sa libertĂ© et sa force, elle s'Ă©cria "Moi, votre Ă©pouse! Ah! cher amant, ce nom, ce bonheur, ce prix, n'Ă©taient plus faits pour moi; je meurs, et je le mĂ©rite. O dieu de mon coeur! ĂÂŽ vous que j'ai sacrifiĂ© Ă des dĂ©mons infernaux, c'en est fait, je suis punie, vivez heureux." Ces paroles tendres et terribles ne pouvaient ĂÂȘtre comprises; mais elles portaient dans tous les coeurs l'effroi et l'attendrissement; elle eut le courage de s'expliquer. Chaque mot fit frĂ©mir d'Ă©tonnement, de douleur et de pitiĂ© tous les assistants. Tous se rĂ©unissaient Ă dĂ©tester l'homme puissant qui n'avait rĂ©parĂ© une horrible injustice que par un crime, et qui avait forcĂ© la plus respectable innocence Ă ĂÂȘtre sa complice. "Qui? vous coupable! lui dit son amant; non, vous ne l'ĂÂȘtes pas; le crime ne peut ĂÂȘtre que dans le coeur, le vĂÂŽtre est Ă la vertu et Ă moi." Il confirmait ce sentiment par des paroles qui semblaient ramener Ă la vie la belle Saint-Yves. Elle se sentit consolĂ©e, et s'Ă©tonnait d'ĂÂȘtre aimĂ©e encore. Le vieux Gordon l'aurait condamnĂ©e dans le temps qu'il n'Ă©tait que jansĂ©niste; mais, Ă©tant devenu sage, il l'estimait, et il pleurait. Au milieu de tant de larmes et de craintes, pendant que le danger de cette fille si chĂšre remplissait tous les coeurs, que tout Ă©tait consternĂ©, on annonce un courrier de la cour. Un courrier! et de qui? et pourquoi? C'Ă©tait de la part du confesseur du roi pour le prieur de la Montagne; ce n'Ă©tait pas le pĂšre de La Chaise qui Ă©crivait, c'Ă©tait le frĂšre Vadbled, son valet de chambre, homme trĂšs important dans ce temps-lĂ , lui qui mandait aux archevĂÂȘques les volontĂ©s du rĂ©vĂ©rend pĂšre, lui qui donnait audience, lui qui promettait des bĂ©nĂ©fices, lui qui faisait quelquefois expĂ©dier des lettres de cachet. Il Ă©crivait Ă l'abbĂ© de la Montagne que "Sa RĂ©vĂ©rence Ă©tait informĂ©e des aventures de son neveu, que sa prison n'Ă©tait qu'une mĂ©prise, que ces petites disgrĂÂąces arrivaient frĂ©quemment, qu'il ne fallait pas y faire attention, et qu'enfin il convenait que lu prieur vĂnt lui prĂ©senter son neveu le lendemain, qu'il devait amener avec lui le bonhomme Gordon, que lui frĂšre Vadbled les introduirait chez Sa RĂ©vĂ©rence et chez mons de Louvois, lequel leur dirait un mot dans son antichambre." Il ajoutait que l'histoire de l'IngĂ©nu et son combat contre les Anglais avaient Ă©tĂ© contĂ©s au roi, que sĂ»rement le roi daignerait le remarquer quand il passerait dans la galerie, et peut-ĂÂȘtre mĂÂȘme lui ferait un signe de tĂÂȘte. La lettre finissait par l'espĂ©rance dont on le flattait que toutes les dames de la cour s'empresseraient de faire venir son neveu Ă leurs toilettes, que plusieurs d'entre elles lui diraient "Bonjour, monsieur l'IngĂ©nu"; et qu'assurĂ©ment il serait question de lui au souper du roi. La lettre Ă©tait signĂ©e "Votre affectionnĂ©, Vadbled frĂšre jĂ©suite." Le prieur ayant lu la lettre tout haut, son neveu furieux, et commandant un moment Ă sa colĂšre, ne dit rien au porteur; mais se tournant vers le compagnon de ses infortunes, il lui demanda ce qu'il pensait de ce style. Gordon lui rĂ©pondit "C'est donc ainsi qu'on traite les hommes comme des singes! On les bat et on les fait danser." L'IngĂ©nu, reprenant son caractĂšre, qui revient toujours dans les grands mouvements de l'ĂÂąme, dĂ©chira la lettre par morceaux, et les jeta au nez du courrier "VoilĂ ma rĂ©ponse." Son oncle, Ă©pouvantĂ©, crut voir le tonnerre et vingt lettres de cachet tomber sur lui. Il alla vite Ă©crire et excuser, comme il put; ce qu'il prenait pour l'emportement d'un jeune homme, et qui Ă©tait la saillie d'une grande ĂÂąme. Mais des soins plus douloureux s'emparaient de tous les coeurs. La belle et infortunĂ©e Saint-Yves sentait dĂ©jĂ sa fin approcher; elle Ă©tait dans le calme, mais dans ce calme affreux de la nature affaissĂ©e qui n'a plus la force de combattre. "O mon cher amant! dit-elle d'une voix tombante, la mort me punit de ma faiblesse; mais j'expire avec la consolation de vous savoir libre. Je vous ai adorĂ© en vous trahissant, et je vous adore en vous disant un Ă©ternel adieu." Elle ne se parait pas d'une vaine fermetĂ©; elle ne concevait pas cette misĂ©rable gloire de faire dire Ă quelques voisins "Elle est morte avec courage." Qui peut perdre Ă vingt ans son amant, sa vie, et ce qu'on appelle l'honneur, sans regrets et sans dĂ©chirements? Elle sentait toute l'horreur de son Ă©tat, et le faisait sentir par ces mots et par ces regards mourants qui parlent avec tant d'empire. Enfin elle pleurait comme les autres dans les moments oĂÂč elle eut la force de pleurer. Que d'autres cherchent Ă louer les morts fastueuses de ceux qui entrent dans la destruction avec insensibilitĂ© c'est le sort de tous les animaux. Nous ne mourons comme eux que quand l'ĂÂąge ou la maladie nous rend semblables Ă eux par la stupiditĂ© de nos organes. Quiconque fait une grande perte a de grands regrets; s'il les Ă©touffe, c'est qu'il porte la vanitĂ© jusque dans les bras de la mort. Lorsque le moment fatal fut arrivĂ©, tous les assistants jetĂšrent des larmes et des cris. L'IngĂ©nu perdit l'usage de ses sens. Les ĂÂąmes fortes ont des sentiments bien plus violents que les autres quand elles sont tendres. Le bon Gordon le connaissait assez pour craindre qu'Ă©tant revenu Ă lui il ne se donnĂÂąt la mort. On Ă©carta toutes les armes; le malheureux jeune homme s'en aperçut; il dit Ă ses parents et Ă Gordon, sans pleurer, sans gĂ©mir, sans s'Ă©mouvoir "Pensez-vous donc qu'il y ait quelqu'un sur la terre qui ait le droit et le pouvoir de m'empĂÂȘcher de finir ma vie?" Gordon se garda bien de lui Ă©taler ces lieux communs fastidieux par lesquels on essaye de prouver qu'il n'est pas permis d'user de sa libertĂ© pour cesser d'ĂÂȘtre quand on est horriblement mal, qu'il ne faut pas sortir de sa maison quand on ne peut plus y demeurer, que l'homme est sur la terre comme un soldat Ă son poste comme s'il importait Ă l'Etre des ĂÂȘtres que l'assemblage de quelques parties de matiĂšre fĂ»t dans un lieu ou dans un autre; raisons impuissantes qu'un dĂ©sespoir ferme et rĂ©flĂ©chi dĂ©daigne d'Ă©couter, et auxquelles Caton ne rĂ©pondit que par un coup de poignard. Le morne et terrible silence de l'IngĂ©nu; ses yeux sombres, ses lĂšvres tremblantes, les frĂ©missements de son corps, portaient dans l'ĂÂąme de tous ceux qui le regardaient ce mĂ©lange de compassion et d'effroi qui enchaĂne toutes les puissances de l'ĂÂąme, qui exclut tout discours, et qui ne se manifeste que par des mots entrecoupĂ©s. L'hĂÂŽtesse et sa famille Ă©taient accourues; on tremblait de son dĂ©sespoir, on le gardait Ă vue, on observait tous ses mouvements. DĂ©jĂ le corps glacĂ© de la belle Saint-Yves avait Ă©tĂ© portĂ© dans une salle basse, loin des yeux de son amant, qui semblait la chercher encore, quoiqu'il ne fĂ»t plus en Ă©tat de rien voir. Au milieu de ce spectacle de la mort, tandis que le corps est exposĂ© Ă la porte de la maison, que deux prĂÂȘtres Ă cĂÂŽtĂ© d'un bĂ©nitier rĂ©citent des priĂšres d'un air distrait, que des passants jettent quelques gouttes d'eau bĂ©nite sur la biĂšre par oisivetĂ©, que d'autres poursuivent leur chemin avec indiffĂ©rence, que les parents pleurent, et que les amants croient ne pas survivre Ă leur perte, le Saint-Pouange arrive avec l'amie de Versailles. Son goĂ»t passager, n'ayant Ă©tĂ© satisfait qu'une fois, Ă©tait devenu de l'amour. Le refus de ses bienfaits l'avait piquĂ©. Le pĂšre de La Chaise n'aurait jamais pensĂ© Ă venir dans cette maison; mais Saint-Pouange ayant tous les jours devant les yeux l'image de la belle Saint-Yves, brĂ»lant d'assouvir une passion qui par une seule jouissance avait enfoncĂ© dans son coeur l'aiguillon des dĂ©sirs, ne balança pas Ă venir lui-mĂÂȘme chercher celle qu'il n'aurait pas peut-ĂÂȘtre voulu revoir trois fois si elle Ă©tait venue d'elle-mĂÂȘme. Il descend de carrosse; le premier objet qui se prĂ©sente Ă lui est une biĂšre; il dĂ©tourne les yeux avec ce simple dĂ©goĂ»t d'un homme nourri dans les plaisirs, qui pense qu'on doit lui Ă©pargner tout spectacle qui pourrait le ramener Ă la contemplation de la misĂšre humaine. Il veut monter. La femme de Versailles demande par curiositĂ© qui on va enterrer; on prononce le nom de mademoiselle de Saint-Yves. A ce nom, elle pĂÂąlit et poussa un cri affreux; Saint-Pouange se retourne; la surprise et la douleur remplissent son ĂÂąme. Le bon Gordon Ă©tait lĂ , les yeux remplis de larmes. Il interrompt ses tristes priĂšres pour apprendre Ă l'homme de cour toute cette horrible catastrophe. Il lui parle avec cet empire que donnent la douleur et la vertu. Saint-Pouange n'Ă©tait point nĂ© mĂ©chant; le torrent des affaires et des amusements avait emportĂ© son ĂÂąme qui ne se connaissait pas encore. Il ne touchait point Ă la vieillesse, qui endurcit d'ordinaire le coeur des ministres; il Ă©coutait Gordon les yeux baissĂ©s, et il en essuyait quelques pleurs qu'il Ă©tait Ă©tonnĂ© de rĂ©pandre il connut le repentir. "Je veux voir absolument, dit-il, cet homme extraordinaire dont vous m'avez parlĂ©; il m'attendrit presque autant que cette innocente victime dont j'ai causĂ© la mort." Gordon le suit jusqu'Ă la chambre oĂÂč le prieur, la Kerkabon, l'abbĂ© de Saint-Yves et quelques voisins rappelaient Ă la vie le jeune homme retombĂ© en dĂ©faillance. "J'ai fait votre malheur, lui dit le sous-ministre, j'emploierai ma vie Ă le rĂ©parer." La premiĂšre idĂ©e qui vint Ă l'IngĂ©nu fut de le tuer, et de se tuer lui-mĂÂȘme aprĂšs. Rien n'Ă©tait plus Ă sa place; mais il Ă©tait sans armes et veillĂ© de prĂšs. Saint-Pouange ne se rebuta point des refus accompagnĂ©s du reproche, du mĂ©pris, et de l'horreur qu'il avait mĂ©ritĂ©s, et qu'on lui prodigua. Le temps adoucit tout. Mons de Louvois vint enfin Ă bout de faire un excellent officier de l'IngĂ©nu, qui a paru sous un autre nom Ă Paris et dans les armĂ©es, avec l'approbation de tous les honnĂÂȘtes gens, et qui a Ă©tĂ© Ă la fois un guerrier et un philosophe intrĂ©pide. Il ne parlait jamais de cette aventure sans gĂ©mir; et cependant sa consolation Ă©tait d'en parler. Il chĂ©rit la mĂ©moire de la tendre Saint-Yves jusqu'au dernier moment de sa vie. L'abbĂ© de Saint-Yves et le prieur eurent chacun un bon bĂ©nĂ©fice; la bonne Kerkabon aima mieux voir son neveu dans les honneurs militaires que dans le sous-diaconat. La dĂ©vote de Versailles garda les boucles de diamants, et reçut encore un beau prĂ©sent. Le pĂšre Tout-Ă -tous eut des boĂtes de chocolat, de cafĂ©, de sucre candi, de citrons confits, avec les MĂ©ditations du rĂ©vĂ©rend pĂšre Croiset et la Fleur des saints reliĂ©es en maroquin. Le bon Gordon vĂ©cut avec l'IngĂ©nu jusqu'Ă sa mort dans la plus intime amitiĂ©; il eut un bĂ©nĂ©fice aussi, et oublia pour jamais la grĂÂące efficace et le concours concomitant. Il prit pour sa devise malheur est bon Ă quelque chose. Combien d'honnĂÂȘtes gens dans le monde ont pu dire malheur n'est bon Ă rien! La Princesse de Babylone I Le vieux BĂ©lus, roi de Babylone, se croyait le premier homme de la terre car tous ses courtisans le lui disaient, et ses historiographes le lui prouvaient. Ce qui pouvait excuser en lui ce ridicule, c'est qu'en effet ses prĂ©dĂ©cesseurs avaient bĂÂąti Babylone plus de trente mille ans avant lui, et qu'il l'avait embellie. On sait que son palais et son parc, situĂ©s Ă quelques parasanges de Babylone, s'Ă©tendaient entre l'Euphrate et le Tigre, qui baignaient ces rivages enchantĂ©s. Sa vaste maison, de trois mille pas de façade, s'Ă©levait jusqu'aux nues. La plate-forme Ă©taient entourĂ©e d'une balustrade de marbre blanc de cinquante pieds de hauteur, qui portait les statues colossales de tous les rois et de tous les grands hommes de l'empire. Cette plate-forme, composĂ©e de deux rangs de briques couvertes d'une Ă©paisse surface de plomb d'une extrĂ©mitĂ© Ă l'autre, Ă©tait chargĂ©e de douze pieds de terre, et sur cette terre on avait Ă©levĂ© des forĂÂȘts d'oliviers, d'orangers, de citronniers, de palmiers, de gĂ©rofliers, de cocotiers, de cannelliers, qui formaient des allĂ©es impĂ©nĂ©trables aux rayons du soleil. Les eaux de l'Euphrate, Ă©levĂ©es par des pompes dans cent colonnes creusĂ©es, venaient dans ces jardins remplir de vastes bassins de marbre, et, retombant ensuite par d'autres canaux, allaient former dans le parc des cascades de six mille pieds de longueur, et cent mille jets d'eau dont la hauteur pouvait Ă peine ĂÂȘtre aperçue elles retournaient ensuite dans l'Euphrate, dont elles Ă©taient parties. Les jardins de SĂ©miramis, qui Ă©tonnĂšrent l'Asie plusieurs siĂšcles aprĂšs, n'Ă©taient qu'une faible imitation de ces antiques merveilles car, du temps de SĂ©miramis, tout commençait Ă dĂ©gĂ©nĂ©rer chez les hommes et chez les femmes. Mais ce qu'il y avait de plus admirable Ă Babylone, ce qui Ă©clipsait tout le reste, Ă©tait la fille unique du roi, nommĂ©e Formosante. Ce fut d'aprĂšs ses portraits et ses statues que dans la suite des siĂšcles PraxitĂšle sculpta son Aphrodite, et celle qu'on nomma la VĂ©nus aux belles fesses. Quelle diffĂ©rence, ĂÂŽ ciel! de l'original aux copies! Aussi BĂ©lus Ă©tait plus fier de sa fille que de son royaume. Elle avait dix-huit ans il lui fallait un Ă©poux digne d'elle; mais oĂÂč le trouver? Un ancien oracle avait ordonnĂ© que Formosante ne pourrait appartenir qu'Ă celui qui tendrait l'arc de Nembrod. Ce Nembrod, le fort chasseur devant le Seigneur, avait laissĂ© un arc de sept pieds babyloniques de haut, d'un bois d'Ă©bĂšne plus dur que le fer du mont Caucase qu'on travaille dans les forges de Derbent; et nul mortel, depuis Nembrod, n'avait pu bander cet arc merveilleux. Il Ă©tait dit encore que le bras qui aurait tendu cet arc tuerait le lion le plus terrible et le plus dangereux qui serait lĂÂąchĂ© dans le cirque de Babylone. Ce n'Ă©tait pas tout le bandeur de l'arc, le vainqueur du lion devait terrasser tous ses rivaux; mais il devait surtout avoir beaucoup d'esprit, ĂÂȘtre le plus magnifique des hommes, le plus vertueux, et possĂ©der la chose la plus rare qui fĂ»t dans l'univers entier. Il se prĂ©senta trois rois qui osĂšrent disputer Formosante le pharaon d'Egypte, le shac des Indes, et le grand kan des Scythes. BĂ©lus assigna le jour, et le lieu du combat Ă l'extrĂ©mitĂ© de son parc, dans le vaste espace bordĂ© par les eaux de l'Euphrate et du Tigre rĂ©unies. On dressa autour de la lice un amphithĂ©ĂÂątre de marbre qui pouvait contenir cinq cent mille spectateurs. Vis-Ă -vis l'amphithĂ©ĂÂątre Ă©tait le trĂÂŽne du roi, qui devait paraĂtre avec Formosante, accompagnĂ©e de toute la cour; et Ă droite et Ă gauche, entre le trĂÂŽne et l'amphithĂ©ĂÂątre, Ă©taient d'autres trĂÂŽnes et d'autres siĂšges pour les trois rois et pour tous les autres souverains qui seraient curieux de venir voir cette auguste cĂ©rĂ©monie. Le roi d'Egypte arriva le premier, montĂ© sur le boeuf Apis, et tenant en main le sistre d'Isis. Il Ă©tait suivi de deux mille prĂÂȘtres vĂÂȘtus de robes de lin plus blanches que la neige, de deux mille eunuques, de deux mille magiciens, et de deux mille guerriers. Le roi des Indes arriva bientĂÂŽt aprĂšs dans un char traĂnĂ© par douze Ă©lĂ©phants. Il avait une suite encore plus nombreuse et plus brillante que le pharaon d'Egypte. Le dernier qui parut Ă©tait le roi des Scythes. Il n'avait auprĂšs de lui que des guerriers choisis, armĂ©s d'arcs et de flĂšches. Sa monture Ă©tait un tigre superbe qu'il avait domptĂ©, et qui Ă©tait aussi haut que les plus beaux chevaux de Perse. La taille de ce monarque, imposante et majestueuse, effaçait celle de ses rivaux; ses bras nus, aussi nerveux que blancs, semblaient dĂ©jĂ tendre l'arc de Nembrod. Les trois princes se prosternĂšrent d'abord devant BĂ©lus et Formosante. Le roi d'Egypte offrit Ă la princesse les deux plus beaux crocodiles du Nil, deux hippopotames, deux zĂšbres, deux rats d'Egypte, et deux momies, avec les livres du grand HermĂšs, qu'il croyait ĂÂȘtre ce qu'il y avait de plus rare sur la terre. Le roi des Indes lui offrit cent Ă©lĂ©phants qui portaient chacun une tour de bois dorĂ©, et mit Ă ses pieds le Veidam, Ă©crit de la main de Xaca lui-mĂÂȘme. Le roi des Scythes, qui ne savait ni lire ni Ă©crire, prĂ©senta cent chevaux de bataille couverts de housses de peaux de renards noirs. La princesse baissa les yeux devant ses amants, et s'inclina avec des grĂÂąces aussi modestes que nobles. BĂ©lus fit conduire ces monarques sur les trĂÂŽnes qui leur Ă©taient prĂ©parĂ©s. "Que n'ai-je trois filles! leur dit-il, je rendrais aujourd'hui six personnes heureuses." Ensuite il fit tirer au sort Ă qui essayerait le premier l'arc de Nembrod. On mit dans un casque d'or les noms des trois prĂ©tendants. Celui du roi d'Egypte sortit le premier; ensuite parut le nom du roi des Indes. Le roi scythe, en regardant l'arc et ses rivaux, ne se plaignit point d'ĂÂȘtre le troisiĂšme. Tandis qu'on prĂ©parait ces brillantes Ă©preuves, vingt mille pages et vingt mille jeunes filles distribuaient sans confusion des rafraĂchissements aux spectateurs entre les rangs des siĂšges. Tout le monde avouait que les dieux n'avaient Ă©tabli les rois que pour donner tous les jours des fĂÂȘtes, pourvu qu'elles fussent diversifiĂ©es; que la vie est trop courte pour en user autrement; que les procĂšs, les intrigues, la guerre, les disputes des prĂÂȘtres, qui consument la vie humaine, sont des choses absurdes et horribles; que l'homme n'est nĂ© que pour la joie; qu'il n'aimerait pas les plaisirs passionnĂ©ment et continuellement s'il n'Ă©tait pas formĂ© pour eux; que l'essence de la nature humaine est de se rĂ©jouir, et que tout le reste est folie. Cette excellente morale n'a jamais Ă©tĂ© dĂ©mentie que par les faits. Comme on allait commencer ces essais, qui devaient dĂ©cider de la destinĂ©e de Formosante, un jeune inconnu montĂ© sur une licorne, accompagnĂ© de son valet montĂ© de mĂÂȘme, et portant sur le poing un gros oiseau, se prĂ©sente Ă la barriĂšre. Les gardes furent surpris de voir en cet Ă©quipage une figure qui avait l'air de la divinitĂ©. C'Ă©tait, comme on a dit depuis, le visage d'Adonis sur le corps d'Hercule; c'Ă©tait la majestĂ© avec les grĂÂąces. Ses sourcils noirs et ses longs cheveux blonds, mĂ©lange de beautĂ© inconnu Ă Babylone, charmĂšrent l'assemblĂ©e tout l'amphithĂ©ĂÂątre se leva pour le mieux regarder; toutes les femmes de la cour fixĂšrent sur lui des regards Ă©tonnĂ©s. Formosante elle-mĂÂȘme, qui baissait toujours les yeux, les releva et rougit; les trois rois pĂÂąlirent; tous les spectateurs, en comparant Formosante avec l'inconnu, s'Ă©criaient "Il n'y a dans le monde que ce jeune homme qui soit aussi beau que la princesse." Les huissiers, saisis d'Ă©tonnement, lui demandĂšrent s'il Ă©tait roi. L'Ă©tranger rĂ©pondit qu'il n'avait pas cet honneur, mais qu'il Ă©tait venu de fort loin par curiositĂ© pour voir s'il y avait des rois qui fussent dignes de Formosante. On l'introduisit dans le premier rang de l'amphithĂ©ĂÂątre, lui, son valet, ses deux licornes, et son oiseau. Il salua profondĂ©ment BĂ©lus, sa fille, les trois rois, et toute l'assemblĂ©e. Puis il prit place en rougissant. Ses deux licornes se couchĂšrent Ă ses pieds, son oiseau se percha sur son Ă©paule, et son valet, qui portait un petit sac, se mit Ă cĂÂŽtĂ© de lui. Les Ă©preuves commencĂšrent. On tira de son Ă©tui d'or l'arc de Nembrod. Le grand maĂtre des cĂ©rĂ©monies, suivi de cinquante pages et prĂ©cĂ©dĂ© de vingt trompettes, le prĂ©senta au roi d'Egypte, qui le fit bĂ©nir par ses prĂÂȘtres; et, l'ayant posĂ© sur la tĂÂȘte du boeuf Apis, il ne douta pas de remporter cette premiĂšre victoire. Il descend au milieu de l'arĂšne, il essaie, il Ă©puise ses forces, il fait des contorsions qui excitent le rire de l'amphithĂ©ĂÂątre, et qui font mĂÂȘme sourire Formosante. Son grand aumĂÂŽnier s'approcha de lui "Que Votre MajestĂ©, lui dit-il, renonce Ă ce vain honneur, qui n'est que celui des muscles et des nerfs; vous triompherez dans tout le reste. Vous vaincrez le lion, puisque vous avez le sabre d'Osiris. La princesse de Babylone doit appartenir au prince qui a le plus d'esprit, et vous avez devinĂ© des Ă©nigmes. Elle doit Ă©pouser le plus vertueux, vous l'ĂÂȘtes, puisque vous avez Ă©tĂ© Ă©levĂ© par les prĂÂȘtres d'Egypte. Le plus gĂ©nĂ©reux doit l'emporter, et vous avez donnĂ© les deux plus beaux crocodiles et les deux plus beaux rats qui soient dans le Delta. Vous possĂ©dez le boeuf Apis et les livres d'HermĂšs, qui sont la chose la plus rare de l'univers. Personne ne peut vous disputer Formosante. - Vous avez raison, dit le roi d'Egypte", et il se remit sur son trĂÂŽne. On alla mettre l'arc entre les mains du roi des Indes. Il en eut des ampoules pour quinze jours, et se consola en prĂ©sumant que le roi des Scythes ne serait pas plus heureux que lui. Le Scythe mania l'arc Ă son tour. Il joignait l'adresse Ă la force l'arc parut prendre quelque Ă©lasticitĂ© entre ses mains; il le fit un peu plier, mais jamais il ne put venir Ă bout de le tendre. L'amphithĂ©ĂÂątre, Ă qui la bonne mine de ce prince inspirait des inclinations favorables, gĂ©mit de son peu de succĂšs, et jugea que la belle princesse ne serait jamais mariĂ©e. Alors le jeune inconnu descendit d'un saut dans l'arĂšne, et, s'adressant au roi des Scythes "Que Votre MajestĂ©, lui dit-il, ne s'Ă©tonne point de n'avoir pas entiĂšrement rĂ©ussi. Ces arcs d'Ă©bĂšne se font dans mon pays; il n'y a qu'un certain tour Ă donner. Vous avez beaucoup plus de mĂ©rite Ă l'avoir fait plier que je n'en peux avoir Ă le tendre." AussitĂÂŽt il prit une flĂšche, l'ajusta sur la corde, tendit l'arc de Membrod, et fit voler la flĂšche bien au-delĂ des barriĂšres. Un million de mains applaudit Ă ce prodige. Babylone retentit d'acclamations, et toutes les femmes disaient "Quel bonheur qu'un si beau garçon ait tant de force!" Il tira ensuite de sa poche une petite lame d'ivoire, Ă©crivit sur cette lame avec une aiguille d'or, attacha la tablette d'ivoire Ă l'arc, et prĂ©senta le tout Ă la princesse avec une grĂÂące qui ravissait tous les assistants. Puis il alla modestement se remettre Ă sa place entre son oiseau et son valet. Babylone entiĂšre Ă©tait dans la surprise; les trois rois Ă©taient confondus, et l'inconnu ne paraissait pas s'en apercevoir. Formosante fut encore plus Ă©tonnĂ©e en lisant sur la tablette d'ivoire attachĂ©e Ă l'arc ces petits vers en beau langage chaldĂ©en L'arc de Nembrod est celui de la guerre; L'arc de l'amour est celui du bonheur; Vous le portez. Par vous ce dieu vainqueur Est devenu le maĂtre de la terre. Trois rois puissants, trois rivaux aujourd'hui, Osent prĂ©tendre Ă l'honneur de vous plaire. Je ne sais pas qui votre coeur prĂ©fĂšre, Mais l'univers sera jaloux de lui. Ce petit madrigal ne fĂÂącha point la princesse. Il fut critiquĂ© par quelques seigneurs de la vieille cour, qui dirent qu'autrefois dans le bon temps on aurait comparĂ© BĂ©lus au soleil, et Formosante Ă la lune, son cou Ă une tour, et sa gorge Ă un boisseau de froment. Ils dirent que l'Ă©tranger n'avait point d'imagination, et qu'il s'Ă©cartait des rĂšgles de la vĂ©ritable poĂ©sie; mais toutes les dames trouvĂšrent les vers fort galants. Elles s'Ă©merveillĂšrent qu'un homme qui bandait si bien un arc eĂ»t tant d'esprit. La dame d'honneur de la princesse lui dit "Madame, voilĂ bien des talents en pure perte. De quoi servira Ă ce jeune homme son esprit et l'arc de BĂ©lus? - A le faire admirer, rĂ©pondit Formosante. - Ah! dit la dame d'honneur entre ses dents, encore un madrigal, et il pourrait bien ĂÂȘtre aimĂ©." Cependant BĂ©lus, ayant consultĂ© ses mages, dĂ©clara qu'aucun des trois rois n'ayant pu bander l'arc de Nembrod, il n'en fallait pas moins marier sa fille, et qu'elle appartiendrait Ă celui qui viendrait Ă bout d'abattre le grand lion qu'on nourrissait exprĂšs dans sa mĂ©nagerie. Le roi d'Egypte, qui avait Ă©tĂ© Ă©levĂ© dans toute la sagesse de son pays, trouva qu'il Ă©tait fort ridicule d'exposer un roi aux bĂÂȘtes pour le marier. Il avouait que la possession de Formosante Ă©tait d'un grand prix; mais il prĂ©tendait que, si le lion l'Ă©tranglait, il ne pourrait jamais Ă©pouser cette belle Babylonienne. Le roi des Indes entra dans les sentiments de l'Egyptien; tous deux conclurent que le roi de Babylone se moquait d'eux; qu'il fallait faire venir des armĂ©es pour le punir; qu'ils avaient assez de sujets qui se tiendraient fort honorĂ©s de mourir au service de leurs maĂtres, sans qu'il en coĂ»tĂÂąt un cheveu Ă leurs tĂÂȘtes sacrĂ©es; qu'ils dĂ©trĂÂŽneraient aisĂ©ment le roi de Babylone, et qu'ensuite ils tireraient au sort la belle Formosante. Cet accord Ă©tant fait, les deux rois dĂ©pĂÂȘchĂšrent chacun dans leur pays un ordre exprĂšs d'assembler une armĂ©e de trois cent mille hommes pour enlever Formosante. Cependant le roi des Scythes descendit seul dans l'arĂšne, le cimeterre Ă la main. Il n'Ă©tait pas Ă©perdument Ă©pris des charmes de Formosante; la gloire avait Ă©tĂ© jusque-lĂ sa seule passion; elle l'avait conduit Ă Babylone. Il voulait faire voir que si les rois de l'Inde et de l'Egypte Ă©taient assez prudents pour ne se pas compromettre avec des lions, il Ă©tait assez courageux pour ne pas dĂ©daigner ce combat, et qu'il rĂ©parerait l'honneur du diadĂšme. Sa rare valeur ne lui permit pas seulement de se servir du secours de son tigre. Il s'avance seul, lĂ©gĂšrement armĂ©, couvert d'un casque d'acier garni d'or, ombragĂ© de trois queues de cheval blanches comme la neige. On lĂÂąche contre lui le plus Ă©norme lion qui ait jamais Ă©tĂ© nourri dans les montagnes de l'Anti-Liban. Ses terribles griffes semblaient capables de dĂ©chirer les trois rois Ă la fois, et sa vaste gueule de les dĂ©vorer. Ses affreux rugissements faisaient retentir l'amphithĂ©ĂÂątre. Les deux fiers champions se prĂ©cipitent l'un contre l'autre d'une course rapide. Le courageux Scythe enfonce son Ă©pĂ©e dans le gosier du lion, mais la pointe, rencontrant une de ces Ă©paisses dents que rien ne peut percer, se brise en Ă©clats, et le monstre des forĂÂȘts, furieux de sa blessure, imprimait dĂ©jĂ ses ongles sanglants dans les flancs du monarque. Le jeune inconnu, touchĂ© du pĂ©ril d'un si brave prince, se jette dans l'arĂšne plus prompt qu'un Ă©clair; il coupe la tĂÂȘte du lion avec la mĂÂȘme dextĂ©ritĂ© qu'on a vu depuis dans nos carrousels de jeunes chevaliers adroits enlever des tĂÂȘtes de maures ou des bagues. Puis, tirant une petite boĂte, il la prĂ©sente au roi scythe, en lui disant "Votre MajestĂ© trouvera dans cette petite boĂte le vĂ©ritable dictame qui croĂt dans mon pays. Vos glorieuses blessures seront guĂ©ries en un moment. Le hasard seul vous a empĂÂȘchĂ© de triompher du lion; votre valeur n'en est pas moins admirable." Le roi scythe, plus sensible Ă la reconnaissance qu'Ă la jalousie, remercia son libĂ©rateur, et, aprĂšs l'avoir tendrement embrassĂ©, rentra dans son quartier pour appliquer le dictame sur ses blessures. L'inconnu donna la tĂÂȘte du lion Ă son valet; celui-ci, aprĂšs l'avoir lavĂ©e Ă la grande fontaine qui Ă©tait au-dessous de l'amphithĂ©ĂÂątre, et en avoir fait Ă©coule tout le sang, tira un fer de son petit sac, arracha les quarante dents du lion, et mit Ă leur place quarante diamants d'une Ă©gale grosseur. Son maĂtre, avec sa modestie ordinaire, se remit Ă sa place; il donna la tĂÂȘte du lion Ă son oiseau "Bel oiseau, dit-il, allez porter aux pieds de Formosante ce faible hommage." L'oiseau part, tenant dans une de ses serres le terrible trophĂ©e; il le prĂ©sente Ă la princesse en baissant humblement le cou, et en s'aplatissant devant elle. Les quarante brillants Ă©blouirent tous les yeux. On ne connaissait pas encore cette magnificence dans la superbe Babylone l'Ă©meraude, la topaze, le saphir et le pyrope Ă©taient regardĂ©s encore comme les plus prĂ©cieux ornements. BĂ©lus et toute la cour Ă©taient saisis d'admiration. L'oiseau qui offrait ce prĂ©sent les surprit encore davantage. Il Ă©tait de la taille d'un aigle, mais ses yeux Ă©taient aussi doux et aussi tendres que ceux de l'aigle sont fiers et menaçants. Son bec Ă©tait couleur de rose, et semblait tenir quelque chose de la belle bouche de Formosante. Son cou rassemblait toutes les couleurs de l'iris, mais plus vives et plus brillantes. L'or en mille nuances Ă©clatait sur son plumage. Ses pieds paraissaient un mĂ©lange d'argent et de pourpre; et la queue des beaux oiseaux qu'on attela depuis au char de Junon n'approchait pas de la sienne. L'attention, la curiositĂ©, l'Ă©tonnement, l'extase de toute la cour se partageaient entre les quarante diamants et l'oiseau. Il s'Ă©tait perchĂ© sur la balustrade, entre BĂ©lus et sa fille Formosante; elle le flattait, le caressait, le baisait. Il semblait recevoir ses caresses avec un plaisir mĂÂȘlĂ© de respect. Quand la princesse lui donnait des baisers, il les rendait, et la regardait ensuite avec des yeux attendris. Il recevait d'elle des biscuits et des pistaches, qu'il prenait de sa patte purpurine et argentĂ©e, et qu'il portait Ă son bec avec des grĂÂąces inexprimables. BĂ©lus, qui avait considĂ©rĂ© les diamants avec attention, jugeait qu'une de ses provinces pouvait Ă peine payer un prĂ©sent si riche. Il ordonna qu'on prĂ©parĂÂąt pour l'inconnu des dons encore plus magnifiques que ceux qui Ă©taient destinĂ©s aux trois monarques. "Ce jeune homme, disait-il, est sans doute le fils du roi de la Chine, ou de cette partie du monde qu'on nomme Europe, dont j'ai entendu parler, ou de l'Afrique, qui est, dit-on, voisine du royaume d'Egypte." Il envoya sur-le-champ son grand Ă©cuyer complimenter l'inconnu, et lui demander s'il Ă©tait souverain ou fils du souverain d'un de ces empires, et pourquoi, possĂ©dant de si Ă©tonnants trĂ©sors, il Ă©tait venu avec un valet et un petit sac. Tandis que le grand Ă©cuyer avançait vers l'amphithĂ©ĂÂątre pour s'acquitter de sa commission, arriva un autre valet sur une licorne. Ce valet, adressant la parole au jeune homme, lui dit "Ormar, votre pĂšre touche Ă l'extrĂ©mitĂ© de sa vie, et je suis venu vous en avertir." L'inconnu leva les yeux au ciel, versa des larmes, et ne rĂ©pondit que par ce mot "Partons." Le grand Ă©cuyer, aprĂšs avoir fait les compliments de BĂ©lus au vainqueur du lion, au donneur des quarante diamants, au maĂtre du bel oiseau, demanda au valet de quel royaume Ă©tait souverain le pĂšre de ce jeune hĂ©ros. Le valet rĂ©pondit "Son pĂšre est un vieux berger qui est fort aimĂ© dans le canton." Pendant ce court entretien l'inconnu Ă©tait dĂ©jĂ montĂ© sur sa licorne. Il dit au grand Ă©cuyer "Seigneur, daignez me mettre aux pieds de BĂ©lus et de sa fille. J'ose la supplier d'avoir grand soin de l'oiseau que je lui laisse; il est unique comme elle." En achevant ces mots, il partit comme un Ă©clair; les deux valets le suivirent, et on les perdit de vue. Formosante ne put s'empĂÂȘcher de jeter un grand cri. L'oiseau, se retournant vers l'amphithĂ©ĂÂątre oĂÂč son maĂtre avait Ă©tĂ© assis, parut trĂšs affligĂ© de ne le plus voir. Puis regardant fixement la princesse, et frottant doucement sa belle main de son bec; il sembla se vouer Ă son service. BĂ©lus, plus Ă©tonnĂ© que jamais, apprenant que ce jeune homme si extraordinaire Ă©tait le fils d'un berger, ne put le croire. Il fit courir aprĂšs lui; mais bientĂÂŽt on lui rapporta que les licornes sur lesquelles ces trois hommes couraient ne pouvaient ĂÂȘtre atteintes, et qu'au galop dont elles allaient elles devaient faire cent lieues par jour. II Tout le monde raisonnait sur cette aventure Ă©trange, et s'Ă©puisait en vaines conjectures. Comment le fils d'un berger peut-il donner quarante gros diamants? Pourquoi est-il montĂ© sur une licorne? On s'y perdait; et Formosante, en caressant son oiseau, Ă©tait plongĂ©e dans une rĂÂȘverie profonde. La princesse AldĂ©e, sa cousine issue de germaine, trĂšs bien faite, et presque aussi belle que Formosante, lui dit "Ma cousine, je ne sais pas si ce jeune demi-dieu est le fils d'un berger; mais il me semble qu'il a rempli toutes les conditions attachĂ©es Ă votre mariage. Il a bandĂ© l'arc de Nembrod, il a vaincu le lion, il a beaucoup d'esprit puisqu'il a fait pour vous un assez joli impromptu. AprĂšs les quarante Ă©normes diamants qu'il vous a donnĂ©s, vous ne pouvez nier qu'il ne soit le plus gĂ©nĂ©reux des hommes. Il possĂ©dait dans son oiseau ce qu'il y a de plus rare sur la terre. Sa vertu n'a point d'Ă©gale, puisque, pouvant demeurer auprĂšs de vous, il est parti sans dĂ©libĂ©rer dĂšs qu'il a su que son pĂšre Ă©tait malade. L'oracle est accompli dans tous ses points, exceptĂ© dans celui qui exige qu'il terrasse ses rivaux; mais il fait plus, il a sauvĂ© la vie du seul concurrent qu'il pouvait craindre; et, quand il s'agira de battre les deux autres, je crois que vous ne doutez pas qu'il n'en vienne Ă bout aisĂ©ment. - Tout ce que vous dites est bien vrai, rĂ©pondit Formosante; mais est-il possible que le plus grand des hommes, et peut-ĂÂȘtre mĂÂȘme le plus aimable, soit le fils d'un berger?" La dame d'honneur, se mĂÂȘlant de la conversation, dit que trĂšs souvent ce mot de berger Ă©tait appliquĂ© aux rois; qu'on les appelait bergers, parce qu'ils tondent de fort prĂšs leur troupeau; que c'Ă©tait sans doute une mauvaise plaisanterie de son valet; que ce jeune hĂ©ros n'Ă©tait venu si mal accompagnĂ© que pour faire voir combien son seul mĂ©rite Ă©tait au-dessus du faste des rois, et pour ne devoir Formosante qu'Ă lui-mĂÂȘme. La princesse ne rĂ©pondit qu'en donnant Ă son oiseau mille tendres baisers. On prĂ©parait cependant un grand festin pour les trois rois et pour tous les princes qui Ă©taient venus Ă la fĂÂȘte. La fille et la niĂšce du roi devaient en faire les honneurs. On portait chez les rois des prĂ©sents dignes de la magnificence de Babylone. BĂ©lus, en attendant qu'on servĂt, assembla son conseil sur le mariage de la belle Formosante, et voici comme il parla en grand politique "Je suis vieux, je ne sais plus que faire, ni Ă qui donner ma fille. Celui qui la mĂ©ritait n'est qu'un vil berger, le roi des Indes et celui d'Egypte sont des poltrons; le roi des Scythes me conviendrait assez, mais il n'a rempli aucune des conditions imposĂ©es. Je vais encore consulter l'oracle. En attendant, dĂ©libĂ©rez, et nous conclurons suivant ce que l'oracle aura dit car un roi ne doit se conduire que par l'ordre exprĂšs des dieux immortels." Alors il va dans sa chapelle; l'oracle lui rĂ©pond en peu de mots, suivant sa coutume "Ta fille ne sera mariĂ©e que quand elle aura couru le monde." BĂ©lus, Ă©tonnĂ©, revient au conseil, et rapporte cette rĂ©ponse. Tous les ministres avaient un profond respect pour les oracles; tous convenaient ou feignaient de convenir qu'ils Ă©taient le fondement de la religion; que la raison doit se taire devant eux; que c'est par eux que les rois rĂšgnent sur les peuples, et les mages sur les rois; que sans les oracles il n'y aurait ni vertu ni repos sur la terre. Enfin, aprĂšs avoir tĂ©moignĂ© la plus profonde vĂ©nĂ©ration pour eux, presque tous conclurent que celui-ci Ă©tait impertinent, qu'il ne fallait pas lui obĂ©ir; que rien n'Ă©tait plus indĂ©cent pour une fille, et surtout pour celle du grand roi de Babylone, que d'aller courir sans savoir oĂÂč; que c'Ă©tait le vrai moyen de n'ĂÂȘtre point mariĂ©e, ou de faire un mariage clandestin, honteux et ridicule; qu'en un mot cet oracle n'avait pas le sens commun. Le plus jeune des ministres, nommĂ© Onadase, qui avait plus d'esprit qu'eux, dit que l'oracle entendait sans doute quelque pĂšlerinage de dĂ©votion, et qu'il s'offrait Ă ĂÂȘtre le conducteur de la princesse. Le conseil revint Ă son avis, mais chacun voulut servir d'Ă©cuyer. Le roi dĂ©cida que la princesse pourrait aller Ă trois cents parasanges sur le chemin de l'Arabie, Ă un temple dont le saint avait la rĂ©putation de procurer d'heureux mariages aux filles, et que ce serait le doyen du conseil qui l'accompagnerait. AprĂšs cette dĂ©cision on alla souper. III Au milieu des jardins, entre deux cascades, s'Ă©levait un salon ovale de trois cents pieds de diamĂštre, dont la voĂ»te d'azur semĂ©e d'Ă©toiles d'or reprĂ©sentait toutes les constellations avec les planĂštes, chacune Ă leur vĂ©ritable place, et cette voĂ»te tournait, ainsi que le ciel, par des machines aussi invisibles que le sont celles qui dirigent les mouvements cĂ©lestes. Cent mille flambeaux enfermĂ©s dans des cylindres de cristal de roche Ă©clairaient les dehors et l'intĂ©rieur de la salle Ă manger. Un buffet en gradins portait vingt mille vases ou plats d'or; et vis-Ă -vis le buffet d'autres gradins Ă©taient remplis de musiciens. Deux autres amphithĂ©ĂÂątres Ă©taient chargĂ©s, l'un, des fruits de toutes les saisons; l'autre, d'amphores de cristal oĂÂč brillaient tous les vins de la terre. Les convives prirent leurs places autour d'une table de compartiments qui figuraient des fleurs et des fruits, tous en pierres prĂ©cieuses. La belle Formosante fut placĂ©e entre le roi des Indes et celui d'Egypte. La belle AldĂ©e auprĂšs du roi des Scythes. Il y avait une trentaine de princes, et chacun d'eux Ă©tait Ă cĂÂŽtĂ© d'une des plus belles dames du palais. Le roi de Babylone au milieu, vis-Ă -vis de sa fille, paraissait partagĂ© entre le chagrin de n'avoir pu la marier et le plaisir de la garder encore. Formosante lui demanda la permission de mettre son oiseau sur la table Ă cĂÂŽtĂ© d'elle. Le roi le trouva trĂšs bon. La musique, qui se fit entendre, donna une pleine libertĂ© Ă chaque prince d'entretenir sa voisine. Le festin parut aussi agrĂ©able que magnifique. On avait servi devant Formosante un ragoĂ»t que le roi son pĂšre aimait beaucoup. La princesse dit qu'il fallait le porter devant Sa MajestĂ©; aussitĂÂŽt l'oiseau se saisit du plat avec une dextĂ©ritĂ© merveilleuse et va le prĂ©senter au roi. Jamais on ne fut plus Ă©tonnĂ© Ă souper. BĂ©lus lui fit autant de caresses que sa fille. L'oiseau reprit ensuite son vol pour retourner auprĂšs d'elle. Il dĂ©ployait en volant une si belle queue, ses ailes Ă©tendues Ă©talaient tant de brillantes couleurs, l'or de son plumage jetait un Ă©clat si Ă©blouissant, que tous les yeux ne regardaient que lui. Tous les concertants cessĂšrent leur musique et demeurĂšrent immobiles. Personne ne mangeait, personne ne parlait, on n'entendait qu'un murmure d'admiration. La princesse de Babylone le baisa pendant tout le souper, sans songer seulement s'il y avait des rois dans le monde. Ceux des Indes et d'Egypte sentirent redoubler leur dĂ©pit et leur indignation, et chacun d'eux se promit bien de hĂÂąter la marche de ses trois cent mille hommes pour se venger. Pour le roi des Scythes, il Ă©tait occupĂ© Ă entretenir la belle AldĂ©e son coeur altier, mĂ©prisant sans dĂ©pit les inattentions de Formosante, avait conçu pour elle plus d'indiffĂ©rence que de colĂšre. "Elle est belle, disait-il, je l'avoue; mais elle me paraĂt de ces femmes qui ne sont occupĂ©es que de leur beautĂ©, et qui pensent que le genre humain doit leur ĂÂȘtre bien obligĂ© quand elles daignent se laisser voir en public. On n'adore point des idoles dans mon pays. J'aimerais mieux une laideron complaisante et attentive que cette belle statue. Vous avez, madame, autant de charmes qu'elle, et vous daignez au moins faire conversation avec les Ă©trangers. Je vous avoue, avec la franchise d'un Scythe, que je vous donne la prĂ©fĂ©rence sur votre cousine." Il se trompait pourtant sur le caractĂšre de Formosante elle n'Ă©tait pas si dĂ©daigneuse qu'elle le paraissait; mais son compliment fut trĂšs bien reçu de la princesse AldĂ©e. Leur entretien devint fort intĂ©ressant ils Ă©taient trĂšs contents, et dĂ©jĂ sĂ»rs l'un de l'autre avant qu'on sortĂt de table. AprĂšs le souper, on alla se promener dans les bosquets. Le roi des Scythes et AldĂ©e ne manquĂšrent pas de chercher un cabinet solitaire. AldĂ©e, qui Ă©tait la franchise mĂÂȘme, parla ainsi Ă ce prince "Je ne hais point ma cousine, quoiqu'elle soit plus belle que moi, et qu'elle soit destinĂ©e au trĂÂŽne de Babylone l'honneur de vous plaire me tient lieu d'attraits. Je prĂ©fĂšre la Scythie avec vous Ă la couronne de Babylone sans vous; mais cette couronne m'appartient de droit, s'il y a des droits dans le monde car je suis de la branche aĂnĂ©e de Nembrod; et Formosante n'est que de la cadette. Son grand-pĂšre dĂ©trĂÂŽna le mien, et le fit mourir. - Telle est donc la force du sang dans la maison de Babylone! dit le Scythe. Comment s'appelait votre grand-pĂšre? - Il se nommait AldĂ©e, comme moi. Mon pĂšre avait le mĂÂȘme nom il fut relĂ©guĂ© au fond de l'empire avec ma mĂšre; et BĂ©lus, aprĂšs leur mort, ne craignant rien de moi, voulut bien m'Ă©lever auprĂšs de sa fille; mais il a dĂ©cidĂ© que je ne serais jamais mariĂ©e. - Je veux venger votre pĂšre, et votre grand-pĂšre, et vous, dit le roi des Scythes. Je vous rĂ©ponds que vous serez mariĂ©e; je vous enlĂšverai aprĂšs-demain de grand matin, car il faut dĂner demain avec le roi de Babylone, et je reviendrai soutenir vos droits avec une armĂ©e de trois cent mille hommes. - Je le veux bien", dit la belle AldĂ©e; et, aprĂšs s'ĂÂȘtre donnĂ© leur parole d'honneur, ils se sĂ©parĂšrent. Il y avait longtemps que l'incomparable Formosante s'Ă©tait allĂ©e coucher. Elle avait fait placer Ă cĂÂŽtĂ© de son lit un petit oranger dans une caisse d'argent pour y faire reposer son oiseau. Ses rideaux Ă©taient fermĂ©s; mais elle n'avait nulle envie de dormir. Son coeur et son imagination Ă©taient trop Ă©veillĂ©s. Le charmant inconnu Ă©tait devant ses yeux; elle le voyait tirant une flĂšche avec l'arc de Nembrod; elle le contemplait coupant la tĂÂȘte du lion; elle rĂ©citait son madrigal; enfin elle le voyait s'Ă©chapper de la foule, montĂ© sur sa licorne; alors elle Ă©clatait en sanglots; elle s'Ă©criait avec larmes "Je ne le reverrai donc plus; il ne reviendra pas. - Il reviendra, madame, lui rĂ©pondit l'oiseau du haut de son oranger; peut-on vous avoir vue, et ne pas vous revoir? - O ciel! ĂÂŽ puissances Ă©ternelles! mon oiseau parle le pur chaldĂ©en!" En disant ces mots, elle tire ses rideaux, lui tend les bras; se met Ă genoux sur son lit "Etes-vous un dieu descendu sur la terre? ĂÂȘtes-vous le grand Orosmade cachĂ© sous ce beau plumage? Si vous ĂÂȘtes un dieu, rendez-moi ce beau jeune homme. - Je ne suis qu'une volatile, rĂ©pliqua l'autre; mais je naquis dans le temps que toutes les bĂÂȘtes parlaient encore, et que les oiseaux, les serpents, les ĂÂąnesses, les chevaux, et les griffons s'entretenaient familiĂšrement avec les hommes. Je n'ai pas voulu parler devant le monde, de peur que vos dames d'honneur ne me prissent pour un sorcier je ne veux me dĂ©couvrir qu'Ă vous." Formosante, interdite, Ă©garĂ©e, enivrĂ©e de tant de merveilles, agitĂ©e de l'empressement de faire cent questions Ă la fois, lui demanda d'abord quel ĂÂąge il avait. "Vingt-sept mille neuf cents ans et six mois, madame; je suis de l'ĂÂąge de la petite rĂ©volution du ciel que vos mages appellent la prĂ©cession des Ă©quinoxes et qui s'accomplit en prĂšs de vingt-huit mille de vos annĂ©es. Il y a des rĂ©volutions infiniment plus longues aussi nous avons des ĂÂȘtres beaucoup plus vieux que moi. Il y a vingt-deux mille ans que j'appris le chaldĂ©en dans un de mes voyages. J'ai toujours conservĂ© beaucoup de goĂ»t pour la langue chaldĂ©enne; mais les autres animaux mes confrĂšres ont renoncĂ© Ă parler dans vos climats. - Et pourquoi cela, mon divin oiseau? - HĂ©las! c'est parce que les hommes ont pris enfin l'habitude de nous manger, au lieu de converser et de s'instruire avec nous. Les barbares! ne devaient-ils pas ĂÂȘtre convaincus qu'ayant les mĂÂȘmes organes qu'eux, les mĂÂȘmes sentiments, les mĂÂȘmes besoins, les mĂÂȘmes dĂ©sirs, nous avions ce qui s'appelle une ĂÂąme tout comme eux; que nous Ă©tions leurs frĂšres, et qu'il ne fallait cuire et manger que les mĂ©chants? Nous sommes tellement vos frĂšres que le grand Etre, l'Etre Ă©ternel et formateur, ayant fait un pacte avec les hommes, nous comprit expressĂ©ment dans le traitĂ©. Il vous dĂ©fendit de vous nourrir de notre sang, et Ă nous, de sucer le vĂÂŽtre. "Les fables de votre ancien Locman, traduites en tant de langues, seront un tĂ©moignage Ă©ternellement subsistant de l'heureux commerce que vous avez eu autrefois avec nous. Elles commencent toutes par ces mots Du temps que les bĂÂȘtes parlaient. Il est vrai qu'il y a beaucoup de femmes parmi vous qui parlent toujours Ă leurs chiens; mais ils ont rĂ©solu de ne point rĂ©pondre depuis qu'on les a forcĂ©s Ă coups de fouet d'aller Ă la chasse, et d'ĂÂȘtre les complices du meurtre de nos anciens amis communs, les cerfs, les daims, les liĂšvres et les perdrix. Vous avez encore d'anciens poĂšmes dans lesquels les chevaux parlent, et vos cochers leur adressent la parole tous les jours; mais c'est avec tant de grossiĂšretĂ©, et en prononçant des mots si infĂÂąmes, que les chevaux, qui vous aimaient tant autrefois, vous dĂ©testent aujourd'hui. Le pays oĂÂč demeure votre charmant inconnu, le plus parfait des hommes, est demeurĂ© le seul oĂÂč votre espĂšce sache encore aimer la nĂÂŽtre et lui parler; et c'est la seule contrĂ©e de la terre oĂÂč les hommes soient justes. - Et oĂÂč est-il ce pays de mon cher inconnu? quel est le nom de ce hĂ©ros? comment se nomme son empire? car je ne croirai pas plus qu'il est un berger que je ne crois que vous ĂÂȘtes une chauve-souris. - Son pays, madame, est celui des Gangarides, peuple vertueux et invincible qui habite la rive orientale du Gange. Le nom de mon ami est Amazan. Il n'est pas roi, et je ne sais mĂÂȘme s'il voudrait s'abaisser Ă l'ĂÂȘtre; il aime trop ses compatriotes il est berger comme eux. Mais n'allez pas vous imaginer que ces bergers ressemblent aux vĂÂŽtres, qui, couverts Ă peine de lambeaux dĂ©chirĂ©s, gardent des moutons infiniment mieux habillĂ©s qu'eux; qui gĂ©missent sous le fardeau de la pauvretĂ©, et qui payent Ă un exacteur la moitiĂ© des gages chĂ©tifs qu'ils reçoivent de leurs maĂtres. Les bergers gangarides, nĂ©s tous Ă©gaux, sont les maĂtres des troupeaux innombrables qui couvrent leurs prĂ©s Ă©ternellement fleuris. On ne les tue jamais c'est un crime horrible vers le Gange de tuer et de manger son semblable. Leur laine, plus fine et plus brillante que la plus belle soie, est le plus grand commerce de l'Orient. D'ailleurs la terre des Gangarides produit tout ce qui peut flatter les dĂ©sirs de l'homme. Ces gros diamants qu'Amazan a eu l'honneur de vous offrir sont d'une mine qui lui appartient. Cette licorne que vous l'avez vu monter est la monture ordinaire des Gangarides. C'est le plus bel animal, le plus fier, le plus terrible, et le plus doux qui orne la terre. Il suffirait de cent Gangarides et de cent licornes pour dissiper des armĂ©es innombrables. Il y a environ deux siĂšcles qu'un roi des Indes fut assez fou pour vouloir conquĂ©rir cette nation il se prĂ©senta suivi de dix mille Ă©lĂ©phants et d'un million de guerriers. Les licornes percĂšrent les Ă©lĂ©phants; comme j'ai vu sur votre table des mauviettes enfilĂ©es dans des brochettes d'or. Les guerriers tombaient sous le sabre des Gangarides comme les moissons de riz sont coupĂ©es par les mains des peuples de l'Orient. On prit le roi prisonnier avec plus de six cent mille hommes. On le baigna dans les eaux salutaires du Gange; on le mit au rĂ©gime du pays, qui consiste Ă ne se nourrir que de vĂ©gĂ©taux prodiguĂ©s par la nature pour nourrir tout ce qui respire. Les hommes alimentĂ©s de carnage et abreuvĂ©s de liqueurs fortes ont tous un sang aigri et aduste qui les rend fous en cent maniĂšres diffĂ©rentes. Leur principale dĂ©mence est la fureur de verser le sang de leurs frĂšres, et de dĂ©vaster des plaines fertiles pour rĂ©gner sur des cimetiĂšres. On employa six mois entiers Ă guĂ©rir le roi des Indes de sa maladie. Quand les mĂ©decins eurent enfin jugĂ© qu'il avait le pouls plus tranquille et l'esprit plus rassis, ils en donnĂšrent le certificat au conseil des Gangarides. Ce conseil, ayant pris l'avis des licornes, renvoya humainement le roi des Indes, sa sotte cour et ses imbĂ©ciles guerriers dans leur pays. Cette leçon les rendit sages, et, depuis ce temps, les Indiens respectĂšrent les Gangarides, comme les ignorants qui voudraient s'instruire respectent parmi vous les philosophes chaldĂ©ens, qu'ils ne peuvent Ă©galer. - A propos, mon cher oiseau, lui dit la princesse, y a-t-il une religion chez les Gangarides? - S'il y en a une? Madame, nous nous assemblons pour rendre grĂÂąces Ă Dieu, les jours de la pleine lune, les hommes dans un grand temple de cĂšdre, les femmes dans un autre, de peur des distractions; tous les oiseaux dans un bocage, les quadrupĂšdes sur une belle pelouse. Nous remercions Dieu de tous les biens qu'il nous a faits. Nous avons surtout des perroquets qui prĂÂȘchent Ă merveille. "Telle est la patrie de mon cher Amazan; c'est lĂ que je demeure; j'ai autant d'amitiĂ© pour lui qu'il vous a inspirĂ© d'amour. Si vous m'en croyez, nous partirons ensemble, et vous irez lui rendre sa visite. - Vraiment, mon oiseau, vous faites lĂ un joli mĂ©tier, rĂ©pondit en souriant la princesse, qui brĂ»lait d'envie de faire le voyage, et qui n'osait le dire. - Je sers mon ami, dit l'oiseau; et, aprĂšs le bonheur de vous aimer, le plus grand est celui de servir vos amours." Formosante ne savait plus oĂÂč elle en Ă©tait; elle se croyait transportĂ©e hors de la terre. Tout ce qu'elle avait vu dans cette journĂ©e, tout ce qu'elle voyait, tout ce qu'elle entendait, et surtout ce qu'elle sentait dans son coeur, la plongeait dans un ravissement qui passait de bien loin celui qu'Ă©prouvent aujourd'hui les fortunĂ©s musulmans quand, dĂ©gagĂ©s de leurs liens terrestres, ils se voient dans le neuviĂšme ciel entre les bras de leurs houris, environnĂ©s et pĂ©nĂ©trĂ©s de la gloire et de la fĂ©licitĂ© cĂ©lestes. IV Elle passa toute la nuit Ă parler d'Amazan. Elle ne l'appelait plus que son berger; et c'est depuis ce temps-lĂ que les noms de berger et d'amant sont toujours employĂ©s l'un pour l'autre chez quelques nations. TantĂÂŽt elle demandait Ă l'oiseau si Amazan avait eu d'autres maĂtresses. Il rĂ©pondait que non, et elle Ă©tait au comble de la joie. TantĂÂŽt elle voulait savoir Ă quoi il passait sa vie; et elle apprenait avec transport qu'il l'employait Ă faire du bien, Ă cultiver les arts, Ă pĂ©nĂ©trer les secrets de la nature, Ă perfectionner son ĂÂȘtre. TantĂÂŽt elle voulait savoir si l'ĂÂąme de son oiseau Ă©tait de la mĂÂȘme nature que celle de son amant; pourquoi il avait vĂ©cu prĂšs de vingt-huit mille ans, tandis que son amant n'en avait que dix-huit ou dix-neuf. Elle faisait cent questions pareilles, auxquelles l'oiseau rĂ©pondait avec une discrĂ©tion qui irritait sa curiositĂ©. Enfin, le sommeil ferma leurs yeux, et livra Formosante Ă la douce illusion des songes envoyĂ©s par les dieux, qui surpassent quelquefois la rĂ©alitĂ© mĂÂȘme, et que toute la philosophie des ChaldĂ©ens a bien de la peine Ă expliquer. Formosante ne s'Ă©veilla que trĂšs tard. Il Ă©tait petit jour chez elle quand le roi son pĂšre entra dans sa chambre. L'oiseau reçut Sa MajestĂ© avec une politesse respectueuse, alla au-devant de lui, battit des ailes, allongea son cou, et se remit sur son oranger. Le roi s'assit sur le lit de sa fille, que ses rĂÂȘves avaient encore embellie. Sa grande barbe s'approcha de ce beau visage, et aprĂšs lui avoir donnĂ© deux baisers, il lui parla en ces mots "Ma chĂšre fille, vous n'avez pu trouver hier un mari, comme je l'espĂ©rais; il vous en faut un pourtant le salut de mon empire l'exige. J'ai consultĂ© l'oracle, qui, comme vous savez, ne ment jamais, et qui dirige toute ma conduite. Il m'a ordonnĂ© de vous faire courir le monde. Il faut que vous voyagiez. - Ah! chez les Gangarides sans doute", dit la princesse; et en prononçant ces mots, qui lui Ă©chappaient, elle sentit bien qu'elle disait une sottise. Le roi, qui ne savait pas un mot de gĂ©ographie, lui demanda ce qu'elle entendait par des Gangarides. Elle trouva aisĂ©ment une dĂ©faite. Le roi lui apprit qu'il fallait faire un pĂšlerinage; qu'il avait nommĂ© les personnes de sa suite, le doyen des conseillers d'Etat, le grand aumĂÂŽnier, une dame d'honneur, un mĂ©decin, un apothicaire, et son oiseau, avec tous les domestiques convenables. Formosante, qui n'Ă©tait jamais sortie du palais du roi son pĂšre, et qui jusqu'Ă la journĂ©e des trois rois et d'Amazan n'avait menĂ© qu'une vie trĂšs insipide dans l'Ă©tiquette du faste et dans l'apparence des plaisirs, fut ravie d'avoir un pĂšlerinage Ă faire. "Qui sait, disait-elle tout bas Ă son coeur, si les dieux n'inspireront pas Ă mon cher Gangaride le mĂÂȘme dĂ©sir d'aller Ă la mĂÂȘme chapelle, et si je n'aurai pas le bonheur de revoir le pĂšlerin?" Elle remercia tendrement son pĂšre, en lui disant qu'elle avait eu toujours une secrĂšte dĂ©votion pour le saint chez lequel on l'envoyait. BĂ©lus donna un excellent dĂner Ă ses hĂÂŽtes; il n'y avait que des hommes. C'Ă©taient tous gens fort mal assortis rois, princes, ministres, pontifes, tous jaloux les uns des autres, tous pesant leurs paroles, tous embarrassĂ©s de leurs voisins et d'eux-mĂÂȘmes. Le repas fut triste, quoiqu'on y bĂ»t beaucoup. Les princesses restĂšrent dans leurs appartements, occupĂ©es chacune de leur dĂ©part. Elles mangĂšrent Ă leur petit couvert. Formosante ensuite alla se promener dans les jardins avec son cher oiseau, qui, pour l'amuser, vola d'arbre en arbre en Ă©talant sa superbe queue et son divin plumage. Le roi d'Egypte, qui Ă©tait chaud de vin, pour ne pas dire ivre, demanda un arc et des flĂšches Ă un de ses pages. Ce prince Ă©tait Ă la vĂ©ritĂ© l'archer le plus maladroit de son royaume. Quand il tirait au blanc, la place oĂÂč l'on Ă©tait le plus en sĂ»retĂ© Ă©tait le but oĂÂč il visait. Mais le bel oiseau, en volant aussi rapidement que la flĂšche, se prĂ©senta lui-mĂÂȘme au coup, et tomba tout sanglant entre les bras de Formosante. L'Egyptien, en riant d'un sot rire, se retira dans son quartier. La princesse perça le ciel de ses cris, fondit en larmes, se meurtrit les joues et la poitrine. L'oiseau mourant lui dit tout bas "BrĂ»lez-moi, et ne manquez pas de porter mes cendres vers l'Arabie Heureuse, Ă l'orient de l'ancienne ville d'Aden ou d'Eden, et de les exposer au soleil sur un petit bĂ»cher de gĂ©rofle et de cannelle." AprĂšs avoir profĂ©rĂ© ces paroles, il expira. Formosante resta longtemps Ă©vanouie et ne revit le jour que pour Ă©clater en sanglots. Son pĂšre, partageant sa douleur et faisant des imprĂ©cations contre le roi d'Egypte, ne douta pas que cette aventure n'annonçĂÂąt un avenir sinistre. Il alla vite consulter l'oracle de sa chapelle. L'oracle rĂ©pondit "MĂ©lange de tout; mort vivant, infidĂ©litĂ© et constance, perte et gain, calamitĂ©s et bonheur." Ni lui ni son conseil n'y purent rien comprendre; mais enfin il Ă©tait satisfait d'avoir rempli ses devoirs de dĂ©votion. Sa fille, Ă©plorĂ©e, pendant qu'il consultait l'oracle, fit rendre Ă l'oiseau les honneurs funĂšbres qu'il avait ordonnĂ©s, et rĂ©solut de le porter en Arabie au pĂ©ril de ses jours. Il fut brĂ»lĂ© dans du lin incombustible avec l'oranger sur lequel il avait couchĂ©; elle en recueillit la cendre dans un petit vase d'or tout entourĂ© d'escarboucles et des diamants qu'on ĂÂŽta de la gueule du lion. Que ne put-elle, au lieu d'accomplir ce devoir funeste, brĂ»ler tout en vie le dĂ©testable roi d'Egypte! C'Ă©tait lĂ tout son dĂ©sir. Elle fit tuer, dans son dĂ©pit, les deux crocodiles, ses deux hippopotames, ses deux zĂšbres, ses deux rats, et fit jeter ses deux momies dans l'Euphrate; si elle avait tenu son boeuf Apis, elle ne l'aurait pas Ă©pargnĂ©. Le roi d'Egypte, outrĂ© de cet affront, partit sur-le-champ pour faire avancer ses trois cent mille hommes. Le roi des Indes, voyant partir son alliĂ©, s'en retourna le jour mĂÂȘme, dans le ferme dessein de joindre ses trois cent mille Indiens Ă l'armĂ©e Ă©gyptienne. Le roi de Scythie dĂ©logea dans la nuit avec la princesse AldĂ©e, bien rĂ©solu de venir combattre pour elle Ă la tĂÂȘte de trois cent mille Scythes, et de lui rendre l'hĂ©ritage de Babylone, qui lui Ă©tait dĂ», puisqu'elle descendait de la branche aĂnĂ©e. De son cĂÂŽtĂ© la belle Formosante se mit en route Ă trois heures du matin avec sa caravane de pĂšlerins, se flattant bien qu'elle pourrait aller en Arabie exĂ©cuter les derniĂšres volontĂ©s de son oiseau, et que la justice des dieux immortels lui rendrait son cher Amazan sans qui elle ne pouvait plus vivre. Ainsi, Ă son rĂ©veil, le roi de Babylone ne trouva plus personne. "Comme les grandes fĂÂȘtes se terminent, disait-il, et comme elles laissent un vide Ă©tonnant dans l'ĂÂąme, quand le fracas est passĂ©." Mais il fut transportĂ© d'une colĂšre vraiment royale lorsqu'il apprit qu'on avait enlevĂ© la princesse AldĂ©e. Il donna ordre qu'on Ă©veillĂÂąt tous ses ministres, et qu'on assemblĂÂąt le conseil. En attendant qu'ils vinssent, il ne manqua pas de consulter son oracle; mais il ne put jamais en tirer que ces paroles si cĂ©lĂšbres depuis dans tout l'univers Quand on ne marie pas les filles, elles se marient elles-mĂÂȘmes. AussitĂÂŽt l'ordre fut donnĂ© de faire marcher trois cent mille hommes contre le roi des Scythes. VoilĂ donc la guerre la plus terrible allumĂ©e de tous les cĂÂŽtĂ©s; et elle fut produite par les plaisirs de la plus belle fĂÂȘte qu'on ait jamais donnĂ©e sur la terre. L'Asie allait ĂÂȘtre dĂ©solĂ©e par quatre armĂ©es de trois cent mille combattants chacune. On sent bien que la guerre de Troie, qui Ă©tonna le monde quelques siĂšcles aprĂšs, n'Ă©tait qu'un jeu d'enfants en comparaison; mais aussi on doit considĂ©rer que dans la querelle des Troyens il ne s'agissait que d'une vieille femme fort libertine qui s'Ă©tait fait enlever deux fois, au lieu qu'ici il s'agissait de deux filles et d'un oiseau. Le roi des Indes allait attendre son armĂ©e sur le grand et magnifique chemin qui conduisait alors en droiture de Babylone Ă Cachemire. Le roi des Scythes courait avec AldĂ©e par la belle route qui menait au mont ImmaĂÂŒs. Tous ces chemins ont disparu dans la suite par le mauvais gouvernement. Le roi d'Egypte avait marchĂ© Ă l'occident, et cĂÂŽtoyait la petite mer MĂ©diterranĂ©e, que les ignorants HĂ©breux ont depuis nommĂ©e la Grande Mer. A l'Ă©gard de la belle Formosante, elle suivait le chemin de Bassora, plantĂ© de hauts palmiers qui fournissaient un ombrage Ă©ternel et des fruits dans toutes les saisons. Le temple oĂÂč elle allait en pĂšlerinage Ă©tait dans Bassora mĂÂȘme. Le saint Ă qui ce temple avait Ă©tĂ© dĂ©diĂ© Ă©tait Ă peu prĂšs dans le goĂ»t de celui qu'on adora depuis Ă Lampsaque. Non seulement il procurait des maris aux filles, mais il tenait lieu souvent de mari. C'Ă©tait le saint le plus fĂÂȘtĂ© de toute l'Asie. Formosante ne se souciait point du tout du saint de Bassora elle n'invoquait que son cher berger gangaride, son bel Amazan. Elle comptait s'embarquer Ă Bassora, et entrer dans l'Arabie Heureuse pour faire ce que l'oiseau mort avait ordonnĂ©. A la troisiĂšme couchĂ©e, Ă peine Ă©tait-elle entrĂ©e dans une hĂÂŽtellerie oĂÂč se fourriers avaient tout prĂ©parĂ© pour elle, qu'elle apprit que le roi d'Egypte y entrait aussi. Instruit de la marche de la princesse par ses espions, il avait sur-le-champ changĂ© de route, suivi d'une nombreuse escorte. Il arrive; il fait placer des sentinelles Ă toutes les portes; il monte dans la chambre de la belle Formosante, et lui dit "Mademoiselle, c'est vous prĂ©cisĂ©ment que je cherchais; vous avez fait trĂšs peu de cas de moi lorsque j'Ă©tais Ă Babylone; il est juste de punir les dĂ©daigneuses et les capricieuses vous aurez, s'il vous plaĂt, la bontĂ© de souper avec moi ce soir; vous n'aurez point d'autre lit que le mien, et je me conduirai avec vous selon que j'en serai content." Formosante vit bien qu'elle n'Ă©tait pas la plus forte; elle savait que le bon esprit consiste Ă se conformer Ă sa situation; elle prit le parti de se dĂ©livrer du roi d'Egypte par une innocente adresse elle le regarda du coin de l'oeil, ce qui plusieurs siĂšcles aprĂšs s'est appelĂ© lorgner; et voici comme elle lui parla avec une modestie, une grĂÂące, une douceur, un embarras, et une foule de charmes qui auraient rendu fou le plus sage des hommes, et aveuglĂ© le plus clairvoyant "Je vous avoue, monsieur, que je baissai toujours les yeux devant vous quand vous fĂtes l'honneur au roi mon pĂšre de venir chez lui. Je craignais mon coeur, je craignais ma simplicitĂ© trop naĂÂŻve je tremblais que mon pĂšre et vos rivaux ne s'aperçussent de la prĂ©fĂ©rence que je vous donnais, et que vous mĂ©ritez si bien. Je puis Ă prĂ©sent me livrer Ă mes sentiments. Je jure par le boeuf Apis, qui est, aprĂšs vous, tout ce que je respecte le plus au monde, que vos propositions m'ont enchantĂ©e. J'ai dĂ©jĂ soupĂ© avec vous chez le roi mon pĂšre; j'y souperai encore bien ici sans qu'il soit de la partie; tout ce que je vous demande, c'est que votre grand aumĂÂŽnier boive avec nous; il m'a paru Ă Babylone un trĂšs bon convive; j'ai d'excellent vin de Chiras, je veux vous en faire goĂ»ter Ă tous deux A l'Ă©gard de votre seconde proposition, elle est trĂšs engageante; mais il ne convient pas Ă une fille bien nĂ©e d'en parler qu'il vous suffise de savoir que je vous regarde comme le plus grand des rois et le plus aimable des hommes." Ce discours fit tourner la tĂÂȘte au roi d'Egypte; il voulut bien que l'aumĂÂŽnier fĂ»t en tiers. "J'ai encore une grĂÂące Ă vous demander, lui dit la princesse; c'est de permettre que mon apothicaire vienne me parler les filles ont toujours de certaines petites incommoditĂ©s qui demandent de certains soins, comme vapeurs de tĂÂȘte, battements de coeur, coliques, Ă©touffements, auxquels il faut mettre un certain ordre dans de certaines circonstances; en un mot, j'ai un besoin pressant de mon apothicaire, et j'espĂšre que vous ne me refuserez pas cette lĂ©gĂšre marque d'amour. - Mademoiselle, lui rĂ©pondit le roi d'Egypte, quoiqu'un apothicaire ait des vues prĂ©cisĂ©ment opposĂ©es aux miennes, et que les objets de son art soient le contraire de ceux du mien, je sais trop bien vivre pour vous refuser une demande si juste je vais ordonner qu'il vienne vous parler en attendant le souper; je conçois que vous devez ĂÂȘtre un peu fatiguĂ©e du voyage; vous devez aussi avoir besoin d'une femme de chambre, vous pourrez faire venir celle qui vous agrĂ©era davantage; j'attendrai ensuite vos ordres et votre commoditĂ©." Il se retira; l'apothicaire et la femme de chambre nommĂ©e Irla arrivĂšrent. La princesse avait en elle une entiĂšre confiance; elle lui ordonna de faire apporter six bouteilles de vin de Chiras pour le souper, et d'en faire boire de pareil Ă tous les sentinelles qui tenaient ses officiers aux arrĂÂȘts; puis elle recommanda Ă l'apothicaire de faire mettre dans toutes les bouteilles certaines drogues de sa pharmacie qui faisaient dormir les gens vingt-quatre heures, et dont il Ă©tait toujours pourvu. Elle fut ponctuellement obĂ©ie. Le roi revint avec le grand aumĂÂŽnier au bout d'une demi-heure; le souper fut trĂšs gai; le roi et le prĂÂȘtre vidĂšrent les six bouteilles, et avouĂšrent qu'il n'y avait pas de si bon vin en Egypte; la femme de chambre eut soin d'en faire boire aux domestiques qui avaient servi. Pour la princesse, elle eut grande attention de n'en point boire, disant que son mĂ©decin l'avait mise au rĂ©gime. Tout fut bientĂÂŽt endormi. L'aumĂÂŽnier du roi d'Egypte avait la plus belle barbe que pĂ»t porter un homme de sa sorte. Formosante la coupa trĂšs adroitement; puis, l'ayant fait coudre Ă un petit ruban, elle l'attacha Ă son menton. Elle s'affubla de la robe du prĂÂȘtre et de toutes les marques de sa dignitĂ©, habilla sa femme de chambre en sacristain de la dĂ©esse Isis; enfin, s'Ă©tant munie de son urne et de ses pierreries, elle sortit de l'hĂÂŽtellerie Ă travers les sentinelles, qui dormaient comme leur maĂtre. La suivante avait eu soin de faire tenir Ă la porte deux chevaux prĂÂȘts. La princesse ne pouvait mener avec elle aucun des officiers de sa suite ils auraient Ă©tĂ© arrĂÂȘtĂ©s par les grandes gardes. Formosante et Irla passĂšrent Ă travers des haies de soldats qui, prenant la princesse pour le grand prĂÂȘtre, l'appelaient mon rĂ©vĂ©rendissime pĂšre en Dieu, et lui demandaient sa bĂ©nĂ©diction. Les deux fugitives arrivent en vingt-quatre heures Ă Bassora, avant que le roi fĂ»t Ă©veillĂ©. Elles quittĂšrent alors leur dĂ©guisements; qui eĂ»t pu donner des soupçons. Elles frĂ©tĂšrent au plus vite un vaisseau qui les porta, par le dĂ©troit d'Ormus, au beau rivage d'Eden, dans l'Arabie Heureuse. C'est cet Eden dont les jardins furent si renommĂ©s qu'on en fit depuis la demeure des justes; ils furent le modĂšle des Champs ElysĂ©es, des jardins des HespĂ©rides, et de ceux des Ăles FortunĂ©es car, dans ces climats chauds, les hommes n'imaginĂšrent point de plus grande bĂ©atitude que les ombrages et les murmures de eaux. Vivre Ă©ternellement dans les cieux avec l'Etre suprĂÂȘme, ou aller se promener dans le jardin, dans le paradis, fut la mĂÂȘme chose pour les hommes, qui parlent toujours sans s'entendre, et qui n'ont pu guĂšre avoir encore d'idĂ©es nettes ni d'expressions justes. DĂšs que la princesse se vit dans cette terre, son premier soin fut de rendre Ă son cher oiseau les honneurs funĂšbres qu'il avait exigĂ©s d'elle. Ses belles mains dressĂšrent un petit bĂ»cher de gĂ©rofle et de cannelle. Quelle fut sa surprise lorsqu'ayant rĂ©pandu les cendres de l'oiseau sur ce bĂ»cher, elle le vit s'enflammer de lui-mĂÂȘme! Tout fut bientĂÂŽt consumĂ©. Il ne parut, Ă la place des cendres, qu'un gros oeuf dont elle vit sortir son oiseau plus brillant qu'il ne l'avait jamais Ă©tĂ©. Ce fut le plus beau des moments que la princesse eĂ»t Ă©prouvĂ©s dans toute sa vie; il n'y en avait qu'un qui pĂ»t lui ĂÂȘtre plus cher elle le dĂ©sirait, mais elle ne l'espĂ©rait pas. "Je vois bien, dit-elle Ă l'oiseau, que vous ĂÂȘtes le phĂ©nix dont on m'avait tant parlĂ©. Je suis prĂÂȘte Ă mourir d'Ă©tonnement et de joie. Je ne croyais point Ă la rĂ©surrection; mais mon bonheur m'en a convaincue. - La rĂ©surrection, madame, lui dit le phĂ©nix, est la chose du monde la plus simple. Il n'est pas plus surprenant de naĂtre deux fois qu'une. Tout est rĂ©surrection dans ce monde; les chenilles ressuscitent en papillons; un noyau mis en terre ressuscite en arbre; tous les animaux ensevelis dans la terre ressuscitent en herbes, en plantes, et nourrissent d'autres animaux dont ils font bientĂÂŽt une partie de la substance toutes les particules qui composaient les corps sont changĂ©es en diffĂ©rents ĂÂȘtres. Il est vrai que je suis le seul Ă qui le puissant Orosmade ait fait la grĂÂące de ressusciter dans sa propre nature." Formosante, qui, depuis le jour qu'elle vit Amazan et le phĂ©nix pour la premiĂšre fois, avait passĂ© toutes ses heures Ă s'Ă©tonner, lui dit "Je conçois bien que le grand Etre ait pu former de vos cendres un phĂ©nix Ă peu prĂšs semblable Ă vous; mais que vous soyez prĂ©cisĂ©ment la mĂÂȘme personne, que vous ayez la mĂÂȘme ĂÂąme, j'avoue que je ne le comprends pas bien clairement. Qu'est devenue votre ĂÂąme pendant que je vous portais dans ma poche aprĂšs votre mort? - Eh! mon Dieu! madame, n'est-il pas aussi facile au grand Orosmade de continuer son action sur une petite Ă©tincelle de moi-mĂÂȘme que de commencer cette action? Il m'avait accordĂ© auparavant le sentiment, la mĂ©moire et la pensĂ©e; il me les accorde encore; qu'il ait attachĂ© cette faveur Ă un atome de feu Ă©lĂ©mentaire cachĂ© dans moi, ou Ă l'assemblage de mes organes, cela ne fait rien au fond les phĂ©nix et les homme ignoreront toujours comment la chose se passe; mais la plus grande grĂÂące que l'Etre suprĂÂȘme m'ait accordĂ©e est de me faire renaĂtre pour vous. Que ne puis-je passer les vingt-huit mille ans que j'ai encore Ă vivre jusqu'Ă ma prochaine rĂ©surrection entre vous et mon cher Amazan! - Mon phĂ©nix, lui repartit la princesse, songez que les premiĂšres paroles que vous me dĂtes Ă Babylone, et que je n'oublierai jamais, me flattĂšrent de l'espĂ©rance de revoir ce cher berger que j'idolĂÂątre il faut absolument que nous allions ensemble chez les Gangarides, et que je le ramĂšne Ă Babylone. - C'est bien mon dessein, dit le phĂ©nix; il n'y a pas un moment Ă perdre. Il faut aller trouver Amazan par le plus court chemin, c'est-Ă -dire par les airs. Il y a dans l'Arabie Heureuse deux griffons, mes amis intimes, qui ne demeurent qu'Ă cent cinquante milles d'ici je vais leur Ă©crire par la poste aux pigeons; ils viendront avant la nuit. Nous aurons tout le temps de vous faire travailler un petit canapĂ© commode avec des tiroirs oĂÂč l'on mettra vos provisions de bouche. Vous serez trĂšs Ă votre aise dans cette voiture avec votre demoiselle. Les deux griffons sont les plus vigoureux de leur espĂšce; chacun d'eux tiendra un des bras du canapĂ© entre ses griffes. Mais, encore une fois, les moments sont chers." Il alla sur-le champ avec Formosante commander le canapĂ© Ă un tapissier de sa connaissance. Il fut achevĂ© en quatre heures. On mit dans le tiroirs des petits pains Ă la reine, des biscuits meilleurs que ceux de Babylone, des poncires, des ananas, des cocos, des pistaches, et du vin d'Eden, qui l'emporte sur le vin de Chiras autant que celui de Chiras est au-dessus de celui de Suresne. Le canapĂ© Ă©tait aussi lĂ©ger que commode et solide. Les deux griffons arrivĂšrent dans Eden Ă point nommĂ©. Formosante et Irla se placĂšrent dans la voiture. Les deux griffons l'enlevĂšrent comme une plume. Le phĂ©nix tantĂÂŽt volait auprĂšs, tantĂÂŽt se perchait sur le dossier. Les deux griffons cinglĂšrent vers le Gange avec la rapiditĂ© d'une flĂšche qui fend les airs. On ne se reposait que la nuit pendant quelques moments pour manger, et pour faire boire un coup aux deux voituriers. On arriva enfin chez les Gangarides. Le coeur de la princesse palpitait d'espĂ©rance, d'amour et de joie. Le phĂ©nix fit arrĂÂȘter la voiture devant la maison d'Amazan il demande Ă lui parler; mais il y avait trois heures qu'il en Ă©tait parti, sans qu'on sĂ»t oĂÂč il Ă©tait allĂ©. Il n'y a point de termes dans la langue mĂÂȘme des Gangarides qui puissent exprimer le dĂ©sespoir dont Formosante fut accablĂ©e. "HĂ©las! voilĂ ce que j'avais craint, dit le phĂ©nix; les trois heures que vous avez passĂ©es dans votre hĂÂŽtellerie sur le chemin de Bassora avec ce malheureux roi d'Egypte vous ont enlevĂ© peut-ĂÂȘtre pour jamais le bonheur de votre vie; j'ai bien peur que nous n'ayons perdu Amazan sans retour." Alors il demanda aux domestiques si on pouvait saluer madame sa mĂšre. Ils rĂ©pondirent que son mari Ă©tait mort l'avant-veille et qu'elle ne voyait personne. Le phĂ©nix, qui avait crĂ©dit dans la maison, ne laissa pas de faire entrer la princesse de Babylone dans un salon dont les murs Ă©taient revĂÂȘtus de bois d'oranger Ă filets d'ivoire; les sous-bergers et les sous-bergĂšres, en longues robes blanches ceintes de garnitures aurore, lui servirent dans cent corbeilles de simple porcelaine cent mets dĂ©licieux, parmi lesquels on ne voyait aucun cadavre dĂ©guisĂ© c'Ă©tait du riz, du sago, de la semoule, du vermicelle, des macaronis, de omelettes, des oeufs au lait, des fromages Ă la crĂšme, des pĂÂątisseries de toute espĂšce, des lĂ©gumes, des fruits d'un parfum et d'un goĂ»t dont on n'a point d'idĂ©e dans les autres climats; c'Ă©tait une profusion de liqueurs rafraĂchissantes, supĂ©rieures aux meilleurs vins. Pendant que la princesse mangeait, couchĂ©e sur un lit de roses, quatre pavons, ou paons, ou pans, heureusement muets, l'Ă©ventaient de leurs brillantes ailes; deux cents oiseaux, cent bergers et cent bergĂšres lui donnĂšrent un concert Ă deux choeurs; les rossignols, les serins, les fauvettes, les pinsons, chantaient le dessus avec les bergĂšres; les bergers faisaient la haute contre et la basse c'Ă©tait en tout la belle et simple nature. La princesse avoua que, s'il y avait plus de magnificence Ă Babylone, la nature Ă©tait mille fois plus agrĂ©able chez les Gangarides; mais, pendant qu'on lui donnait cette musique si consolante et si voluptueuse, elle versait des larmes; elle disait Ă la jeune Irla sa compagne "Ces bergers et ces bergĂšres; ces rossignols et ces serins font l'amour, et moi, je suis privĂ©e du hĂ©ros gangaride, digne objet de mes trĂšs tendres et trĂšs impatients dĂ©sirs." Pendant qu'elle faisait ainsi collation, qu'elle admirait et qu'elle pleurait, le phĂ©nix disait Ă la mĂšre d'Amazan "Madame, vous ne pouvez vous dispenser de voir la princesse de Babylone; vous savez... - Je sais tout, dit-elle, jusqu'Ă son aventure dans l'hĂÂŽtellerie sur le chemin de Bassora; un merle m'a tout contĂ© ce matin; et ce cruel merle est cause que mon fils, au dĂ©sespoir, est devenu fou, et a quittĂ© la maison paternelle. - Vous ne savez donc pas, reprit le phĂ©nix, que la princesse m'a ressuscitĂ©? - Non, mon cher enfant; je savais par le merle que vous Ă©tiez mort, et j'en Ă©tais inconsolable. J'Ă©tais si affligĂ©e de cette perte, de la mort de mon mari, et du dĂ©part prĂ©cipitĂ© de mon fils, que j'avais fait dĂ©fendre ma porte. Mais puisque la princesse de Babylone me fait l'honneur de me venir voir, faites-la entrer au plus vite; j'ai des choses de la derniĂšre consĂ©quence Ă lui dire, et je veux que vous y soyez prĂ©sent." Elle alla aussitĂÂŽt dans un autre salon au-devant de la princesse. Elle ne marchait pas facilement c'Ă©tait une dame d'environ trois cents annĂ©es; mais elle avait encore de beaux restes, et on voyait bien que vers les deux cent trente Ă quarante ans elle avait Ă©tĂ© charmante. Elle reçut Formosante avec une noblesse respectueuse, mĂÂȘlĂ©e d'un air d'intĂ©rĂÂȘt et de douleur qui fit sur la princesse une vive impression. Formosante lui fit d'abord ses tristes compliments sur la mort de son mari. "HĂ©las! dit la veuve, vous devez vous intĂ©resser Ă sa perte plus que vous ne pensez. - J'en suis touchĂ©e sans doute, dit Formosante; il Ă©tait le pĂšre de..." A ces mots elle pleura. "Je n'Ă©tais venue que pour lui et Ă travers bien des dangers. J'ai quittĂ© pour lui mon pĂšre et la plus brillante cour de l'univers; j'ai Ă©tĂ© enlevĂ©e par un roi d'Egypte que je dĂ©teste. EchappĂ©e Ă ce ravisseur, j'ai traversĂ© les airs pour venir voir ce que j'aime; j'arrive, et il me fuit!" Les pleurs et les sanglots l'empĂÂȘchĂšrent d'en dire davantage. La mĂšre lui dit alors "Madame, lorsque le roi d'Egypte vous ravissait, lorsque vous soupiez avec lui dans un cabaret sur le chemin de Bassora, lorsque vos belles mains lui versaient du vin de Chiras, vous souvenez-vous d'avoir vu un merle qui voltigeait dans la chambre? - Vraiment oui, vous m'en rappelez la mĂ©moire; je n'y avais pas fait d'attention; mais, en recueillant mes idĂ©es, je me souviens trĂšs bien qu'au moment que le roi d'Egypte se leva de table pour me donner un baiser, le merle s'envola par la fenĂÂȘtre en jetant un grand cri, et ne reparut plus. - HĂ©las! madame, reprit la mĂšre d'Amazan, voilĂ ce qui fait prĂ©cisĂ©ment le sujet de nos malheurs; mon fils avait envoyĂ© ce merle s'informer de l'Ă©tat de votre santĂ© et de tout ce qui se passait Ă Babylone; il comptait revenir bientĂÂŽt se mettre Ă vos pieds et vous consacrer sa vie. Vous ne savez pas Ă quel excĂšs il vous adore. Tous les Gangarides sont amoureux et fidĂšles; mais mon fils est le plus passionnĂ© et le plus constant de tous. Le merle vous rencontra dans un cabaret; vous buviez trĂšs gaiement avec le roi d'Egypte et un vilain prĂÂȘtre; il vous vit enfin donner un tendre baiser Ă ce monarque, qui avait tuĂ© le phĂ©nix, et pour qui mon fils conserve une horreur invincible. Le merle Ă cette vue fut saisi d'une juste indignation; il s'envola en maudissant vos funestes amours; il est revenu aujourd'hui, il a tout contĂ©; mais dans quels moments, juste ciel! dans le temps oĂÂč mon fils pleurait avec moi la mort de son pĂšre et celle du phĂ©nix; dans le temps qu'il apprenait de moi qu'il est votre cousin issu de germain! - O ciel! mon cousin! madame, est-il possible? par quelle aventure? comment? quoi! je serais heureuse Ă ce point! et je serais en mĂÂȘme temps assez infortunĂ©e pour l'avoir offensĂ©! - Mon fils est votre cousin, vous dis-je, reprit la mĂšre, et je vais bientĂÂŽt vous en donner la preuve; mais en devenant ma parente vous m'arrachez mon fils; il ne pourra survivre Ă la douleur que lui a causĂ©e votre baiser donnĂ© au roi d'Egypte. - Ah! ma tante, s'Ă©cria la belle Formosante, je jure par lui et par le puissant Orosmade que ce baiser funeste, loin d'ĂÂȘtre criminel, Ă©tait la plus forte preuve d'amour que je pusse donner Ă votre fils. Je dĂ©sobĂ©issais Ă mon pĂšre pour lui. J'allais pour lui de l'Euphrate au Gange. TombĂ©e entre les mains de l'indigne pharaon d'Egypte, je ne pouvais lui Ă©chapper qu'en le trompant. J'en atteste les cendres et l'ĂÂąme du phĂ©nix, qui Ă©taient alors dans ma poche; il peut me rendre justice; mais comment votre fils, nĂ© sur les bords du Gange, peut-il ĂÂȘtre mon cousin, moi dont la famille rĂšgne sur les bords de l'Euphrate depuis tant de siĂšcles? - Vous savez, lui dit la vĂ©nĂ©rable Gangaride, que votre grand-oncle AldĂ©e Ă©tait roi de Babylone, et qu'il fut dĂ©trĂÂŽnĂ© par le pĂšre de BĂ©lus. - Oui madame. - Vous savez que son fils AldĂ©e avait eu de son mariage la princesse AldĂ©e, Ă©levĂ©e dans votre cour. C'est ce prince, qui, Ă©tant persĂ©cutĂ© par votre pĂšre, vint se rĂ©fugier dans notre heureuse contrĂ©e, sous un autre nom; c'est lui qui m'Ă©pousa; j'en ai eu le jeune prince AldĂ©e-Amazan, le plus beau, le plus fort, le plus courageux, le plus vertueux des mortels, et aujourd'hui le plus fou. Il alla aux fĂÂȘtes de Babylone sur la rĂ©putation de votre beautĂ© depuis ce temps-lĂ il vous idolĂÂątre, et peut-ĂÂȘtre je ne reverrai jamais mon cher fils." Alors elle fit dĂ©ployer devant la princesse tous les titres de la maison des AldĂ©es; Ă peine Formosante daigna les regarder. "Ah! madame, s'Ă©cria-t-elle, examine-t-on ce qu'on dĂ©sire? Mon coeur vous en croit assez. Mais oĂÂč est AldĂ©e-Amazan? oĂÂč est mon parent, mon amant, mon roi? oĂÂč est ma vie? quel chemin a-t-il pris? J'irais le chercher dans tous les globes que l'Eternel a formĂ©s, et dont il est le plus bel ornement. J'irais dans l'Ă©toile Canope, dans Sheat, dans AldĂ©baran; j'irais le convaincre de mon amour et de mon innocence." Le phĂ©nix justifia la princesse du crime que lui imputait le merle d'avoir donnĂ© par amour un baiser au roi d'Egypte; mais il fallait dĂ©tromper Amazan et le ramener. Il envoie des oiseaux sur tous les chemins; il met en campagne les licornes on lui rapporte enfin qu'Amazan a pris la route de la Chine. "Eh bien! allons Ă la Chine, s'Ă©cria la princesse; le voyage n'est pas long; j'espĂšre bien vous ramener votre fils dans quinze jours au plus tard." A ces mots, que de larmes de tendresse versĂšrent la mĂšre gangaride et la princesse de Babylone! que d'embrassements! que d'effusion de coeur! Le phĂ©nix commanda sur-le-champ un carrosse Ă six licornes. La mĂšre fournit deux cents cavaliers, et fit prĂ©sent Ă la princesse, sa niĂšce, de quelques milliers des plus beaux diamants du pays. Le phĂ©nix, affligĂ© du mal que l'indiscrĂ©tion du merle avait causĂ©, fit ordonner Ă tous les merles de vider le pays; et c'est depuis ce temps qu'il ne s'en trouve plus sur les bords du Gange. V Les licornes, en moins de huit jours, amenĂšrent Formosante, Irla et le phĂ©nix Ă Cambalu, capitale de la Chine. C'Ă©tait une ville plus grande que Babylone, et d'une espĂšce de magnificence toute diffĂ©rente. Ces nouveaux objets, ces moeurs nouvelles, auraient amusĂ© Formosante si elle avait pu ĂÂȘtre occupĂ©e d'autre chose que d'Amazan. DĂšs que l'empereur de la Chine eut appris que la Princesse de Babylone Ă©tait Ă une porte de la ville, il lui dĂ©pĂÂȘcha quatre mille mandarins en robes de cĂ©rĂ©monie; tous se prosternĂšrent devant elle, et lui prĂ©sentĂšrent chacun un compliment Ă©crit en lettres d'or sur une feuille de soie pourpre. Formosante leur dit que si elle avait quatre mille langues, elle ne manquerait pas de rĂ©pondre sur-le-champ Ă chaque mandarin; mais que, n'en ayant qu'une, elle le priait de trouver bon qu'elle s'en servĂt pour les remercier tous en gĂ©nĂ©ral. Ils la conduisirent respectueusement chez l'empereur. C'Ă©tait le monarque de la terre le plus juste, le plus poli, et le plus sage. Ce fut lui qui, le premier, laboura un petit champ de ses mains impĂ©riales, pour rendre l'agriculture respectable Ă son peuple. Il Ă©tablit, le premier, des prix pour la vertu. Les lois, partout ailleurs, Ă©taient honteusement bornĂ©es Ă punir les crimes. Cet empereur venait de chasser de ses Etats une troupe de bonzes Ă©trangers qui Ă©taient venus du fond de l'Occident, dans l'espoir insensĂ© de forcer toute la Chine Ă penser comme eux, et qui, sous prĂ©texte d'annoncer des vĂ©ritĂ©s, avaient acquis dĂ©jĂ des richesses et des honneurs. Il leur avait dit, en les chassant, ces propres paroles enregistrĂ©es dans les annales de l'empire "Vous pourriez faire ici autant de mal que vous en avez fait ailleurs vous ĂÂȘtes venus prĂÂȘcher des dogmes d'intolĂ©rance chez la nation la plus tolĂ©rante de la terre. Je vous renvoie pour n'ĂÂȘtre jamais forcĂ© de vous punir. Vous serez reconduits honorablement sur mes frontiĂšres; on vous fournira tout pour retourner aux bornes de l'hĂ©misphĂšre dont vous ĂÂȘtes partis. Allez en paix si vous pouvez ĂÂȘtre en paix, et ne revenez plus." La princesse de Babylone apprit avec joie ce jugement et ce discours; elle en Ă©tait plus sĂ»re d'ĂÂȘtre bien reçue Ă la cour, puisqu'elle Ă©tait trĂšs Ă©loignĂ©e d'avoir des dogmes intolĂ©rants. L'empereur de la Chine, en dĂnant avec elle tĂÂȘte Ă tĂÂȘte, eut la politesse de bannir l'embarras de toute Ă©tiquette gĂÂȘnante; elle lui prĂ©senta le phĂ©nix, qui fut trĂšs caressĂ© de l'empereur, et qui se percha sur son fauteuil. Formosante, sur la fin du repas, lui confia ingĂ©nument le sujet de son voyage, et le pria de faire chercher dans Cambalu le bel Amazan, dont elle lui conta l'aventure, sans lui rien cacher de la fatale passion dont son coeur Ă©tait enflammĂ© pour ce jeune hĂ©ros. "A qui en parlez-vous? lui dit l'empereur de la Chine; il m'a fait le plaisir de venir dans ma cour; il m'a enchantĂ©; cet aimable Amazan il est vrai qu'il est profondĂ©ment affligĂ©; mais ses grĂÂąces n'en sont que plus touchantes; aucun de mes favoris n'a plus d'esprit que lui; nul mandarin de robe n'a de plus vastes connaissances; nul mandarin d'Ă©pĂ©e n'a l'air plus martial et plus hĂ©roĂÂŻque; son extrĂÂȘme jeunesse donne un nouveau prix Ă tous ses talents; si j'Ă©tais assez malheureux, assez abandonnĂ© du Tien et du Changti pour vouloir ĂÂȘtre conquĂ©rant, je prierais Amazan de se mettre Ă la tĂÂȘte de mes armĂ©es, et je serais sĂ»r de triompher de l'univers entier. C'est bien dommage que son chagrin lui dĂ©range quelquefois l'esprit. - Ah! monsieur, lui dit Formosante avec un air enflammĂ© et un ton de douleur, de saisissement et de reproche, pourquoi ne m'avez-vous pas fait dĂner avec lui? Vous me faites mourir; envoyez-le prier tout Ă l'heure. - Madame il est parti ce matin, et il n'a point dit dans quelle contrĂ©e il portait ses pas." Formosante se tourna vers le phĂ©nix "Eh bien; dit-elle, phĂ©nix, avez-vous jamais vu une fille plus malheureuse que moi? Mais, monsieur, continua-t-elle, comment, pourquoi a-t-il pu quitter si brusquement une cour aussi polie que la vĂÂŽtre, dans laquelle il me semble qu'on voudrait passer sa vie? - Voici, madame, ce qui est arrivĂ©. Une princesse du sang, des plus aimables, s'est Ă©prise de passion pour lui, et lui a donnĂ© un rendez-vous chez elle Ă midi; il est parti au point du jour, et il a laissĂ© ce billet, qui a coĂ»tĂ© bien des larmes Ă ma parente. "Belle princesse du sang de la Chine, vous mĂ©ritez un coeur qui n'ait jamais Ă©tĂ© qu'Ă vous; j'ai jurĂ© aux dieux immortels de n'aimer jamais que Formosante, princesse de Babylone, et de lui apprendre comment on peut dompter ses dĂ©sirs dans ses voyages; elle a eu le malheur de succomber avec un indigne roi d'Egypte je suis le plus malheureux des hommes; j'ai perdu mon pĂšre et le phĂ©nix, et l'espĂ©rance d'ĂÂȘtre aimĂ© de Formosante; j'ai quittĂ© ma mĂšre affligĂ©e, ma patrie, ne pouvant vivre un moment dans les lieux oĂÂč j'ai appris que Formosante en aimait un autre que moi; j'ai jurĂ© de parcourir la terre et d'ĂÂȘtre fidĂšle. Vous me mĂ©priseriez, et les dieux me puniraient, si je violais mon serment; prenez un amant, madame, et soyez aussi fidĂšle que moi." - Ah! laissez-moi cette Ă©tonnante lettre, dit la belle Formosante, elle fera ma consolation; je suis heureuse dans mon infortune. Amazan m'aime; Amazan renonce pour moi Ă la possession des princesses de la Chine; il n'y a que lui sur la terre capable de remporter une telle victoire; il me donne un grand exemple; le phĂ©nix sait que je n'en avais pas besoin; il est bien cruel d'ĂÂȘtre privĂ©e de son amant pour le plus innocent des baisers donnĂ© par pure fidĂ©litĂ©. Mais enfin oĂÂč est-il allĂ©? quel chemin a-t-il pris? daignez me l'enseigner, et je pars." L'empereur de la Chine lui rĂ©pondit qu'il croyait, sur les rapports qu'on lui avait faits, que son amant avait suivi une route qui menait en Scythie. AussitĂÂŽt les licornes furent attelĂ©es, et la princesse, aprĂšs les plus tendres compliments, prit congĂ© de l'empereur avec le phĂ©nix, sa femme de chambre Irla et toute sa suite. DĂšs qu'elle fut en Scythie, elle vit plus que jamais combien les hommes et les gouvernements diffĂšrent, et diffĂ©reront toujours jusqu'au temps oĂÂč quelque peuple plus Ă©clairĂ© que les autres communiquera la lumiĂšre de proche en proche aprĂšs mille siĂšcles de tĂ©nĂšbres, et qu'il se trouvera dans des climats barbares des ĂÂąmes hĂ©roĂÂŻques qui auront la force et la persĂ©vĂ©rance de changer les brutes en hommes. Point de villes en Scythie, par consĂ©quent point d'arts agrĂ©ables. On ne voyait que de vastes prairies et des nations entiĂšres sous des tentes et sur des chars. Cet aspect imprimait la terreur. Formosante demanda dans quelle tente ou dans quelle charrette logeait le roi. On lui dit que depuis huit jours il s'Ă©tait mis en marche Ă la tĂÂȘte de trois cent mille hommes de cavalerie pour aller Ă la rencontre du roi de Babylone, dont il avait enlevĂ© la niĂšce, la belle princesse AldĂ©e. "Il a enlevĂ© ma cousine! s'Ă©cria Formosante; je ne m'attendais pas Ă cette nouvelle aventure. Quoi! ma cousine, qui Ă©tait trop heureuse de me faire la cour, est devenue reine, et je ne suis pas encore mariĂ©e!" Elle se fit conduire incontinent aux tentes de la reine. Leur rĂ©union inespĂ©rĂ©e dans ces climats lointains, les choses singuliĂšres qu'elles avaient mutuellement Ă s'apprendre, mirent dans leur entrevue un charme qui leur fit oublier qu'elles ne s'Ă©taient jamais aimĂ©es; elles se revirent avec transport; une douce illusion se mit Ă la place de la vraie tendresse; elles s'embrassĂšrent en pleurant, et il y eut mĂÂȘme entre elles de la cordialitĂ© et de la franchise, attendu que l'entrevue ne se faisait pas dans un palais. AldĂ©e reconnut le phĂ©nix et la confidente Irla; elle donna des fourrures de zibeline Ă sa cousine, qui lui donna des diamants. On parla de la guerre que les deux rois entreprenaient; on dĂ©plora la condition des hommes que des monarques envoient par fantaisie s'Ă©gorger pour des diffĂ©rends que deux honnĂÂȘtes gens pourraient concilier en une heure; mais surtout on s'entretint du bel Ă©tranger vainqueur des lions, donneur des plus gros diamants de l'univers, faiseur de madrigaux, possesseur du phĂ©nix, devenu le plus malheureux des hommes sur le rapport d'un merle. "C'est mon cher frĂšre, disait AldĂ©e. - C'est mon amant! s'Ă©criait Formosante; vous l'avez vu sans doute, il est peut-ĂÂȘtre encore ici; car, ma cousine, il sait qu'il est votre frĂšre; il ne vous aura pas quittĂ©e brusquement comme il a quittĂ© le roi de la Chine. - Si je l'ai vu, grands dieux! reprit AldĂ©e; il a passĂ© quatre jours entiers avec moi. Ah! ma cousine, que mon frĂšre est Ă plaindre! Un faux rapport l'a rendu absolument fou; il court le monde sans savoir oĂÂč il va. Figurez-vous qu'il a poussĂ© la dĂ©mence jusqu'Ă refuser les faveurs de la plus belle Scythe de toute la Scythie. Il partit hier aprĂšs lui avoir Ă©crit une lettre dont elle a Ă©tĂ© dĂ©sespĂ©rĂ©e. Pour lui, il est allĂ© chez les CimmĂ©riens. - Dieu soit louĂ©! s'Ă©cria Formosante; encore un refus en ma faveur! mon bonheur a passĂ© mon espoir, comme mon malheur a surpassĂ© toutes mes craintes. Faites-moi donner cette lettre charmante, que je parte, que je le suive, les mains pleines de ses sacrifices. Adieu, ma cousine; Amazan est chez les CimmĂ©riens, j'y vole." AldĂ©e trouva que la princesse sa cousine Ă©tait encore plus folle que son frĂšre Amazan. Mais comme elle avait senti elle-mĂÂȘme les atteintes de cette Ă©pidĂ©mie, comme elle avait quittĂ© les dĂ©lices et la magnificence de Babylone pour le roi des Scythes, comme les femmes s'intĂ©ressent toujours aux folies dont l'amour est cause, elle s'attendrit vĂ©ritablement pour Formosante, lui souhaita un heureux voyage, et lui promit de servir sa passion si jamais elle Ă©tait assez heureuse pour revoir son frĂšre. VI BientĂÂŽt la princesse de Babylone et le phĂ©nix arrivĂšrent dans l'empire des CimmĂ©riens, bien moins peuplĂ©, Ă la vĂ©ritĂ©, que la Chine, mais deux fois plus Ă©tendu; autrefois semblable Ă la Scythie, et devenu depuis quelque temps aussi florissant que les royaumes qui se vantaient d'instruire les autres Etats. AprĂšs quelques jours de marche on entra dans une trĂšs grande ville que l'impĂ©ratrice rĂ©gnante faisait embellir; mais elle n'y Ă©tait pas elle voyageait alors des frontiĂšres de l'Europe Ă celles de l'Asie pour connaĂtre ses Etats par ses yeux, pour juger des maux et porter les remĂšdes, pour accroĂtre les avantages, pour semer l'instruction. Un des principaux officiers de cette ancienne capitale, instruit de l'arrivĂ©e de la Babylonienne et du phĂ©nix, s'empressa de rendre ses hommages Ă la princesse, et de lui faire les honneurs du pays, bien sĂ»r que sa maĂtresse, qui Ă©tait la plus polie et la plus magnifique des reines, lui saurait grĂ© d'avoir reçu une si grande dame avec les mĂÂȘmes Ă©gards qu'elle aurait prodiguĂ©s elle-mĂÂȘme. On logea Formosante au palais, dont on Ă©carta une foule importune de peuple; on lui donna des fĂÂȘtes ingĂ©nieuses. Le seigneur cimmĂ©rien, qui Ă©tait un grand naturaliste, s'entretint beaucoup avec le phĂ©nix dans les temps oĂÂč la princesse Ă©tait retirĂ©e dans son appartement. Le phĂ©nix lui avoua qu'il avait autrefois voyagĂ© chez les CimmĂ©riens, et qu'il ne reconnaissait plus le pays. "Comment de si prodigieux changements, disait-il, ont-ils pu ĂÂȘtre opĂ©rĂ©s dans un temps si court? Il n'y a pas trois cents ans que je vis ici la nature sauvage dans toute son horreur; j'y trouve aujourd'hui les arts, la splendeur, la gloire et la politesse. - Un seul homme a commencĂ© ce grand ouvrage, rĂ©pondit le CimmĂ©rien; une femme l'a perfectionnĂ©; une femme a Ă©tĂ© meilleure lĂ©gislatrice que l'Isis des Egyptiens et la CĂ©rĂšs des Grecs. La plupart des lĂ©gislateurs ont eu un gĂ©nie Ă©troit et despotique qui a resserrĂ© leurs vues dans le pays qu'ils ont gouvernĂ©; chacun a regardĂ© son peuple comme Ă©tant seul sur la terre, ou comme devant ĂÂȘtre l'ennemi du reste de la terre. Ils ont formĂ© des institutions pour ce seul peuple, introduit des usages pour lui seul, Ă©tabli une religion pour lui seul. C'est ainsi que les Egyptiens, si fameux par des monceaux de pierres, se sont abrutis et dĂ©shonorĂ©s par leurs superstitions barbares. Ils croient les autres nations profanes, ils ne communiquent point avec elles; et, exceptĂ© la cour, qui s'Ă©lĂšve quelquefois au-dessus des prĂ©jugĂ©s vulgaires, il n'y a pas un Egyptien qui voulĂ»t manger dans un plat dont un Ă©tranger se serait servi. Leurs prĂÂȘtres sont cruels et absurdes. Il vaudrait mieux n'avoir point de lois, et n'Ă©couter que la nature, qui a gravĂ© dans nos coeurs les caractĂšres du juste et de l'injuste, que de soumettre la sociĂ©tĂ© Ă des lois si insociables. "Notre impĂ©ratrice embrasse des projets entiĂšrement opposĂ©s elle considĂšre son vaste Etat, sur lequel tous les mĂ©ridiens viennent se joindre, comme devant correspondre Ă tous les peuples qui habitent sous ces diffĂ©rents mĂ©ridiens. La premiĂšre de ses lois a Ă©tĂ© la tolĂ©rance de toutes les religions, et la compassion pour toutes les erreurs. Son puissant gĂ©nie a connu que si les cultes sont diffĂ©rents, la morale est partout la mĂÂȘme par ce principe elle a liĂ© sa nation Ă toutes les nations du monde, et les CimmĂ©riens vont regarder le Scandinavien et le Chinois comme leurs frĂšres. Elle a fait plus elle a voulu que cette prĂ©cieuse tolĂ©rance, le premier lien des hommes, s'Ă©tablĂt chez ses voisins; ainsi elle a mĂ©ritĂ© le titre de mĂšre de la patrie, et elle aura celui de bienfaitrice du genre humain, si elle persĂ©vĂšre. "Avant elle, des hommes malheureusement puissants envoyaient des troupes de meurtriers ravir Ă des peuplades inconnues et arroser de leur sang les hĂ©ritages de leurs pĂšres on appelait ces assassins des hĂ©ros; leur brigandage Ă©tait de la gloire. Notre souveraine a une autre gloire elle a fait marcher des armĂ©es pour apporter la paix, pour empĂÂȘcher les hommes de se nuire, pour les forcer Ă se supporter les uns les autres; et ses Ă©tendards ont Ă©tĂ© ceux de la concorde publique." Le phĂ©nix, enchantĂ© de tout ce que lui apprenait ce seigneur, lui dit "Monsieur, il y a vingt-sept mille neuf cents annĂ©es et sept mois que je suis au monde; je n'ai encore rien vu de comparable Ă ce que vous me faites entendre." Il lui demanda des nouvelles de son ami Amazan; le CimmĂ©rien lui conta les mĂÂȘmes choses qu'on avait dites Ă la princesse chez les Chinois et chez les Scythes. Amazan s'enfuyait de toutes les cours qu'il visitait sitĂÂŽt qu'une dame lui avait donnĂ© un rendez-vous auquel il craignait de succomber. Le phĂ©nix instruisit bientĂÂŽt Formosante de cette nouvelle marque de fidĂ©litĂ© qu'Amazan lui donnait, fidĂ©litĂ© d'autant plus Ă©tonnante qu'il ne pouvait pas soupçonner que sa princesse en fĂ»t jamais informĂ©e. Il Ă©tait parti pour la Scandinavie. Ce fut dans ces climats que des spectacles nouveaux frappĂšrent encore ses yeux. Ici la royautĂ© et la libertĂ© subsistaient ensemble par un accord qui paraĂt impossible dans d'autres Etats les agriculteurs avaient part Ă la lĂ©gislation, aussi bien que les grands du royaume; et un jeune prince donnait les plus grandes espĂ©rances d'ĂÂȘtre digne de commander Ă une nation libre. LĂ c'Ă©tait quelque chose de plus Ă©trange le seul roi qui fĂ»t despotique de droit sur la terre par un contrat formel avec son peuple Ă©tait en mĂÂȘme temps le plus jeune et le plus juste des rois. Chez les Sarmates, Amazan vit un philosophe sur le trĂÂŽne on pouvait l'appeler le roi de l'anarchie, car il Ă©tait le chef de cent mille petits rois dont un seul pouvait d'un mot anĂ©antir les rĂ©solutions de tous les autres. Eole n'avait pas plus de peine Ă contenir tous les vents qui se combattent sans cesse, que ce monarque n'en avait Ă concilier les esprits c'Ă©tait un pilote environnĂ© d'un Ă©ternel orage; et cependant le vaisseau ne se brisait pas, car le prince Ă©tait un excellent pilote. En parcourant tous ces pays si diffĂ©rents de sa patrie, Amazan refusait constamment toutes les bonnes fortunes qui se prĂ©sentaient Ă lui, toujours dĂ©sespĂ©rĂ© du baiser que Formosante avait donnĂ© au roi d'Egypte, toujours affermi dans son inconcevable rĂ©solution de donner Ă Formosante l'exemple d'une fidĂ©litĂ© unique et inĂ©branlable. La princesse de Babylone avec le phĂ©nix le suivait partout Ă la piste; et ne le manquait jamais que d'un jour ou deux, sans que l'un se lassĂÂąt de courir, et sans que l'autre perdĂt un moment Ă le suivre. Ils traversĂšrent ainsi toute la Germanie; ils admirĂšrent les progrĂšs que la raison et la philosophie faisaient dans le Nord tous les princes y Ă©taient instruits, tous autorisaient la libertĂ© de penser; leur Ă©ducation n'avait point Ă©tĂ© confiĂ©e Ă des hommes qui eussent intĂ©rĂÂȘt de les tromper, ou qui fussent trompĂ©s eux-mĂÂȘmes on les avait Ă©levĂ©s dans la connaissance de la morale universelle, et dans le mĂ©pris des superstitions; on avait banni dans tous ces Etats un usage insensĂ©, qui Ă©nervait et dĂ©peuplait plusieurs pays mĂ©ridionaux cette coutume Ă©tait d'enterrer tout vivants, dans de vastes cachots, un nombre infini des deux sexes Ă©ternellement sĂ©parĂ©s l'un de l'autre, et de leur faire jurer de n'avoir jamais de communication ensemble. Cet excĂšs de dĂ©mence, accrĂ©ditĂ© pendant des siĂšcles, avait dĂ©vastĂ© la terre autant que les guerres les plus cruelles. Les princes du Nord avaient Ă la fin compris que, si on voulait avoir des haras, il ne fallait pas sĂ©parer les plus forts chevaux des cavales. Ils avaient dĂ©truit aussi des erreurs non moins bizarres et non moins pernicieuses. Enfin les hommes osaient ĂÂȘtre raisonnables dans ces vastes pays, tandis qu'ailleurs on croyait encore qu'on ne peut les gouverner qu'autant qu'ils sont imbĂ©ciles. VII Amazan arriva chez les Bataves; son coeur Ă©prouva une douce satisfaction dans son chagrin d'y retrouver quelque faible image du pays des heureux Gangarides; la libertĂ©, l'Ă©galitĂ©, la propretĂ©, l'abondance, la tolĂ©rance; mais les dames du pays Ă©taient si froides qu'aucune ne lui fit d'avances comme on lui en avait fait partout ailleurs; il n'eut pas la peine de rĂ©sister. S'il avait voulu attaquer ces dames, il les aurait toutes subjuguĂ©es l'une aprĂšs l'autre, sans ĂÂȘtre aimĂ© d'aucune; mais il Ă©tait bien Ă©loignĂ© de songer Ă faire des conquĂÂȘtes. Formosante fut sur le point de l'attraper chez cette nation insipide il ne s'en fallut que d'un moment. Amazan avait entendu parler chez les Bataves avec tant d'Ă©loges d'une certaine Ăle, nommĂ©e Albion, qu'il s'Ă©tait dĂ©terminĂ© Ă s'embarquer, lui et ses licornes, sur un vaisseau qui, par un vent d'orient favorable, l'avait portĂ© en quatre heures au rivage de cette terre plus cĂ©lĂšbre que Tyr et que l'Ăle Atlantide. La belle Formosante, qui l'avait suivi au bord de la Duina, de la Vistule, de l'Elbe, du VĂ©ser, arrive enfin aux bouches du Rhin, qui portait alors ses eaux rapides dans la mer Germanique. Elle apprend que son cher amant a voguĂ© aux cĂÂŽtes d'Albion; elle croit voir son vaisseau; elle pousse des cris de joie dont toutes les dames bataves furent surprises, n'imaginant pas qu'un jeune homme pĂ»t causer tant de joie. Et Ă l'Ă©gard du phĂ©nix, elles n'en firent pas grand cas, parce qu'elles jugĂšrent que ses plumes ne pourraient probablement se vendre aussi bien que celles des canards et des oisons de leurs marais. La princesse de Babylone loua ou nolisa deux vaisseaux pour la transporter avec tout son monde dans cette bienheureuse Ăle qui allait possĂ©der l'unique objet de tous ses dĂ©sirs, l'ĂÂąme de sa vie, le dieu de son coeur. Un vent funeste d'occident s'Ă©leva tout Ă coup dans le moment mĂÂȘme oĂÂč le fidĂšle et malheureux Amazan mettait pied Ă terre en Albion; les vaisseaux de la princesse de Babylone ne purent dĂ©marrer. Un serrement de coeur, une douleur amĂšre, une mĂ©lancolie profonde, saisirent Formosante; elle se mit au lit, dans sa douleur, en attendant que le vent changeĂÂąt; mais il souffla huit jours entiers avec une violence dĂ©sespĂ©rante. La princesse, pendant ce siĂšcle de huit jours, se faisait lire par Irla des romans ce n'est pas que les Bataves en sussent faire; mais, comme ils Ă©taient les facteurs de l'univers, ils vendaient l'esprit des autres nations ainsi que leurs denrĂ©es. La princesse fit acheter chez Marc-Michel Rey tous les contes que l'on avait Ă©crits chez les Ausoniens et chez les Velches, et dont le dĂ©bit Ă©tait dĂ©fendu sagement chez ces peuples pour enrichir les Bataves; elle espĂ©rait qu'elle trouverait dans ces histoires quelque aventure qui ressemblerait Ă la sienne, et qui charmerait sa douleur. Irla lisait, le phĂ©nix disait son avis, et la princesse ne trouvait rien dans la Paysanne parvenue, ni dans TansaĂÂŻ, ni dans le Sopha, ni dans les Quatre Facardins, qui eĂ»t le moindre rapport Ă ses aventures; elle interrompait Ă tout moment la lecture pour demander de quel cĂÂŽtĂ© venait le vent. VIII Cependant Amazan Ă©tait dĂ©jĂ sur le chemin de la capitale d'Albion, dans son carrosse Ă six licornes, et rĂÂȘvait Ă sa princesse. Il aperçut un Ă©quipage versĂ© dans un fossĂ©; les domestiques s'Ă©taient Ă©cartĂ©s pour aller chercher du secours; le maĂtre de l'Ă©quipage restait tranquillement dans sa voiture, ne tĂ©moignant pas la plus lĂ©gĂšre impatience, et s'amusant Ă fumer, car on fumait alors il se nommait milord What-then, ce qui signifie Ă peu prĂšs milord Qu'importe en la langue dans laquelle je traduis ces mĂ©moires. Amazan se prĂ©cipita pour lui rendre service; il releva tout seul la voiture, tant sa force Ă©tait supĂ©rieure Ă celle des autres hommes. Milord Qu'importe se contenta de dire "VoilĂ un homme bien vigoureux." Des rustres du voisinage; Ă©tant accourus, se mirent en colĂšre de ce qu'on les avait fait venir inutilement, et s'en prirent Ă l'Ă©tranger ils le menacĂšrent en l'appelant chien d'Ă©tranger, et ils voulurent le battre. Amazan en saisit deux de chaque main, et les jeta Ă vingt pas; les autres le respectĂšrent, le saluĂšrent, lui demandĂšrent pour boire il leur donna plus d'ar
Leprincipe est finalement assez simple: dans un premier temps, il faut Ă©videmment possĂ©der un poirier qui produit des fruits. Il faut ensuite installer une bouteille sur le fruit pendant quâil passe encore dans le goulot de la bouteille, en choisissant un fruit sur une tige parfaitement droite, qui doit aussi pousser vers le haut. InsĂ©rez ensuite la bouteille sur la poireNous avons 1368 invitĂ©s et 52 inscrits en ligne IndexSujets rĂ©centsRechercheConsignes d'indexation Forums Jura et Savoie Domaine Cellier des Cray, Adrien Berlioz Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet CR Le Cellier des Cray â Adrien Berlioz â Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Grand Zeph â 2015 Le Cellier des Cray â Adrien Berlioz â Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Grand Zeph â 2015 Bue lors d'une semaine savoyarde contĂ©e ICI Robe dâun or assez clair. Le nez sâouvre bien aprĂšs un peu dâaĂ©ration dans le verre et se montre plutĂŽt complexe, combinant du miel, des plantes aromatiques tilleul, des fruits jaunes pĂȘche, et mĂȘme une touche de pralin. La bouche est bien charnue, entourĂ©e dâune lĂ©gĂšre pellicule grasse. Lâaromatique est trĂšs fruitĂ©e, encore plus quâau nez, rehaussĂ©e par une bonne vivacitĂ©. La finale est Ă la fois savoureuse, longue et pleine de ressort. TrĂšs Bien + Lâaccord est rĂ©ussi 3,5 / 5 avec un beaufort dâĂ©tĂ© de 6 mois. Jean-Loup 05 FĂ©v 2019 1831 31 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet CR Le Cellier des Cray â Adrien Berlioz â Roussette de Savoie â Zulime â 2015 Le Cellier des Cray â Adrien Berlioz â Roussette de Savoie â Zulime â 2015 Bue lors de la mĂȘme semaine savoyarde contĂ©e ICI Robe dâun bel or dense. Le nez fait preuve dâune belle intensitĂ© et dâune certaine complexitĂ© des fruits jaunes sont prĂ©sents mais de maniĂšre moins attendue on y dĂ©cĂšle aussi des Ă©pices et des arĂŽmes de pĂątisserie. La bouche est ample, dâun beau volume, dotĂ©e dâun lĂ©ger gras et dâune belle sapiditĂ©. La finesse de lâaltesse nâest pas en reste, mise en valeur par une grande vivacitĂ©. La finale Ă la persistance satisfaisante est pleine dâallant et trĂšs salivante. TrĂšs Bien + AssociĂ© Ă des quenelles au beaufort, le vin gagne certes encore en tension mais il perd beaucoup en volume et sâefface quelque peu 3- / 5. Jean-Loup 05 FĂ©v 2019 1839 32 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. GILT Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de GILT sur le sujet CR Le Cellier des Cray â Adrien Berlioz â Octavie â Persan â 2014 Le Cellier des Cray - Adrien Berlioz - Octavie - Persan - 2014 Robe trouble et tuilĂ©e. Le nez est rĂ©duit et discret avec de lĂ©gĂšres notes cacaotĂ©es et poivrĂ©es. La bouche associe une astringence forte Ă une aciditĂ© marquĂ©e, le tout sans vĂ©ritable est discrĂšte sur la fleur et la rĂ©glisse. Cela donne un vin agressif qui serait mieux associĂ© Ă un plat bien gras qu'en dĂ©gustation pure. Vin intĂ©ressant intellectuellement, moyen au niveau du plaisir apportĂ©, et pas donnĂ© financiĂšrement. Gilles 03 Mar 2019 1432 33 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. H. Seldon Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de H. Seldon sur le sujet CR Domaine Cellier des Cray, A. Berlioz, Roussette de Savoie, Altesse "Zulime" 2016 Domaine Cellier des Cray, A. Berlioz, Roussette de Savoie, Altesse "Zulime" 2016 TrĂšs beau nez prĂ©cis sur les agrumes, l'Ă©corce d'orange, le floral blanc. MĂȘme chose en bouche oĂč le vin se distingue par un Ă©quilibre sans reproche, construit autour d'une belle aciditĂ©. Aspect lĂ©gĂšrement crayeux en finale qui complexifie l'ensemble. A boire ou Ă garder. TrĂšs bien Notation Moyen les vins sans intĂ©rĂȘt ; Assez bien vins Ă boire pour la curiositĂ© ; Bien bon vin, Ă faire dĂ©couvrir ; TrĂšs bien vin remarquable ; Excellent vins de trĂšs haut niveau, une rare rĂ©ussite; Splendide grand vin qui justifie le temps passĂ© ici ! 16 Mar 2019 1659 34 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet CR Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Octavie â Persan â 2015 Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Octavie â Persan â 2015 Bue lors d'une dĂ©gustation de LPV Versailles sur la Savoie relatĂ©e ICI La robe est trĂšs sombre, aux nets reflets violacĂ©s. TrĂšs intense, le beau nez associe des fruits noirs, oĂč la myrtille domine, des arĂŽmes floraux iris et Ă©picĂ©s. La bouche affiche une rĂ©elle concentration, caractĂ©ristique du cĂ©page mais sans doute exacerbĂ©e par une extraction poussĂ©e que permettait le millĂ©sime. Un fruitĂ© dense et fin, des tanins encore un peu accrocheurs et une finale plus tonique laissent prĂ©sager un bel avenir Ă ce vin. TrĂšs Bien en lâĂ©tat Jean-Loup 05 Jui 2019 1456 35 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet CR Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Octavie â Persan â 2015 Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Octavie â Persan â 2015 Nouvelle bouteille et nouvelle photo. La robe est sombre et toujours insolemment jeune ! Le nez trĂšs intense montre d'abord une trĂšs forte rĂ©duction avec des arĂŽmes animaux pas nobles du tout, voire d'Ă©curie. Mais il ne lui faut pas longtemps pour exprimer tout autre chose, aprĂšs un peu d'oxygĂ©nation. Les fruits noirs, myrtille et mĂ»re, sont concurrencĂ©s par la framboise, mais aussi par les Ă©pices, le tout Ă©tant teintĂ© d'une touche fumĂ©e. La bouche est pleine et aimable, dotĂ©e d'un fruitĂ© charnu et acidulĂ© qui perdure longtemps. Les tanins sont assouplis et la finale Ă nouveau marquĂ©e par les Ă©pices. Cette bouteille, par rapport Ă celle bue il y a six mois, a toujours du caractĂšre mais paraĂźt moins charpentĂ©e et tanique, plus sur la fraĂźcheur. TrĂšs Bien La Savoie regorge dĂ©cidĂ©ment de jeunes vignerons talentueux ! Jean-Loup Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© breizhmanu, DUROCHER, Nicco 30 DĂ©c 2019 1816 36 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. supagweg Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de supagweg sur le sujet CR Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Serfouette â Mondeuse â 2014 Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Serfouette â Mondeuse â 2014 La robe est rouge violette. Au nez on a de la griotte, de la cerise avec un cotĂ© fumĂ©, cuir, tabac, de l'olive noir, de la sauge, Ă©galement un peu de pĂąte de fruit, fraise. En bouche de l'aciditĂ©, sur le fruit pas d'astringence, une ambiance bonbon acidulĂ©. C'est frais, gouleyant, pas une grosse complexitĂ© mais c'est drĂŽlement bon. Bien + Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© oliv, breizhmanu, Jean-Loup Guerrin 03 FĂ©v 2020 2059 37 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet CR Domaine Cellier des Cray - Roussette de Savoie - Zulime - 2015 Domaine Cellier des Cray - Roussette de Savoie - Zulime - 2015 La robe prĂ©sente un or moyen lĂ©gĂšrement gris. Bien ouvert aprĂšs une courte oxygĂ©nation, l'aromatique du nez mĂȘle fruits jaunes, notes florales et herbes aromatiques. La bouche, enrobĂ©e d'une fine pellicule de gras, donne une impression de densitĂ© sans sapiditĂ© extravagante. L'aciditĂ© tend vers la minĂ©ralitĂ© et la finale de mi-longueur fait ressortir des arĂŽmes d'agrumes. Bien ++ / TrĂšs Bien Le vin rĂ©alise un accord intĂ©ressant 3,5 + / 5 avec un simple gratin de pĂątes au jambon, en gagnant en volume et sapiditĂ©, Ă moins que ce soit le supplĂ©ment d'aĂ©ration qui en soit Ă l'origine. Jean-Loup 19 FĂ©v 2020 2105 38 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. FGsuperfred Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de FGsuperfred sur le sujet CR Domaine Adrien Berlioz, Vin de Savoie La CuvĂ©e des Gueux 2019 Domaine Adrien Berlioz, Vin de Savoie La CuvĂ©e des Gueux 2019 nez d'une grande fraicheur sur les fruits et fleurs blanches, iodĂ©, salin, trĂšs chablisien dans l'Ăąme, je m'y serais trompĂ© en aveugle... la bouche est surprenante, parce que l'attaque est assez vive, soutenue par une jolie aciditĂ© citronnĂ©e, mais la matiĂšre trĂšs chablisienne encore une fois prend de suite le dessus... donnant un vin alliant fraicheur, matiĂšre, aciditĂ© sous-jascente soulignant de fort belle maniĂšre ce vin, qui roule en bouche tel un joli baiser, pas l'impression de rouler une pelle Ă un bouledogue si vous voyez ce que je veux dire je cherche un dĂ©faut Ă cette seconde partie de bouche qui, mĂȘme au rĂ©chauffement, amĂšne ce soupçon de puretĂ© et surtout de peps citronnĂ© qui me plait tant dans les vins blancs, de quelque rĂ©gion fussent ils issus, et ce peps qui les empĂȘchent de tomber dans une lourdeur qui m'Ă©coeure encore plus vite qu'avant la finale lĂ©gĂšrement citronnĂ©, sous-tendue par une aciditĂ© qui a la joyeuse idĂ©e de se mettre en second plan, dure trĂšs longtemps, ce qui rend le vin non pas inoubliable mais qui me fait penser diablement Ă lui longtemps aprĂšs l'avoir avalĂ©, faut dire que le verre galope tout seul au frigo pour se remplir, il doit prendre plus de plaisir que moi encore, tous des poivrots ces spieg ! un petit manque de complexitĂ© 2019 trĂšs jeune et ce vin deviendrait splendide trĂšs bien+ Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Olivier Mottard, breizhmanu, Jean-Loup Guerrin, bibi64, VaudĂ©sir, Blog, LLDA 21 Mai 2020 2129 39 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. FGsuperfred Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© bibi64 Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de bibi64 sur le sujet Domaine adrien Berlioz - vin de savoie Fred, les photos inclinĂ©es ou grises sont un problĂšme rĂ©current avec les photos prise par tĂ©lĂ©phone. Pour s'affranchir du problĂšme, il suffit de sauver les photos sur ton ordinateur avec n'importe quel logiciel paint, snagit, photoshop, windows photo... avant de les joindre Ă ton post sur LPV. En tout cas, tu m'as donnĂ© envie de goĂ»ter cette belle jacquĂšre... Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© FGsuperfred 21 Mai 2020 2151 41 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. FGsuperfred Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de FGsuperfred sur le sujet Domaine adrien Berlioz - vin de savoie salivant est le terme, faut pas l'dire, mais j'finis le flacon... chuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuut ! pour la photo je l'enregistre sous le disque dur avant, dĂ©solĂ© j'ai un niveau informatique bien moindre par rapport Ă mon apprĂ©ciation de ce vin 21 Mai 2020 2256 42 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. nishaton Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de nishaton sur le sujet CR Domaine Adrien Berlioz - CuvĂ©e des Gueux 2018 - Vin de savoie Domaine Adrien Berlioz - CuvĂ©e des Gueux 2018 - Vin de savoie Une bouteille amenĂ©e ce midi par un ami lors du traditionnel repas dominical. J'avais entendu parlĂ© de ce domaine plusieurs fois et failli craquĂ© Ă plusieurs reprise par curiositĂ©. Au nez, une palette aromatique proche du chardonnay. Je m'enquiĂšre du cĂ©page 100% jacquĂšre ! Allons donc. Ce n'est pas un vin extrĂȘmement aromatique mais on sait ou on va. En bouche, un manque de fraicheur sur la bouteille dĂ©gustĂ©e, et globalement pas Ă©normĂ©ment de longueur. Finalement pas une grande claque. A re-gouter sur une autre cuvĂ©e ou un autre millĂ©sime pour me faire une meilleure idĂ©e. Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Jean-Loup Guerrin 24 Mai 2020 2113 43 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet Domaine Adrien Berlioz - CuvĂ©e des Gueux 2018 - Vin de savoie A re-gouter sur une autre cuvĂ©e Oui, essaie les diffĂ©rentes cuvĂ©es commentĂ©es plus haut, en particulier sur les un autre millĂ©sime Pas encore goĂ»tĂ© 2018 mais c'est effectivement atypique comme conditions climatiques. Jean-Loup Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© nishaton 24 Mai 2020 2255 44 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. ysildur Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de ysildur sur le sujet CR Adrien Berlioz â Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Albinum â 2017 Adrien Berlioz â Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Albinum â 2017 Vin dĂ©gustĂ© Ă l'aveugle. La robe est d'un beau jaune dorĂ©. Le nez est frais, sur des notes de miel et quelques fruits jaunes et blancs. Avec Ă©galement une petite pointe fumĂ©e. La bouche est fraĂźche, agrĂ©able sur la poire, le miel. La finale est marquĂ©e par une amertume assez prĂ©sente. Le tout n'est pas d'une grande longueur. Un vin assez simple en l'Ă©tat. A la dĂ©couverte de l'Ă©tiquette, je suis assez dubitatif. C'est bien fait, mais Ă prĂšs de 30 euros la quille, je me pose des questions. A revoir. Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Olivier Mottard, Jean-Loup Guerrin, bibi64 29 Jui 2020 2215 45 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Blog Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Blog sur le sujet Adrien Berlioz â Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Barzereu â 2017 Adrien Berlioz â Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Barzereu â 2017 Robe dorĂ©e, assez intense pour un vin jeune. Nez expressif sur le miel, câest assez fin nĂ©anmoins, il y a aussi des notes de fruits jaunes et blancs. La bouche prĂ©sente un beau volume, ce nâest pas hyper tendu, mais pas mou non plus. En lâĂ©tat câest un vin trĂšs expressif, direct, immĂ©diat, presque dĂ©monstratif, mais un peu monolithique aussi, sans rĂ©elle complexitĂ© ou nuance. Jâai aimĂ© ce vin pour lâexpĂ©rience et lâoriginalitĂ©, en revanche je le trouve difficile Ă accorder mis Ă part avec du fromage. Il faut aussi reconnaĂźtre que ce nâest pas dâune grande buvabilitĂ©, 2 verres en deux repas, il va faire la semaine ... Je ne sais pas comment ça peut vieillir. Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Olivier Mottard, Jean-Loup Guerrin, bibi64 08 Juil 2020 2017 47 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet CR Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Grand Zeph â 2017 Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Grand Zeph â 2017 Bue au restaurant Flocons de sel Ă MegĂšve. La robe se pare dâun or prononcĂ©. Intense, le nez entremĂȘle des senteurs miellĂ©es et de fruits jaunes, avec juste une touche de pralin. La bouche, dotĂ©e dâune grande envergure, est bĂątie sur une matiĂšre dense qui sâenveloppe dâun beau gras. Lâaromatique, superbe sans ĂȘtre opulente, rĂ©jouit la rĂ©tro-olfaction, ponctuĂ©e par une finale qui sâaffirme plus en tension. TrĂšs Bien ++ Jean-Loup Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Olivier Mottard 14 Juil 2020 1912 48 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet CR Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Octavie â Persan â 2015 Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Octavie â Persan â 2015 La robe est toujours sombre mais montre cette fois-ci quelques signes d'Ă©volution avec des reflets lĂ©gĂšrement tuilĂ©s. Pas de rĂ©duction au nez, mais une confiture bien intense de myrtilles et de mĂ»res, agrĂ©mentĂ©e d'une touche Ă©picĂ©e. La bouche est bien en chair et d'un beau fruit noir comme au nez. Les tanins sont doux, cela manque juste un petit peu de peps en milieu de bouche pour soutenir l'ensemble. Mais les Ă©pices qui ressortent en finale font le job et allongent les saveurs pour finir en beautĂ©. TrĂšs Bien A ne pas servir au-delĂ de 16 °. Jean-Loup 21 Juil 2020 2120 49 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. oberlin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de oberlin sur le sujet Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â CuvĂ©e Marie Clothilde Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â CuvĂ©e Marie Clothilde 2017 Robe assez claire, jeune, violacĂ©e. Superbe nez trĂšs typique d'une mondeuse, dominĂ©e par le poivre blanc. En bouche trĂšs bel Ă©quilibre, c'est trĂšs pur, frais, sur le poivre blanc, les fruits rouges, sensation minĂ©rale. QualitĂ© de bouche irrĂ©prochable avec des tanins hyper fins. Joli volume, la finesse du vin n'empĂȘche pas une trĂšs belle tenue il passe aprĂšs la cuvĂ©e "Elise 2012" du Domaine de la Terrasse d'Elise, et lui tient largement tĂȘte en donnant plus de plaisir, de surcroĂźt!. TrĂšs bon super dĂ©couverte Marc Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© FGsuperfred, Jean-Loup Guerrin, Kiravi 28 Juil 2020 2206 50 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. letournaisien Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de letournaisien sur le sujet CR Domaine du Cellier des Cray â Roussette de Savoie â CuvĂ©e ClĂ©mence 2016 Domaine du Cellier des Cray â Roussette de Savoie â CuvĂ©e ClĂ©mence 2016 Belle robe d'un jaune bien soutenu. Nez trĂšs Ă©panoui, riche, trĂšs aromatique, sur la pĂȘche, l'abricot, des notes de miel aussi. La bouche reprend cette aromatique sur une structure par contre un peu molle, car plutĂŽt sur la richesse, on pourrait presque se mĂ©prendre avec un moelleux sans SR. Finale sur une pointe d'encaustique. Ca manque de vivacitĂ© Ă mon goĂ»t et il n'y a pas assez d'amertume pour l'Ă©quilibrer, mĂȘme si ça se boit avec plaisir. Julien Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Olivier Mottard, Jean-Loup Guerrin 24 Oct 2020 2044 51 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Blog Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Blog sur le sujet Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Octavie â Persan â 2017 Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Octavie â Persan â 2017 Robe dense, jeune avec des contours violets. Nez ouvert, sur les fruits noirs, les Ă©pices, un petit cĂŽtĂ© balsamique. La bouche est fraĂźche, tendue, câest clairement trop jeune, un peu anguleux avec une aciditĂ© trĂšs prĂ©sente. Câest nĂ©anmoins trĂšs bon, il y a du vin, une profondeur, une identitĂ© pas vraiment commune, comme une Syrah mais en plus effilĂ©e. Je trouve ça vraiment trĂšs bon, une Crozes Equis bu en parallĂšle Ă Ă©tĂ© proprement atomisĂ© mĂȘme si je me doutais quâil ne ferait pas le poids .... La prochaine dans un an ou deux, si jâarrive Ă me modĂ©rer... Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Olivier Mottard, Jean-Loup Guerrin 07 Nov 2020 0033 52 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Val59 Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Val59 sur le sujet CR Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â CuvĂ©e Euphrasie - Chignin Bergeron - 2017 Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â CuvĂ©e Euphrasie - Chignin Bergeron - 2017 Nez marquĂ© par la poire, des notes de fruits exotiques et dâacacia. Super Ă©quilibre en bouche entre une certaine richesse aromatique miel, amande, poire, tilleul et une belle fraicheur. Quelques amers non dĂ©sagrĂ©ables en finale. TB + - 16,5-17/20 Ce n'est que la 3e fois que je goute du chignin bergeron mais je trouve sa typicitĂ© interessante avec des marqueurs assez constants miel, poire, fruits jaunes et une belle fraicheur malgrĂ© tout. Cette bouteille m'a semblĂ© supĂ©rieure au Belluard le feu 2014 bu lâan dernier notamment en terme de longueur. J'avais goutĂ© les rouges du domaine en salon qui m'avait par contre un peu moins convaincu. Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Olivier Mottard, Jean-Loup Guerrin 22 Nov 2020 1139 53 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© Val59 Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet CR Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Grand ZĂšph â 2015 Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Grand ZĂšph â 2015 La photo de la contre-Ă©tiquette figure dans mon CR prĂ©cĂ©dent de fĂ©vrier 2019 en haut de page. La robe est bien dorĂ©e, commençant mĂȘme Ă tendre vers le vieil or. D'intensitĂ© moyenne mais noble, le nez fait preuve d'une certaine complexitĂ©, associant des fruits jaunes, classiques pour une roussanne, Ă des fruits secs, des notes miellĂ©es et mĂȘme un soupçon de plantes aromatiques. La bouche affiche une belle dimension et une chair gĂ©nĂ©reuse de belle densitĂ©. L'aromatique, toujours avenante, prend des accents baroques, mais une bonne vivacitĂ© allĂšge le vin et prend mĂȘme le dessus dans la finale persistante et salivante. TrĂšs Bien + A noter que le soir, la bouche n'a pas Ă©voluĂ© mais le nez est moins flatteur, des senteurs peu Ă©lĂ©gantes faisant mĂȘme leur apparition. Jean-Loup Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Olivier Mottard, bertou 25 Jan 2021 1143 56 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. denaire Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de denaire sur le sujet Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â CuvĂ©e des Gueux 2019 & Marie-Clothilde 2018 Premier contact avec ce domaine avec ces deux bouteilles bues la semaine derniĂšre Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â CuvĂ©e des Gueux 2019 Joli nez relativement expressif sans ĂȘtre explosif non plus, sur les agrumes, les fruits blancs poire, une touche florale. La bouche est toute en lĂ©gĂšretĂ© et en dĂ©licatesse. Une belle aciditĂ© mĂ»re, jamais excessive, c'est pur, joliment fruitĂ©, jusque dans une finale nette, propre, salivante, qui incite Ă se resservir. Un peu de CO2 au dĂ©part, qui disparaĂźt toutefois rapidement. Beau vin, qui possĂšde beaucoup de naturel et de gourmandise. Pas souvenir d'avoir bu une jacquĂšre aussi gourmande. Bien ++ PS une petite remarque sur le bouchon de ce vin on sent beaucoup de soin sur la bouteille, l'Ă©tiquette, la jolie cire blanche qui la couronne, d'oĂč une certaine surprise de trouver dessous un bouchon en plastique Nomacorc Select Green 100. Je ne suis pas un spĂ©cialiste, donc c'est peut-ĂȘtre un prĂ©jugĂ©, mais c'est qualitatif ce genre de bouchon ? la cuvĂ©e Marie-Clothilde ci-dessous Ă©tait elle dotĂ©e d'un bouchon en liĂšge naturel. Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Marie-Clothilde 2018 Un nez assez peu expressif, qui porte surtout sur les fruits rouges framboise, groseille, un peu de poivre peut-ĂȘtre, d'eucalyptus, une touche vĂ©gĂ©tale. La bouche, longiligne, est marquĂ©e par une aciditĂ© assez haute, tapissĂ©e d'une foule de jolis petits tanins encore un peu serrĂ©s, avec lĂ aussi une aromatique tĂ©nue, dominĂ©e par de discrets fruits rouges. Un vin qui m'a paru fermĂ©, avec une belle qualitĂ© de tanins, mais pas en place au plan aromatique. A l'aĂ©ration sur deux jours les tanins s'assouplissent un peu, mais l'aromatique Ă©volue vers des notes moins sĂ©duisantes. Je vais laisser les suivantes tranquilles quelque temps. A revoir, donc. Mathieu Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© oliv, Olivier Mottard, Jean-Loup Guerrin 31 Jan 2021 2331 57 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet CR Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â CuvĂ©e Octavie â Persan â 2015 Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â CuvĂ©e Octavie â Persan â 2015 La robe est assez sombre et prĂ©sente quelques reflets tuilĂ©s sur le bord du disque. D'une bonne intensitĂ© et appĂ©tent, le nez gagne Ă l'aĂ©ration pour dĂ©voiler de la framboise puis des fruits plus noirs, ainsi que de fines Ă©pices. Concentration et finesse sont les deux qualitĂ©s complĂ©mentaires de la bouche qui reprend le beau fruitĂ© du nez, s'habille de tanins poudreux et d'une texture de velours. La vivacitĂ© se rĂ©vĂšle minimaliste mais juste suffisante et l'allonge honnĂȘte. TrĂšs Bien et aurait pu aller plus haut avec plus de complexitĂ©. Le vin prend de la profondeur avec du jambon au madĂšre 3,5 + / 5 et un cĂŽtĂ© plus sauvage avec du vieux comtĂ© 3,5 / 5, accord avec lequel on est rarement déçu, quel que soit le vin. Jean-Loup Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Olivier Mottard, denaire, bertou, PapĂ©, Kiravi 26 FĂ©v 2021 1134 60 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. ModĂ©rateurs Gildas, PBAES, Martinez, CĂ©dric42120, Vougeot, jean-luc javaux, starbuck ConnexionDerniers messages FAV SEPTEMBRE 2022 L'actualitĂ© des vins de Loire L'actualitĂ© des vins de Provence et de Corse L'actualitĂ© des vins suisses Weingut SchĂ€fer-Fröhlich, Bockenau Allemagne - Nahe Au fait, c'est quoi un vin de terroir? L'actualitĂ© des vins de Bourgogne et du Beaujolais Vendange 2022, c'est parti ! ChĂąteau Rieussec, Sauternes Domaine Jean-Paul & BenoĂźt Droin, Chablis Domaine de Pouilly Des pĂ©nuries de matĂ©riel Domaine Anne Marie & Jean-Marc Vincent, Santenay ChĂąteau de Chamilly Domaine de la Taille aux Loups Domaine François Villard ChĂąteau Simian Domaine de la ChauviniĂšre, Muscadet Zorah Wines ArmĂ©nie Weingut Gantenbein, FlĂ€sch Domaine Dampt FrĂšres L'actualitĂ© des vins du RhĂŽne Domaine Dupasquier, Jongieux, Savoie Domaine Bernard Faurie Maison Michel Chapoutier Clos Canarelli L'actualitĂ© des vins du Jura et de Savoie Kopke, Porto ChĂąteau Guiraud, Sauternes Henschke Cellars Plus de sujets »
PrĂ©parezĂ©galement un jus de citron : Il met en valeur le goĂ»t du fruit, prĂ©serve son arĂŽme, favorise la prise de la confiture et sa conservation et en mĂȘme temps empĂȘche le sucre de cristalliser dans la confiture. Comment remplacer le zeste de citron ? Vous pouvez remplacer le zeste de citron par un zeste de citron vert ou dâorange
TĂ©lĂ©charger l'article TĂ©lĂ©charger l'article Les fruits, les lĂ©gumes et les viandes cuisinĂ©es se conservent longtemps du moment qu'ils sont prĂ©parĂ©s et mis en bocaux correctement. Il est important de stĂ©riliser les bocaux et les bouteilles avant de les utiliser pour Ă©viter que la nourriture soit contaminĂ©e par des bactĂ©ries. PrĂ©parez tout votre matĂ©riel et stĂ©rilisez soigneusement les rĂ©cipients pour pouvoir profiter de vos aliments toute l'annĂ©e ! 1 Prenez des rĂ©cipients adaptĂ©s. Cherchez des bouteilles et des bocaux faits pour la conservation. Ils doivent ĂȘtre en verre trempĂ© et ne pas ĂȘtre fissurĂ©s ou Ă©brĂ©chĂ©s [1] . Assurez-vous qu'ils ont tous un couvercle qui se ferme bien. Les bocaux doivent avoir un disque plat avec un joint et un couvercle qui se visse par-dessus. Les couvercles peuvent se rĂ©utiliser, mais il faut remplacer les disques. Les bouteilles doivent avoir un bouchon avec un joint en caoutchouc en bon Ă©tat. 2Lavez et stĂ©rilisez les rĂ©cipients. Lavez-les bien avec de l'eau chaude et du savon avant de les stĂ©riliser. Assurez-vous qu'ils ne contiennent aucune trace de nourriture collĂ©e ou d'autre saletĂ©. Lavez aussi les couvercles. Ils doivent ĂȘtre parfaitement propres. 3Mettez-les dans une casserole. Posez les bouteilles et les bocaux Ă l'endroit dans une casserole profonde avec les couvercles Ă cĂŽtĂ©. Remplissez la casserole d'eau froide de maniĂšre Ă ce que les rĂ©cipients se trouvent 2 ou 3 cm au-dessous de la surface. 4Faites chauffer l'eau. Portez-la Ă Ă©bullition. Si vous vous trouvez Ă une altitude de moins de 300 m, laissez chauffer les bocaux et les bouteilles pendant 10 minutes Ă partir de l'Ă©bullition. Si vous ĂȘtes Ă une altitude plus Ă©levĂ©e, ajoutez une minute pour chaque tranche de 300 m supplĂ©mentaire [2] . 5Sortez les rĂ©cipients de l'eau. Sortez les bocaux, les bouteilles et les couvercles un par un Ă l'aide d'une pince de cuisine et posez-les sur du papier absorbant pour qu'ils sĂšchent. Faites attention Ă ce qu'ils ne touchent rien Ă part le papier absorbant propre. 1 Remplissez les rĂ©cipients. Mettez la nourriture que vous souhaitez conserver dans les bocaux et ou les bouteilles. Faites-le pendant que les rĂ©cipients et les aliments sont encore chauds. Si vous mettez de la nourriture chaude dans des bocaux froids, le verre risque de se fissurer [3] . Laissez 5 mm d'espace vide en haut de chaque rĂ©cipient [4] . Essuyez les rebords des bocaux et des bouteilles pour Ă©viter que des gouttes de nourriture les empĂȘchent de bien se fermer hermĂ©tiquement. 2Mettez les couvercles. Posez les disques sur les bocaux et vissez les couvercles aussi fermement que possible. 3Mettez les bocaux dans une casserole. Posez-les sur une grille en mĂ©tal Ă l'intĂ©rieur d'une casserole profonde. La grille empĂȘchera les bocaux de toucher le fond, ce qui permettra Ă leur contenu de chauffer de façon homogĂšne et Ă leurs couvercles de se fermer correctement. Prenez-les avec une pince pour les poser sur la grille [5] . 4 Faites chauffer les rĂ©cipients. Remplissez la casserole d'eau de maniĂšre Ă ce que les bouteilles et les bocaux se trouvent 2 ou 3 cm au-dessous de la surface. Portez l'eau Ă Ă©bullition et laissez chauffer les rĂ©cipients pendant 10 minutes Ă partir de l'Ă©bullition. Sortez-les de la casserole Ă l'aide d'une pince et posez-les sur du papier absorbant [6] . Attendez 24 heures avant de les toucher. Ils doivent ĂȘtre complĂštement froids lorsque vous les rangez. VĂ©rifiez les couvercles. S'ils sont lĂ©gĂšrement creux au centre, cela signifie qu'ils sont fermĂ©s hermĂ©tiquement. S'il y en a qui ne sont pas creux, cela signifie qu'ils ne sont pas complĂštement hermĂ©tiques. Dans ce cas, ouvrez ces bocaux et mangez leur contenu au lieu de les garder. Conseils Un cycle de lavage rapide Ă tempĂ©rature Ă©levĂ©e dans le lave-vaisselle est efficace pour Ă©liminer les rĂ©sidus de nourriture des bocaux, mais vous devez tout de mĂȘme les stĂ©riliser avec de l'eau bouillante comme dans le tutoriel ou avec un produit stĂ©rilisant du commerce, car un lave-vaisselle n'atteint pas une tempĂ©rature assez Ă©levĂ©e pour tuer les bactĂ©ries qui peuvent vous rendre malade. Vous pouvez aussi acheter un produit stĂ©rilisant du commerce pour stĂ©riliser vos bocaux et bouteilles. RĂ©fĂ©rences Ă propos de ce wikiHow Cette page a Ă©tĂ© consultĂ©e 58 810 fois. Cet article vous a-t-il Ă©tĂ© utile ? Abonnez-vous pour recevoir la newsletter de wikiHow! S'abonner Plusieursbouteilles ouvertes ont fait l'objet d'un test, avec soit un bouchon hermĂ©tique, soit une capsule couronnĂ©e, soit une cuillĂšre dans le goulot, soit sans rien pour les recouvrir. AprĂšs avoir rĂ©guliĂšrement mesurĂ© le taux de CO2 dans les diffĂ©rentes bouteilles de champagne, les scientifiques ont conclu que seul le bouchon hermĂ©tique permettait Nous avons 1384 invitĂ©s et 52 inscrits en ligne IndexSujets rĂ©centsRechercheConsignes d'indexation Forums Jura et Savoie Domaine Cellier des Cray, Adrien Berlioz Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet CR Le Cellier des Cray â Adrien Berlioz â Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Grand Zeph â 2015 Le Cellier des Cray â Adrien Berlioz â Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Grand Zeph â 2015 Bue lors d'une semaine savoyarde contĂ©e ICI Robe dâun or assez clair. Le nez sâouvre bien aprĂšs un peu dâaĂ©ration dans le verre et se montre plutĂŽt complexe, combinant du miel, des plantes aromatiques tilleul, des fruits jaunes pĂȘche, et mĂȘme une touche de pralin. La bouche est bien charnue, entourĂ©e dâune lĂ©gĂšre pellicule grasse. Lâaromatique est trĂšs fruitĂ©e, encore plus quâau nez, rehaussĂ©e par une bonne vivacitĂ©. La finale est Ă la fois savoureuse, longue et pleine de ressort. TrĂšs Bien + Lâaccord est rĂ©ussi 3,5 / 5 avec un beaufort dâĂ©tĂ© de 6 mois. Jean-Loup 05 FĂ©v 2019 1831 31 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet CR Le Cellier des Cray â Adrien Berlioz â Roussette de Savoie â Zulime â 2015 Le Cellier des Cray â Adrien Berlioz â Roussette de Savoie â Zulime â 2015 Bue lors de la mĂȘme semaine savoyarde contĂ©e ICI Robe dâun bel or dense. Le nez fait preuve dâune belle intensitĂ© et dâune certaine complexitĂ© des fruits jaunes sont prĂ©sents mais de maniĂšre moins attendue on y dĂ©cĂšle aussi des Ă©pices et des arĂŽmes de pĂątisserie. La bouche est ample, dâun beau volume, dotĂ©e dâun lĂ©ger gras et dâune belle sapiditĂ©. La finesse de lâaltesse nâest pas en reste, mise en valeur par une grande vivacitĂ©. La finale Ă la persistance satisfaisante est pleine dâallant et trĂšs salivante. TrĂšs Bien + AssociĂ© Ă des quenelles au beaufort, le vin gagne certes encore en tension mais il perd beaucoup en volume et sâefface quelque peu 3- / 5. Jean-Loup 05 FĂ©v 2019 1839 32 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. GILT Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de GILT sur le sujet CR Le Cellier des Cray â Adrien Berlioz â Octavie â Persan â 2014 Le Cellier des Cray - Adrien Berlioz - Octavie - Persan - 2014 Robe trouble et tuilĂ©e. Le nez est rĂ©duit et discret avec de lĂ©gĂšres notes cacaotĂ©es et poivrĂ©es. La bouche associe une astringence forte Ă une aciditĂ© marquĂ©e, le tout sans vĂ©ritable est discrĂšte sur la fleur et la rĂ©glisse. Cela donne un vin agressif qui serait mieux associĂ© Ă un plat bien gras qu'en dĂ©gustation pure. Vin intĂ©ressant intellectuellement, moyen au niveau du plaisir apportĂ©, et pas donnĂ© financiĂšrement. Gilles 03 Mar 2019 1432 33 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. H. Seldon Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de H. Seldon sur le sujet CR Domaine Cellier des Cray, A. Berlioz, Roussette de Savoie, Altesse "Zulime" 2016 Domaine Cellier des Cray, A. Berlioz, Roussette de Savoie, Altesse "Zulime" 2016 TrĂšs beau nez prĂ©cis sur les agrumes, l'Ă©corce d'orange, le floral blanc. MĂȘme chose en bouche oĂč le vin se distingue par un Ă©quilibre sans reproche, construit autour d'une belle aciditĂ©. Aspect lĂ©gĂšrement crayeux en finale qui complexifie l'ensemble. A boire ou Ă garder. TrĂšs bien Notation Moyen les vins sans intĂ©rĂȘt ; Assez bien vins Ă boire pour la curiositĂ© ; Bien bon vin, Ă faire dĂ©couvrir ; TrĂšs bien vin remarquable ; Excellent vins de trĂšs haut niveau, une rare rĂ©ussite; Splendide grand vin qui justifie le temps passĂ© ici ! 16 Mar 2019 1659 34 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet CR Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Octavie â Persan â 2015 Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Octavie â Persan â 2015 Bue lors d'une dĂ©gustation de LPV Versailles sur la Savoie relatĂ©e ICI La robe est trĂšs sombre, aux nets reflets violacĂ©s. TrĂšs intense, le beau nez associe des fruits noirs, oĂč la myrtille domine, des arĂŽmes floraux iris et Ă©picĂ©s. La bouche affiche une rĂ©elle concentration, caractĂ©ristique du cĂ©page mais sans doute exacerbĂ©e par une extraction poussĂ©e que permettait le millĂ©sime. Un fruitĂ© dense et fin, des tanins encore un peu accrocheurs et une finale plus tonique laissent prĂ©sager un bel avenir Ă ce vin. TrĂšs Bien en lâĂ©tat Jean-Loup 05 Jui 2019 1456 35 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet CR Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Octavie â Persan â 2015 Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Octavie â Persan â 2015 Nouvelle bouteille et nouvelle photo. La robe est sombre et toujours insolemment jeune ! Le nez trĂšs intense montre d'abord une trĂšs forte rĂ©duction avec des arĂŽmes animaux pas nobles du tout, voire d'Ă©curie. Mais il ne lui faut pas longtemps pour exprimer tout autre chose, aprĂšs un peu d'oxygĂ©nation. Les fruits noirs, myrtille et mĂ»re, sont concurrencĂ©s par la framboise, mais aussi par les Ă©pices, le tout Ă©tant teintĂ© d'une touche fumĂ©e. La bouche est pleine et aimable, dotĂ©e d'un fruitĂ© charnu et acidulĂ© qui perdure longtemps. Les tanins sont assouplis et la finale Ă nouveau marquĂ©e par les Ă©pices. Cette bouteille, par rapport Ă celle bue il y a six mois, a toujours du caractĂšre mais paraĂźt moins charpentĂ©e et tanique, plus sur la fraĂźcheur. TrĂšs Bien La Savoie regorge dĂ©cidĂ©ment de jeunes vignerons talentueux ! Jean-Loup Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© breizhmanu, DUROCHER, Nicco 30 DĂ©c 2019 1816 36 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. supagweg Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de supagweg sur le sujet CR Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Serfouette â Mondeuse â 2014 Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Serfouette â Mondeuse â 2014 La robe est rouge violette. Au nez on a de la griotte, de la cerise avec un cotĂ© fumĂ©, cuir, tabac, de l'olive noir, de la sauge, Ă©galement un peu de pĂąte de fruit, fraise. En bouche de l'aciditĂ©, sur le fruit pas d'astringence, une ambiance bonbon acidulĂ©. C'est frais, gouleyant, pas une grosse complexitĂ© mais c'est drĂŽlement bon. Bien + Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© oliv, breizhmanu, Jean-Loup Guerrin 03 FĂ©v 2020 2059 37 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet CR Domaine Cellier des Cray - Roussette de Savoie - Zulime - 2015 Domaine Cellier des Cray - Roussette de Savoie - Zulime - 2015 La robe prĂ©sente un or moyen lĂ©gĂšrement gris. Bien ouvert aprĂšs une courte oxygĂ©nation, l'aromatique du nez mĂȘle fruits jaunes, notes florales et herbes aromatiques. La bouche, enrobĂ©e d'une fine pellicule de gras, donne une impression de densitĂ© sans sapiditĂ© extravagante. L'aciditĂ© tend vers la minĂ©ralitĂ© et la finale de mi-longueur fait ressortir des arĂŽmes d'agrumes. Bien ++ / TrĂšs Bien Le vin rĂ©alise un accord intĂ©ressant 3,5 + / 5 avec un simple gratin de pĂątes au jambon, en gagnant en volume et sapiditĂ©, Ă moins que ce soit le supplĂ©ment d'aĂ©ration qui en soit Ă l'origine. Jean-Loup 19 FĂ©v 2020 2105 38 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. FGsuperfred Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de FGsuperfred sur le sujet CR Domaine Adrien Berlioz, Vin de Savoie La CuvĂ©e des Gueux 2019 Domaine Adrien Berlioz, Vin de Savoie La CuvĂ©e des Gueux 2019 nez d'une grande fraicheur sur les fruits et fleurs blanches, iodĂ©, salin, trĂšs chablisien dans l'Ăąme, je m'y serais trompĂ© en aveugle... la bouche est surprenante, parce que l'attaque est assez vive, soutenue par une jolie aciditĂ© citronnĂ©e, mais la matiĂšre trĂšs chablisienne encore une fois prend de suite le dessus... donnant un vin alliant fraicheur, matiĂšre, aciditĂ© sous-jascente soulignant de fort belle maniĂšre ce vin, qui roule en bouche tel un joli baiser, pas l'impression de rouler une pelle Ă un bouledogue si vous voyez ce que je veux dire je cherche un dĂ©faut Ă cette seconde partie de bouche qui, mĂȘme au rĂ©chauffement, amĂšne ce soupçon de puretĂ© et surtout de peps citronnĂ© qui me plait tant dans les vins blancs, de quelque rĂ©gion fussent ils issus, et ce peps qui les empĂȘchent de tomber dans une lourdeur qui m'Ă©coeure encore plus vite qu'avant la finale lĂ©gĂšrement citronnĂ©, sous-tendue par une aciditĂ© qui a la joyeuse idĂ©e de se mettre en second plan, dure trĂšs longtemps, ce qui rend le vin non pas inoubliable mais qui me fait penser diablement Ă lui longtemps aprĂšs l'avoir avalĂ©, faut dire que le verre galope tout seul au frigo pour se remplir, il doit prendre plus de plaisir que moi encore, tous des poivrots ces spieg ! un petit manque de complexitĂ© 2019 trĂšs jeune et ce vin deviendrait splendide trĂšs bien+ Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Olivier Mottard, breizhmanu, Jean-Loup Guerrin, bibi64, VaudĂ©sir, Blog, LLDA 21 Mai 2020 2129 39 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. FGsuperfred Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© bibi64 Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de bibi64 sur le sujet Domaine adrien Berlioz - vin de savoie Fred, les photos inclinĂ©es ou grises sont un problĂšme rĂ©current avec les photos prise par tĂ©lĂ©phone. Pour s'affranchir du problĂšme, il suffit de sauver les photos sur ton ordinateur avec n'importe quel logiciel paint, snagit, photoshop, windows photo... avant de les joindre Ă ton post sur LPV. En tout cas, tu m'as donnĂ© envie de goĂ»ter cette belle jacquĂšre... Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© FGsuperfred 21 Mai 2020 2151 41 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. FGsuperfred Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de FGsuperfred sur le sujet Domaine adrien Berlioz - vin de savoie salivant est le terme, faut pas l'dire, mais j'finis le flacon... chuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuut ! pour la photo je l'enregistre sous le disque dur avant, dĂ©solĂ© j'ai un niveau informatique bien moindre par rapport Ă mon apprĂ©ciation de ce vin 21 Mai 2020 2256 42 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. nishaton Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de nishaton sur le sujet CR Domaine Adrien Berlioz - CuvĂ©e des Gueux 2018 - Vin de savoie Domaine Adrien Berlioz - CuvĂ©e des Gueux 2018 - Vin de savoie Une bouteille amenĂ©e ce midi par un ami lors du traditionnel repas dominical. J'avais entendu parlĂ© de ce domaine plusieurs fois et failli craquĂ© Ă plusieurs reprise par curiositĂ©. Au nez, une palette aromatique proche du chardonnay. Je m'enquiĂšre du cĂ©page 100% jacquĂšre ! Allons donc. Ce n'est pas un vin extrĂȘmement aromatique mais on sait ou on va. En bouche, un manque de fraicheur sur la bouteille dĂ©gustĂ©e, et globalement pas Ă©normĂ©ment de longueur. Finalement pas une grande claque. A re-gouter sur une autre cuvĂ©e ou un autre millĂ©sime pour me faire une meilleure idĂ©e. Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Jean-Loup Guerrin 24 Mai 2020 2113 43 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet Domaine Adrien Berlioz - CuvĂ©e des Gueux 2018 - Vin de savoie A re-gouter sur une autre cuvĂ©e Oui, essaie les diffĂ©rentes cuvĂ©es commentĂ©es plus haut, en particulier sur les un autre millĂ©sime Pas encore goĂ»tĂ© 2018 mais c'est effectivement atypique comme conditions climatiques. Jean-Loup Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© nishaton 24 Mai 2020 2255 44 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. ysildur Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de ysildur sur le sujet CR Adrien Berlioz â Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Albinum â 2017 Adrien Berlioz â Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Albinum â 2017 Vin dĂ©gustĂ© Ă l'aveugle. La robe est d'un beau jaune dorĂ©. Le nez est frais, sur des notes de miel et quelques fruits jaunes et blancs. Avec Ă©galement une petite pointe fumĂ©e. La bouche est fraĂźche, agrĂ©able sur la poire, le miel. La finale est marquĂ©e par une amertume assez prĂ©sente. Le tout n'est pas d'une grande longueur. Un vin assez simple en l'Ă©tat. A la dĂ©couverte de l'Ă©tiquette, je suis assez dubitatif. C'est bien fait, mais Ă prĂšs de 30 euros la quille, je me pose des questions. A revoir. Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Olivier Mottard, Jean-Loup Guerrin, bibi64 29 Jui 2020 2215 45 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Blog Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Blog sur le sujet Adrien Berlioz â Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Barzereu â 2017 Adrien Berlioz â Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Barzereu â 2017 Robe dorĂ©e, assez intense pour un vin jeune. Nez expressif sur le miel, câest assez fin nĂ©anmoins, il y a aussi des notes de fruits jaunes et blancs. La bouche prĂ©sente un beau volume, ce nâest pas hyper tendu, mais pas mou non plus. En lâĂ©tat câest un vin trĂšs expressif, direct, immĂ©diat, presque dĂ©monstratif, mais un peu monolithique aussi, sans rĂ©elle complexitĂ© ou nuance. Jâai aimĂ© ce vin pour lâexpĂ©rience et lâoriginalitĂ©, en revanche je le trouve difficile Ă accorder mis Ă part avec du fromage. Il faut aussi reconnaĂźtre que ce nâest pas dâune grande buvabilitĂ©, 2 verres en deux repas, il va faire la semaine ... Je ne sais pas comment ça peut vieillir. Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Olivier Mottard, Jean-Loup Guerrin, bibi64 08 Juil 2020 2017 47 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet CR Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Grand Zeph â 2017 Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Grand Zeph â 2017 Bue au restaurant Flocons de sel Ă MegĂšve. La robe se pare dâun or prononcĂ©. Intense, le nez entremĂȘle des senteurs miellĂ©es et de fruits jaunes, avec juste une touche de pralin. La bouche, dotĂ©e dâune grande envergure, est bĂątie sur une matiĂšre dense qui sâenveloppe dâun beau gras. Lâaromatique, superbe sans ĂȘtre opulente, rĂ©jouit la rĂ©tro-olfaction, ponctuĂ©e par une finale qui sâaffirme plus en tension. TrĂšs Bien ++ Jean-Loup Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Olivier Mottard 14 Juil 2020 1912 48 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet CR Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Octavie â Persan â 2015 Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Octavie â Persan â 2015 La robe est toujours sombre mais montre cette fois-ci quelques signes d'Ă©volution avec des reflets lĂ©gĂšrement tuilĂ©s. Pas de rĂ©duction au nez, mais une confiture bien intense de myrtilles et de mĂ»res, agrĂ©mentĂ©e d'une touche Ă©picĂ©e. La bouche est bien en chair et d'un beau fruit noir comme au nez. Les tanins sont doux, cela manque juste un petit peu de peps en milieu de bouche pour soutenir l'ensemble. Mais les Ă©pices qui ressortent en finale font le job et allongent les saveurs pour finir en beautĂ©. TrĂšs Bien A ne pas servir au-delĂ de 16 °. Jean-Loup 21 Juil 2020 2120 49 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. oberlin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de oberlin sur le sujet Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â CuvĂ©e Marie Clothilde Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â CuvĂ©e Marie Clothilde 2017 Robe assez claire, jeune, violacĂ©e. Superbe nez trĂšs typique d'une mondeuse, dominĂ©e par le poivre blanc. En bouche trĂšs bel Ă©quilibre, c'est trĂšs pur, frais, sur le poivre blanc, les fruits rouges, sensation minĂ©rale. QualitĂ© de bouche irrĂ©prochable avec des tanins hyper fins. Joli volume, la finesse du vin n'empĂȘche pas une trĂšs belle tenue il passe aprĂšs la cuvĂ©e "Elise 2012" du Domaine de la Terrasse d'Elise, et lui tient largement tĂȘte en donnant plus de plaisir, de surcroĂźt!. TrĂšs bon super dĂ©couverte Marc Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© FGsuperfred, Jean-Loup Guerrin, Kiravi 28 Juil 2020 2206 50 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. letournaisien Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de letournaisien sur le sujet CR Domaine du Cellier des Cray â Roussette de Savoie â CuvĂ©e ClĂ©mence 2016 Domaine du Cellier des Cray â Roussette de Savoie â CuvĂ©e ClĂ©mence 2016 Belle robe d'un jaune bien soutenu. Nez trĂšs Ă©panoui, riche, trĂšs aromatique, sur la pĂȘche, l'abricot, des notes de miel aussi. La bouche reprend cette aromatique sur une structure par contre un peu molle, car plutĂŽt sur la richesse, on pourrait presque se mĂ©prendre avec un moelleux sans SR. Finale sur une pointe d'encaustique. Ca manque de vivacitĂ© Ă mon goĂ»t et il n'y a pas assez d'amertume pour l'Ă©quilibrer, mĂȘme si ça se boit avec plaisir. Julien Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Olivier Mottard, Jean-Loup Guerrin 24 Oct 2020 2044 51 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Blog Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Blog sur le sujet Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Octavie â Persan â 2017 Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Octavie â Persan â 2017 Robe dense, jeune avec des contours violets. Nez ouvert, sur les fruits noirs, les Ă©pices, un petit cĂŽtĂ© balsamique. La bouche est fraĂźche, tendue, câest clairement trop jeune, un peu anguleux avec une aciditĂ© trĂšs prĂ©sente. Câest nĂ©anmoins trĂšs bon, il y a du vin, une profondeur, une identitĂ© pas vraiment commune, comme une Syrah mais en plus effilĂ©e. Je trouve ça vraiment trĂšs bon, une Crozes Equis bu en parallĂšle Ă Ă©tĂ© proprement atomisĂ© mĂȘme si je me doutais quâil ne ferait pas le poids .... La prochaine dans un an ou deux, si jâarrive Ă me modĂ©rer... Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Olivier Mottard, Jean-Loup Guerrin 07 Nov 2020 0033 52 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Val59 Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Val59 sur le sujet CR Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â CuvĂ©e Euphrasie - Chignin Bergeron - 2017 Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â CuvĂ©e Euphrasie - Chignin Bergeron - 2017 Nez marquĂ© par la poire, des notes de fruits exotiques et dâacacia. Super Ă©quilibre en bouche entre une certaine richesse aromatique miel, amande, poire, tilleul et une belle fraicheur. Quelques amers non dĂ©sagrĂ©ables en finale. TB + - 16,5-17/20 Ce n'est que la 3e fois que je goute du chignin bergeron mais je trouve sa typicitĂ© interessante avec des marqueurs assez constants miel, poire, fruits jaunes et une belle fraicheur malgrĂ© tout. Cette bouteille m'a semblĂ© supĂ©rieure au Belluard le feu 2014 bu lâan dernier notamment en terme de longueur. J'avais goutĂ© les rouges du domaine en salon qui m'avait par contre un peu moins convaincu. Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Olivier Mottard, Jean-Loup Guerrin 22 Nov 2020 1139 53 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© Val59 Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet CR Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Grand ZĂšph â 2015 Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Chignin Bergeron â CuvĂ©e Grand ZĂšph â 2015 La photo de la contre-Ă©tiquette figure dans mon CR prĂ©cĂ©dent de fĂ©vrier 2019 en haut de page. La robe est bien dorĂ©e, commençant mĂȘme Ă tendre vers le vieil or. D'intensitĂ© moyenne mais noble, le nez fait preuve d'une certaine complexitĂ©, associant des fruits jaunes, classiques pour une roussanne, Ă des fruits secs, des notes miellĂ©es et mĂȘme un soupçon de plantes aromatiques. La bouche affiche une belle dimension et une chair gĂ©nĂ©reuse de belle densitĂ©. L'aromatique, toujours avenante, prend des accents baroques, mais une bonne vivacitĂ© allĂšge le vin et prend mĂȘme le dessus dans la finale persistante et salivante. TrĂšs Bien + A noter que le soir, la bouche n'a pas Ă©voluĂ© mais le nez est moins flatteur, des senteurs peu Ă©lĂ©gantes faisant mĂȘme leur apparition. Jean-Loup Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Olivier Mottard, bertou 25 Jan 2021 1143 56 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. denaire Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de denaire sur le sujet Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â CuvĂ©e des Gueux 2019 & Marie-Clothilde 2018 Premier contact avec ce domaine avec ces deux bouteilles bues la semaine derniĂšre Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â CuvĂ©e des Gueux 2019 Joli nez relativement expressif sans ĂȘtre explosif non plus, sur les agrumes, les fruits blancs poire, une touche florale. La bouche est toute en lĂ©gĂšretĂ© et en dĂ©licatesse. Une belle aciditĂ© mĂ»re, jamais excessive, c'est pur, joliment fruitĂ©, jusque dans une finale nette, propre, salivante, qui incite Ă se resservir. Un peu de CO2 au dĂ©part, qui disparaĂźt toutefois rapidement. Beau vin, qui possĂšde beaucoup de naturel et de gourmandise. Pas souvenir d'avoir bu une jacquĂšre aussi gourmande. Bien ++ PS une petite remarque sur le bouchon de ce vin on sent beaucoup de soin sur la bouteille, l'Ă©tiquette, la jolie cire blanche qui la couronne, d'oĂč une certaine surprise de trouver dessous un bouchon en plastique Nomacorc Select Green 100. Je ne suis pas un spĂ©cialiste, donc c'est peut-ĂȘtre un prĂ©jugĂ©, mais c'est qualitatif ce genre de bouchon ? la cuvĂ©e Marie-Clothilde ci-dessous Ă©tait elle dotĂ©e d'un bouchon en liĂšge naturel. Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â Marie-Clothilde 2018 Un nez assez peu expressif, qui porte surtout sur les fruits rouges framboise, groseille, un peu de poivre peut-ĂȘtre, d'eucalyptus, une touche vĂ©gĂ©tale. La bouche, longiligne, est marquĂ©e par une aciditĂ© assez haute, tapissĂ©e d'une foule de jolis petits tanins encore un peu serrĂ©s, avec lĂ aussi une aromatique tĂ©nue, dominĂ©e par de discrets fruits rouges. Un vin qui m'a paru fermĂ©, avec une belle qualitĂ© de tanins, mais pas en place au plan aromatique. A l'aĂ©ration sur deux jours les tanins s'assouplissent un peu, mais l'aromatique Ă©volue vers des notes moins sĂ©duisantes. Je vais laisser les suivantes tranquilles quelque temps. A revoir, donc. Mathieu Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© oliv, Olivier Mottard, Jean-Loup Guerrin 31 Jan 2021 2331 57 Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© Jean-Loup Guerrin Hors Ligne Utilisateur EnregistrĂ© RĂ©ponse de Jean-Loup Guerrin sur le sujet CR Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â CuvĂ©e Octavie â Persan â 2015 Domaine du Cellier des Cray â Vin de Savoie â CuvĂ©e Octavie â Persan â 2015 La robe est assez sombre et prĂ©sente quelques reflets tuilĂ©s sur le bord du disque. D'une bonne intensitĂ© et appĂ©tent, le nez gagne Ă l'aĂ©ration pour dĂ©voiler de la framboise puis des fruits plus noirs, ainsi que de fines Ă©pices. Concentration et finesse sont les deux qualitĂ©s complĂ©mentaires de la bouche qui reprend le beau fruitĂ© du nez, s'habille de tanins poudreux et d'une texture de velours. La vivacitĂ© se rĂ©vĂšle minimaliste mais juste suffisante et l'allonge honnĂȘte. TrĂšs Bien et aurait pu aller plus haut avec plus de complexitĂ©. Le vin prend de la profondeur avec du jambon au madĂšre 3,5 + / 5 et un cĂŽtĂ© plus sauvage avec du vieux comtĂ© 3,5 / 5, accord avec lequel on est rarement déçu, quel que soit le vin. Jean-Loup Les utilisateurs suivant ont remerciĂ© Olivier Mottard, denaire, bertou, PapĂ©, Kiravi 26 FĂ©v 2021 1134 60 PiĂšces jointes Connexion ou CrĂ©er un compte pour participer Ă la conversation. ModĂ©rateurs Gildas, PBAES, Martinez, CĂ©dric42120, Vougeot, jean-luc javaux, starbuck ConnexionDerniers messages FAV SEPTEMBRE 2022 L'actualitĂ© des vins de Loire L'actualitĂ© des vins de Provence et de Corse L'actualitĂ© des vins suisses Weingut SchĂ€fer-Fröhlich, Bockenau Allemagne - Nahe Au fait, c'est quoi un vin de terroir? L'actualitĂ© des vins de Bourgogne et du Beaujolais Vendange 2022, c'est parti ! 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